Droit des migrations

Art. 6 Annexe I-ALCP ; 18 al. 3 OLCP

Une ressortissante portugaise née en 1969, A. entre en Suisse en janvier 2009 afin d’y exercer une activité lucrative à temps plein. Elle obtient à cet égard une autorisation de séjour CE/AELE d’une durée de cinq ans. Après avoir exercé l’activité lucrative envisagée durant un mois à 100%, un nouveau contrat à 50% est conclu pour une durée d’un an. A. est ensuite licenciée pour cause de restructuration. Par la suite, A. bénéficie de deux emplois temporaires d’insertion offerts par l’Office régional de placement, entrecoupés de périodes de maladie. Elle décide finalement de quitter son dernier emploi.

En mai 2012, A. conclut un contrat pour une durée de trois mois à 80%. Elle fait cependant l’objet d’une incapacité de travail. Le 17 septembre 2012, le Service de la population du canton de Vaud décide de révoquer son autorisation de séjour et de prononcer son renvoi au motif que A. ne peut plus se prévaloir de la qualité de travailleur salarié. De même, les conditions pour une autorisation de séjour sans activité lucrative ou pour admettre un cas de rigueur ne sont pas remplies selon l’autorité cantonale. Saisit d’un recours, le TF commence par rappeler la teneur de l’art. 6 Annexe I-ALCP. Il relève ensuite que, conformément à la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne, la notion de travailleur doit être interprétée de façon extensive alors que les exceptions et les dérogations doivent faire l’objet d’une interprétation restrictive. A relever néanmoins que la qualité de travailleur peut produire certains effets après la fin de la relation de travail et qu’une personne à la recherche d’un emploi bénéficie de cette qualité.

Pour admettre qu’il y a recherche d’emploi, il est nécessaire que l’intéressé prouve non seulement qu’il cherche, mais également qu’il a de véritables chances d’obtenir un emploi. A défaut, son renvoi est possible après six mois. « A ce propos, le TF considère que, sous réserve d’une situation d’abus de droit où un ressortissant communautaire se rendrait dans un autre Etat membre pour y exercer un travail fictif ou d’une durée extrêmement limitée dans le but de bénéficier de certaines aides, les intentions ou le comportement de l’intéressé avant ou après sa période d’emploi ne sont pas déterminants pour examiner sa qualité de travailleur salarié. Seuls comptent les critères objectifs énoncés par la jurisprudence ».

En se fondant sur la jurisprudence susmentionnée ainsi que les art. 6 al. 6 Annexe I-ALCP et 23 al. 1 OLCP, le TF estime qu’une autorisation de séjour peut être révoquée si les conditions requises pour sa délivrance ne sont plus remplies. Il relève néanmoins que grâce à la conclusion du dernier contrat de travail de trois mois, l’intéressée obtient le droit de rester au moins six mois en Suisse, une fois son activité terminée, afin de chercher un nouvel emploi (cf. art. 2 al. 1 Annexe I-ALCP et 18 OLCP). Si une perspective réelle d’engagement existe, l’autorisation peut par ailleurs être prolongée jusqu’à une année (art. 18 al. 3 OLCP).

En l’espèce, le TF considère que les conditions mentionnées ci-dessus ne sont pas réunies, l’intéressée n’ayant produit aucune proposition d’embauche ou de preuves de ses postulations, se trouvant au chômage depuis 2010, n’ayant trouvé depuis lors qu’un emploi d’une durée de trois mois, ayant fait l’objet de nombreux arrêts maladies sans prétendre souffrir de maladies particulières et ne bénéficiant plus de l’aide de l’Office régional de placement. La période de six mois prévue pour la recherche d’un emploi ne peut dès lors pas être prolongée et son autorisation doit être révoquée.

Il s’agit d’un ressortissant burkinabé, né en 1975 et résidant à Genève. Le 2 mai 2005, il fait l’objet d’un contrôle par deux gendarmes qui aurait mal tourné (violences physiques, injures racistes). Un constat médical établit qu’il souffre d’une fracture distale de la clavicule droite, qui lui vaut un arrêt de travail de 21 jours.

La procédure pénale échoue devant les autorités pénales cantonales et il faut un arrêt du TF pour qu’une nouvelle enquête soit diligentée, mais cette dernière aboutit également à une ordonnance de classement qui est finalement confirmée par la Haute Cour.

Saisis de l’affaire, les juges de Strasbourg considèrent qu’il y a eu violation de l’art. 3 CEDH, l’intéressé ayant bien été victime de mauvais traitements de la part de la police genevoise (volet matériel : emploi disproportionné de la force). De plus, s’agissant du volet procédural, la Suisse a manqué à son obligation de diligenter une enquête effective. Selon elle, l’instruction de cette affaire n’a pas été complète (une contre-expertise aurait dû être faite concernant le bris de la matraque d’un des gendarmes).

Un ressortissant d’Iran engage une procédure d’asile, en France. À l’appui de sa demande, il invoque des mauvais traitements subis à la suite de ses prises de position contre les abus commis par les Bassidjis et le risque d’être interpellé dès son arrivée à l’aéroport de Téhéran. Il n’obtient pas gain de cause devant les autorités françaises et saisit avec succès la CourEDH.

Selon les juges de Strasbourg, il est « important de prendre en compte les risques spécifiques encourus par les Iraniens qui retournent dans leur pays sans pouvoir prouver qu’ils ont quitté légalement le territoire. Il ressort des rapports internationaux consultés que ces personnes sont fréquemment interpellées et interrogées quant aux conditions de leur départ du pays.

En l’espèce, il n’est pas contesté que le requérant a quitté illégalement l’Iran et qu’il est détenteur d’un laissez-passer délivré par les autorités consulaires iraniennes en France et non d’un passeport.

Par conséquent, il est probable que celui-ci, à son arrivée à l’aéroport de Téhéran, attire l’attention des autorités et que son passé de Bassidji et ses anciennes prises de position contre les abus commis par les membres de cette milice soient révélés. L’effet cumulé de ces différents facteurs constitue un risque supplémentaire ».

Un ressortissant de Somalie, originaire de Mogadiscio, engage, en Suède, une procédure, mais en vain.

L’intéressé saisit la CourEDH, mais n’obtient pas gain de cause. Pour les juges de Strasbourg, le niveau général de violence à Mogadiscio diminue depuis 2011 ou au début de l’année 2012. S’agissant de la situation personnelle de l’intéressé, il n’est pas établi qu’il risque réellement d’être tué ou soumis à des mauvais traitements en cas de l’exécution de la décision de renvoi.

