Droit administratif

ATF 147 I 73 (d)

2020-2021

Studienreglement 2013 für den Bachelor-Studiengang Biologie ; recevabilité du recours en matière de droit public ; examens ; moyens auxiliaires ; égalité de traitement ; discrimination fondée sur la langue. Une étudiante tessinoise italophone en bachelor en biologie à l’EPZ échoue à son examen écrit de Physikalische Chemie II. Les directives reçues des organisateurs de l’examen indiquaient que le recours à un dictionnaire n’était pas autorisé. Le recours en matière de droit public est recevable contre la décision d’échec en dépit de l’art. 83 let. t LTF, puisque la recourante s’en prend à la procédure d’examen et non à l’évaluation de ses capacités par les examinateurs à proprement parler. De l’égalité de traitement et l’interdiction des discriminations découle le principe de l’égalité des chances en matière d’examens, qui impose qu’un examen soit organisé en respectant le plus possible l’égalité formelle entre les candidats. Exceptionnellement, en vertu de l’interdiction des discriminations et indépendamment de ce que prévoient la loi et ses textes d’application, une compensation des faiblesses peut s’imposer. Elle ne saurait toutefois intervenir que si la faiblesse du candidat ne porte pas sur l’objet même de l’examen. L’expression écrite fait certes partie des qualités requises de tout candidat à un examen écrit de l’EPFZ, mais ne constitue pas le point central de l’examen d’espèce. L’interdiction signifiée à l’étudiante italophone de se munir d’un dictionnaire italien constitue donc une discrimination, qui n’est acceptable qu’en présence d’un motif justificatif qualifié. Au regard de la dimension fédérale de l’EPFZ et du fait qu’aucun cursus équivalent à celui de la recourante n’est offert dans sa langue maternelle, l’on peine à identifier un motif justificatif à la discrimination.

ATF 147 I 153 (d)

2020-2021

Taxe hospitalière cantonale ; taxe causale ; taxe d’utilisation ; nature juridique d’une créance ; droit à une audience publique. La nature juridique de la créance d’un hôpital public envers ses patients se détermine en première ligne selon le droit cantonal et communal. Le droit zurichois classe les prétentions d’un hôpital public pour ses services de contributions causales prenant la forme de taxe d’utilisation. Il n’est cependant pas encore dit qu’une telle créance de droit public soit soustraite au champ d’application de l’art. 6 par. 1 CEDH, dont les notions – notamment celle de droits et obligations à caractère civil – s’interprètent de manière autonome. Les obligations fiscales sont exclues du champ d’application de l’art. 6 CEDH, mais en l’espèce, la configuration est telle qu’elle se rapproche grandement de la créance de droit privé qu’un hôpital privé pourrait faire valoir à l’encontre d’un patient, qui tomberait alors dans le champ d’application de l’art. 6 CEDH. Cette disposition doit donc trouver application en l’espèce.

ATF 147 I 173 (d)

2020-2021

Péréquation financière intercommunale ; apparence de prévention ; récusation ; procédure de récusation ; droit à une composition correcte de l’autorité judiciaire ; droit cantonal. La jurisprudence du TF prévoit dans les matières civile et pénale qu’un motif de récusation découvert après une décision cantonale de première ou seconde instance doit en principe être fait valoir par la voie de la demande de révision. Lorsqu’il est découvert pendant le délai de recours, cependant, il doit être fait valoir dans le cadre de la procédure de recours sous l’angle du droit à une autorité composée correctement. Lorsque le motif de récusation est découvert alors que la cause est pendante devant le TF, il convient de requérir la suspension de ladite procédure et saisir l’autorité précédente d’une demande de révision. Les mêmes principes valent dans les causes de droit public cantonal, pour autant que le motif de récusation se fonde directement sur l’art. 30 al. 1 Cst., hypothèse dans laquelle le TF bénéficie d’un plein pouvoir d’examen, s’agissant d’une question de droit fédéral. Il y a violation de l’art. 30 al. 1 Cst. si un juge, qui est par ailleurs membre de l’exécutif d’une commune, participe à une procédure concernant la péréquation financière intercommunale qui a été engagée à la demande d’une autre commune du même canton (consid. 5).

