Droit fiscal

JU CST 2/2015

2014-2015

Art. 35a de la loi d’impôt jurassienne du 26 mai 1988 (LI/RS JU 641.11) ; 127 al. 2 Cst.

Impôt minimal sur le revenu ; principes d’égalité, de solidarité et de capacité contributive.

La loi cantonale jurassienne sur les contributions prévoit à son art. 35a l’introduction d’un impôt minimal de CHF 50.- pour tous les citoyens, et cela, quels que soient leurs revenu ou fortune imposables sauf exception prévue expressément. La Cour Constitutionnelle du canton du Jura a jugé que cette imposition minimale violait doublement le principe de l’égalité de traitement. Car, en introduisant dans le barème d’imposition progressif un montant forfaitaire unique de CHF 50.- pour les revenus imposables de CHF 0.- à CHF 13'600.-, l’art. 35a LI crée, de fait, deux systèmes différents d’impositions sur le revenu, ce qui transgresse le principe d’unicité de la réglementation du barème, rompt l’égalité des rapports entre les tranches et est contraire au principe d’universalité de l’impôt, qui suppose que tous les contribuables soient imposés selon les mêmes règles légales.

Enfin à l’intérieur même de ce barème spécial « le montant de l’impôt n’est pas calculé en proportion des revenus imposables des contribuables concernés », ne tenant ainsi pas compte de leur capacité contributive. De surcroit, en faisant le rapport entre le montant forfaitaire et le revenu imposable, on constate un effet dégressif du taux, ce qui est formellement prohibé, car cela engendre une inégalité où « les plus démunis, proportionnellement, paient un impôt plus élevé que ceux qui le sont moins ».

TF 1C_184/2014

2014-2015

Art. 5 al. 1 et 18 al. 2 aLAT ; 33 ss LCAT/RS NE 701.1

Avantage économique majeur ; contribution de plus-value ; zone d’utilisation différée ; zones réservées. Alors qu’une nouvelle modification du plan d’aménagement de la commune avait déjà été mise à l’enquête, un mois avant son approbation par le Conseil d’Etat, l’intimé a acquis des parcelles en zone réservée pour CHF 90.90 le m2, bien que le prix du terrain agricole soit de CHF 2.- le m2.

En s’appuyant sur l’ATF 132 II 401, le TF cherche à déterminer si, lors du nouveau classement, l’intimé a retiré un avantage économique majeur qui ouvre selon les art. 5 al. 1 aLAT et 35 al. 1 LCAT, l’obligation de s’acquitter d’une contribution de plus-value. Si certes, dans le cas d’espèce, l’on est face à une zone réservée discordant ainsi de l’état de fait typique de l’ATF 132 II 401 (zone d’utilisation différée) cette divergence n’est toutefois pas, selon le TF, « un élément à lui seul pertinent» permettant d’exclure l’application de cette jurisprudence.

Car il n’en reste pas moins que, lors de l’acquisition, l’affectation en zone à bâtir était de l’ordre du pratiquement certain et, dès lors, il existait une forte probabilité d’urbanisation confortée par le fait que, pour de la zone constructible, l’intimé a payé un prix objectivement réaliste. Ainsi au vu de ces éléments, le TF conclut que ce n’est pas l’intimé qui a retiré un avantage majeur du déclassement, mais bien le précédent propriétaire. Par ailleurs, le TF précise l’interprétation de l’art. 35 al. 1 LCA, en spécifiant que le débiteur de la compensation est le propriétaire bénéficiant de la plus-value et que l’art. 36 LCA « ne règle, quant à lui, que le moment déterminant pour fixer le montant de la plus-value ».

TF 1C_588/2014

2014-2015

Art. 5 al. 1 et 18 al. 2 LAT ; 33 ss LCAT/RS NE 701.1

Compensation d’avantages et inconvénients majeurs qui résultent de mesures d’aménagement du territoire ; contributions de plus-value.

Le contribuable avait acquis en 1976 un bien-fonds de la commune de La Chaux-de-Fonds sis en zone agricole et faisant partie du domaine dont il est propriétaire avec son épouse. En 2013, l’autorité administrative ordonne le paiement d’une contribution de plus-value d’environ

CHF 90'000.-, ce à quoi le recourant s’oppose en faisant valoir que le fait que des installations équestres sont comprises dans l’exploitation agricole diminuerait la valeur vénale des terrains concernés en raison de restriction de vente qu’imposerait la LDFR. Cet argument est rejeté par le Tribunal fédéral qui relève que des exceptions à ces restrictions de vente sont prévues par le droit foncier rural et que, même si un morcellement peut ne pas être opportun en l’espèce comme le prétend le recourant, il n’en est pas moins objectivement possible et que la valeur des terrains doit par conséquent être déterminée indépendamment de leur intégration actuelle à l’exploitation agricole.

En conséquence, aucune violation de l’art. 5 LAT n’est constatée en l’espèce.

Art. 309e et 314 de la loi tessinoise des contributions publiques du 24 juin 1994 (LT/RS TI 10.2.1.1) ; 53a, 56, 57b LHID ; 8 al. 1, 49, 127 al. 2 Cst.

Simplification du rappel d’impôt en cas de succession ; dénonciation spontanée non punissable ; principe de la force dérogatoire du droit fédéral ; principes d’universalité, d’égalité de traitement et d’imposition selon la capacité économique.

Suite à une initiative parlementaire, le Grand Conseil du canton du Tessin a adopté, le 25 novembre 2013, deux dispositions transitoires à la loi cantonale sur les contributions, permettant tant aux personnes physiques que morales opérant une dénonciation spontanée entre le 1er janvier et le 31 décembre de l’année suivant l’entrée en vigueur de la modification législative, d’être non seulement exonérées de poursuite, conformément aux art. 53a, 56 et 57b LHID, mais également de se voir octroyer un rabais de 70% du taux de l’imposition. Les recourants considèrent que ces deux dispositions violent le principe de la force dérogatoire du droit fédéral (art. 49 Cst.), car les prescriptions de la LHID régissant la dénonciation spontanée ne font aucunement mention d’un possible rabais sur le taux d’imposition lors du rappel d’impôt.

Sachant que pour introduire une dénonciation spontanée, selon les art. 56 al. 1bis et 57b al. 1 LHID, le contribuable doit s’efforcer de « s’acquitter du rappel d’impôt dû » et que l’art. 72i LHID impose une application directe de ces mêmes dispositions, le TF conclut donc que, malgré la large latitude laissée aux cantons dans l’établissement des barèmes d’imposition, la LHID ne donne, dans ce cas, aucune marge de manœuvre qui permettrait au droit cantonal d’introduire un tel rabais.

D’autre part, les recourants arguent que ces normes contreviennent aux principes d’universalité, d’égalité de traitement et d’imposition selon la capacité économique (art. 127 al. 2 et 8 al. 1 Cst.). Le TF rappelle que l’art. 127 Cst. est une objectivation de l’art. 8 Cst. auquel les cantons ne peuvent déroger lorsqu’ils prélèvent l’impôt. Ainsi, dès lors que la loi cantonale accepte que des personnes dont la situation est semblable soient imposées de manières différentes, en tolérant que l’une d’elles se voit imposée aux taux ordinaires alors que l’autre bénéficie d’une réduction de 70% de ce même taux, elle enfreint, de fait, le principe d’égalité de traitement en ayant introduit une inégalité systématique à l’égard d’une certaine catégorie de contribuables.

Enfin, lorsque la législation cantonale force l’assujetti faisant face à des difficultés économiques à s’acquitter de la totalité de l’impôt dû, tandis que celui qui se trouve dans une situation financière confortable, en s’étant soustrait à ses obligations fiscales, peut lui bénéficier, en plus de l’abandon des poursuites, d’une réduction de taux alors les principes d’universalité et d’imposition selon la capacité économique, sont transgressés. C’est donc pour l’ensemble de ces violations des principes constitutionnels que le TF décide d’annuler les modifications faites à la loi cantonale tessinoise sur les contributions publiques.

TF 2C_290/2014

2014-2015

Art. 14 LHID ; 9 et 11 de la loi sur l’imposition des personnes physiques – impôt sur la fortune du 31 décembre 2009 (aLIPP-III ; RSGE D 3 13)

Évaluation de la valeur d’un bien immobilier pour l’impôt sur la fortune et l’impôt immobilier complémentaire genevois ; délai pour demander l’expertise.

Le contribuable, puis, suite à son décès au cours de la procédure, son hoirie, conteste la valeur prise en compte pour l’impôt sur la fortune et l’impôt immobilier complémentaire de deux parcelles agricoles sises dans le canton de Genève. Pour l’administration fiscale, si l’assujetti considérait que la valeur retenue pour ses biens n’était pas adéquate, il pouvait, conformément à l’art. 11 al. 5 aLIPP-III, demander une expertise jusqu’au 31 décembre de l’année en cause, démarche que le contribuable n’a pas entreprise. Le recourant conteste ce délai au motif qu’il ne figure pas explicitement à l’art. 14 LHID, mais seulement à l’art. 11 aLIPP-III. S’agissant, dans le cas présent, d’un impôt cantonal, le TF rappelle que le législateur fédéral laisse, dans ces circonstances, une certaine marge de manœuvre aux cantons.

Ainsi, hormis les règles contenues dans la LHID et les garanties de la Constitution fédérale, les cantons sont, pour le reste, libres d’organiser la procédure de fixation et de prélèvement comme ils l’entendent. L’art. 14 LHID ne prévoyant pas de règles d’harmonisation sur ces points, les cantons disposent d’une large autonomie, encore plus importante que celle dont ils disposent pour évaluer la fortune imposable. De ce fait, les art. 9 et 11 aLIPP-III ne contreviennent pas l’art. 14 LHID.

TF 2C_32/2014

2014-2015

Art. 14 al. 2 LHID ; 40ss de la loi sur les contributions du canton de Zurich du 8 juin 1997 (StG/ZH ; RS 631.1)

Aliénation d’un immeuble agricole ; impôt complémentaire sur la fortune ; valeur vénale ; valeur d’acquisition.