Par ailleurs, il n’appartient à aucun groupe qui présente un risque d’être visé par le groupe islamiste Al-Chabaab, cela d’autant plus qu’il aurait un domicile à Mogadiscio où réside son épouse.

Le requérant est un ressortissant du Pakistan, arrivé au Royaume-Uni, en octobre 2006, aux fins d’études. Le 8 avril 2009, il est arrêté, avec quatre autres Pakistanais, car les autorités les soupçonnent de mener une attaque massive au Nord-Est de l’Angleterre. La libération est ordonnée faute de charges établies contre les intéressés. Par contre, ils sont mis en détention administrative en vue de leur expulsion du territoire britannique. Le 21 août 2009, l’intéressé quitte volontairement le Royaume-Uni.

Le 18 décembre 2009, son autorisation de séjour est révoquée par le Secrétariat d’Etat pour des motifs de sécurité nationale. L’intéressé conteste en vain cette décision devant les autorités britanniques. C’est alors qu’il saisit la CourEDH et invoque la violation de plusieurs normes, dont notamment les art. 2, 3, 5 et 6 CEDH. Les juges de Strasbourg déclarent sa requête irrecevable, car il n’est plus sous la juridiction du Royaume-Uni. En effet, la compétence juridictionnelle au sens de l’art. 1 CEDH est en principe territoriale.

La compétence extra-territoriale est reconnue exceptionnellement dans deux cas : le contrôle d’une partie du territoire d’un Etat par les agents d’un autre Etat et le contrôle effectif en mer. Le retour volontaire du requérant au Pakistan n’entre dans aucune des deux exceptions précitées. C’est dire que son cas est différent de celui d’Al-Saadoon et de Mufdi ou encore des personnes de l’affaire Al-Skeini et consorts.

Un ressortissant turc saisit en vain la CourEDH. Dans cet arrêt, les juges de Strasbourg rappellent les principes directeurs à appliquer en présence d’une affaire relevant de la protection de la vie privée. Il n’est pas contesté que l’intéressé peut valablement invoquer cette protection, car il a vécu en Suisse entre 1989 et 2008, avec une courte interruption de 1993 à 1994.

Il a travaillé dans ce pays et y a fondé une famille. Par contre, sous l’angle de la pesée des intérêts, c’est-à-dire dans l’optique de l’art. 8 § 2 CEDH, le dossier pénal pèse en défaveur de l’intéressé : 19 condamnations entre 1995 et 2005, même si la plupart ont trait à des infractions mineures et même si on ne saurait en déduire de fortes intentions criminelles.

Toutefois, il y a lieu de tenir compte des violences conjugales survenues en 1999, la persistance dans la voie des infractions, malgré les avertissements prononcés par les autorités. Par ailleurs, le dossier montre qu’il peut se réintégrer sans grandes difficultés en Turquie.

Un ressortissant géorgien, né en 1958, arrive en Belgique en 1998, avec son épouse et l’enfant de celle-ci, alors âgé de six ans. Par la suite, le couple donne naissance à deux enfants. L’intéressé est condamné à plusieurs reprises, entre 1998 et 2007, notamment pour vol avec violence et participation à une organisation criminelle. Bien qu’il ait une famille en Belgique et souffre de plusieurs pathologies graves dont une leucémie lymphoïde chronique et la tuberculose, la CourEDH juge que son renvoi vers la Géorgie est compatible avec l’art. 8 CEDH.

Les juges de Strasbourg ne manquent pas de préciser à plusieurs reprises que la présente cause doit être distinguée des affaires Udeh c. Suisse du 16 avril 2013 et de Nunez c. Norvège du 28 juin 2011. Plusieurs motifs sont invoqués pour justifier le jugement de la CourEDH : durant les quinze années de vie en Belgique, à aucun moment, l’intéressé n’a bénéficié d’un titre de séjour régulier (§ 149), les autorités belges ont fait preuve d’une « remarquable tolérance » à son égard et à l’endroit de sa famille (§ 150), il n’a pas de liens sociaux particuliers en Belgique, aucun membre de la famille n’a la nationalité d’un pays d’accueil, la mère paraît être mesure de s’occuper seule des enfants qui n’ont pas de besoins spécifiques (§ 153).

La CourEDH émet certes une réserve et admet « qu’eu égard au volet médical particulier de la présente espèce, (...) le seul maintien de contacts réguliers pourrait ne pas suffire à satisfaire " l’intérêt supérieur " des enfants ». Mais, au final, elle juge que cette réserve ne l’emporte pas sur les éléments qui précèdent.

Un ressortissant d’Afghanistan, se rend en Autriche, en août 2008, avec sa femme, pour engager une procédure d’asile, après avoir séjourné quelques mois en Grèce. Le 8 avril 2009, il est transféré vers ce pays. Cette mesure est-elle compatible avec l’art. 3 CEDH ? Oui, répond la CourEDH, car il s’agit d’un transfert antérieur à l’affaire M.S.S. c. Belgique et Grèce du 21 janvier 2011. En avril 2009, les autorités autrichiennes étaient certes au courant des déficiences de la procédure d’asile en Grèce, ainsi que des conditions de vie et de détention des requérants d’asile. Mais, à l’époque, il n’était pas établi qu’elles n’étaient pas compatibles avec l’art. 3 CEDH.

Art. 83 al. 7 LEtr ; 8 CEDH

A., un Erythréen est mis au bénéfice de l’admission provisoire, par décision de l’ODM du 24 décembre 2006. Le 23 avril 2012, l’autorité cantonale compétente transmet à l’ODM son avis concernant la demande d’inclusion, présentée en février 2012, de B., une ressortissante d’Erythrée résidant au Soudan, dans l’admission provisoire d’A. Elle mentionne que la condition de l’autonomie financière n’est pas remplie. A la suite du rejet de la demande de regroupement familial, un recours est déposé au TAF qui le rejette.

Sous l’angle de l’art. 8 CEDH, les juges administratifs fédéraux relèvent ce qui suit : l’admission provisoire étant un statut précaire, puisqu’il règle la présence en Suisse de l’étranger aussi longtemps que l’exécution de son renvoi n’est pas licite, n’est pas raisonnablement exigible ou n’est pas possible (art. 83 al. 1 LEtr), le recourant n’est pas au bénéfice d’une autorisation de séjour lui conférant un droit de présence assuré sur la base duquel il peut se prévaloir d’un droit au regroupement familial en vertu de la LEtr. Toutefois, le titulaire d’une admission provisoire ne peut momentanément pas être renvoyé de Suisse.

