Droit des migrations

TF 2D_50/2012

2012-2013

Une association dépose une demande d’autorisation de séjour de longue durée avec activité lucrative en faveur d’un ressortissant roumain. Jusqu’à la fin de la période transitoire (actuellement 31 mai 2014), la Suisse prévoit des contingents pour les permis de travail de courte et de longue durée à l’égard des ressortissants bulgares et roumains (Protocole II à l’ALCP, RS 0.142.112.688). Selon l’art. 10 al. 2b ALCP, les conditions de l’ordre de priorité et du contrôle des salaires et conditions de travail peuvent être maintenues envers ces mêmes ressortissants. Selon la condition de l’ordre de priorité, l’employeur doit prouver qu’il a cherché à recruter un travailleur sur le marché du travail indigène, les postes vacants doivent être annoncés suffisamment tôt. L’employeur est tenu de prouver les recherches effectuées. L’art. 21 LEtr est applicable, en tout cas par analogie, à l’admission en vue de l’exercice d’une activité lucrative en Suisse des ressortissants des nouveaux États membres de l’UE. En l’espèce, l’indication de la langue roumaine dans l’annonce de recrutement est, selon les juges, directement liée à la personne. Le recours est rejeté.

Un ressortissant kosovar entre en Suisse en 1997, il se marie avec une Suissesse et obtient une autorisation d’établissement en 2005. Il se sépare de sa première femme et épouse une compatriote en 2007, qu’il connaissait depuis 1993 et avec laquelle il a trois enfants au Kosovo. Elle bénéficie du regroupement familial et reçoit finalement une autorisation d’établissement en 2012. Elle dépose une demande de regroupement familial pour ses trois enfants en décembre 2007, le service cantonal refuse précisant qu’aucun des requérants n’avait évoqué l’existence de ces enfants au moment de leur arrivée en Suisse. Les enfants entrent clandestinement en Suisse peu de temps après, un quatrième enfant naît en 2010. Les requérants invoquent une violation de l’art. 8 CEDH. La Cour estime que la séparation de la famille résulte ici d’un choix des requérants de quitter leur pays d’origine et qu’ils n’ont pas été empêchés de mener une vie familiale. Les juges estiment de plus que les enfants ont de solides liens sociaux et culturels avec leur pays d’origine et qu’ils n’ont pas vécu suffisamment longtemps en Suisse pour que ces liens puissent être considérés comme rompus. Le comportement des requérants pendant la procédure joue également en leur défaveur. L’art. 8 CEDH ne garantit pas le droit de choisir le lieu le plus approprié à la vie familiale. La Suisse ne viole donc pas l’art. 8 CEDH en refusant d’accorder des titres de séjour aux enfants des requérants.

Une ressortissante philippine est séparée de son compagnon dont elle a un enfant né en 2001 et sur lequel elle exerce l’autorité parentale. L’intéressée retourne aux Philippines avec l’enfant suite à une mesure de renvoi prise à son égard en 2002, puis autorise le père à prendre l’enfant en Suisse pour des vacances en 2004. Le père ne rend pas l’enfant à sa mère, celle-ci entreprend différentes démarches en vue de récupérer son enfant, et dépose une demande d’autorisation d’entrée en Suisse en 2006 afin de pouvoir vivre auprès de son fils, refusée par l’ODM en 2008 puis par le TAF en 2009. Elle est finalement mise au bénéfice d’une autorisation de séjour en octobre 2012. La requérante allègue que le refus de lui octroyer une autorisation de séjour pendant plus de six ans a violé son droit au respect de la vie familiale garanti par l’art. 8 CEDH (§45). La Suisse n’a entrepris aucune démarche pour protéger la vie familiale de l’intéressée, le fait de ne pas lui octroyer d’autorisation de séjour pendant plus de six ans constitue une ingérence dans sa vie familiale. Selon la Cour, l’écoulement du temps peut avoir des conséquences irréversibles sur la relation entre un parent et son enfant, il faut donc que la réunification de ceux-ci puisse se faire rapidement. Il y a en l’espèce violation de l’art. 8 CEDH du fait que la requérante ait été privée de l’exercice effectif de sa vie familiale avec son enfant pendant plus de six ans. Le récent octroi d’une autorisation de séjour ne permet pas, selon la Cour, d’effacer suffisamment les conséquences de cette séparation.