Les héritiers de H vendent, à son décès, un terrain agricole d’une superficie de 11’409 m2 pour CHF 665.-/m2 (CHF 7’586’985). Ce bien agricole ayant été jusqu’alors imposé par rapport à sa valeur de rendement (CHF 11'409.-), son aliénation déclenche la perception d’un impôt complémentaire sur la fortune de la part des autorités zurichoise conformément aux arts. 14 al. 2 2e phrase LHID et 41 StG/ZH. Cet impôt est prélevé en fonction de la durée de possession, mais au maximum pour une période de détention de 20 ans.

Par ailleurs, l’art. 43 al. 2 StG-ZH stipule que le calcul de l’impôt complémentaire se base sur la différence entre les moyennes des valeurs de rendements et des valeurs vénales du début et de la fin de la période déterminante, en l’occurrence, dans ce cas, la moyenne entre la valeur d’il y a 20 ans et celle d’aujourd’hui. La législation fiscale cantonale reprenant dans son ensemble les prescriptions de l’art. 14 al. 2 LHID, le TF précise que l’on ne peut ni faire recours à la notion de valeur vénale de la LDFR ni à celle de l’imposition sur la fortune (art. 39 al. 2 StG-ZH), car l’art. 43 StG StG-ZH est très précis concernant les modalités de calcul de l’impôt complémentaire. L’instance précédente s’étant appuyée sur la valeur réelle de marché (CHF 665.-/m2) pour déterminer la valeur vénale du bien aujourd’hui, elle a dès lors appliqué correctement l’art. 43 StG-ZH et par conséquent n’a pas fait preuve d’arbitraire.

S’agissant de la valeur vénale d’il y a 20 ans, le TF suit le raisonnement de l’instance inférieure qui a utilisé le coût d’acquisition de l’impôt sur le gain immobilier (CHF 430.-/m2) pour déterminer cette valeur. Car, lorsqu’aucun prix d’acquisition n’est identifiable, l’impôt sur les gains immobiliers se fonde, pour son calcul, sur la valeur vénale d’il y a 20 ans. Cette valorisation leur étant favorable dans le contexte de l’impôt sur les gains immobiliers, les contribuables l’ont accepté. Comme nul n’est admis à se prévaloir de ses propres contradictions au détriment d’autrui (« venire contra factum proprium »), ils ne peuvent donc pas maintenant, dans le cadre de l’impôt complémentaire sur la fortune, contester la valeur préalablement établie.

TF 2C_759/2014

2014-2015

Art. 34 al. 2 BauG/RS BE 713.100 ; 19 al. 2 et 22 al. 2 RPG

Contribution bernoise de raccordement aux eaux usées sur une parcelle déjà viabilisée.

Le recourant est propriétaire d’une parcelle sur laquelle se trouve une habitation et pour laquelle il a obtenu un permis de construire lui permettant de raser celle-ci et d’en construire une nouvelle. Dans le même temps, la commune décide de moderniser les canalisations d’eaux usées qui desservent, entre autres, la parcelle du recourant. Bien que le recourant ait déjà payé des contributions de raccordement pour son terrain, la commune lui demande une taxe supplémentaire.

Comme le rappelle le TF, lorsqu’un évènement améliore le bâtiment, notamment si on remplace le réseau de canalisation des eaux usées, il y a création d’un avantage pour le propriétaire de la parcelle, ce qui justifie le prélèvement de contributions de raccordement supplémentaires. Dans le cas d’espèce, le TF signale que la nouvelle canalisation était la condition préalable à l’octroi du permis de construire. Par conséquent, le recourant a clairement profiter d’un avantage qui doit être soumis à une taxe. Enfin, la déductibilité des contributions de raccordement déjà engagées ne rentre pas en ligne de compte puisque le recourant a rasé l’habitation existante pour en construire une nouvelle.

TF 2C_904/2014

2014-2015

Art. 39 al. 2 WVG ; 32 al. 2 ABG

Emolument de raccordement aux eaux usées et à l’eau potable ; effet de l’inflation et indexation.

Selon la législation grisonne, si, suite à des travaux, la valeur d’assurance augmente de CHF 50’000.- par rapport à la précédente valeur, des émoluments de raccordements sont dus sur la plus-value générée par lesdits travaux. La commune de situation de l’immeuble souhaite prélever des émoluments de raccordement non seulement sur l’accroissement de valeur générée par les travaux, mais également sur celle liée à l’inflation entre les deux périodes de travaux, c’est-à-dire entre 1998 et 2009 (plus précisément sur l’inflation entre 2005 et 2009, mais pas sur celle de 1998 à 2005).

Le contribuable s’y oppose en plaidant une application arbitraire du droit communal. Le TF se range à l’avis du contribuable, car la loi est claire sur le point que ce qui déclenche l’imposition est bien l’accroissement de valeur dû à des travaux et non pas celui lié au simple effet de l’inflation. De toute évidence, la loi ne prévoit pas, lors d’accroissement de valeur dû à l’inflation, que des frais de raccordements supplémentaires soient prélevés. Par ailleurs, le TF relève la position contradictoire de l’instance précédente, qui ne soumet pas aux émoluments de raccordements l’accroissement de valeur lié à inflation jusqu’en 2005 mais bien celle qui a eu lieu entre 2005 et 2009. Le TF conclut que l’instance précédente a agi de façon arbitraire et somme la commune de rembourser les émoluments de raccordements perçus sur la plus-value liée à l’inflation entre 1998 et 2009.

TF 2C_139/2015

2014-2015

Art. 11 loi vaudoise du 27 février 1963 concernant le droit de mutation sur les transferts immobiliers et l’impôt sur les successions et les donations (LMSD/VD)

Partage du pouvoir fiscal en cas de succession intercantonale.

Le de cujus, B.X., décédé dans le canton de Vaud est, selon l’inventaire fiscal de la succession, propriétaire, en plus des biens mobiliers, de plusieurs biens immobiliers sis dans le canton de Vaud, de Schwyz et du Valais. Un des héritiers conteste la répartition du pouvoir fiscal et souhaite se voir imposer uniquement sur les actifs qui lui ont été effectivement attribués par la convention de partage. Le TF se range à l’interprétation de l’instance précédente, considérant que celui-ci a correctement réparti la quote-part successorale de chaque héritier à la succession non partagée. Car il faut déterminer le pourcentage correspondant à la part des actifs situés dans le canton par rapport à l’ensemble des actifs de la masse successorale en n’opérant aucune distinction entre les actifs mobiliers et immobiliers. Ainsi, si l’art. 11 al. 1 lit. a et b LMSD distingue les biens immobiliers des mobiliers, «cette distinction ne peut se comprendre que dans le sens de la valeur que représente ces biens par rapport à l’ensemble de la succession et non comme une possible différenciation selon le type de bien ».

TF 2C_327/2014

2014-2015

Art. 127 al. 3 Cst.

Valeur locative ; double imposition intercantonale.

En septembre 2003, A déménage du canton de Zoug au canton de Lucerne pour s’installer avec sa compagne dans l’appartement en PPE dont il a fait l’acquisition. Cet appartement n’étant pas fini au moment de l’aménagement, A ne considère pas y être domicilié. Cependant, suite à la procédure engagée par le canton de Lucerne, A est reconnu comme domicilié dans le canton depuis le 1er janvier 2003. Entre-temps, le canton de Zoug décida, en 2006, d’imposer A pour la période fiscale 2003, de façon illimitée. Mais, lorsqu’en 2008 la procédure pris fin et que le canton de Lucerne obtint la reconnaissance du domicile de A sur son sol, il imposa également A de manière illimitée pour la période fiscale 2003. Pour déterminer s’il y a double imposition, le TF examine en premier lieu si le canton de Lucerne a la compétence d’imposer A et dans un deuxième temps, si cela entraîne une double imposition.

La Haute Cour conclut que suite à la procédure lucernoise, A a bien son domicile fiscal principal dans le canton de Lucerne et doit donc y être imposé de façon illimitée. Si le recourant ne conteste pas cette opinion, il s’injure par contre de la comptabilisation, en 2003, d’une valeur locative dans ce canton. Le TF se range à l’interprétation de l’instance lucernoise inférieure, car, selon la jurisprudence, la valeur locative est rajoutée au revenu du propriétaire à partir du moment où celui-ci habite lui-même le logement dont il est titulaire. A n’ayant intégré son appartement qu’en septembre 2003, les autorités fiscales ont correctement appliqué la loi en ajoutant au revenu de A, pour la période fiscale 2003, la valeur locative uniquement du 1er octobre au 31 décembre 2003. Le fait que l’appartement n’était pas totalement habitable à cette époque ou que l’évaluation cadastrale n’avait pas eu encore lieu n’a, selon le TF, aucun impact sur le début de la prise en compte de la valeur locative.

Ainsi, pour la période fiscale 2003, tant le canton de Zoug que de Lucerne ont imposé A de manière illimitée créant, selon l’art. 127 al. 3 1ère phrase Cst., une double imposition effective puisque que A est concrètement soumis par ces deux cantons sur le même objet. C’est pourquoi, afin d’éliminer cette double imposition, le TF décide qu’étant donné que le canton de Lucerne est le domicile fiscal principal de A en 2003, il revient aux autorités lucernoises de l’imposer de manière illimitée. Le canton de Zoug doit revoir, quant à lui, son imposition en tenant compte du fait qu’il n’est que le domicile accessoire.

TF 2C_1201/2013

2014-2015

Art. 4 al. 1 lit. c, 5, 6 al. 2 et 7 al. 2 LIFD

Intérêt passif en cas de détention d’un immeuble en Suisse depuis l’étranger ; répartition de la dette selon la méthode objective ou proportionnelle.

Un couple résidant à Londres est propriétaire, dans le canton de Vaud, d’un immeuble grevé d’une dette hypothécaire. Ce bien créant un rattachement économique, les contribuables sont assujettis de manière limitée en Suisse et seuls les éléments économiques rattachés à la Suisse sont imposés. Si la répartition des valeurs se fait selon la méthode objective, les intérêts passifs sont en revanche attribués proportionnellement aux actifs localisés, qu’ils soient privés ou commerciaux. Le TF justifie ce choix par le fait que « les dettes hypothécaires qui grèvent un immeuble ne se trouvent pas dans une relation à ce point étroite avec celui-ci qu’elles devraient être entièrement et exclusivement déduite de la valeur de l’objet grevé ».

