Droit du sport

Art. 190 LDIP al. 2 let. b

(A. [joueur de football professionnel algérien] c. B [club de football algérien] et FAF [Fédération algérienne de Football]) ; recours contre une sentence du TAS du 9 avril 2019 (procédure arbitrale d’appel). Se fondant sur l’art. 190 al. 2 let. b LDIP, le recourant reproche à la formation arbitrale de s’être déclarée à tort incompétente pour connaitre d’un appel contre une décision arbitrale rendue par le Tribunal Algérien des Règlement des litiges Sportifs. D’entrée de cause, les juges fédéraux rappellent que s’il est vrai que, saisi du grief d’incompétence, le TF examine « librement » les questions de droit, il ne devient pas « pour autant une cour d’appel » de sorte qu’il incombe au recourant de se conformer aux exigences de motivation de l’art. 77 al. 3 LTF. Le recourant estime fonder la compétence du TAS (alternativement) (i) sur les statuts de la FIFA ou (ii) sur les statuts de la Fédération algérienne de football. Quant au premier (prétendu) fondement, le TF relève que c’est à juste titre que la formation arbitrale a nié sa compétence en reconnaissant que le joueur ne pouvait pas fonder la compétence du TAS sur les dispositions statutaires de la FIFA, celles-ci ne constituant qu’une instruction aux fédérations membres de mettre en œuvre les moyens de recours contre leurs décisions et ne conférant aucun droit immédiat de faire appel d’une décision auprès du TAS (consid. 3.4.1-3.4.2). Quant au deuxième fondement invoqué par le recourant, la compétence du TAS en tant qu’organe d’appel contre des décisions relevant de litiges entre clubs et joueurs professionnels ne peut pas être admise lorsque les statuts de la fédération nationale prévoient expressément que les décisions concernant les clubs et les joueurs « sont définitives et non susceptibles de recours devant toute structure d’arbitrage étrangère » (consid. 3.4.3). Recours rejeté.

Art. 190 LDIP al. 2 let. b

(A. [nageur professionnel] et Agence Mondiale Antidopage et Fédération International de Natation) ; recours contre la décision du TAS rendue le 19 mai 2019 (procédure arbitrale d’appel). Le recourant attaque une décision du TAS admettant la recevabilité de l’appel déposé par l’AMA. Le TF commence par rappeler les principes régissant l’exception d’incompétence au sens de l’art. 186 al. 2 LDIP, notamment le fait que, lorsqu’une partie entre en matière sans émettre de réserve sur le fond (i) elle accepte tacitement la compétence du tribunal arbitral et (ii) elle perd définitivement le droit d’exciper l’exception incompétence. Cela ne signifie pour autant pas que le défendeur ne puisse pas se déterminer « à titre éventuel » sur le fond pour le cas où l’exception d’incompétence ne serait pas admise (consid. 3.2). Invoquant l’art. 190 al. 2 let. b LDIP, le recourant fait valoir que la formation arbitrale s’est déclarée à tort compétente (ratione temporis) car l’AMA n’aurait pas respecté le délai de recours devant le TAS. Le TF relève qu’en écartant l’exception d’irrecevabilité du mémoire d’appel de l’AMA, la formation arbitrale n’a pas statué « définitivement » sur sa compétence. De toute manière, la question du respect du délai d’appel au TAS n’est pas une question de compétence mais une condition de recevabilité du recours (TF 4A_413/2019). Recours irrecevable.

Art. 190 LDIP al. 2 let. b

(A. [nageur professionnel] et Agence Mondiale Antidopage [AMA] et Fédération International de Natation[FINA]) ; recours contre la décision rendue par le TAS le 26 juillet 2019 (procédure arbitrale d’appel). Sur la base de l’art. 190 al. 2 let. b LDIP, le recourant reproche à la formation arbitrale de s’être déclarée à tort compétente pour connaitre d’un appel formée par l’AMA contre une décision rendue par la FINA en matière de dopage. Il fait valoir (i) l’incapacité de postuler des conseils de l’AMA, ce qui, d’après le recourant, aurait entraîné l’irrecevabilité du recours et (ii) le dépôt tardif du mémoire d’appel de l’AMA, ce qui aurait entraîné l’incompétence de la formation arbitrale du TAS ratione temporis. Quant au premier argument, la décision de la formation arbitrale rejetant l’argument soulevé par l’athlète invoquant l’incapacité de postuler des conseils de l’AMA ne concerne pas une question de compétence du tribunal arbitral ; il s’ensuit que ladite décision ne peut pas faire l’objet d’un recours direct au TF. Quant au deuxième argument, le TF relève que, jusqu’à présent, la question de savoir si la tardiveté du dépôt de l’appel entraîne l’incompétence du TAS ou simplement l’irrecevabilité, voire le rejet de ce moyen de droit a toujours été laissée ouverte (TF 4A_170/2017 du 22 mai 2018, consid. 5.2 et TF 4A_488/2011 du 18 juin 2012, consid. 4.3.1). Se fondant notamment sur l’opinion jugée « convaincante » de deux auteurs de doctrine, le TF tranche la question en admettant que le respect du délai d’appel au TAS constitue une condition de recevabilité et non un problème de compétence. Cela a pour conséquence que l’inobservation du délai d’appel entraîne la perte du droit de soumettre la décision à tout contrôle juridictionnel et non pas (simplement) l’incompétence du TAS au profit des juridictions étatiques. Recours irrecevable.