Pour le TAF, au regard des éléments à prendre en considération, le refus d’autoriser l’entrée en Suisse de B. et de sa fille apparaît légitime et proportionné. En effet, il correspond à l’intérêt public visant à intégrer les étrangers et par conséquent à limiter l’octroi d’autorisations aux seules personnes qui ne dépendent pas de l’assistance publique, du moins de manière durable et significative.

Le Tribunal fédéral a certes émis des doutes sur le rejet de la demande de regroupement familial d’une personne admise provisoirement, sous l’angle de l’art. 8 § 2 CEDH, lorsque les perspectives d’un équilibre financier paraissent réalistes à brève échéance. Dans le cas particulier toutefois, une telle perspective n’apparaît pas être possible à court ou moyen terme.

Dès lors, la décision de l’ODM refusant l’autorisation d’entrer en Suisse et l’inclusion de B. et de sa fille dans l’admission provisoire d’A. est fondée sur une pesée des intérêts conforme à l’art. 8 § 2 CEDH .

TAF D-3694/2013

2013-2014

Il est rappelé qu’un réfugié mis au bénéfice de l’asile peut également invoquer valablement l’art. 8 CEDH.

TAF C-4208/2009

2013-2014

Art. 41 LN ; 42 al. 1 LN

Une personne étrangère épouse une citoyenne suisse en 2000 et obtient la naturalisation facilitée en 2004. En 2006, les époux déposent une requête commune de divorce. La naturalisation facilitée est annulée en raison de déclarations mensongères (art. 42 al. 1 LN).

Dans son examen, le TAF admet l’argument de la recourante, selon lequel la relation conjugale a échoué car les intéressés se sont détachés en raison de séjours hebdomadaires de l’épouse à Bâle depuis l’année 2003.

La preuve d’un mariage non-intact au moment de la naturalisation facilitée n’est pas fournie. Par conséquent, le Tribunal admet le recours en considérant que les conditions de l’annulation de ladite naturalisation ne sont pas remplies.

TAF C-5377/2012

2013-2014

Art. 41 LN

Un ressortissant camerounais saisit le TAF et conteste, avec succès, la décision de l’Office fédéral annulant sa naturalisation facilitée. Il allègue la nature stable et effective de la communauté conjugale au moment de l’obtention de la naturalisation facilitée.

A cet égard, il relève que la fausse couche que son ex-épouse avait subie en septembre 2009 avait provoqué des tensions conjugales, mais sans remettre en cause la volonté du couple de maintenir le lien conjugal.

TF 1C_430/2012

2013-2014

Art. 41 LN

A., un ressortissant kosovar, épouse B., une citoyenne suisse, en date de 24 mai 2002. Après avoir obtenu une autorisation de séjour, A. requiert, en juin 2005, la naturalisation facilitée en application de l’art. 27 LN. En septembre 2008, le couple dépose une requête commune de divorce. Le 5 février 2010, après le prononcé du divorce, l’intéressé se remarie avec une compatriote auprès de l’état civil de la commune de Prilly. Le 3 mars 2011, l’office annule ladite naturalisation. Par la suite, le prénommé interjette un recours en concluant à l’annulation de la décision de l’autorité administrative.

Par arrêt du 6 juillet 2012, le TAF confirme la décision attaquée en considérant que le recourant a obtenu la naturalisation facilitée frauduleusement. Saisi de l’affaire, le TF annule les décisions précédentes en considérant que « le recourant parvient à rendre vraisemblable l’absence de conscience de l’importance que prendraient au fil du temps ‑ jusqu’à devenir insupportables en 2008 ‑ les pressions familiales au sujet de la question des enfants sur son mariage. Il établit ainsi de manière plausible l’existence d’une véritable volonté de maintenir une union stable avec son conjoint lorsqu’il a signé la déclaration en octobre 2006, puis reçu la nationalité suisse le mois suivant » (consid. 3.2).

TF 1D_3/2013

2013-2014

Art. 29 al. 1 et 2 Cst.

Le 16 mai 2012, une famille de quatre personnes (A., B., C. et D.), dépose une demande de naturalisation ordinaire devant les autorités communales de Weiningen (ZH). Par décision du 22 octobre 2012, la commune rejette la demande en considérant que leur maîtrise de la langue et leur intégration sont insuffisantes. Cette décision est confirmée à deux reprises, par le Conseil municipal, puis par le Tribunal administratif du canton de Zurich.

Par la suite, les époux forment un recours constitutionnel subsidiaire auprès du TF en invoquant la violation des garanties générales de procédure, notamment le droit d’être entendu et le droit à une procédure équitable (art. 29 al. 1 et 2 Cst.). En l’espèce, le TF considère que la lettre d’invitation adressée par les autorités communales aux requérants porte sur un entretien de présentation et d’écoute sur les motifs de leur demande et non sur un examen du niveau linguistique et d’intégration.

En l’occurrence, le TF constate une violation des garanties générales de procédure, en particulier le droit d’être entendu, le droit à un procès équitable et le principe de la bonne foi. Le recours est ainsi admis, la décision attaquée annulée et la cause renvoyée à l’autorité inférieure pour une nouvelle décision au sens des considérants.

Art. 61 al. 2 LEtr ; 6 al. 5 Annexe I-ALCP

A., ressortissant portugais, obtient le 15 mars 2007 une autorisation de séjour au titre de l’exercice d’une activité lucrative valable jusqu’au 30 septembre 2012. A. est arrêté en Allemagne le 13 juillet 2010 pour trafic de stupéfiants et condamné le 24 janvier 2011 à une peine privative de liberté de trois ans et neuf mois. Le Service de la population informe A., le 17 mars 2011, de la fin de son autorisation de séjour. A son retour en Suisse, le 26 septembre 2012, A. requiert une nouvelle autorisation de séjour. Le 12 décembre 2012, il est condamné en Suisse pour violation grave de la circulation routière.

Le 21 janvier 2013, sa demande d’autorisation est rejetée et son renvoi prononcé. Dans le cadre de son recours au Tribunal cantonal vaudois, A. produit trois contrats de travail de trois mois. Il est par ailleurs entendu avec son épouse. L’instance cantonale admet son recours. L’ODM saisit alors le Tribunal fédéral. Notre Haute Cour commence par relever que l’intimé, en raison de sa condamnation en Allemagne, a été absent du territoire suisse durant plus de six mois. Cela étant, conformément aux art. 61 al. 2 LEtr et 6 al. 5 Annexe I-ALCP, il était correct de considérer que A. ne bénéficiait plus de titre de séjour lors de son retour en Suisse.