Malgré tout, cette répartition est encadrée par deux conditions. La première veut que le revenu imposable en Suisse doive s’élever au minimum au revenu acquis en Suisse (art. 6 al. 2 LIFD), et la seconde commande que le taux d’imposition s’élève au moins au taux correspondant au revenu acquis en Suisse (art. 7 al. 2 LIFD). Le TF conclut qu’il ne peut valider aucune méthode qui viendrait transgresser les prescriptions de la loi fédérale quant à l’assiette et le taux minimal.

TF 2C_18/2014

2014-2015

Art. 6 et 7 LIFD ; 127 al. 3 Cst. ; 5 al. 3 et 4 de la loi sur les contributions publiques du canton de Zurich du 8 juin 1997 (RS ZH 631.1)

Répartition intercantonale des pertes d’exploitation d’un hôtel en Suisse en propriété de résidants allemands avec des revenus immobiliers dans d’autres cantons.

Un couple résidant en Allemagne est propriétaire en Suisse de plusieurs biens immobiliers dans les cantons des Grisons, de Zurich et de Saint-Gall. Parmi ces biens figure un hôtel sis dans les Grisons exploité sous la forme juridique d’une entreprise individuelle. En 2009, l’administration cantonale grisonne constate une perte de CHF 255'523.- dont elle ne peut pas tenir compte faute de substance imposable. C’est pourquoi, présumant que dans l’Etat de résidence les contribuables bénéficiaient de revenu substantiel, les autorités grisonnes ont imputé cette perte au domicile principal des contribuables (l’Allemagne) et non pas aux autres cantons. Les autorités fiscales zurichoises ayant fait le même raisonnement, elles ne tinrent pas compte des pertes grisonnes dans leur détermination du revenu imposable zurichois. Les recourants, assujettis de manière limitée, due à leur rattachement économique, contestent cette répartition et demandent l’application des règles fédérales en matière d’élimination de la double imposition cantonale.

Cela reviendrait, comme le soulève le TF, à faire supporter d’abord l’entier de la perte aux revenus de source zurichoise et saint-galloise pour subsidiairement transférer la perte résiduelle à l’Allemagne. Un tel concept n’est pas retenu par la Haute Cour, car cela consisterait à faire une consolidation intercantonale en utilisant des dispositions dont le sens et le but sont complètement contradictoires, puisqu’elles visent précisément à délimiter la souveraineté fiscale et non à la consolider. Par ailleurs, cette vision impacterait directement les compétences fiscales subsidiaires des cantons étant donné que ceux-ci ont intégré dans leurs lois cantonales les seuils minimaux fixés aux art. 6 al. 2 et 7 al. 2 LIFD. Ainsi, en déduisant du revenu imposable zurichois (CHF 126'100.-) les pertes grisonnes de CHF 255'523.-, on remarque que les seuils minimaux sont largement enfoncés (le revenu imposable en Suisse doit s’élever au minimum au revenu acquis en Suisse et le taux d’imposition doit s’élever au moins au taux correspondant au revenu acquis en Suisse).

Le TF considère que c’est à l’Etat où se trouvent les immeubles, en l’occurrence la Suisse, de décider si et comment il entend répartir les pertes du contribuable. Le fait que l’Allemagne ne tienne pas compte dans son droit interne de cette perte, car elle applique la « Symetriethese» n’oblige en rien les cantons à la compenser. Enfin, selon le TF, cette interprétation est renforcée par la CDI CH-A, calquée sur le MC OCDE, qui ne connaît pas de dispositions spécifiques pour répartir de telles pertes. De fait, c’est bien au pays qui se voit, selon la convention, octroyer le droit d’imposer, ici la Suisse, puisque les biens immobiliers sont sur son territoire, d’édicter sa pratique concernant la répartition des pertes.

TF 2C_198/2014

2014-2015

Art. 6 LIFD ; ALCP

Excédent de charges en relation avec des immeubles sis à l’étranger ; statut de quasi-résident selon la jurisprudence de la CJUE.

Des époux de nationalité néerlandaise sont domiciliés en France où ils sont propriétaires d’une villa. Les deux époux exercent une activité lucrative dépendante en Suisse dans le canton de Genève. L’administration fiscale cantonale genevoise a refusé la déduction de l’excédent des charges (frais d’entretien et intérêts hypothécaires) liées à l’immeuble sis en France. Les époux, faisant valoir l’existence d’une «  discrimination prohibée par les principes fondamentaux du droit communautaire  », firent recours au Tribunal fédéral. Celui-ci se penche sur la question de déterminer si le refus de déduire l’excédent de charges viole l’ALCP et la jurisprudence de la CJUE invoquée par les contribuables, en particulier celle définissant la notion de «  quasi-résident  ».

Dans ce contexte, le Tribunal fédéral constate que «  dans la mesure [...] où les recourants tirent l’essentiel de leurs revenus en Suisse, ils doivent être qualifiés de quasi résidents  ». Cette qualification implique que les contribuables doivent être traités fiscalement comme des contribuables résidant en Suisse et qu’il faut en particulier leur reconnaître le droit aux mêmes déductions que celles prévues pour les résidents suisses. Selon la décision présentée ici, des contribuables quasi résidents doivent dès lors être traités comme des résidents du point de vue de l’art. 6 LIFD. La pratique établie en 2014, selon laquelle des excédents de charges sur des immeubles étrangers sont pris en compte pour le calcul du taux, mais pas de l’assiette de l’impôt, est directement applicable au cas d’espèce. Les références aux jurisprudences de la CJUE invoquées par les contribuables concernaient des situations dans lesquelles des contribuables résidents et non résidents étaient traités fiscalement de manière différente et ne permirent pas de convaincre le Tribunal fédéral de modifier sa position. Ce dernier rejeta en conséquence le recours.

TF 2C_286/2014

2014-2015

Art. 6 al. 3, 32 al. 2 et 34 let. d LIFD

Qualification en tant que frais d’entretien ou d’acquisition, frais de remise en état d’immeubles acquis récemment ; pratique Dumont.

En 2011, les époux A, résidant dans le canton de Soleure, entreprennent une trentaine de travaux différents dans une bâtisse inhabitée depuis 30 ans qu’ils viennent d’acquérir en Bourgogne (FR). Etant imposés de manière illimitée en Suisse en raison de leur rattachement personnel, les rendements immobiliers et donc, par écho, les déductions liées à ce bien immobilier sis à l’étranger ne sont pas pris en compte dans la détermination du revenu imposable des époux, mais uniquement pour le taux de l’impôt (confirmation de jurisprudence). Pour ce faire, il faut que les dépenses soient des frais déductibles au sens de l’art 32 al. 2 LIFD.

En l’espèce, le TF examine si les travaux effectués correspondent ou non aux « frais de remise en état d’immeubles acquis récemment » de l’art. 32 al. 2 1ère phrase LIFD. Dans ce cadre, la Haute Cour précise que l’abrogation de la pratique Dumont ne signifie pas que tous les frais encourus suite à l’achat d’un immeuble sont déductibles. Au contraire, il reste à examiner dans quelle mesure les travaux en question ont contribué à maintenir l’état du bien immobilier, ou générer une plus-value. Au vu de l’ampleur des travaux réalisés, particulièrement ceux concernant le chauffage, l’électricité, les sanitaires et les fenêtres, et de leurs coûts, supérieurs au prix d’achat de la maison, et de leur concentration sur une période relativement restreinte (un an), le TF considère qu’il s’agit d’une rénovation totale du bien immobilier (non déductible, art. 34 lit. d LIFD) et de frais d’acquisition. Ces montants ne sont pas non plus pris en considération pour le calcul du taux.

TF 2C_64/2013

2014-2015

Art. 53 à 56 LIA ; 18, 13 al. 2, 11, 3 al. 1 et 8 al. 1 OIFI ; 24 al 1 LHID ; 58 al. 1 lit. a LIFD

Imputation forfaitaire d’impôt ; perte dans le canton du siège et revenu immobilier dans un autre canton ; clause « subject to tax ».

Une société d’assurances, ayant son siège à Bâle et des immeubles dans plusieurs cantons, dont celui de Genève, enregistre une perte d’exploitation de CHF 2,3 millions pour l’année 2006. Par ailleurs pour la même période, elle perçoit des dividendes et des intérêts étrangers ne bénéficiant pas de la réduction pour participation à hauteur de CHF 14,7 millions. La part d’impôt à la source résiduelle sur les revenus de sources étrangères se monte à CHF 2,1 millions (« Sockelsteuern»). Selon l’art. 10 al. 3 in fine OIFI, le montant de crédit d’impôt maximal que peut percevoir une personne morale est limité par l’impôt sur le bénéfice qu’elle acquitte effectivement pour l’exercice correspondant à celui où l’impôt forfaitaire est demandé.

Au vu de la perte réalisée à Bâle, il n’y a pas de substance imposable dans ce canton permettant l’imputation forfaitaire. Cependant, dans l’un des domiciles secondaires, en l’occurrence le canton de Genève, une telle substance existe suite au gain immobilier de CHF 32,6 millions généré par la vente d’un immeuble. Alors même que le canton de Genève a imposé le gain immobilier en tenant compte de la perte du siège, afin d’éviter une perte de répartition, les autorités fiscales bâloises refusent de tenir compte de ce gain dans l’imputation au motif qu’aucun n’impôt n’est effectivement payé dans ce canton, c’est-à-dire qu’aucun des revenus imposables à la source (ici : dividendes et intérêts étrangers) n’est attribuable au canton de Genève. Le TF rappelle que, n’ont droit à l’imputation forfaitaire d’impôt, que les personnes morales qui ont leur domicile en Suisse et qui sont assujetties aux impôts suisses sur le revenu pour leurs rendements provenant de l’étranger, ce qui est a priori le cas pour la société contribuable.

La Haute Cour rejette l’interprétation des autorités fiscales cantonales et retient que pour calculer le montant maximum de l’imputation forfaitaire il faut prendre en compte l’ensemble des revenus, et ce même si aucun impôt n’est dans les faits acquitté, car aucune substance n’est imposable par l’effet de compensation entre ces dividendes et les pertes de la société. Enfin les juges de Mon Repos, se basant sur le principe de l’interdiction d’un traitement plus défavorable, décident que lorsqu’une entreprise se trouvant dans une relation intercantonale subit des pertes à son domicile principal alors qu’elle est bénéficiaire au domicile secondaire et qu’elle réalise globalement un bénéfice, alors ce canton qui ne perçoit aucun revenu de source étrangère (ici : Genève) se doit de participer au remboursement de l’imputation forfaitaire.