ATF 147 I 219 (d)

2020-2021

Droit à une audience publique ; procédure disciplinaire ; profession d’avocat. L’art. 6 par. 1 CEDH garantit, dans les contestations sur des droits à caractère civil, un droit à ce que la cause soit jugée par un tribunal au cours d’une procédure publique. La procédure disciplinaire à l’encontre des avocats selon l’art. 17 LLCA prévoit entre autres comme sanction une interdiction de pratiquer et constitue donc une contestation sur des droits à caractère civil. Les garanties de procédure de l’art. 6 par. 1 CEDH, y compris le droit à une audience publique, s’appliquent également lorsque dans le cas concret seul un avertissement, et non une interdiction de pratiquer, a été prononcé ou est litigieux devant le tribunal.

Accès au juge ; voies de droit ; exclusion du recours. L’art 11 al. 3 de l’Ordonnance COVID dans le secteur de la culture du 20 mars 2020 prévoit que les décisions qui l’exécutent « ne sont pas sujettes à recours », disposition reprise telle quelle en droit cantonal vaudois et dans la décision dont est recours par un artificier ayant requis le paiement d’indemnités en raison de la réduction de l’horaire de travail. Cette disposition viole l’art. 29a Cst. en tant qu’elle exclut tout recours contre les décisions prises en exécution de l’ordonnance. Elle est inconstitutionnelle et inapplicable.

ATF 147 I 47 (f)

2020-2021

Transparence ; rapport d’audit ; document officiel ; document officiel ayant trait à une procédure pendante. Aux termes de l’art. 69 al. 2, CPDT-JUNE, l’accès aux documents officiels ayant trait aux procédures et arbitrages pendants est régi par les dispositions de procédure. Les documents élaborés en dehors d’une procédure judiciaire (et qui se trouvent dans le dossier de procédure au sens large) demeurent accessibles en vertu de la législation sur la transparence, alors que cette législation ne s’applique pas pour les actes qui ont été ordonnés expressément dans le cadre d’une procédure judiciaire. Tel est le cas d’un rapport d’audit commandé par le Conseil d’Etat en-dehors de toute procédure civile ou pénale ayant par la suite été déposé au dossier de ces procédures. Il n’est ainsi pas exclu du champ d’application de la CPDT-JUNE.

Compteur d’eau électronique ; transmission automatique des données ; sphère privée ; risque d’usage abusif de données personnelles. Un compteur d’eau électronique qui mesure continuellement et enregistre localement durant 252 jours l’état d’alarme, l’état actuel du compteur ainsi que les débits maximal et minimal, puis crypte les valeurs ainsi mesurées et les émet par ondes toutes les 30 ou 45 secondes, traite des données en ne répondant à aucun intérêt public. L’enregistrement de la valeur d’eau consommée le jour du contrôle, son émission pour être lue à distance (p. ex depuis la rue) par un lecteur protégé par mot de passe, et son utilisation pour la facturation de l’eau consommée, sont suffisants pour atteindre le but poursuivi par la commune, qui est de facturer ses prestations de fourniture d’eau. Les traitements dépassant cette mesure consacrent une violation du droit à l’autodétermination informationnelle (art. 13 al. 2 Cst.), outre le fait qu’ils ne disposent pas d’une base légale en l’espèce.

Publicité de la justice ; publication des jugements ; affaires matrimoniales. Le principe de publicité de la justice ancré à l’art. 30 al. 3 Cst. garantit un droit à l’accès à tous les jugements après le prononcé du jugement, même s’ils ont été rendus il y a quelque temps, et peu importe si la demande d’accès porte sur quelques jugements ou un grand nombre d’entre eux. En présence de nombreux jugements, le travail d’anonymisation et de caviardage ne doit pas submerger l’autorité. Le droit à la consultation des jugements après leur prononcé peut être restreint notamment pour protéger la sphère privée des parties, au terme d’une pesée d’intérêts en accord avec le principe de proportionnalité. L’intérêt des journalistes, des chercheurs et des avocats est en principe prépondérant. La confidentialité des procédures matrimoniales postulée à l’art. 54 al. 4 CPC n’a pas d’incidence sur la publicité des jugements après leur prononcé. Ceux-ci doivent également être rendus accessibles de manière appropriée.