Le Tribunal fédéral rappelle ensuite sa jurisprudence relative à l’art. 5 Annexe I-ALCP et considère qu’il y a lieu d’admettre, en l’espèce, un risque actuel pour l’ordre public suisse justifiant le refus d’une nouvelle autorisation de séjour. Le Tribunal fédéral se penche ensuite sur l’art. 8 CEDH et juge que l’intérêt public à l’éloignement l’emporte sur l’intérêt privé à rester en Suisse. En outre, sous l’angle de la proportionnalité, la Haute Cour considère qu’on ne saurait suivre les juges cantonaux.

Art. 61 al. 2 LEtr ; 6 al. 5 Annexe I-ALCP

A., ressortissant portugais, obtient le 15 mars 2007 une autorisation de séjour au titre de l’exercice d’une activité lucrative valable jusqu’au 30 septembre 2012. A. est arrêté en Allemagne le 13 juillet 2010 pour trafic de stupéfiants et condamné le 24 janvier 2011 à une peine privative de liberté de trois ans et neuf mois. Le Service de la population informe A., le 17 mars 2011, de la fin de son autorisation de séjour. A son retour en Suisse, le 26 septembre 2012, A. requiert une nouvelle autorisation de séjour.

Le 12 décembre 2012, il est condamné en Suisse pour violation grave de la circulation routière.

Le 21 janvier 2013, sa demande d’autorisation est rejetée et son renvoi prononcé. Dans le cadre de son recours au Tribunal cantonal vaudois, A. produit trois contrats de travail de trois mois. Il est par ailleurs entendu avec son épouse. L’instance cantonale admet son recours. L’ODM saisit alors le Tribunal fédéral. Notre Haute Cour commence par relever que l’intimé, en raison de sa condamnation en Allemagne, a été absent du territoire suisse durant plus de six mois.

Cela étant, conformément aux art. 61 al. 2 LEtr et 6 al. 5 Annexe I-ALCP, il était correct de considérer que A. ne bénéficiait plus de titre de séjour lors de son retour en Suisse. Le Tribunal fédéral rappelle ensuite sa jurisprudence relative à l’art. 5 Annexe I-ALCP et considère qu’il y a lieu d’admettre, en l’espèce, un risque actuel pour l’ordre public suisse justifiant le refus d’une nouvelle autorisation de séjour. Le Tribunal fédéral se penche ensuite sur l’art. 8 CEDH et juge que l’intérêt public à l’éloignement l’emporte sur l’intérêt privé à rester en Suisse.

En outre, sous l’angle de la proportionnalité, la Haute Cour considère qu’on ne saurait suivre les juges cantonaux

TAF C-4099/2010

2013-2014

Art. 5 Annexe I-ALCP

Une ressortissante de Côte d’Ivoire, mère d’une fille, née en 2006 et titulaire d’une carte d’identité française, fait l’objet d’une interdiction d’entrée en Suisse, prononcée par l’ODM, et ce pour la durée du 7 mai 2010 au 6 mai 2019. Saisi de l’affaire, le TAF admet le recours. Les juges administratifs fédéraux considèrent, sur la base de la jurisprudence Zhu et Chen ainsi que sur l’arrêt du TF 2C_624/2010 du 8 septembre 2010, que le droit des ALCP est applicable, car l’intéressée est mère d’une fille, âgée d’un peu plus de sept ans et disposant de la nationalité française, dès lors que « l’interdiction d’entrée la prive de la possibilité, le cas échéant, de suivre sa fille lors d’éventuels déplacements de celle-ci en Suisse ».

Or, sous l’angle des ALCP, une interdiction d’entrée doit répondre aux conditions exigées par l’art. 5 Annexe I-ALCP. Dans le cas particulier, l’intéressée est condamnée pour exercice illégal de la prostitution, d’infractions à la LEtr, à la LStup (achat, détention, distribution et vente de cocaïne), et ce à une peine de 330 jours-amende avec sursis pendant deux ans.

Pour le TAF, « il n’est pas contestable que ses agissements constituent un trouble à l’ordre social et affectent un intérêt fondamental de la société », étant rappelé que la lutte contre le trafic de drogue constitue un intérêt public prépondérant. Toutefois, le risque de récidive est faible, car « les infractions commises il y a plus de trois ans et demi représentent plutôt un écart de conduite, certes important, mais unique ». Les conditions relatives à l’actualité d’une menace sérieuse ne sont plus réalisées pour justifier ainsi une restriction à un droit reconnu par les ALCP (arrêt résumé par Véronique Boillet, in : Actualité du droit des étrangers 2013 II, 160).

Art. 6 Annexe I-ALCP ; 18 al. 3 OLCP

Une ressortissante portugaise née en 1969, A. entre en Suisse en janvier 2009 afin d’y exercer une activité lucrative à temps plein. Elle obtient à cet égard une autorisation de séjour CE/AELE d’une durée de cinq ans. Après avoir exercé l’activité lucrative envisagée durant un mois à 100%, un nouveau contrat à 50% est conclu pour une durée d’un an. A. est ensuite licenciée pour cause de restructuration. Par la suite, A. bénéficie de deux emplois temporaires d’insertion offerts par l’Office régional de placement, entrecoupés de périodes de maladie. Elle décide finalement de quitter son dernier emploi.

En mai 2012, A. conclut un contrat pour une durée de trois mois à 80%. Elle fait cependant l’objet d’une incapacité de travail. Le 17 septembre 2012, le Service de la population du canton de Vaud décide de révoquer son autorisation de séjour et de prononcer son renvoi au motif que A. ne peut plus se prévaloir de la qualité de travailleur salarié. De même, les conditions pour une autorisation de séjour sans activité lucrative ou pour admettre un cas de rigueur ne sont pas remplies selon l’autorité cantonale. Saisit d’un recours, le TF commence par rappeler la teneur de l’art. 6 Annexe I-ALCP. Il relève ensuite que, conformément à la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne, la notion de travailleur doit être interprétée de façon extensive alors que les exceptions et les dérogations doivent faire l’objet d’une interprétation restrictive. A relever néanmoins que la qualité de travailleur peut produire certains effets après la fin de la relation de travail et qu’une personne à la recherche d’un emploi bénéficie de cette qualité. Pour admettre qu’il y a recherche d’emploi, il est nécessaire que l’intéressé prouve non seulement qu’il cherche, mais également qu’il a de véritables chances d’obtenir un emploi. A défaut, son renvoi est possible après six mois.

« A ce propos, le TF considère que, sous réserve d’une situation d’abus de droit où un ressortissant communautaire se rendrait dans un autre Etat membre pour y exercer un travail fictif ou d’une durée extrêmement limitée dans le but de bénéficier de certaines aides, les intentions ou le comportement de l’intéressé avant ou après sa période d’emploi ne sont pas déterminants pour examiner sa qualité de travailleur salarié. Seuls comptent les critères objectifs énoncés par la jurisprudence ».