TF 2C_447/2014

2014-2015

Art. 9 al. 1 de la loi concernant la perception de droits de mutation sur les transferts immobiliers (LDMI-NE)

Application d’un taux réduit pour immeuble nouvellement construit ; rénovation d’envergure ; transformation d’un hôtel en habitation.

Les copropriétaires d’un ancien hôtel entièrement transformé en logement d’habitation (PPE) souhaitent que le taux du droit de mutation grevant leur acquisition soit réduit à 2,2% du prix de vente, car ils considèrent avoir acheté des appartements sis dans un « immeuble nouvellement construit ». Le TF, sous l’angle de l’arbitraire, confirme l’interprétation faite par le Tribunal cantonal de la notion d’ « immeuble nouvellement construit » relatif à l’art. 9 al. 1 LDMI-NE.

Ainsi, bien que l’on soit en présence d’un bâtiment voué pour la première fois à l’habitation et malgré l’ampleur des travaux de rénovation, le fait d’avoir conservé les murs extérieurs et l’ossature ne permet pas de qualifier le bien, en question, d’ « immeuble nouvellement construit ». Ainsi une telle transformation, nonobstant sa consistance, ne donne pas droit à la réduction du taux de droit de mutation proposée à l’art. 9 al. 1 LDMI-NE.

TF 2C_692/2014

2014-2015

Art. 29 al. 2 Cst. ; 210 et 214 al. 2 Gesetzes des Kantons Solothurn vom 1 Dezember 1985 über die Staats- und Gemeindesteuern (StG/SO RS 614.11)

Prix du transfert immobilier pour le droit de mutation en cas de contrat de vente lié à des conditions spéciales ; offres de preuve ; violation du droit d’être entendu.

En 2011, A SA achète au canton de Soleure un hôpital abandonné pour CHF 11’996'430.-, afin de le transformer en centre de santé et de soin. Il est convenu que A SA n’aura pas à s’acquitter du prix d’achat si, dans un délai de 7 ans après l’obtention du permis de construire, elle a investi au moins CHF 10 millions et maintenu 60 emplois. En raison du transfert de droit de propriété, le canton réclame des droits de mutation de 2,2% sur le prix convenu contractuellement. La recourante demande à l’autorité fiscale de prendre en compte, pour calculer le montant des droits de mutation, une valeur de 0, malgré le fait que la législation fiscale soleuroise prévoie la prise en compte de la valeur vénale (art. 210 StG/SO).

D’après la jurisprudence constante du TF en matière d’évaluation de la valeur vénale de biens immobiliers, on utilise en général la méthode des comparables afin d’éliminer les éventuelles spécificités liées à la transaction telles que les modalités de paiement ou la fixation du prix. Néanmoins, lorsque l’on fait face à de l’immobilier très spécialisé, comme c’est le cas ici, où aucun comparable n’est disponible et le prix d’achat est symbolique, car lié à un volume d’investissement, l’art. 214 al. 2 StG/SO préconise de procéder à une expertise indépendante afin de déterminer la valeur vénale du bien en question.

Ainsi, alors que la valeur vénale est difficile à appréhender au vu des circonstances et que son évaluation est contestée par la recourante, l’instance inférieure a agi, selon le TF, de façon arbitraire et a violé le droit d’être entendu de l’intimée lorsqu’elle a écarté l’expertise de celle-ci, qui compte tenu de la complexité du dossier gardait toute sa pertinence, sans motiver en quoi cette preuve ne changerait rien à sa détermination. En particulier, l’explication de l’administration fiscale sur la raison pour laquelle la valeur de l’immeuble n’est pas égale à CHF 0.- n’est pas une justification suffisante pour écarter l’expertise de la recourante. La question de la fixation du prix étant une question de fait, le TF renvoie la cause à l’instance précédente.

TF 2C_276/2014

2014-2015

Art. 175 al. 1 LIFD ; 56 al. 1 LHID

Soustraction fiscale ; abandon de créances hypothécaires non déclaré.

A la suite de l’échec d’un projet de promotion immobilière dans lequel ils étaient impliqués, des époux domiciliés dans le canton de Genève ont bénéficié d’un abandon de créances hypothécaires accordé par une banque. Selon la pratique administrative et fiscale, un tel abandon de créance constitue un revenu imposable. Par conséquent, en ne le déclarant pas, les contribuables ont indûment réduit leur imposition, remplissant matériellement les éléments constitutifs objectifs de la soustraction fiscale, selon l’art 175 al. 1 LIFD.

Partant, il reste au TF à rechercher si les éléments constitutifs subjectifs de l’infraction sont réalisés, c’est-à-dire si les contribuables ont agi intentionnellement ou par négligence. La Haute Cour constate que l’époux, étant à la tête d’une fiduciaire active notamment dans le domaine fiscal, avait de toute évidence les connaissances suffisantes pour comprendre « qu’avec l’abandon de créance hypothécaire d’un montant supérieur au paiement de la somme requise en contrepartie, son patrimoine ne serait pas diminué comme il l’aurait été sans cet abandon ».

Par ailleurs, le TF relève que s’il subsistait un doute sur la qualification de cet abandon de créance, il incombait aux contribuables de se renseigner auprès des autorités fiscales.

Ainsi, au vu de ces éléments, les intimés n’ont pas usé de toutes les précautions recommandées, ce qui permet au TF d’établir la négligence. Toutes les conditions de la soustraction fiscale étant remplies, le TF conclut donc que l’amende infligée initialement était fondée.

TF 2C_363/2014

2014-2015

Art. 21 al. 1 let. b LIFD ; 7 al. 1, 21 al. 1 let. c, 24 al. 1 et 28 al. 2 LHID ; 74 al. 1 let. c et 81 al. 1 let. a de la loi fiscale du 10 mars 1976 du canton du Valais (LF/VS ; RSVS 642.1)

Prestation appréciable en argent et valeur locative d’un immeuble en propriété d’une personne morale. X. SA, dont le siège se trouve dans le canton de Fribourg, détient un chalet sis dans le canton du Valais. Si, jusqu’en 2007, elle comptabilisait des revenus locatifs pour cette propriété (CHF 42'729.- en 2007), depuis 2008 seuls des frais sont comptabilisés. L’administration fiscale valaisanne, supposant une prestation appréciable en argent, procéda à une reprise (CHF 25'200.-) puis calcula à partir de ce bénéfice global ainsi corrigé la part revenant au canton (art. 21 al. 1 lit. c LHID).

Selon le TF, étant donné qu’aucune disposition de la LIFD ou de la LHID ne prévoit, pour les personnes morales, l’intégration d’une valeur locative dans le bénéfice imposable et que la jurisprudence spécifie que « le bénéfice imposable des personnes morales ne peut pas être augmenté du rendement hypothétique que devrait obtenir une société anonyme », l’instance précédente a donc correctement examiné le manque de revenu locatif sous l’angle de la prestation appréciable en argent. Cependant, l’autorité cantonale n’ayant pu démontrer que X. SA avait mis le chalet à disposition de ses actionnaires ou proches, la Haute Cour ne peut constater l’existence de prestation appréciable en argent.

TF 2C_377/2014

2014-2015

Art. 58 al. 1 LIFD

Prestation appréciable en argent ; procuration ; organe de fait ; renonciation à un produit ; manque à gagner provenant de la violation du devoir de fidélité.

Grâce à la procuration de sa sœur associée gérante, AY., gère, depuis 2006, X. Sàrl, société active dans la promotion immobilière. Sur trois projets, X. Sàrl a extourné la totalité des bénéfices engendrés aux associés, AY., F et G, de la société simple C, c’est-à-dire que, peu après avoir enregistré l’opération, une écriture comptable inverse est passée en faveur de la société simple C. Au vu des liens unissant les parties, l’administration fiscale valaisanne qualifia ces opérations de prestations appréciables en argent (ci-après : PAA) et les réintégra au bénéfice imposable de X. Sàrl en 2008.

Le TF réaffirme sa position selon laquelle les actes des organes, y compris ceux des organes de fait, quelles que soient les circonstances, sont imputables à la société (art. 55 CO), et ces mêmes organes ont de facto une position dominante au sein de l’entreprise, qui permet de les assimiler à des sociétaires, alors qu’ils ne sont ni des actionnaires ni des proches de ceux-ci. La Haute Cour rappelle que si la prestation peut être une renonciation à un produit (« Grundatdbestand»), elle peut également, conformément à la jurisprudence, prendre la forme particulière (« Sonderatbestand ») d’un manque à gagner provenant de la violation du devoir de fidélité qui incombe aux employés (art. 321a CO), aux fondés de procuration et mandataires commerciaux (art. 464 CO), aux membres du conseil d’administration d’une SA et, par extension, aux organes de fait. Lorsque la société permet à ces personnes de faire des affaires, elle est tenue d’exiger de celles-ci qu’elles lui restituent les gains réalisés. Si elle s’en abstient, elle octroie alors, de fait, une PAA à ces personnes, pour autant que les autres conditions soient remplies.

Ainsi, comme il n’est pas contesté que X. Sàrl n’a perçu aucune rémunération pour ses trois promotions immobilières, le TF conclut que, bien qu’AY. n’était ni salarié ni associé gérant de la recourante, il était organe de fait, au vu de l’étendue des pouvoirs conférés par sa sœur associée gérante. C’est pourquoi il convient de réintégrer l’entier du gain réalisé par AY. sur ces trois projets au bénéfice imposable 2008 de X Sàrl. S’agissant de F et G, les indices étant insuffisants pour démontrer la PAA, les juges de Mon Repos ont annulé la reprise de bénéfice les concernant.

TF 2C_594/2014

2014-2015

Art. 29 al. 2 Cst. ; 112 LIFD ; 39 LHID

Vente d’un immeuble d’une SA à un actionnaire ; valeur prise en compte pour l’impôt sur le bénéfice ; refus de tenir compte d’une expertise fournie par les contribuables.