Renseignement ; collecte de donnée ; surveillance de masse ; protection juridique ; intérêt digne de protection ; intérêt personnel ; chilling effect. L’association « Société Numérique » et sept personnes – parmi lesquelles un avocat et des journalistes – saisissent le service des renseignements de la Confédération (SRC) en lui demandant de mettre fin aux activités d’exploration radio et du réseau câblé du SRC et d’autres agences et d’établir que ces activités violent leurs droits fondamentaux selon la Cst. et la CEDH, demande à laquelle le SRC refuse de donner suite. C’est à tort que le SRC a refusé de rendre une décision basée sur les art. 25 LPD ou 25a PA. Sur le plan de l’intérêt personnel digne de protection à agir, s’il est vrai que les recourants journalistes et avocat pourraient se prévaloir d’un intérêt digne de protection se détachant de la collectivité, même eux ne font pas valoir que leurs données auraient été concrètement traitées par le SRC ; ils demandent bien plus un intérêt à faire vérifier le système de renseignement dans son entièreté. Cette requête est recevable, car une requête individuelle fondée sur le droit de la protection des données ne leur donnerait pas satisfaction en raison des obstacles liés à la confidentialité de l’activité en cause – il en va de même de l’exercice du droit d’accès au sens de l’art. 63 LRens, qui peut être reporté sur des décennies, et de la saisine du PFPDT au sens de l’art. 64 LPD, qui constitue un mécanisme de contrôle objectif et non une voie de droit remplissant les conditions de l’art. 13 CEDH. La jurisprudence de la CourEDH impose qu’au moins une autorité judiciaire nationale avant elle procède à l’examen du système de surveillance de masse des communications mis en place par un Etat membre. Le SRC doit donc rendre une décision en application de l’art. 25 LPD et examiner la demande des recourants consistant à déterminer si l’exploration radio et du réseau câblé viole leurs droits fondamentaux et, dans l’affirmative, quelles conséquences juridiques doivent y être rattachées. Cet examen devra intervenir à l’aune non seulement du droit régissant l’activité du SRC et d’autres agences impliquées (LRens et ordonnances d’application), mais aussi des éventuelles directives et instructions internes, de la pratique effective des autorités ainsi que du contrôle effectué par les autorités de surveillance.

58 Décision 2007/533/JAI du Conseil du 12 juin 2007 sur l’établissement, le fonctionnement et l’utilisation du système d’information Schengen de deuxième génération (SIS II) (FF 2008 4821). Le refus d’accès aux données personnelles d’une personne signalée dans le système d’information et de signalement de personnes et d’objets de l’espace Schengen (SIS II) constitue une grave atteinte au droit à l’autodétermination informationnelle (art. 13 al. 2 Cst. ; 8 CEDH). L’absence de renseignement empêche une protection juridique effective (art. 6 et 13 CEDH ; 29a Cst.). L’ignorance des données conservées empêche en outre d’exercer son droit à la rectification de données incorrectes et à la suppression de données conservées illicitement (art. 25 LPD). L’autorité doit donc s’assurer que le but de l’enregistrement dans la base de données justifie l’atteinte aux droits fondamentaux. Elle n’est en particulier pas liée par la prise de position de l’Etat ayant inscrit la personne quant à la divulgation : le principe de loyauté réciproque entre Etats implique de tenir pour vraies les explications données par l’Etat consulté à moins qu’elles présentent des lacunes manifestes, des contradictions ou des erreurs. L’autorité n’est pas non plus tenue de revoir la régularité de la procédure menée à l’encontre de la personne inscrite à l’étranger, à moins de vices graves. Elle est en revanche tenue, sur la base des informations obtenues, d’apprécier si le refus de divulgation est justifié ou non, en demandant cas échéant des informations supplémentaires à l’Etat inscrivant à propos de la nature, la durée et l’objet de la procédure en cours contre la personne inscrite. Si selon son appréciation, l’inscription est injustifiée, après avoir informé l’Etat inscrivant et éventuellement saisi le préposé européen à la protection des données, elle devra divulguer les informations auxquelles l’accès a été demandé.