En se fondant sur la jurisprudence susmentionnée ainsi que les art. 6 al. 6 Annexe I-ALCP et 23 al. 1 OLCP, le TF estime qu’une autorisation de séjour peut être révoquée si les conditions requises pour sa délivrance ne sont plus remplies. Il relève néanmoins que grâce à la conclusion du dernier contrat de travail de trois mois, l’intéressée obtient le droit de rester au moins six mois en Suisse, une fois son activité terminée, afin de chercher un nouvel emploi (cf. art. 2 al. 1 Annexe I-ALCP et 18 OLCP). Si une perspective réelle d’engagement existe, l’autorisation peut par ailleurs être prolongée jusqu’à une année (art. 18 al. 3 OLCP).

En l’espèce, le TF considère que les conditions mentionnées ci-dessus ne sont pas réunies, l’intéressée n’ayant produit aucune proposition d’embauche ou de preuves de ses postulations, se trouvant au chômage depuis 2010, n’ayant trouvé depuis lors qu’un emploi d’une durée de trois mois, ayant fait l’objet de nombreux arrêts maladies sans prétendre souffrir de maladies particulières et ne bénéficiant plus de l’aide de l’Office régional de placement. La période de six mois prévue pour la recherche d’un emploi ne peut dès lors pas être prolongée et son autorisation doit être révoquée.

Art. 2 § 1 let. a et b, 3, 4 § 2 et 5 § 1 du règlement n° 1251/70 ; 22 OLCP

Un ressortissant français arrive en Suisse afin d’y exercer une activité salariée. Il obtient une autorisation de séjour CE/AELE valable jusqu’au 30 septembre 2009. Entre le 1er octobre et le 30 novembre 2005 et à partir du 1er août 2008, il reçoit le revenu minimum de réinsertion. Par décision du 22 décembre 2009, le Service de la population du canton de Vaud (ci-après : le Service cantonal) renouvelle son autorisation de séjour pour une année en précisant que son droit au séjour pourrait être révoqué dans le cas où il ne retrouverait « pas son autonomie financière à l’échéance du permis de séjour ».

Après s’être adressé à l’Office de l’assurance-invalidité du canton de Vaud (ci-après : l’Office AI) dans le but d’engager sa réinsertion professionnelle, le recourant requiert, le 14 septembre 2010, la prolongation de son autorisation de séjour. Cette dernière fait l’objet d’une nouvelle prolongation d’une année, dans l’attente d’une décision de l’Office AI. Une nouvelle demande de prolongation de son autorisation de séjour est déposée le 23 décembre 2011.

Après que l’Office AI a transmis au recourant un premier projet de décision que ce dernier a contesté, l’Office décide d’accorder au recourant le bénéfice d’une mesure d’orientation professionnelle et lui transmet un second projet de décision refusant le reclassement et l’octroi d’une rente d’invalidité. Le recourant conteste ce second projet. Dans l’intervalle, le SPOP fait part au recourant de son refus de prolonger l’autorisation de séjour et lui impartit un délai de trois mois pour quitter la Suisse.

Dans son arrêt, notre Haute Cour commence par rappeler les conditions d’application du droit de demeurer qui se déduisent de l’article 4 al. 1 et 2 Annexe I-ALCP ainsi que des art. 2 § 1 let. a et b, 3, 4 § 2 et 5 § 1 du règlement n° 1251/70. Elle relève ensuite que, conformément à l’article 22 OLCP et la directive de l’Office fédéral des migrations du 1er mai 2011 sur l’introduction progressive de la libre circulation des personnes (ch. 11.1), les ressortissants des États parties à l’Accord au bénéfice d’un droit de demeurer reçoivent une autorisation de séjour indépendamment d’un éventuel recours aux prestations de l’aide sociale et conservent les droits qu’ils ont acquis en qualité de travailleur en vertu de l’ALCP.

Dans le cas d’espèce, le Tribunal fédéral relève « qu’au moment de l’arrêt attaqué, la requête de l’intéressé n’avait fait l’objet d’aucune décision sujette à recours de la part de l’Office AI et que, partant, la procédure relative à l’incapacité de travail du recourant était toujours en cours » (consid. 4.3). Cela étant, le Tribunal cantonal n’aurait pas dû admettre que les conditions du droit de demeurer, notamment l’incapacité permanente de travail du recourant au sens de l’art. 2 § 1 let. b du règlement 1251/70, n’étaient pas réalisées (arrêt résumé par Véronique Boillet, in : Actualité du droit des étrangers 2013 II, 156-157).

TAF D-3440/2013

2013-2014

Art. 83 LEtr

A., une ressortissante pakistanaise de religion ahmadi, dépose une demande d’asile en Suisse pour la deuxième fois le 24 septembre 2012. Elle explique que son mari est décédé un an plus tôt et qu’elle a depuis lors fait l’objet de diverses intimidations de la part de malfrats. Son fils, qui vit en Suisse depuis six ans, a organisé son voyage. Par décision du 13 mai 2013, l’ODM rejette sa demande d’asile, prononce son renvoi et ordonne l’exécution de cette mesure.

Le TAF relève que les Ahmadis sont exposés à une situation difficile au Pakistan, où ils font souvent l’objet d’attaques régulières. Le nombre de meurtres et d’arrestations des Ahmadis aurait par ailleurs augmenté ces dernières années parallèlement à l’islamisation croissante du pays. La province d’où vient la recourante a d’ailleurs connu plusieurs attaques ciblant les Ahmadis et un lieu de culte ahmadi de son village a subi un attentat meurtrier.

A cela s’ajoute la situation de veuve isolée de la recourante et un état de santé préoccupant. A l’inverse, la famille de son fils vivant en Suisse peut lui apporter le soutien dont elle a besoin.

Dans ces circonstances, l’exécution du renvoi de A. est jugée inexigible.

TAF E-4151/2013

2013-2014

Art. 51 LAsi ; 85 al. 7 LEtr

Une famille de ressortissants afghans constituée de l’épouse A., de l’époux B. et de leurs deux enfants C. et D. vit en Grèce en qualité de demandeurs d’asile depuis 2008. Le 21 août 2012, A. rejoint la Suisse accompagnée de son fils D. et y dépose une demande d’asile. Le 29 octobre 2012, elle demande à l’ODM d’autoriser B. et C. à la rejoindre en Suisse. Le 19 juin 2013, l’ODM rejette la demande du 29 octobre 2012 et refuse l’entrée en Suisse de B. et de C. Le TAF considère que c’est à tort que l’ODM a qualifié la demande introduite le 29 octobre 2012 de demande de regroupement familial.