Art. 190 LDIP al. 2 let. a

(A. [nageur professionnel] et Agence Mondiale Antidopage et Fédération International de Natation) ; recours contre la décision du TAS rendue le 19 mai 2019 (procédure arbitrale d’appel). Le recourant attaque une décision du TAS admettant la recevabilité de l’appel déposé par l’AMA. Se fondant sur l’art. 190 al. 2 let. a LDIP, le recourant se plaint en particulier de la composition irrégulière de la formation arbitrale ayant rendu la décision attaquée. Il fait valoir que l’arbitre nommé par l’AMA ne présentait pas les garanties d’indépendance et d’impartialité. Le TF relève que l’arbitre en question avait entretemps démissionné. La LDIP ne règle pas les conséquences de la démission d’un arbitre sur les actes de procédure antérieurs à celle-ci. Toutefois, le code de procédure du TAS (Article R36) prévoit que « sauf convention contraire des parties ou décision contraire de la Formation, la procédure se poursuit sans répétition des actes de procédure antérieurs au remplacement ». Le TF constate que le recourant ne conteste pas l’application de cette disposition et que, de toute façon, la formation arbitrale, dans sa nouvelle composition, avait expressément confirmé la décision incidente admettant la recevabilité du mémoire d’appel de l’AMA. Il s’ensuit que le recours est irrecevable (faute d’intérêt actuel du recourant) dans la mesure où il n’est pas sans objet.

Art. 123 LTF

(A. [Alex Schwazer] v. International Association of Athletics Federations [IAAF], Organizzazione Nazionale Antidoping [Nado Italia], Federazione Italiana di Atletica Leggera [FIDAL] et Agence mondiale antidopage [AMA]) ; demande de révision d’une sentence arbitrale rendue par le TAS le 30 janvier 2017. Conformément à l’art. 124 al. 1 let. d LTF, une demande de révision fondée sur l’art. 123 al. 2 LTF doit être déposée « dans les 90 jours suivants la découverte du motif de révision », étant précisé qu’il s’agit d’une condition de recevabilité de la demande dont la preuve incombe au requérant. A la teneur de l’art. 123 al. 2 let. a LTF, une demande de révision peut être demandée si le requérant découvre (i) des « faits pertinents » ou (ii) des « moyens de preuves concluants » qu’il n’avait pas pu faire valoir dans la procédure ayant donné lieu au jugement (ou à la sentence) faisant l’objet de la requête en révision. Les faits et moyens de preuve postérieurs au jugement sont toujours exclus. En l’espèce, le requérant fait valoir un nouveau moyen de preuve, soit une expertise génétique établie dans le cadre d’une procédure pénale en Italie et tendant à démontrer que la concentration d’ADN dans les échantillons de l’athlète est « anormale ». Ce moyen de preuve est toutefois postérieur à la décision pour laquelle la révision est demandée. Sur ce point, le TF rappelle que la révision est un moyen de droit extraordinaire et qu’en principe il incombe aux parties de contribuer à établir les faits à temps selon les règles de procédure applicables. Il s’ensuit que le requérant doit démontrer que, en faisant preuve de toute la diligence requise, il était dans l’« impossibilité » de faire valoir dans la procédure arbitrale le nouveau moyen de preuve. Or, en l’espèce le requérant ne démontre pas que tel était effectivement le cas, le fait que la procédure arbitrale devant le TAS était une procédure accélérée n’y change rien. Demande de révision rejetée.