Règlement d’organisation des Programmes nationaux de recherche (PNR) du FNS ; transparence ; souveraineté ; décision ; composition de l’autorité ; délégation. Seuls les documents qui concernent directement une procédure menant au prononcé d’une décision au sens de l’art. 5 PA sont sujets à la LTrans (art. 2 al. 1 let. b LTrans). Le Conseil de la recherche se prononce sur les demandes de subsides pour la promotion de la recherche. Pour ce faire, il met sur pied un comité de direction (Leitungsgruppe) chargé d’apprécier la qualité scientifique des demandes. Se pose la question de savoir si l’activité du comité directeur est si directement liée à la décision sur les subsides que les documents relatifs à sa composition par le Conseil de la recherche doivent être soumis à la LTrans. Tel est le cas, car faute de connaissances topiques, le Conseil de la recherche délègue l’appréciation de projets scientifiques de projets de recherche aux comités de direction, qui jouent alors un rôle important dans la sélection finale. Leurs recommandations revêtant un poids important, il faut retenir qu’ils agissent de manière souveraine, de sorte que le processus de création de ces comités est soumis à la LTrans en vertu de son art. 2 al. 1 let. b.

ATAF 2020 IV/2 (d)

2020-2021

Marchés publics ; protection juridique primaire ou secondaire ; illicéité de la décision ; remède ; responsabilité de l’Etat. La protection juridique primaire vise l’annulation de la décision viciée et le rétablissement de l’état conforme au droit. La protection juridique secondaire, sous forme de dommages-intérêts au sens du droit des marchés publics, n’entre en ligne de compte que si la recourante n’a plus aucune chance d’obtenir le marché. Après une interruption de la procédure conforme au droit, dans le but de répéter celle-ci, la recourante peut participer au nouvel appel d’offres et, le cas échéant, obtenir le marché. En conséquence, toute prétention à des dommages-intérêts au sens du droit des marchés public est exclue, malgré les irrégularités et les coûts inutiles pour l’établissement de l’offre qui en découlent. Le TAF n’est pas compétent pour connaître d’éventuelles prétentions en dommages-intérêts au sens du droit privé ; cette question doit, le cas échéant, être examinée par un tribunal civil.

Circulation routière ; retrait provisoire du permis de conduire ; mesure provisionnelle ; décision incidente ; recours de l’autorité de première instance. La décision par laquelle le tribunal cantonal annule le retrait provisoire du permis de conduire dans le but de vérifier l’aptitude à conduire et fait l’objet d’un recours de la part de l’autorité de première instance est une décision finale, et non incidente comme le TF a pu le considérer par le passé. Il ne s’agit pas moins d’une mesure provisionnelle, susceptible de critique uniquement pour violation des droits constitutionnels.

Soumission à autorisation d’acquisition pour personne à l’étranger ; établissement stable pour exercer une industrie en la forme commerciale. L’acquisition de parts de propriété par étage par une personne à l’étranger pour le personnel (200 personnes) d’un hôtel adjacent qu’elle possède ne constitue pas un établissement stable pour faire le commerce, exploiter une fabrique ou exercer en la forme commerciale quelqu’autre industrie au sens de l’art. 2 al. 2 let. A LFAIE, pas davantage qu’elle constitue une acquisition simultanée au sens de l’art. 2 al. 3 LFAIE. Elle est donc soumise à autorisation de l’autorité cantonale compétente.