En effet, « [s]on objectif était d’obtenir que l’ensemble de la famille puisse voir leurs demandes de protection traitées par une seule autorité, in casu: l’autorité suisse, et ce dans la mesure où le retour de l’intéressée et de ses enfants en Grèce n’était plus possible ». En ce sens, l’application de l’art. 51 LAsi – qui ne concerne que les membres de la famille de réfugiés ayant obtenu l’asile en Suisse – et de l’art. 85 al. 7 LEtr – qui vise le regroupement familial des personnes mises au bénéfice de l’admission provisoire – ne se justifie pas.

Deuxièmement, l’ODM n’explique pas en quoi la situation de la recourante et des membres de sa famille diffère de celle prévalant dans les trois cas auxquels se réfère l’intéressée. L’Office fédéral se contente en effet d’affirmer qu’ « aucun rapprochement entre le cas d’espèce et les cas rapportés par l’intéressée ne [peut] être fait ».

Se faisant, l’Office fédéral n’a pas correctement examiné si sa décision respecte le principe de l’égalité de traitement. Troisièmement, c’est à tort que l’ODM a indiqué que B. et C. conservent la possibilité de demander un visa humanitaire, ce dernier n’étant pas accordé lorsque la personne concernée se trouve déjà dans un Etat tiers.

Dans ces conditions, le TAF admet le recours, annule la décision attaquée et renvoie la cause à l’ODM pour nouvelle décision.

TAF E-4192/2013

2013-2014

Art. 3 al. 4 LAsi (entré en vigueur le 1er février 2014)

A., un ressortissant érythréen, dépose une demande d’asile en Suisse en mars 2013. Il explique avoir quitté son Etat d’origine en 2010 pour effectuer une formation à l’étranger et ne pas avoir pu y retourner en 2012 comme convenu, en raison des risques de persécutions qu’il y encourt pour avoir entre-temps adhéré au « Eritrea National Salvation Front (ENSF) », un parti politique en exil. Par décision du 21 juin 2013, l’ODM rejette sa demande d’asile, prononce son renvoi et ordonne l’exécution de cette mesure.

L’Office fédéral considère en effet que A. n’a rejoint l’ENSF que récemment et qu’il ne connaît pas de façon détaillée les objectifs et les activités de cette organisation. Il n’appartiendrait ainsi pas au groupe à risque constitué des personnes s’opposant de façon active au gouvernement érythréen depuis l’étranger.

Le TAF estime ainsi qu’il existe un risque important que A. fasse l’objet d’une punition exemplaire en cas de retour en Erythrée, non seulement pour avoir mené une activité politique d’opposition en exil, mais aussi pour ne pas être rentré à l’issue de son voyage autorisé à l’étranger. Bien que l’engagement politique du recourant soit relativement nouveau et plutôt modeste, il convient de lui reconnaître la qualité de réfugié et, en tant que tel, de le mettre au bénéfice de l’admission provisoire.

TAF E-722/2014

2013-2014

Art. 8 § 1 et 2 CEDH

A., un ressortissant irakien, dépose une demande d’asile en Suisse le 10 janvier 2007. Il est mis au bénéfice de l’admission provisoire le 26 juin 2012, l’exécution de son renvoi étant alors jugée inexigible par l’ODM. Par courrier du 18 novembre 2013, l’Office fédéral informe A. qu’il envisage de lever son admission provisoire en raison de l’amélioration de la situation prévalant dans les provinces kurdes du nord de l’Irak. Invité à s’exprimer à ce propos, A. indique qu’il a une fille de nationalité suisse. Il précise qu’elle vit actuellement dans une famille d’accueil mais qu’il la voit régulièrement et qu’il ne veut pas s’en séparer.

Par décision du 20 janvier 2014, l’ODM lève malgré tout l’admission provisoire de A. Saisi d’un recours, le TAF examine le cas sous l’angle du regroupement familial inversé au sens de l’art. 8 CEDH. Le TAF considère que l’intérêt supérieur de l’enfant doit être pris en compte dans la balance des intérêts opérée dans le cadre de l’art. 8 § 2 CEDH. Il souligne que la situation familiale dans laquelle évolue la fille du recourant est particulièrement difficile : à sa naissance, ses deux parents étaient encore mineurs et elle a été placée dans une famille d’accueil où elle séjourne encore.

D’autre part, sa mère a été chassée de sa famille lorsque celle-ci a appris la grossesse, ce qui permet de supposer que l’enfant n’a que peu de chance de tisser des liens avec ses grands-parents. Dans ce contexte, la relation que l’enfant vit avec son père présente une importance particulière ; y mettre fin serait préjudiciable au bien-être de l’enfant.

Au vu de ces différents éléments, le TAF estime que l’exécution du renvoi de A. violerait l’art. 8 CEDH. Le recours est admis et la décision attaquée annulée.

TAF E-6855/2011

2013-2014

Art. 3 CDE ; 29a3 OA 1 ; 3 § 2 1ère phr. Règlement Dublin II

Le TAF rappelle les différents arrêts qu’il a rendus au sujet de la Hongrie. Ce pays a certes amélioré son système d’accueil des requérants d’asile. Toutefois, de nouvelles modifications de la législation hongroise sur l’asile, entrées en vigueur au 1er juillet 2013, prévoient plusieurs motifs pour le placement en détention des demandeurs d’asile.

C’est pourquoi, « la présomption du respect par la Hongrie des conventions pertinentes en matière de protection des droits de l’homme ne peut ainsi plus être maintenue sans réserve ; que l’autorité doit partant se livrer à un examen approfondi du cas d’espèce au regard de la situation qui règne dans ce pays de destination, examen allant au-delà du certain automatisme qu’autorise la présomption de sécurité ».

Les juges administratifs fédéraux rappellent que « lors de cet examen, il y a notamment lieu de répondre à la question de savoir si la personne concernée est particulièrement vulnérable et, cas échéant, s’il apparaît probable qu’elle remplisse les conditions d’un placement en détention ». Dans le cas particulier, il s’agit de trois enfants en bas âge. L’un d’eux présente un syndrome polymalformatif avec atteinte du massif facial, des mains et de la nuque.

Partant, il y a lieu de considérer que cette cellule familiale fait partie du groupe des personnes vulnérables. Sous l’angle de l’intérêt supérieur de l’enfant (art. 3 CDE) et en application de l’art. 29a al. 3 OA 1, le TAF juge qu’il convient d’appliquer la clause de souveraineté de l’art. 3 § 2 1ère phr. Règlement Dublin II.

Le recours est admis et l’ODM est invité à ouvrir une procédure nationale d’asile.