Art. 190 LDIP al. 2 let. d

(KS Skënderbeu [club de football professionnel albanais] c. Union des Associations Européennes de Football [UEFA]), recours contre la sentence du TAS du 12 juillet 2019 ; dans un premier argument, le recourant invoque la violation de son droit d’être entendu car il n’aurait pas eu accès « aux formules mathématiques, algorithmes et à la base de données numériques du BFDS (Betting Fraud Detection System) ». Sur ce point, le TF retient que la formation arbitrale a reconnu que ces informations et données n’étaient pas « décisives » pour le litige. Plus fondamentalement, le recourant n’a pas établi que les moyens de preuve requis « aurait pu influer sur le sort du litige » et n’a pas contesté le fait que ces données étaient de nature confidentielle et sensible et appartenaient à un tiers qui n’était pas partie à la procédure. Dans un argument additionnel, le recourant fait en outre valoir que la formation arbitrale aurait à tort refusé d’administrer une preuve, en l’occurrence une expertise judiciaire, que le recourant avait valablement requis. Le Tribunal fédéral retient que le droit être d’entendu n’est pas violé d’un seul fait que le tribunal arbitral refuse d’administrer une preuve en particulier (i) si le moyen de preuve est inapte à fonder une conviction, (ii) si le fait à prouver est déjà établi, (iii) s’il est sans pertinence ou encore (iv) si le tribunal, en procédant à une appréciation anticipée des preuves, parvient à la conclusion que sa conviction est déjà faite et que le résultat de la mesure probatoire sollicitée ne peut plus la modifier. Enfin, le recourant fait encore valoir que la formation arbitrale aurait renversé le fardeau de la preuve en imposant au recourant de prouver qu’il n’avait pas truqué certains matchs. Sur ce point, le TF constate qu’il ne s’agit pas d’un problème de violation du droit d’être entendu et que, de toute manière, les règles sur le fardeau de la preuve ne font pas partie de l’ordre public matériel au sens de l’art. 190 al. 2 let. e LDIP. Par conséquent, la correcte application de ces règles échappe à son contrôle, y compris en matière d’arbitrage sportif disciplinaire. Recours rejeté.

Art. 190 LDIP al. 2 let. d

(A. [société turque], B. [société turque], V. [club professionnel de football] c. Turkish Football Federation [TFF], C. [société turque] W. [club professionnel de football] et Fédération Internationale de Football Association [FIFA]) ; recours contre la sentence du TAS du 30 juillet 2019 (procédure d’arbitrage d’appel). Les recourants font valoir une violation de leur droit d’être entendu en relation avec une prétendue violation de l’art. 75 CC. Le tribunal arbitral en limitant la procédure aux questions de recevabilité et en niant par la suite la qualité pour agir des recourants, aurait empêché le contrôle juridictionnel d’une décision émanant de la FIFA. Tout d’abord, le TF observe que la scission de la procédure entre, d’une part, les questions (préliminaires) de recevabilité et, d’autre part, les questions relevant du droit de fonds n’a rien de surprenant puisqu’elle « répond à des impératifs d’économie de procédure » et est même expressément prévue pour les juridictions civiles ordinaires à l’art. 125 let. a CPC. De toute manière, même si la formation arbitrale n’avait pas limité, comme elle l’a effectivement fait, la procédure aux seules questions de recevabilité, elle n’aurait pour autant pas violé le droit d’être entendu des recourants, en n’analysant pas le fond du litige. En effet, le tribunal arbitral peut passer sous silence les arguments dûment présentés par les parties lorsque les motifs adoptés dans la sentence les rendent superflus. Recours rejeté.

Art. 190 LDIP al. 2 let. d

(Club A. [club professionnel de football] c. Z. [agent de footballeur professionnel]) ; recours contre la sentence rendue le 30 juillet 2018 par le TAS (procédure d’arbitrage ordinaire) ; le recourant fait valoir une violation de son droit d’être entendu car la formation arbitrale n’aurait pas examiné les arguments présentés par son conseil durant l’audience ni les déclarations de ses témoins. Tout d’abord, le TF admet qu’une formule stéréotypée, voire l’aveu même des parties à la fin de l’audience certifiant que leur droit d’être entendu a été respecté « n’a pas plus de valeur qu’une clause de style » et ne suffit en tout cas pas à exclure la violation du droit d’être entendu qu’un tribunal arbitral pourrait commettre s’il ne prend pas en considération des allégués, arguments, preuves et offres de preuve présentés par l’une des parties et importants pour la sentence à rendre. En l’espèce, le TF, s’appuyant sur les passages précis de la sentence attaquée, arrive à la conclusion que le droit d’être entendu n’a pas été violé et que le recourant reproche en réalité l’appréciation des preuves et l’interprétation faite des dispositions contractuelles pertinentes, points qui échappent tous à l’examen du TF dans le cadre du recours contre une sentence arbitrale. Recours rejeté.