Une société anonyme vend à son actionnaire un bien immobilier. L’AFC, s’appuyant sur son évaluation de la valeur vénale du bien en question, a considéré que la société avait procédé, par cette opération, à une distribution dissimulée de bénéfice à son actionnaire. Alors que la recourante a produit, dans la procédure, une expertise visant à contester l’évaluation faite par l’administration, le Tribunal cantonal vaudois n’en a pas tenu compte. Il n’a, par ailleurs, fait aucune mention, dans ses motivations, des raisons qui l’ont poussé à écarter ladite expertise. De ce fait, le TF conclut que l’instance précédente a violé le droit d’être entendu de la recourante. Il rajoute que si l’administration fiscale, pour fixer la valeur vénale, venait à verser des pièces du dossier de l’actionnaire dans le dossier fiscal de la recourante, alors elle devra faire en sorte que le droit d’être entendu de la recourante soit respecté.

TF 2C_598/2014

2014-2015

Art. 58 al. 1 lit. b 5e tiret LIFD

Prestation appréciable en argent ; expertise de la valeur vénale d’un ensemble d’appartements.

Une société de capitaux vend à une société sœur un lot d’appartements en dessous de sa valeur vénale. La société recourante conteste avoir effectué une prestation appréciable en argent en remettant en cause le contenu et la méthodologie des expertises utilisées par l’autorité fiscale pour déterminer la valeur vénale de ses biens. Le TF rappelle, en premier lieu, qu’il ne peut remettre en cause la validité d’une expertise que si l’expert n’a pas répondu aux questions posées, ou si ses conclusions sont contradictoires ou si, encore, l’expertise est entachée de défauts, reconnaissables même sans connaissances spécifiques.

De prime abord, la société recourante souhaiterait que l’on utilise, pour l’évaluation, la méthode des prix comparables. Cependant, elle échoue à démontrer en quoi le bien servant de référence présente des caractéristiques similaires à son propre bien. Enfin, elle conteste le contenu même des expertises et suggère, alternativement, sa propre méthode d’évaluation. Là, à nouveau, sa démonstration échoue, en n’utilisant pas, d’une part, les faits établis par l’instance précédente pour procéder à ses calculs et, d’autre part, en ne démontrant pas la pertinence de sa méthode, respectivement l’inadéquation des expertises antérieures.

Pour finir, le TF conclut que l’usage du pouvoir d’appréciation des autorités, afin de s’écarter de la valeur vénale établie par l’expert, ne constitue pas un cas d’appréciation arbitraire des faits.

TF 2C_835/2013

2014-2015

Art. 24 al. 1 lit. b LHID

Date déterminante pour l’impôt sur le bénéfice dans un contrat de vente immobilier.

Le 26 novembre 2008, une SA vend un bien faisant partie de son parc immobilier. Contractuellement, il est décidé que la jouissance et le transfert des risques auront lieu le 1erjanvier 2009, alors que la délivrance, c’est-à-dire l’inscription au registre foncier, s’opérerait le 5 janvier 2009. Considérant que la vente est effective au moment de la signature du contrat, l’administration fiscale soumet la plus-value à l’impôt sur le bénéfice en 2008. La société contribuable fait valoir quant à elle que la date de l’inscription au registre foncier en 2009 est pertinente.

S’appuyant sur la jurisprudence en matière de vente d’immobiliers commerciaux, le TF applique la « Soll-Methode » qui préconise que la date pertinente pour la réalisation du bénéfice d’aliénation est celle de la conclusion du contrat à condition que son exécution ne paraisse pas incertaine. Le TF examine si, dans le cas d’espèce, un risque de non-exécution du contrat est présent. Sachant que, d’une part, il subsiste toujours dans le contrat de vente un risque intrinsèque (garantie pour défaut et pour éviction) que, d’autre part, le laps de temps très court entre la conclusion, le 26 novembre 2008, et la délivrance, le 5 janvier 2009, réduit considérablement le risque de la non-exécution du contrat et qu’enfin la recourante a reçu du Crédit Suisse, le 16 novembre 2008, une promesse de paiement ferme permettant de fait d’exclure un éventuel défaut de paiement, le TF conclut que la transaction était certaine dès la conclusion du contrat en 2008 et donc imposable durant cette même année.

TF 2C_583/2014

2014-2015

Art. 12 al. 3 LHID ; 216 al. 3 de la loi sur les contributions du canton de Zurich du 8 juin 1997 (StG/ZH ; RS 631.1)

Report de l’imposition des gains immobiliers en cas d’aliénation de l’habitation servant au propre usage suivi, dans les 5 ans, d’un avancement d’hoirie avec réserve d’usufruit.

En 2003, les époux C acquièrent un terrain sur lequel ils font construire un immeuble avec 5 appartements. Ils en vendent trois et en gardent deux pour leur usage personnel. En 2007, ils déménagent dans leurs appartements et vendent l’immeuble qui leur servait jusqu’alors de domicile. Consécutivement à cette vente, ils requièrent et obtiennent le report de l’imposition des gains immobiliers. Cependant, en 2011, moins de 5 ans après avoir emménagé, ils cèdent la propriété des deux appartements en question à leur fille à titre d’avancement d’hoirie tout en en conservant l’usufruit. Dans ces circonstances, l’administration fiscale zurichoise révoque le report d’imposition accordé au titre de l’art. 12 al. 3 lit. e LHID au motif que le délai de détention de 5 ans minimum, imposé par la circulaire cantonale du 19 novembre 2001, a été violé par les contribuables, alors même que l’art. 12 al. 3 lit. a LHID accorde également le report d’imposition du gain immobilier, mais cette fois, en cas d’avancement d’hoirie (art. 12 al. 3 lit. a LHID).

Pour l’instance cantonale, un fait justifiant un report d’impôt (ici : aliénation de l’habitation servant au propre usage) doit obligatoirement être remplacé par un autre fait de même nature, faute de quoi le report d’impôt ainsi accordé est révoqué. Le TF réfute cette interprétation du différé d’impôt, en expliquant que ce n’est qu’en cas de mutation imposable, c’est-à-dire le dernier changement de propriétaire qui ne permet plus de bénéficier du report d’imposition, que l’impôt sur les gains immobiliers est prélevé. Par conséquent, selon le TF, il est cohérent de pouvoir solliciter tout au long de sa vie, pour des motifs différents, un report d’imposition créant, de fait, une chaîne de différés d’impôt. C’est pourquoi l’exigence de lien entre les différents reports souhaitée par l’instance précédente ne peut être retenue.

Enfin le TF rappelle que le report d’imposition du couple n’aurait pu être levé que s’il y avait eu une interruption de l’usage propre des biens. Ainsi l’utilisation par des tiers exclut d’emblée l’octroi du différé de l’art. 12 al. 3 lit. e LHID, « à moins qu’il ne s’agisse que d’une courte période, par exemple d’une interruption temporaire ».

TF 2C_589/2014

2014-2015

Art. 12 LHID ; 128ss Steuergesetzes des Kantons Bern du 21 mai 2000 (StG/BE RS 661.11)

Coût d’acquisition pour l’impôt sur les gains immobiliers ; certificat d’insuffisance de gage.

A achète, lors d’une procédure d’exécution forcée, des parcelles de la famille B sur lesquelles A était elle-même créancière gagiste. La vente ne couvrant pas la totalité des dettes, l’office des poursuites lui remit un certificat d’insuffisance de gage. Un an après son acquisition, A vend une partie des terrains et fait valoir son certificat d’insuffisance de gage comme coût d’acquisition dans le calcul de l’impôt sur les gains immobiliers. La Haute Cour rappelle que cet impôt est exclusivement cantonal. C’est pourquoi l’art. 12 LHID définit seulement le cadre de l’impôt et laisse les cantons libres de développer leur propre pratique, notamment en matière de définition du gain immobilier.

Cependant, dans le contexte de l’exécution forcée, la prise en compte de l’insuffisance de gage violerait, selon le TF, le principe de continuité de l’imposition, et c’est bien plus le prix d’adjudication qui fait foi tant pour le prix de vente du vendeur que pour le coût d’acquisition de l’acheteur. Tenir compte de ce certificat introduirait alors une césure entre le prix de vente et le coût d’acquisition qui ne pourrait être justifiée ni par des impenses augmentant la valeur du bien immobilier (art. 142 al. 1 StG/BE) ni par une forme spéciale de dépense expressément instaurée dans la législation fiscale bernoise.

Le TF conclut que la non prise en compte du certificat d’insuffisance de gage représente une exception véritable et objective de l’imposition, que le législateur bernois a volontairement exclue et que, par ailleurs, le droit harmonisé ne définissant pas la notion de gain immobilier, aucune violation de l’art 12 al. 1 LHID n’est constatée.

TF 2C_674/2014

2014-2015

Art. 51 al. 2 de la loi fiscale valaisanne du 10 mars 1976 (RSVS 642.100)

Travaux de rafraîchissement sur un immeuble ; qualification d’impenses.

Suite à un « coup de frais » donné à leur bien immobilier, deux sœurs valaisannes réussissent enfin à le vendre. L’art. 12 al. 1 LHID définissant le gain immobilier comme la différence entre le prix de vente et les coûts d’investissement en l’occurrence le prix d’acquisition augmenté des impenses, elles souhaitent faire déduire le coût des travaux de la plus-value immobilière. Ces concepts n’étant pas détaillés par la LHID, les cantons se doivent de suivre le principe des conditions comparables (« Kongruenzprinzip »).

Ainsi, lors de la détermination du gain imposable, tant les plus-values matérielles que juridiques, apportées pendant la durée de détention du bien immobilier, doivent être prises en compte. C’est pourquoi afin de coordonner l’étendue de la notion d’impenses avec celle des dépenses d’entretiens déductibles de l’impôt sur le revenu, il a été tranché que lorsque des travaux n’avaient pour fonction que de maintenir la valeur de l’immeuble privé, ils seraient qualifiés de frais d’entretien. Par contre lorsqu’ils augmentent cette même valeur, ils sont alors considérés comme des impenses, c’est-à-dire des dépenses de plus-value non déductibles.

Dans le cas d’espèce, le TF considère que l’instance précédente s’est fourvoyée en s’appuyant sur le simple motif que l’ensemble des travaux avait amélioré la qualité de l’appartement en lui conférant une valeur supplémentaire certaine pour qualifier le changement de sanitaires et de cuisine de dépenses de plus-value. Car la distinction entre frais d’entretien et d’amélioration de la fortune étant difficile, il faut systématiquement « procéder à la comparaison de la valeur et de la qualité du standard des installations existantes par rapport à la valeur et la qualité du standard des installations neuves ». Comme l’arrêt attaqué ne contient pas de tels descriptifs, il est renvoyé à l’instance précédente.