TAF D-3623/2013

2013-2014

Art. 2, 3 et 44 LAsi ; 33 CR

Cet arrêt est l’occasion pour le TAF de souligner à quel point la situation au Soudan est critique pour toute personne soupçonnée, à tort ou à raison, de soutenir l’opposition ou un groupe rebelle. Les étudiants, les journalistes, les défenseurs des droits de l’homme, les personnes actives dans les ONG ou encore celles travaillant au sein des agences de l’ONU sont surveillées, intimidées, voire torturées. De plus, les services de renseignement surveillent les activités politiques des ressortissants soudanais en exil.

La qualité de réfugié doit ainsi être reconnue à un demandeur d’asile soudanais membre du SLM (Soudan Liberation Movement) ayant donné une conférence à l’ONU en Suisse et ayant été interrogé par des journalistes. Pareil profil politique est en effet susceptible d’avoir été perçu par les forces de sécurité soudanaises et d’avoir suscité des soupçons auprès d’elles.

TAF D-7259/2013

2013-2014

Art. 2, 3 et 7 LAsi

A., un ressortissant érythréen, dépose une demande d’asile en Suisse le 15 novembre 2012. Il explique être un curé orthodoxe engagé pour l’indépendance de sa communauté religieuse. En 2008, les services secrets auraient procédé à une perquisition à son domicile et auraient découvert un document critique envers le gouvernement, qu’il aurait rédigé en vue d’une publication. À la suite de cette découverte, il est interrogé durant une semaine.

Un mois plus tard, un parent de sa femme l’informe que son arrestation est prévue. Il décide alors de quitter le pays, mais sa tentative échoue et il est mis en détention. Il parvient finalement à s’enfuir et rejoint la Suisse. Par décision du 25 novembre 2013, l’ODM reconnaît la qualité de réfugié de A., mais refuse de le mettre au bénéfice de l’asile, considérant que son récit comporte des incohérences. Saisi d’un recours, le TAF examine les différents éléments d’invraisemblance retenus dans la décision attaquée.

Contrairement à l’ODM, le Tribunal estime plausible que le recourant ait subi un interrogatoire durant une semaine en 2008 et qu’il n’ait été arrêté qu’un mois plus tard. De même, le fait qu’il ait été averti de son arrestation imminente par un proche n’est pas irréaliste. Enfin, les juges administratifs fédéraux considèrent que ses allégations en lien avec la rédaction de son livre sont crédibles et qu’elles coïncident avec différents rapports établissant la mise en détention de plusieurs ecclésiastiques.

Dans ces circonstances, le TAF admet le recours de l’intéressé et le met au bénéfice de l’asile.

TAF D-6428/2013

2013-2014

Art. 63 al. 1 let. b Lasi ; 1, section C, ch. 1 à 6 CR

Par décision du 15 octobre 2013, l’ODM retire la qualité de réfugié de A., un ressortissant chinois d’ethnie tibétaine, en raison de son séjour en République populaire de Chine. A. recourt contre cette décision en expliquant que son père est gravement malade et qu’il lui a demandé de le visiter une dernière fois.

Le TAF rappelle que selon l’art. 63 al. 1 let. b LAsi, l’ODM révoque l’asile ou retire la qualité de réfugié pour les motifs mentionnés à l’art. 1, section C, ch. 1 à 6, de la Convention du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés. Le TAF constate que le fait pour une personne reconnue comme réfugié en Suisse de se rendre dans le pays persécuteur représente un indice indiquant que le risque de persécution ne demeure plus. L’application de l’art. 63 al. 1 let. b LAsi en lien avec l’art. 1 ch. 1 CR suppose néanmoins que trois conditions soient réalisées : le recourant doit avoir contacté les autorités de son pays d’origine, il doit s’être réclamé de la protection de celles-ci et il doit enfin avoir effectivement obtenu une telle protection.

En l’espèce, A. a demandé et obtenu du Consulat chinois la délivrance d’un passeport. Il était donc possible pour les autorités chinoises de contrôler les données relatives au recourant et de procéder à son arrestation, ce qu’elles n’ont pas fait puisque son entrée et son séjour sur le territoire chinois se sont déroulés sans encombre.

A cela s’ajoute le fait que la maladie du père de A. ne présente pas un risque vital, pour autant qu’il reçoive un traitement médical adéquat. Son état de santé n’est donc pas assez préoccupant pour susciter chez le recourant une pression morale suffisant à écarter le caractère volontaire du séjour en Chine.

Dans ces conditions, les juges administratifs estiment que l’ODM a, à juste titre, retiré la qualité de réfugié du recourant. Ils précisent toutefois que cette décision ne porte pas atteinte à l’autorisation de séjour qui lui a été délivrée.

TF 2C_360/2013

2013-2014

Art. 62 LEtr ; 8 CEDH

Un ressortissant kosovar, né en 1975, entre en Suisse en 1994 dans le cadre du regroupement familial. En 1995, il épouse une compatriote au bénéfice d’une autorisation d’établissement avec laquelle il a deux fils. Par la suite, il commet à plusieurs reprises des infractions pénales (rixe, infractions à la LCR, violences conjugales, infractions à la LStup) pour lesquelles il est condamné à des amendes et à une peine privative de liberté de 45 jours.

Après un avertissement et de nouvelles infractions à la LStup, il est condamné à une peine privative de liberté et son permis de séjour n’est plus prolongé. Le TF reconnaît que le conjoint d’un étranger au bénéfice d’une autorisation d’établissement a droit à la prolongation de sa durée de validité à condition de vivre en ménage commun avec ce dernier.

Toutefois, le permis peut être révoqué aux conditions de l’art. 62 let. b LEtr si l’étranger a été condamné à une peine privative de liberté de longue durée. Cette condition de révocation est remplie en l’espèce. En outre, une restriction à la vie familiale (art. 8 CEDH) est justifiée si elle sert à préserver la sécurité et l’ordre publics suisses. Par conséquent, le recours est rejeté.

TF 2C_1039/2013

2013-2014

Art 91 et 122 LEtr

Une société de construction et de rénovation est condamnée à plusieurs reprises pour avoir engagé du personnel au noir. En plus de sa sanction pénale, elle fait l’objet d’une interdiction d’engager de la main-d’oeuvre étrangère pour une durée de trois mois. En 2013, elle sollicite une autorisation de travail pour un ressortissant kosovar.

Parallèlement, à la suite d’un nouveau contrôle de chantier, il est à nouveau constaté qu’une personne sans autorisation de travail œuvre pour le compte de la société, celle-ci n’ayant apparemment pas fait les démarches nécessaires pour s’assurer que son employé disposait d’un permis de travail.