Art. 190 LDIP al. 2 let. d

(Fédération A. [Fédération nationale de football de la République M.]. et B., C., [joueurs de football de l’équipe nationale U17 de la République M.] c. Confédération D. [structure faitière regroupant les fédérations nationales de football du continent africain]) ; recours contre les sentences du TAS rendues le 4 octobre 2019 (procédure d’arbitrage d’appel). Substantiellement, les recourants se plaignent que (i) le tribunal arbitral s’est contenté de rejeter intégralement les appels pour défaut de légitimation passive et (ii) que, par conséquent, il n’aurait pas tenu compte d’une série d’arguments relevant du fond de l’affaire. Le TF relève que le procédé du tribunal arbitral, consistant à rejeter les conclusions des recourants au motif que ceux-ci n’ont pas dirigé leurs appels contre le bon défendeur, ne viole en rien leur droit d’être entendu. En outre, sous couvert d’une violation du droit d’être entendu, les recourants souhaitent en réalité faire examiner si c’est à bon droit que le tribunal arbitral a rejeté leurs appels pour défaut de légitimation passive. Un tel examen (matériel) échappe au contrôle du TF, sous réserve d’une éventuelle violation de l’ordre public, ce qui en l’espèce n’est même pas plaidé par les recourants. Recours rejeté.

(Kuwait Motor Sports Club c. Fédération Internationale de Motocyclisme [FIM]) ; recours contre l’arrêt rendu par la Chambre des recours civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud le 24 septembre 2019. Dans une sentence finale du 1er mai 2017, une formation arbitrale du TAS, après avoir constaté un déni de justice, avait condamné la FIM à se prononcer, dans un délai de neuf mois à compter de la notification de la sentence, sur la demande d’admission en qualité de membre du recourant. La sentence avait été confirmée par le TF (TF 4A_314/2018). Dans un premier temps, le recourant a saisi le juge de paix de Lausanne qui (i) a ordonné l’exécution forcée de la sentence, (ii) a enjoint à la FIM de se prononcer sur la candidature du recourant après avoir respecté son droit d’être entendu et (iii) a condamné la FIM au paiement de 500 francs par jour d’inexécution. Dans un deuxième temps, le recourant a de nouveau saisi la même autorité dans le but de faire constater que sa précédente ordonnance restait inexécutée. L’autorité compétente a, cette fois-ci, rejeté la demande du recourant en considérant que la fédération internationale s’était prononcé sur sa candidature, en la rejetant après lui avoir imparti un délai (de 5 jours) pour faire valoir ses arguments. Par la suite, le Tribunal cantonal vaudois a confirmé cette décision. L’exécution en Suisse des sentences arbitrales rendues par un tribunal arbitral avec siège en Suisse est régie par les articles 335-346 CPC. Rien n’empêche qu’une même sentence arbitrale (tout comme une même décision judiciaire) puisse être au besoin suivie de plusieurs procédures successives devant le tribunal de l’exécution, en particulier lorsque des mesures d’exécution d’abord ordonnées n’aboutissent pas au résultat voulu et qu’il se révèle nécessaire de les répéter ou de les compléter. Par contre, une décision du tribunal de l’exécution n’est pas elle-même susceptible d’une procédure d’exécution selon les art. 335 et ss CPC. Le recourant conteste notamment que son droit d’être entendu n’a pas été respecté du fait que le délai que la fédération internationale lui a imparti était trop court (soit moins de 5 jours). Le TF relève que, au vu des circonstances du cas, « on ne saurait surestimer l’importance d[u] droit d’être entendu » car la position du recourant était largement connue et, compte tenu de la première procédure d’exécution, le recourant devait s’attendre à être interpellé et pouvait (et devait) donc se préparer en conséquence. De toute manière, le recourant omet d’expliquer exactement quels éléments il n’a pas pu faire valoir du fait du délai soi-disant trop court. Recours rejeté.