TF 2C_780/2014

2014-2015

Art. 18 CO ; 12 al. 3 lit. a LHID ; 106 StG/BS

Report d’imposition en cas d’avancement d’hoirie ; qualification des prestations de l’assurance incendie en impenses.

Afin de transférer à l’un de ses enfants la maison familiale, un couple conclut un contrat intitulé « contrat de vente (« avancement d’hoirie soumis à rapport ») (« Kaufvertrag (ausgleichungsbedürftiger Erbvorbezug »). Si pour l’administration fiscale ce contrat est qualifié de contrat de vente entraînant la perception de l’impôt sur les gains immobiliers, pour les recourants il s’agit là d’un contrat d’avancement d’hoirie permettant un report d’imposition. A cet effet, les recourants produisent comme moyen de preuve le testament subséquent. Le TF constate que contrairement aux règles d’interprétation en matière de contrat, l’instance inférieure n’a pas recherché la réelle et commune intention des parties (interprétation subjective) et a procédé directement à une interprétation objective, violant ainsi la systématique voulue par l’art. 18 CO. Par ailleurs, les considérants ne justifiant pas cette transgression des principes d’interprétation (art. 112 al. 1 lit. b BGG), les recourants ne sont pas en mesure de comprendre et de défier l’argumentation de l’instance cantonale dans leur recours au Tribunal fédéral.

C’est pourquoi le TF renvoie la cause devant l’instance inférieure afin qu’elle établisse les faits en recherchant la réelle et commune volonté des parties. Cependant, si, suite à l’établissement correct des faits, le contrat venait à être qualifié de vente et non d’avancement d’hoirie, le TF s’interroge sur le calcul de l’impôt sur les gains immobiliers et plus particulièrement sur le statut de l’indemnité payée par l’assurance « Bâtiment » pour la reconstruction de l’immeuble lorsque celui-ci fut incendié quelque année plus tôt. S’appuyant sur diverses législations cantonales ainsi qu’un arrêt du tribunal administratif du canton de Saint-Gall, l’instance précédente précise la notion d’impenses contribuant à l’augmentation de la valeur du bien immobilier en y excluant toutes les plus-values qui sont nées sans le concours de l’aliénateur lui-même ou de ses propres ressources.

Par conséquent, les frais pris en charge par un tiers, ici l’assurance incendie, n’entrent pas dans la définition des impenses contribuant à l’augmentation de la valeur du bien immobilier selon l’art. 106 al. 3 StG/BS. Les recourants, quant à eux, récusent une telle exégèse. Malgré cela, le TF réfute chacun de leurs arguments, car, bien que les primes soient une utilisation en amont des propres ressources des recourants pour couvrir les cas de reconstruction du bâtiment, elles ont, selon l’art. 31 al. 2 lit. b StG/BS, déjà été déduite de l’impôt sur le revenu et ne sont donc pas déductibles à nouveau. Les recourants n’arrivant pas à démontrer l’arbitraire de la position de l’instance précédente, le TF conclut que l’indemnisation de l’assurance ne contribue pas à l’augmentation, mais au maintien de la valeur de l’immeuble puisqu’elle doit uniquement servir à la reconstruction à l’identique du bâtiment.


 

TF 2C_1048/2013

2014-2015

Art. 16 al. 1 et 3 et 18 al. 1 et 2 LIFD

Qualification en tant que commerçant professionnel d’immeuble ou gestion de la fortune privée.

Le recourant A construit en 2010, sur des terrains acquis il y a 16 ans, un immeuble composé de 6 appartements. En 2011, il en vend 4, en garde un pour son usage personnel et un autre reste invendu. Les autorités fiscales schwytzoises considèrent que A est un commerçant professionnel d’immeubles et que les gains réalisés à ce titre doivent être imposés comme revenu de l’activité indépendante.

En examinant la situation de A, le TF rejette l’avis de l’administration fiscale, car rien n’indique dans son comportement que celui-ci exerce une activité de commerçant professionnel d’immeubles. Il n’a effectué aucun achat ou vente de biens immobiliers autre que ceux faisant l’objet du litige, son activité n’est pas liée au domaine de l’immobilier, et il a détenu les terrains en question pendant 16 ans sans qu’aucune activité commerciale n’y soit observée. Le TF relève que, contrairement à l’opinion de l’instance précédente, on ne peut retenir la présence d’un caractère systématique des agissements et le fait qu’il ait fait appel à des spécialistes, car il s’agit là d’une démarche commune à n’importe quel contribuable construisant une maison.

Par ailleurs, l’optimisation de la surface constructible ne change en rien les conclusions de la Haute Cour « puisqu’une personne privée doit également pouvoir faire un usage optimal de son bien dans le cadre des règles légales ». La qualification de commerçant professionnel d’immeubles est dès lors rejetée.

TF 2C_1079/2013

2014-2015

Art. 18 al. 2 et 21 LIFD ; 12 LHID

Traitement fiscal de l’octroi d’un droit de superficie ; valeur à prendre en considération pour le calcul du revenu imposable.

Deux raisons individuelles propriétaires de plusieurs immeubles sis dans le canton de Zurich octroient à une société anonyme un droit de superficie indépendant et durable pour une durée de 99 ans. Les titulaires du droit de superficie paient une indemnité unique de CHF 92 millions et un montant annuel. Est en particulier débattue la qualification de ces montants en tant que revenu immobilier (art. 21 LIFD) ou en tant que gain en capital (art. 18 al. 2 LIFD).

En application de la théorie de la « consommation de la substance » (« Kriterum des Substanzverzehrs»), il faut admettre que l’octroi d’un droit de superficie représente non pas l’octroi d’un droit d’usage sur l’immeuble, mais bien plus un abandon de la substance de cet immeuble. En conséquence, il y a lieu de traiter cette opération comme un gain en capital. Au niveau fédéral, c’est la différence entre la valeur comptable et le montant de la transaction qui est soumise à l’impôt sur le revenu.

TF 2C_1204/2013

2014-2015

Art. 16 al. 1 et 3 et 18 al. 1 et 2 LIFD

Qualification en tant que commerçant professionnel d’immeuble ou gestion de la fortune privée.

Le couple A vendit en 1988 des parcelles situées sur une colline faisant partie de leur exploitation agricole sise dans le canton de Schwyz, sur laquelle des maisons en terrasse furent réalisées. En 1993, grâce à l’argent de la vente précédente, le couple fit construire sur la parcelle principale 5 maisons familiales avec un parking souterrain qui furent revendues à la société immobilière K. SA en 2009. Considérant que le couple était des commerçants professionnels d’immeubles, les autorités fiscales qualifièrent cette vente de revenu de l’activité lucrative indépendante alors que les contribuables estimaient eux que ces biens représentaient un gain en capital de la fortune privée.

Le TF rappelle qu’en matière d’immobilier la simple gestion qui se caractériserait en une administration des contrats de location, même d’un patrimoine immobilier conséquent, géré de manière professionnelle, avec la tenue d’une comptabilité, n’est jamais considérée comme une activité lucrative indépendante. Ce qui distingue cette administration du patrimoine avec le commerçant professionnel d’immeubles est la volonté de celui-ci de réaliser un profit lors de l’acquisition et de la vente d’un bien immobilier. Par conséquent cette activité est qualifiée de professionnelle lorsqu’elle est entièrement tournée vers l’achat et la vente de biens immobiliers.

Le TF considère que le fait que, des années auparavant, les contribuables aient vu leur activité être qualifiée d’activité lucrative indépendante n’est pas déterminant pour la qualification de la situation actuelle, car seules les tâches menées par les assujettis durant la période fiscale examinée comptent.

Ainsi, les recourants ayant systématiquement réinvesti depuis 1988 leur bénéfice pour financer d’autres projets immobiliers, qu’ils ont volontairement surdimensionnés dans le but de les vendre un jour (construction de 5 maisons) et le fait que l’ancienne activité de M. A (agriculteur) ne soit pas très éloignée de celle de commerçant, permet au TF de se ranger à l’avis de l’administration cantonale et de qualifier les contribuables de commerçants professionnels d’immeubles.

TF 2C_142/2014

2014-2015

Art. 33 et 33a LIFD ; 9 al. 2 LHID

Déduction des intérêts hypothécaires payés en lien avec un immeuble en propriété du concubin.

A et B vivent en concubinage dans un immeuble en propriété exclusive de B qui a été financé par un prêt bancaire. Le contrat de prêt en question, signé par A et B, prévoit un gage immobilier sur l’immeuble et une responsabilité solidaire de A et B. En 2009, A s’acquitte de 40% des intérêts hypothécaires (CHF 12'275.-) et l’administration fiscale du canton d’Argovie retient qu’il s’agit d’un loyer qui n’est pas déductible du revenu de A. Invoquant la déduction des intérêts passifs privés au sens de l’art. 33 al. 1 lit. a LIFD, A obtient gain de cause au Tribunal fédéral.

Celui-ci retient en particulier que la responsabilité solidaire prévue par le contrat permet de considérer que la dette hypothécaire est une « propre dette » de A permettant l’application de la déduction prévue à l’art. 33 al. 1 lit. a LIFD des montants payés par A (même si A n’est pas propriétaire de l’immeuble sur lequel la dette hypothécaire repose).

TF 2C_148/2014

2014-2015

Art. 6 al. 3 3e phrase LIFD ; 3 LHID

Excédents de charges d’immeuble sis à l’étranger.

Un couple de résidents genevois souhaite voir leur revenu imposable réduit des charges dépassant le rendement de leur propriété sise en France. Si, selon la jurisprudence, l’art 6 al. 3 3ephrase LIFD exclut de l’assiette imposable en Suisse, les pertes subies à l’étranger, y compris celles portant sur les immeubles, elle n’est pas explicite quant au traitement des excédents de charges.

Le TF rappelle que « du moment que l’assujettissement fondé sur un rattachement personnel en Suisse ne s’étend pas aux rendements (positifs) des entreprises, des établissements stables et des immeubles situés à l’étranger, il est cohérent que les résultats négatifs ne puissent – sous réserve des pertes des établissements stables (art. 6 al. 3 2e phrase LIFD) – être déduits lors de la détermination de l’assiette imposable en Suisse, même si cela semble déroger au principe de l’imposition du revenu global net. ».