Dès lors, une nouvelle décision l’enjoignant à respecter les procédures applicables lui est notifiée. Une interdiction d’engager des travailleurs étrangers pour une durée de six mois est prononcée. Saisi d’un recours, le TF constate que la société a récidivé plusieurs fois en matière de travail illégal et que, d’un point de vue de la proportionnalité, la sanction prononcée se justifie donc. Le recours est rejeté.

Art. 67 LEtr ; 80 et 81 OASA

Deux époux géorgiens sont mis au bénéfice d’un visa Schengen d’une durée de 45 jours. Ils font l’objet d’une décision d’interdiction d’entrée de trois ans, car l’ODM considère qu’ils ont attenté à la sécurité et à l’ordre publics en Suisse en induisant « volontairement et délibérément en erreur les autorités suisses afin d’obtenir frauduleusement une autorisation d’entrée dans l’Espace Schengen ». Saisi de l’affaire, le TAF confirme la décision de l’ODM

A contrario, dans l'arrêt du TAF C-2128/2012, le recours a été admis.

TAF D-4045/2013

2013-2014

Art. 5 et 51 LAsi ; 33 CR ; 64 LEtr ; 8 CEDH

Le recourant est kurde et de confession alévie. Il est arrivé en Suisse le 27 juillet 1988, avec sa famille. Tout comme ses parents et ses frères, il a été mis au bénéfice de l’asile. L’intéressé avait alors onze ans. En 2002, pour pouvoir enterrer un de ses frères en Turquie, ses parents ont renoncé à la qualité de réfugié et l’asile. Puis, par la suite, ils en ont décidé de même pour le recourant. Il ne lui restait alors que son permis d’établissement.

Le 7 juillet 2011, en raison de son comportement pénal, l’autorité cantonale révoque l’autorisation d’établissement. En date du 25 janvier 2012, saisi de l’affaire, le Tribunal administratif cantonal admet partiellement le recours et invite l’autorité cantonale à demander à l’ODM d’accorder l’admission provisoire.

Le 3 avril 2012, l’autorité cantonale transmet à l’ODM une demande tendant à l’octroi de l’admission provisoire de l’intéressé en tant que réfugié. L’autorité fédérale engage une procédure d’asile à l’issue de laquelle elle ne reconnaît pas à l’intéressé la qualité de réfugié et ordonne son renvoi.

Pour les juges administratifs fédéraux, l’objet du litige ne saurait être la question de la qualité de réfugié, mais celle de l’octroi ou non de l’admission provisoire, à la suite de la confirmation de la révocation de l’autorisation d’établissement. C’est pourquoi la décision attaquée doit être annulée.

Art. 50 et 61 LEtr

Un ressortissant pakistanais né en 1979 entre en Suisse en août 2000 afin de suivre une formation supérieure à la Haute Ecole de Lucerne. Dix jours avant l’expiration de son autorisation de séjour, il se marie avec une ressortissante portugaise au bénéfice d’une autorisation d’établissement en octobre 2004. Il reçoit alors une autorisation de séjour valable jusqu’en octobre 2009. En février 2008, il se sépare de son épouse, qui part sans laisser d’adresse.

En janvier 2010, il dépose une demande de prolongation de son autorisation de séjour, rentre au Pakistan pour y visiter sa mère malade et requiert un visa de retour pour « regroupement familial ». Ses demandes de prolongation de son autorisation de séjour et de visa sont refusées. Le Tribunal fédéral considère que le recourant, marié à une ressortissante européenne, a un droit à une autorisation de séjour tant que dure formellement le mariage, sous réserve de l’abus de droit. Il y a abus de droit si le mariage est maintenu formellement sans réelle intention de vivre en commun et que le maintien du mariage a pour but de contourner les dispositions légales en matière du droit des étrangers.

En l’occurrence, la vie commune a duré plus de trois ans et le Tribunal fédéral constate que le recourant est bien intégré en Suisse où (i) il a toujours travaillé, (ii) il ne dépend pas de l’aide sociale, (iii) il participe à une vie sociale et associative (Cricket Club Zurich), (iv) il n’a pas occupé les forces de police ni la justice et (v) où il a appris l’allemand, langue qu’il parle convenablement.

Le Tribunal fédéral considère dès lors que son intégration est réussie au sens de l’art. 50 al. 1 let. a LEtr et admet le recours.

Art. 50 LEtr

Le TF juge que dans le cadre du calcul du délai de l’art. 50 al. 1 let. a LEtr, la durée de trois ans doit être totalisée avec le/la même conjoint/e. Dans ces deux arrêts, un ressortissant kosovar et un ressortissant bengali ont épousé chacun une ressortissante suisse, de laquelle ils se sont séparés avant le délai de trois ans.

Par la suite, ils se sont tous les deux remariés chacun avec une autre ressortissante suisse. Ainsi, ils totalisent plus de trois ans de vie conjugale, mais avec deux femmes différentes. Malgré leur bonne intégration, le TF considère que la durée de trois ans doit être réalisée avec la même personne pour pouvoir prétendre au maintien de l’autorisation de séjour en application de l’art. 50 al. 1 let. a LEtr.

Art. 5 LEtr ; 2 et 4 OEV

Une ressortissante turque demande des visas d’entrée pour elle, son mari et sa fille de trois ans pour rendre visite à des membres de sa famille en Suisse à l’occasion d’un mariage, pendant trois semaines. Sa demande est refusée, car les autorités considèrent que la sortie de Suisse n’est pas garantie. Le TAF constate sur recours qu’il n’y a aucun droit à l’octroi d’un visa. Cette liberté est restreinte dans le cadre des accords Schengen en faveur d’une pratique uniforme.

En droit suisse tout comme en droit Schengen et sous réserve d’autres conditions (moyens financiers suffisants, absence de danger pour l’ordre public), la sortie de l’étranger du territoire national doit être assurée. En l’occurrence, la recourante a 36 ans et vient d’une région économiquement faible. Les jeunes y sont soumis à une forte pression migratoire.

La recourante est mère au foyer et dispose de tout son réseau social dans sa région d’origine. Son mari travaille et la famille dispose d’une situation économique stable. Elle n’a pas vu son père, qui vit en Suisse en tant que réfugié, depuis 13 ans et le mariage de son frère a effectivement eu lieu.

Les motifs de la visite annoncés sont donc corrects et il n’y a pas d’empêchement à l’entrée au sens de l’art. 5 LEtr. Selon le TAF, l’instance précédente a constaté les faits de façon lacunaire, notamment en ce qui concerne le réseau familial de la recourante en Suisse. Par conséquent, le recours est admis et l’affaire renvoyée à l’autorité précédente pour nouvelle instruction.