Art. 190 LDIP al. 2 let. e

(A. [société turque], B. [société turque], V. [club professionnel de football] c. Turkish Football Federation [TFF], C. [société turque] W. [club professionnel de football] et Fédération Internationale de Football Association [FIFA]) ; recours contre la sentence du TAS du 30 juillet 2019 (procédure d’arbitrage d’appel). Les recourants invoquent la violation de l’ordre public (procédural et matériel) en lien avec trois différents aspects. Premièrement, ils font valoir que le tribunal arbitral aurait violé le droit à une audience publique tel que garanti à l’art. 6 (1) CEDH. A cet égard, le TF rappelle, une fois de plus, qu’une partie à la convention d’arbitrage ne peut pas se plaindre directement dans le cadre du recours contre une sentence internationale de la violation de l’art. 6 (1) CEDH « même si les principes de cette disposition peuvent servir, le cas échéant, à concrétiser les garanties invoquées sur la base de l’art. 190 al. 2 LDIP » (consid. 4.1). Le TF rejette donc la thèse avancée par les recourants selon laquelle une violation de l’art. 6 (1) CEDH constituerait un grief « sui generis » s’ajoutant « implicitement » aux motifs de recours prévus à l’art. 190 al. 2 LDIP. D’après notre Haute Cour, une violation de l’art. 6 (1) CEDH n’implique pas « eo ipso » une violation de l’ordre public procédural au sens de l’art. 190 al. 2 let. e LDIP de sorte il incombe aux recourants de démontrer en quoi la prétendue violation de la garantie conventionnelle constituerait également une violation de l’ordre public procédural, ce que les recourants ont omis de faire. En l’espèce, selon le TF, l’applicabilité des garanties de procédure de l’art. 6 (1) CEDH est « d’emblée exclue », dans la mesure où les recourants ne sont pas affectés dans leurs « droits et obligations de caractère civil » (consid. 4.2). Il s’agit de « simples dénonciateurs » qui ne peuvent pas prétendre à l’existence d’un droit à ce qu’une procédure disciplinaire soit ouverte à l’encontre d’un autre club (consid. 4.3). Deuxièmement, les recourants font valoir que la TFF et la FIFA ont adopté un comportement contraire à la bonne foi (art. 2 CC), en décidant de ne pas appliquer un certain nombre de règles qu’elles avaient elles-mêmes édictées afin de lutter contre les manipulations sportives alors que les infractions commisses étaient avérées. Or, en agissant de la sorte, la TFF et la FIFA auraient trahi les expectatives légitimes des recourants. Quant à cet argument, le TF constate qu’une violation de l’art. 2 CC « ne rend pas – per se
– la sentence incompatible avec l’ordre public matériel » et qu’en l’espèce les recourants n’ont pas fait la démonstration qu’on était face à une « violation grave » de l’art. 2 CC tendant à la contrariété de la sentence avec l’ordre public procédural de sorte que leur argument doit être rejeté à défaut de motivation suffisante. Troisièmement, les recourants soutiennent que la sentence viole l’ordre public car la formation arbitrale aurait « cautionné » des actes de corruptions avérés. A ce sujet, le TF se limite à observer que la sentence attaquée ne porte pas sur la question (relevant du droit de fond) de savoir si des actes de corruptions ont été effectivement perpétrés mais uniquement sur celle (préliminaire) de savoir si les recourants avaient la qualité pour agir. Recours rejeté.

Art. 190 LDIP al. 2 let. e

ž(KS Skënderbeu [club de football professionnel albanais] c. Union des Associations Européennes de Football [UEFA]), recours contre la sentence du TAS du 12 juillet 2019. Le recourant fait valoir une violation de l’ordre public procédural du fait que la formation arbitrale du TAS aurait violé le principe ne bis in idem en le sanctionnant deux fois sur la base des mêmes faits. Il est vrai que, d’après la jurisprudence, le principe ne bis in idem
en tant que « corollaire » ou « aspect négatif » de l’autorité de la chose jugée est inclus dans la notion d’ordre public (procédural) au sens de l’art. 190 al. 2 let. e LDIP. Le TF s’appuie sur sa jurisprudence antérieure (TF 4A_314/2014) dans laquelle il avait admis que l’exclusion d’un club de la UEFA Champions League suivie d’une suspension de toute compétition européenne pendant deux saisons sportives n’était pas contraire au principe précité. En effet, les deux procédures (i) poursuivaient des objectifs différents et (ii) visaient à protéger des intérêts distincts. Contrairement à l’avis du recourant, cette jurisprudence est confirmée dans le cas d’espèce. En effet, l’exclusion d’une compétition pour une durée limitée, prononcée dans un premier temps, vise principalement à garantir l’intégrité et le bon déroulement de la compétition sportive. Elle se distingue de la suspension ultérieure (en l’espèce valable pour les dix prochaines saisons sportives) et de l’amende infligée (en l’espèce un million de francs) au recourant dans la sentence attaquée, ces mesures revêtant « avant tout » un caractère répressif. De plus, le TF fait sienne la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme et considère que le critère de l’identité des faits (volet « idem » du principe) ne suffit pas à lui seul à retenir une violation du principe en question. Encore faut-il déterminer s’il existe s’il y a eu répétition des poursuites (volet « bis » du principe). Tel n’est notamment pas le cas s’il existe un « lien matériel et temporel suffisamment étroit » entre les procédures concernées visant la même constellation de faits, de sorte qu’elles peuvent être considérées comme « deux aspects d’un système unique » (consid. 5.4). Le TF admet qu’en l’espèce il existe des liens suffisamment étroits entre les deux phases de la procédure prévue par la réglementation de l’UEFA pour qu’elles soient considérées comme deux aspects « d’un système unique ». Recours rejeté.