Ainsi, les rendements négatifs de la fortune, tels que les excédents de charges, sont compris dans la notion de « autres hypothèses » de l’art. 6 al. 3 3e phrase LIFD et ne peuvent, par conséquent, être pris que dans le calcul du revenu déterminant le taux d’imposition. La présente décision confirme ainsi les jurisprudences récentes sur cette problématique (cf. ATF 140 II 141 et ATF 140 II 157).

TF 2C_153/2014

2014-2015

Art. 34 lit. d LIFD ; 9 al. 3 et al. 4 LHID ; 39 al. 2 et 41 al. 1 lit. d de la loi sur les contributions du canton d’Argovie du 15 décembre 1998 (StG/AG ; RS 651100)

Qualification en tant que frais d’entretien ou impenses ayant contribué à l’augmentation de la valeur du bien immobilier ; dépenses en lien avec les mesures visant à augmenter l’efficience énergétique des bâtiments.

Les époux A ont acquis, en 1998, une maison avec grange et écurie attenante. Suite à une série de travaux effectués en 2004, ils aménagèrent, en 2010, définitivement les combles en chambre avec dressing et salle de bain. Lors de cette dernière rénovation, ils remplacèrent également la toiture et la charpente centenaire et mirent en place une isolation thermique dernière génération. Ils demandent la déduction de l’ensemble de ces travaux en les déclarant en tant que frais d’entretien (art. 39 al. 2 1rephrase StG/AG) et dépenses visant à diminuer les pertes énergétiques (art. 39 al. 2 2e phrase StG/AG).

Le TF refuse la déduction des frais d’entretien au motif que ces dépenses visent à valoriser le bien immobilier et non à maintenir sa valeur (art. 41 al. 1, lit d StG/AG). Les juges de Mon Repos constatent que les dépenses entreprises pour l’aménagement des combles offrent une surface habitable plus grande à la famille propriétaire de l’immeuble. Cette superficie ainsi acquise doit donc être qualifiée de nouvelle construction, car, selon la jurisprudence du TF « la transformation et le changement d’affectation d’un immeuble seront considérés être une fabrication si l’ampleur de la « rénovation » est équivalente à une construction nouvelle ». Les combles étant qualifiés de constructions nouvelles, les dépenses d’isolation thermique et de réfection de la toiture ne sont pas déductibles, car le but visé par cette réglementation est d’inciter aux changements des installations thermiques obsolètes afin d’améliorer l’efficience énergétique des bâtiments, mais pas d’en accroître la possibilité d’utilisation.

TF 2C_186/2014

2014-2015

Art. 18, 25 et 27 al. 1 LIFD ; 8 LHID ; 14 al. 1 et 23 al. 2 let. b de la loi sur les contributions du canton du Valais (LI VS)

Qualification en tant que hobby ou activité lucrative.

En plus de son activité lucrative dépendante, le recourant exploite une petite ferme. Si, jusqu’alors, cette activité secondaire était soit légèrement bénéficiaire ou déficitaire, en 2008 elle enregistra une perte de CHF 20’815.50, que le contribuable souhaita déduire de son revenu imposable. Cependant, l’administration fiscale refuse la déduction de la perte au motif qu’il s’agissait d’un hobby. La limite permettant de qualifier un hobby en une activité lucrative indépendante tient, selon le TF, en l’adoption d’un comportement économique au sens d’une gestion visant à réaliser un profit. Au vu de l’organisation et de la situation financière actuelle de la ferme, et bien que des investissements dans les bâtiments, notamment l’agrandissement de la grange, furent consentis, aucun signe ne permet de constater un déploiement de l’activité agricole du contribuable vers une orientation commerciale. Toutefois, les juges de Mon Repos précisent que rien n’empêche de réévaluer la qualification en activité lucrative indépendante ces prochaines années si l’assujetti venait à orienter de manière décisive son exploitation vers la réalisation de profit.

TF 2C_266/2015

2014-2015

Art. 18 al. 4 LIFD et 2 al. 2 lit. a–d LDFR

Bénéfice provenant de l’aliénation d’un immeuble agricole.

Un couple d’exploitants agricoles vend un terrain situé intégralement sur une zone à bâtir et s’engage conventionnellement à raser les bâtiments existants sur cette parcelle. Les recourants souhaitent, au vu de la nature agricole du bien, pouvoir bénéficier de l’exception figurant à l’art. 18 al. 4 LIFD, afin de circonscrire l’imposition sur le revenu aux seuls amortissements effectués sur ce bien.
Cependant, suite à l’ATF 138 II 32, ce privilège est exclusivement réservé au terrain rentrant dans le champ d’application de la LDFR. Ici, le TF se range à l’avis de l’instance précédente en considérant que le terrain en question ne possède pas les caractéristiques exigées à l’art. 2 al. 2 lit. a–d LDFR et ne peut dès lors pas bénéficier de l’art. 18 al. 4 LIFD.

TF 2C_309/2014*

2014-2015

Art. 3 al. 3 LHID ; 9 LIFD

Assujettissement économique du conjoint non propriétaire dans un canton en raison de la propriété immobilière de l’autre conjoint.

A et B forment un couple marié domicilié dans le canton de Zurich. B est propriétaire (unique) d’un immeuble dans le canton de Saint-Gall. Au décès de A, ses héritiers font valoir qu’ils ne sont pas assujettis économiquement dans le canton de Saint-Gall. Dû au fait que l’imposition en commun est prévue par le droit fédéral, qu’elle ressort d’une interprétation historique de la loi, que l’art. 3 al. 3 LHID ne prévoit pas d’exception, qu’une imposition séparée compliquerait la procédure de taxation des époux dans la mesure où les autorités de taxation devraient déterminer les relations économiques entre les époux (et leur statut matrimonial) lors de chaque taxation, le Tribunal fédéral retient que le rattachement économique d’un des époux dans un canton crée un assujettissement également pour l’autre époux.

TF 2C_325/2014

2014-2015

Art. 3 al. 3 OPP3 et 38 LIFD

Retrait anticipé de fonds de la prévoyance liée A (3e pilier A) ; amortissement du crédit hypothécaire.

Un couple retire, en mars et avril 2011, la somme de CHF 88'154.95 de leur 3e pilier A dans le but d’amortir le crédit hypothécaire grevant leur résidence principale. Cependant, les autorités fiscales constatent qu’en décembre 2011 les contribuables ont réaugmenté leur hypothèque de CHF 40'000.-. Devant les instances précédentes, les contribuables ont expliqué que cette augmentation était due à de futurs travaux de rénovation dans leur logement.

Le TF rappelle que pour bénéficier du taux préférentiel appliqué aux prestations de prévoyances, il faut que le retrait anticipé d’avoir du 3e pilier A réponde au but de prévoyance fixé à l’art. 3 al. 3 OPP3. En amortissant dans un premier temps leur hypothèque pour, dans le même temps ou peu de temps après, la réaugmenter ne correspond pas, selon le TF, à l’esprit de la notion « remboursement du crédit hypothécaire » prévue à l’art. 3 al. 3 lit. c OPP3.

TF 2C_370/2014

2014-2015

Art. 16 al. 3 et 18 al. 2 LIFD ; 8 al. 2 LHID

Transformation d’une RI en Sàrl et appartenance d’une participation dans une coopérative (transformée en SA par la suite) à la fortune privée ou fortune commerciale ; traitement fiscal du gain en capital.

La contribuable acquiert une part dans une coopérative de logement (respectivement dans une société immobilière) sans l’inclure dans les comptes de la raison individuelle qu’elle exploite alors. Après la transformation de son exploitation en Sàrl, elle cède cette participation et réalise un gain de CHF 683'755.-. L’autorité fiscale valaisanne, retenant l’existence d’un gain sur un élément de la fortune commerciale, le soumet à l’impôt sur le revenu.

La recourante, quant à elle, fait valoir qu’il s’agit d’un gain en capital privé exonéré de l’impôt sur le revenu. Sur le fond, la Haute Cour considère qu’à supposer que les titres faisaient partie intégrante de la fortune commerciale, alors la recourante a fait clairement savoir aux autorités fiscales par acte concluant lors de sa transformation en Sàrl, que d’une part, elle cessait son activité lucrative indépendante et que, d’autre part, les titres mis en cause n’étaient pas repris par la nouvelle société comme le démontre l’avis de transformation publié à la FOSC.

Ainsi le TF conclut que les participations faisaient partie intégrante de la fortune privée de la recourante au plus tard lors de la transformation. De ce fait, au moment de l’aliénation, le gain généré doit être qualifié de gain en capital non imposable (art. 16 al. 3 LIFD). Enfin, la question du prélèvement de l’impôt sur les gains immobiliers reste ouverte dans la mesure où la décision attaquée ne traite pas de cet impôt spécial. La cause est donc renvoyée à l’instance inférieure pour une nouvelle décision.

TF 2C_585/2014

2014-2015

Art. 16 al. 1 LIFD et 127 al. 3 Cst.

Traitement du paiement mensuel de la charge hypothécaire prévue par le jugement civil en cas de séparation.

Un contribuable séparé laisse à son épouse le droit d’utiliser l’immeuble dont il est propriétaire. Son épouse s’engage à s’acquitter d’un «paiement mensuel du montant de la dette hypothécaire » de CHF 1'652.10. L’administration fiscale considère cette créance comme une partie intégrante du revenu du propriétaire de l’immeuble, ce que conteste le contribuable.

Selon l’art. 16 al. 1 LIFD et la jurisprudence constante du TF, un revenu est imposable lorsqu’il est réalisé, c’est-à-dire lorsque le contribuable acquiert une prétention dont l’exécution ne paraît pas incertaine. Bien que le TF admette que la qualification juridique de la créance, dans le jugement civil, est peu précise, cette imprécision n’influence pas le fait que, dans tous les cas de figure, la somme bénéficie au contribuable soit sous la forme du paiement des intérêts hypothécaires ou par une augmentation de ses liquidités. Le jugement civil lui octroie, bel et bien, une prétention ferme qu’il peut faire valoir en justice. Si celui-ci choisit de renoncer à son exigibilité, cela est sans influence sur la détermination de l’assiette de l’impôt sur le revenu. En conséquence, le montant de CHF 1'652.10 payé par son épouse qui utilise son immeuble est bien imposé auprès du contribuable propriétaire de l’immeuble.

