Droit des migrations

Art. 29 aLN

Cet arrêt concerne un jeune homme qui a reçu la nationalité suisse sur base d’un certificat de famille attestant que son père était un ressortissant suisse. Malgré une action en désaveu de paternité introduite par celui-ci, son passeport est prolongé puis renouvelé. Ce n’est qu’en 2013, soit 13 ans après sa naissance, que l’intéressé perd effectivement sa nationalité suisse. Il demande alors la naturalisation facilitée sur la base de l’art. 29 aLN (« Nationalité suisse admise par erreur »). Cette demande est rejetée par le SEM qui estime, d’une part, que l’intéressé savait qu’il ne possédait pas la nationalité suisse et a obtenu des documents d’identité sur la base de pièces qu’il savait ne plus représenter la réalité et, d’autre part, qu’il ne remplissait pas les conditions d’intégration et de respect de l’ordre juridique. Un premier recours contre cette décision est admis par le TAF, le Tribunal fédéral est ensuite saisi d’un recours du DFJP. L’art. 29 aLN exige d’avoir vécu durant cinq ans au moins dans la conviction d’être suisse. Examinant cette condition en l’espèce, le TF distingue deux périodes. Premièrement, la période entre la naissance de l’enfant et la seconde prolongation de son passeport. Durant cette période, l’intéressé, né en 2000, était incapable de discernement et représenté par sa mère. Les règles du CO relatives à la représentation imposent donc de lui imputer ce que sa mère savait, en l’occurrence « la non-conformité des documents présentés aux autorités ainsi que l’absence de conviction quant à la nationalité suisse de son fils ». La seconde période examinée est celle démarrant avec la deuxième prolongation du passeport et la constatation de l’absence de nationalité par l’autorité cantonale. Durant cette période de plus de cinq ans, l’intéressé est considéré comme capable de discernement et ne peut donc se voir imputer les actes de sa mère. Dès lors, la bonne foi étant présumée et rien ne permettant de la remettre en cause, le TF retient que la condition de l’art. 29 aLN est remplie. Le recours est toutefois admis pour un autre motif lié à la constatation des faits par l’instance inférieure.

Art. 14 aLN, KBüG/GR

Dans cette affaire, le TF doit se pencher, pour la seconde fois, sur le refus par la commune de Grimmis (GR) de naturaliser un ressortissant iranien reconnu comme réfugié et présent sur le territoire suisse depuis 1989. Le refus est motivé par le fait que le requérant n’est pas assez intégré : il ne fait pas partie d’une société locale, n’est pas assez intégré dans la vie de la commune et ne connait pas assez les us et coutumes locaux. Or lors de la discussion devant l’assemblée communale, le point principal abordé n’était pas celui de l’intégration. En effet, le débat a principalement porté sur les conséquences d’une décision négative pour la commune et sa réputation. En outre, on reprochait au requérant d’avoir fait appel aux tribunaux suite au refus de la commune et que dès lors, l’assemblée communale ne voyait pas pourquoi elle devrait se soumettre à toute décision judiciaire. Le fait que le requérant ait fait usage de ses droits procéduraux ne va pas à l’encontre de son intégration et ne peut lui être imputé dans la décision de naturalisation. Vu l’importance de cette dernière question dans le débat, on peut supposer qu’elle a été décisive dans le résultat et que la question de l’intégration n’avait pas vraiment d’importance. Dès lors, malgré la large marge d’appréciation dont jouissent les autorités communales dans la procédure de naturalisation, la décision doit être considérée comme arbitraire. Il en va de même de l’arrêt du Tribunal administratif grison qui s’appuie uniquement sur les éléments négatifs sans les placer dans le contexte général de la situation particulière. Lorsque l’autorité dispose d’un pouvoir d’appréciation, le TF exerce son pouvoir d’examen de manière limitée et se contente normalement de renvoyer la cause pour nouvelle décision. Cependant, au vu de la durée de l’ensemble de la procédure et des critiques à l’égard du plaignant qui n’a fait qu’exercer ses droits de manière légitime, le TF renvoie la cause à la commune de Trimmis et lui ordonne, exceptionnellement, d’accorder la naturalisation (NB : pour le premier jugement, cf. ATF 141 I 60).