Art. 190 LDIP al. 2 let. e

(Club A. [club professionnel de football] c. Z. [agent de footballeur professionnel]) ; recours contre la sentence rendue le 30 juillet 2018 par le TAS (procédure d’arbitrage ordinaire). Invoquant l’art. 190 al. 2 let. e LDIP, le recourant se plaint que la formation arbitrale aurait violé l’autorité de chose jugée découlant d’une première sentence rendue par le TAS. Le TF commence par rappeler, références doctrinales et jurisprudentielles à l’appui, « quelques préceptes en la matière » (consid. 3.1.1). Essentiellement, l’autorité de chose jugée interdit de remettre en cause par le biais d’une nouvelle procédure divisant les mêmes parties une prétention qui a déjà été définitivement jugée. Seul le dispositif du jugement est revêtu de (l’effet préjudiciel ou contraignant de) l’autorité de chose jugée, le nouveau juge (ou arbitre) n’étant pas lié par les constatations en fait, ni les arguments de droit soulevés. L’identité des prétentions est « matérielle » puisqu’il n’est pas déterminant que les conclusions soient formulées de manière identique. En matière d’actions partielles, les considérants du premier jugement ne lient pas le nouveau juge quand bien même les questions qui se posent sont les mêmes. En matière d’arbitrage international, il est de jurisprudence constante qu’un tribunal arbitral viole l’ordre public (procédural) au sens de l’art. 190 al. 2 let. e LDIP lorsqu’il statue sans tenir compte de l’autorité de chose jugée d’une décision définitive antérieure, ou encore lorsqu’il s’écarte, dans sa sentence finale, de l’opinion qu’il a émise dans une sentence préjudicielle tranchant une question préalable de fond. En l’occurrence, la première sentence du TAS est une décision finale qui rejette définitivement la conclusion tendant au paiement de la commission prévue par l’art. 2 a/bb) du contrat et refuse d’entrer en matière, faute d’intérêt suffisant sur la conclusion en constatation d’une prétention fondée sur l’art. 2b) du même contrat. Une telle décision d’irrecevabilité ne fait pas d’obstacle à ce qu’une nouvelle action tendant au paiement de la somme et fondée sur l’art. 2b) du contrat soit ouverte entre les mêmes parties. Recours rejeté.

Art. 190 LDIP al. 2 let. e

(Fédération A. [Fédération nationale de football de la République M.]. et B., C., [joueurs de football de l’équipe nationale U17 de la République M.] c. Confédération D. [structure faitière regroupant les fédérations nationales de football du continent africain]) ; recours contre les sentences du TAS rendues le 4 octobre 2019 (procédure d’arbitrage d’appel). D’après les recourants, la formation arbitrale aurait violé le droit au procès équitable (art. 29 al. 1 Cst. féd.) en méconnaissant les règles sur la consorité passive. Le TF considère que l’application erronée ou même arbitraire des dispositions procédurales applicables ne constitue pas, à elle seule, une violation de l’ordre public et que les recourants ne font ressortir aucune violation de principes fondamentaux de procédure qui entreraient dans la notion d’ordre public procédural. Recours rejeté.

Art. 190 LDIP al. 2 let. e

(A. [agent de joueurs] c. B [joueur professionnel de football]) ; recours contre la sentence du TAS rendue le 18 décembre 2019 (procédure d’arbitrage ordinaire). Le recourant se plaint d’une violation des règles sur la bonne foi et du principe de l’interdiction de l’abus de droit, notions qui entrent « sans conteste » dans celle d’ordre public. Toutefois, se contentant d’émettre des « considérations théoriques », le recourant ne tente pas de démontrer, par une argumentation précise, en quoi la formation arbitrale aurait en l’espèce méconnu ces principes, de sorte que ce moyen du grief est irrecevable faute de motivation suffisante. Dans un autre moyen tiré du même grief, le recourant se plaint en outre de l’incompatibilité de la sentence avec l’ordre public au motif que la formation arbitrale n’aurait pas respecté le principe pacta sunt servanda. Après avoir rappelé que la notion de fidélité contractuelle a un « sens restrictif » selon la jurisprudence relative à l’art. 190 al. 2 let. e LDIP, le TF rejette le grief car il constate que l’arbitre a décidé de ne pas prendre en compte la clause contractuelle uniquement pour des motifs de procédure, ce qui est « totalement étranger à la notion de fidélité contractuelle formant l’un des aspects de l’ordre public matériel visé par l’art. 190 al. 2 let. e LDIP ». Recours rejeté.