TF 2C_605/2014

2014-2015

Art. 20 al. 1 lit. c LIFD et 16 al. 1 lit. c de la loi fiscale du canton du Valais du 10 mars 1976 (LF-VS)

Prestations appréciables en argent en cas de vente à l’actionnaire d’un immeuble à un prix en dessous de sa valeur vénale et de non-paiement d’un loyer.

En 2007, les contribuables font l’acquisition de la maison dont ils étaient, depuis 2004, les locataires pour la somme de CHF 400'000.-. Bien que ce bien immobilier fut la propriété d’une SA, fondé en 2001, c’est les contribuables qui financèrent, en 2003, l’achat du terrain et les frais de construction de l’immeuble par le biais d’un crédit. En contrepartie, la SA inscrivit à son bilan une créance en leur faveur du montant de son investissement.
En 2004, le contribuable et son épouse prirent le contrôle de la SA. Suite à l’examen des comptes de la société en 2007, l’administration fiscale valaisanne considéra que la SA avait octroyé une prestation appréciable en argent à ses actionnaires. L’avantage ainsi concédé comprenait d’une part, la diminution du gain lors la vente de la maison à un prix en dessous de sa valeur de marché (CHF 550'00.-) et d’autre part, la non-perception des loyers 2007 du bien dont les actionnaires étaient les locataires (loyers selon les conditions normales du marché immobilier local CHF 18'000.-). S’agissant de l’immeuble, si les contribuables ne contestent pas la valeur vénale retenue par l’administration fiscale, ils expliquent le prix de vente, dans un premier temps, par le fait qu’ils détiennent une créance envers la société.

Le TF se range à l’avis de l’instance précédente, considérant que l’inscription d’une créance au bilan de la SA en faveur de l’actionnaire contribuable ne justifie pas une réduction du prix de vente. Dans un second temps, les contribuables souhaitent légitimer cette différence de prix par l’abandon de leur créance contre la SA. Là également, le TF rejette l’argument, car le simple fait que la créance ne figure plus au bilan 2007 de la SA ne prouve en rien qu’elle ait été effectivement abandonnée par le contribuable. D’autant que si cet abandon avait eu lieu, il aurait dû être déclaré et imposé au titre de bénéfice de la SA, ce que les contribuables sont incapables de démontrer. Ainsi, la non-visibilité de la créance dans les comptes ne constitue pas en soi un moyen de preuve valable de son abandon.

Notre Haute Cour conclut donc que la différence entre le prix d’acquisition (CHF 400'000.-) et la valeur du marché (CHF 550'000.-) représente bien une prestation appréciable en argent de CHF 150'000.- en faveur de l’actionnaire. S’agissant des loyers non perçus, une prestation appréciable en argent existe lorsque la société de capitaux perçoit un loyer insuffisant de son actionnaire locataire. L’évaluation de la valeur économique réelle du loyer doit se faire en fonction des éléments caractéristiques des locaux et de l’état du marché immobilier et non pas, comme l’a fait l’autorité cantonale, selon une contre-prestation permettant à la SA de couvrir ses frais et de réaliser un bénéfice approprié. De la valeur locative économique réelle (CHF 18'000.-), il faut déduire les contre-prestations effectuées par le contribuable locataire telles que notamment le paiement des intérêts hypothécaires ou les frais d’entretien. Les autorités cantonales les ayant évaluées à CHF 12'000.-, le TF constate donc ici une prestation appréciable en argent supplémentaire de CHF 6'000.-.

TF 2C_627/2014

2014-2015

Art. 25 LIFD et 211 aLIFD

Activité lucrative indépendante ; report de pertes.

Un couple souhaite déduire de ses revenus de l’année 2007 les pertes issues de la vente forcée, en 2006, de biens immobiliers. Cependant, l’instance genevoise précédente a nié cette déduction au motif que les contribuables, et par là principalement le mari, n’exerçaient plus d’activité lucrative indépendante durant la période fiscale 2007.

Les recourants admettant eux-mêmes n’avoir eu, en 2007, aucune activité lucrative indépendante, fait corroboré par leur déclaration de revenu 2007 et, n’ayant par ailleurs pas invoqué la poursuite ou la reprise d’une autre activité indépendante durant cette même période, le TF rejoint, donc, conformément à l’art. 211 aLIFD et sa jurisprudence, les conclusions de l’instance inférieure en refusant le report de pertes.

TF 2C_71/2014

2014-2015

Art. 26 LIFD ; 29 Cst. ; 327a CO ; 9 et 73 LHID

Déduction d’une chambre privée utilisée à des fins professionnelles.

Trouvant les infrastructures scolaires insuffisantes, un couple d’enseignants genevois utilise une pièce de leur appartement pour effectuer diverses tâches professionnelles. Le TF rappelle que « pour admettre une telle déduction, l’exercice des tâches sur le lieu de travail ne doit pas être possible ou à tout le moins ne pas être raisonnablement exigible ». Ainsi, pour notre Haute Cour, lorsque le contribuable choisit d’utiliser une partie de son domicile pour exercer son activité professionnelle alors qu’il bénéficie d’une place de travail, aucune déduction n’est permise.

Enfin, les juges de Mon Repos soulignent que contrairement aux salariés du secteur privé et à beaucoup de leurs collègues de la fonction publique qui doivent travailler sur un site précis selon des horaires prédéterminés, les enseignements sont eux « privilégiés » puisqu’ils sont libres de travailler à la maison. Les recourants ne pouvant démontrer l’impossibilité d’effectuer leurs tâches dans les locaux mis à disposition par l’instruction publique, la déduction ne peut pas être accordée.

TF 2C_892/2014

2014-2015

Art. 21 al. 1 lit. b LIFD ; 7 LHID

Constitution d’une servitude personnelle irrégulière au sens de l’art. 781 CC ; transfert de propriété avec réserve d’usage.

Un contribuable acquiert un immeuble sis à Neuchâtel et consent à un des vendeurs une servitude de jouissance qui est portée en déduction du prix de vente (CHF 2’000'000.- moins CHF 450'000.-). Le service des contributions considère qu’il s’agit d’un contrat de bail et impose un loyer de CHF 45'000.- (CHF 450'000.- pour 10 ans).

Le Tribunal fédéral retient que lorsqu’un transfert de propriété d’immeuble et la constitution d’une servitude ont lieu simultanément (autrement dit lorsqu’il y a transfert de propriété avec réserve d’usage), l’immeuble ne change pas de propriétaire libre de toute charge pour qu’ensuite seulement, l’acquéreur en rétrocède un droit d’usage contre un montant compensé avec le prix de vente. Du point de vue des droits réels limités, l’immeuble est bien plutôt transféré uno actu déjà grevé du droit d’usage stipulé et à une valeur inférieure (« deductio servitutis»). Le titulaire de la servitude personnelle est alors imposé pour la durée du rapport de servitude sur la valeur d’usage de l’objet en application de l’art. 21 al. 1 let. b LIFD.

En effet, l’acquisition d’une servitude personnelle (droit de jouissance) par le versement d’un capital au propriétaire est une acquisition gratuite, en ce sens que le bénéficiaire de cette jouissance ne fait plus de prestations périodiques après ce versement en capital.

En l’occurrence, il ne saurait y avoir une imposition d’un rendement locatif auprès du propriétaire.

TF 2C_201/2014

2014-2015

Art.42 LHID

Devoir de collaboration du contribuable.

A SA est une société immobilière sise dans le canton de Fribourg, qui détient et gère un patrimoine d’immeubles de rendement dans le canton de Thurgovie. Son unique actionnaire est la fondation de droit liechtensteinoise B. Dans le bilan de A SA figure un prêt octroyé par B d’un million de CHF portant intérêt à 5,5%, qui fut, durant la période fiscale 2009, postposé de moitié. L’administration fiscale thurgovienne qualifia cette opération de contribution d’assainissement et en prit compte dans la détermination du bénéfice imposable. Cependant, doutant de la réelle nature de ce prêt, elle souhaita définir les liens unissant A SA et B.

C’est pourquoi, elle demanda à A SA une liste des participants aux assemblées générales de 2009 et 2010, accompagnée de leurs adresses afin d’en identifier les éventuels ayants droit économiques. Jugeant ces documents non nécessaires à l’établissement de sa taxation, A SA refusa de s’exécuter et se vit infliger, après un avertissement, une amende de CHF 1'000.-. Le Tribunal administratif du canton de Thurgovie renvoie l’affaire à l’administration fiscale afin qu’elle rende une décision indépendante de celle d’imposition, ouvrant un droit de recours, quant à l’obligation de collaborer. Le droit fédéral ne prévoyant pas un tel dispositif, dans le cadre de la procédure de taxation, le TF rejette cette décision.

Ainsi, en l’espèce, il y a aucune nécessité que les documents requis soient désignés de manière exacte dans la décision concernant l’amende. S’agissant de la question de l’obligation de collaborer, non abordée par la décision de l’instance cantonale, figurant à l’art. 42 LHID, le TF rappelle que cette notion doit être interprétée de façon large et qu’il revient à l’administration fiscale de décider quels renseignements lui sont nécessaires afin d’établir la taxation. Concrètement, cela oblige l’assujetti à fournir les informations exigées par les autorités fiscales pour autant qu’elles soient appropriées pour l’établissement d’une taxation complète et correcte, qu’elles soient nécessaires, qu’on puisse raisonnablement les lui imposer et qu’elles ne soient pas à disposition de tiers. Si le contribuable considère que la demande est disproportionnée, il se doit quand même d’obtempérer. Ce n’est qu’une fois la décision de taxation prise, qu’il pourra, par le biais du recours contre celle-ci, faire valoir cet argument.

Dans le cas d’espèce, le TF conclut que l’ampleur des informations exigées était parfaitement en adéquation avec le principe de proportionnalité, car, d’une part, les informations requises ne sont pas en main de tiers et d’autre part les documents, en l’occurrence la liste détaillée des personnes assistant aux assemblés générales, sont effectivement nécessaires pour établir la taxation de A SA afin d’éclaircir la réelle nature du prêt. Le contribuable doit donc fournir les informations demandées par l’administration fiscale tout en supportant les conséquences, c’est-à-dire les amendes, de son refus de collaborer initial.