Art. 190 LDIP al. 2 let. d

(A. [ancien rameur professionnel de nationalité russe c. Russian Anti-Doping Agency [RUSADA], Agence Mondiale Antidopage [AMA] et Fédération International des Sociétés d’Aviron [FISA]) ; recours contre une sentence du TAS rendue le 26 juin 2019 (procédure d’arbitrage ordinaire). Le recourant fait valoir une violation de son droit d’être entendu en relation avec deux arguments distincts : premièrement, il reproche à la formation arbitrale de ne pas avoir pris en compte sa thèse selon laquelle lui et son expert n’ont pas pu assister à l’ensemble de la procédure d’ouverture de son échantillon B, du fait des « fausses informations » prétendument fournies par les représentants du laboratoire en question ; deuxièmement, l’athlète se plaint du fait que les arbitres n’ont pas pris en compte ses développements présentés quant au caractère prétendument non intentionnel de la violation des règles antidopage. Le TF constate qu’à la lecture de la sentence rien n’indique que son premier argument n’aurait pas été pris en compte et que, de toute manière, les prétendument « fausses informations » données par les représentants du laboratoire « n’auraient pas été susceptibles d’influer sur le raisonnement du tribunal arbitral » (consid. 3.2.1). S’agissant du caractère intentionnel (ou non) de la violation, le recourant ne peut pas déduire de son droit d’être entendu que tous les éléments soulevés soient expressément mentionnés dans la sentence arbitrale, en particulier s’il s’agit que d’une « simple possibilité théorique » qui n’a pas été « étayée par des preuves ni même reliée à des circonstances spécifiques » (consid. 3.2.2). Recours rejeté.

Art. 77 LTF_3

(A. [club de football kazakh] c. B. [joueur professionnel de football de nationalité ghanéenne]) ; recours contre une sentence du TAS rendue le 15 avril 2019 (procédure arbitrale d’appel). Dans la sentence arbitrale faisant l’objet du recours, la formation arbitrale avait retenu que la FIFA ne pouvait pas communiquer aux parties les motifs d’une décision rendue par l’un de ses organes une fois que le délai fixé aux parties pour faire valoir la demande des motifs, selon les règlements sportifs applicables, était expiré. Ainsi, cette communication ne faisait en aucun cas « renaître le délai d’appel au TAS », la décision étant entretemps devenue définitive et exécutoire. La formation arbitrale avait donc à juste titre déclaré le recours irrecevable. Le TF observe que la question soulevée en l’espèce n’a rien à voir avec la prétendue incompétence du tribunal arbitral (art. 190 al. 2 let. b LDIP), unique grief invoqué par le recourant à l’appui de son recours. En effet, le litige concerne un problème de res judicata qui, selon la jurisprudence, relève du grief de l’ordre public procédural (art. 190 al. 2 let. e LDIP). Puisque le recourant s’en prend au mauvais grief, il n’appartient pas au TF de rechercher lui-même dans la sentence attaquée les arguments pouvant fonder un grief qui n’a pas été formellement invoqué par le recourant dans son acte de recours. Recours irrecevable.

Art. 77 LTF al. 1 let. a , Art. 190 LDIP let. d , Art. 191 LDIP , Art. 192 LDIP

(A. [nageur professionnel] et Agence Mondiale Antidopage [AMA] et Fédération Internationale de Natation[FINA]) ; recours contre la décision rendue le 26 juillet 2019 (procédure arbitrale d’appel). Le recours en matière civile visé par l’art. 77 al. 1 let. a LTF en liaison avec les art. 190 à 192 LDIP n’est recevable qu’à l’encontre d’une sentence. L’acte attaquable peut être (i) une « sentence finale » mettant un terme à l’instance arbitrale, (ii) une « sentence partielle » portant sur une partie quantitativement limitée d’une prétention litigieuse ou sur l’une des diverses prétentions en cause ou encore qui met fin à la procédure à l’égard d’une partie des consorts, voire (iii) une « sentence préjudicielle » ou « incidente », réglant une ou plusieurs questions préalables de fond ou de procédure. A l’encontre d’une sentence finale ou partielle, le recourant peut invoquer l’ensemble des motifs énumérés à l’art. 190 al. 2 LDIP. En revanche, à l’encontre d’une décision incidente, seuls les griefs tirés de la composition irrégulière (art. 190 al. 2 let. a LDIP) ou de l’incompétence (art. 190 al. 2 let. b LDIP) du tribunal arbitral sont recevables. En l’espèce, la décision concernait la capacité de postuler des conseils de l’AMA. Le TF qualifie la décision d’incidente ne concernant ni la composition ni la compétence du tribunal arbitral. Par conséquent, le recourant ne peut pas attaquer immédiatement, dans le cadre du recours devant le TF, en invoquant l’art. 190 al. 2 let. b LDIP, une décision portant sur la capacité de postuler d’un avocat. Recours irrecevable.

Art. 102 LTF

(A. [société turque], B. [société turque], V. [club professionnel de football] c. Turkish Football Federation [TFF], C. [société turque] W. [club professionnel de football] et Fédération Internationale de Football Association [FIFA]) ; recours contre la sentence du TAS du 30 juillet 2019 (procédure d’arbitrage d’appel). D’après sa jurisprudence, le TF rappelle que les recourants ne peuvent pas se servir de la réplique pour invoquer des moyens de fait ou de droit qu’ils n’avaient pas présenté dans leur acte de recours ; en effet, la réplique a essentiellement pour but « de répondre à d’éventuels nouveaux arguments formulés dans la réponse d’une autre partie à la procédure » (consid. 2.4.1). Les nouveaux arguments qui échappent à ce cadre ne peuvent pas être pris en considération. Recours rejeté.

(A. [nageur chinois] c. Agence mondiale antidopage [AMA] et Fédération Internationale de Natation [FINA]) ; recours contre la décision rendue par la Commission de récusation du Conseil International de l’Arbitrage en matière de Sport (CIAS) le 16 avril 2019. Un recours au TF contre la décision de la Commission de récusation du CIAS rejetant la demande de récusation d’un arbitre « perd toute raison d’être » si l’arbitre annonce entretemps sa démission. S’agissant de la question des frais et dépens de la procédure, conformément à l’art. 72 PFC (applicable par analogie à la répartition des frais dans un procès devenu sans objet), l’autorité doit se fonder, en premier lieu, sur l’issue probable qu’aurait eu la procédure ; lorsqu’un tel « pronostic sommaire » n’est pas possible, il convient de faire supporter les frais à la partie « ayant provoqué la procédure devenue sans objet », ou à celle « répondant des motifs qui privent d’objet ladite procédure ». En l’espèce, contrairement à ce que soutient le recourant, on ne saurait voir dans la démission de l’arbitre un aveu de partialité. En outre, compte tenu de la jurisprudence niant la recevabilité du recours contre une décision prise par un organisme privé au sujet d’une demande de récusation, le TF retient que le pronostic est défavorable au recourant de sorte qu’il lui incombe de supporter les frais et dépens de la procédure. Recours devenu sans objet.

Art. 76 LTF al. 1 let. b

(Fédération A. [Fédération nationale de football de la République M.]. et B., C., [joueurs de football de l’équipe nationale U17 de la République M.] c. Confédération D. [structure faitière regroupant les fédérations nationales de football du continent africain]) ; recours contre les sentences du TAS rendues le 4 octobre 2019 (procédure arbitrale d’appel). Conformément à l’art. 76 al. 1 let. b LTF, le TF entre en matière sur un recours lorsque son auteur « est particulièrement touché par la décision attaquée et a un intérêt digne de protection à son annulation ou sa modification ». Cet intérêt fait systématiquement défaut si le recourant attaque une décision de non-admission d’un athlète ou d’une équipe à une compétition sportive alors que celle-ci a déjà eu lieu dans l’intervalle. Il en demeure différemment si la même décision prévoit également des sanctions financières ou autres sanctions disciplinaires qui perdurent au-delà de la compétition en question. En l’espèce, les deux décisions faisant l’objet de deux procédures d’appel distinctes au TAS (jointes devant le TF) en plus de l’inéligibilité prononcée à l’égard de certains joueurs à participer à la Coupe d’Afrique des nations U17, contenaient également des sanctions disciplinaires et financières à l’encontre des mêmes athlètes, de sorte que le TF a reconnu aux recourants un intérêt digne de protection. Recours rejeté.