Un ressortissant kosovar entre en Suisse en 1990 dans le cadre du regroupement familial, il est au bénéfice d’une autorisation d’établissement. Il fait l’objet de diverses condamnations dès 2003. Il se marie en 2007 avec une ressortissante kosovare pour laquelle il dépose une demande de regroupement familial. L’intéressé est expulsé de Suisse le 31 mars 2008. Le requérant allègue que son expulsion est disproportionnée, étant donné qu’il a vécu 18 ans en Suisse. La Cour reconnaît que le requérant a passé plus des deux tiers de sa vie en Suisse et que celui-ci n’a pas commis de nouvelles infractions depuis sa dernière condamnation en 2007. Elle estime cependant que la gravité des infractions commises est relativement importante (notamment menaces de mort à l’encontre de son ex-amie). Le fait que l’expulsion du requérant soit d’une durée limitée (10 ans) et qu’il n’est pas contesté qu’il pourrait se réintégrer au Kosovo dont il connaît encore les coutumes et habitudes, la Cour estime qu’il n’y a pas violation de l’art. 8 CEDH, compte tenu également de la gravité des infractions et les attaches du requérant avec le Kosovo de par son épouse kosovare également.

Un ressortissant nigérian entre en Suisse en 2001 et dépose en vain une demande d’asile. Il épouse une ressortissante suisse en 2003 avec laquelle il a deux enfants (jumelles) et reçoit une autorisation de séjour. Il avait été condamné en 2001 par un tribunal autrichien à 4 mois d’emprisonnement pour possession de drogue et est à nouveau condamné en 2006 à 42 mois d’emprisonnement par un tribunal allemand pour trafic de drogue.

L’ODM prononce à l’encontre de l’intéressé une décision d’interdiction d’entrée sur le territoire suisse valable jusqu’en janvier 2020. Sur le plan personnel, le requérant et son épouse ont divorcé, il bénéficie d’un droit de visite sur ses filles et entretient des contacts réguliers avec elles. Il est père d’une troisième fille depuis août 2012 qu’il a eue avec une autre ressortissante suisse qu’il envisage d’épouser. La Cour reconnaît qu’il y a ingérence dans le droit au respect de la vie familiale du requérant. Au moment d’analyser la proportionnalité de la mesure, la Cour estime que l’atteinte portée par celle-ci est injuste. Plusieurs critères doivent être pris en compte par les autorités pour qu’une atteinte au droit protégé par l’art. 8 §1 CEDH soit justifiée, tels que la nature et la gravité des infractions commises, la situation familiale ou la connaissance de l’infraction par le conjoint au moment de la création du lien familial (cf. §45).

En l’espèce, la Cour met en avant le comportement irréprochable de l’intéressé depuis qu’il a purgé sa peine et estime que cela démontre qu’il ne constitue pas un danger pour l’ordre et la sécurité publics. Le requérant vit depuis sept ans et demi en Suisse, qui constitue le centre de sa vie privée et familiale. Le fait que le lien familial entre la première épouse et les filles du requérant ait été créé avant l’infraction principale du requérant est prépondérant ; l’ex-épouse ne pouvait pas en avoir connaissance au moment du mariage et de la naissance des enfants.

Ce n’est pas le cas pour la troisième fille du requérant ni de sa prétendue future épouse, qui connaissait ou devait connaître la situation précaire de l’intéressé au moment de l’établissement du lien familial. La Cour privilégie l’intérêt supérieur des filles de l’intéressé et estime qu’elles doivent pouvoir évoluer auprès de leurs deux parents. Le seul moyen de garantir cela est d’octroyer une autorisation de séjour au requérant, ce qui permet de garantir le droit des intéressés à vivre ensemble, aspect fondamental du droit au respect de la vie familiale. La Cour constate donc que l’expulsion du requérant constitue une violation de l’art. 8 CEDH. Demande de renvoi devant la Grande Chambre.

Un ressortissant serbe entre en Suisse en 1983, où il vit avec son épouse jusqu’en 2004, au bénéfice d’une autorisation d’établissement depuis 1993. Le couple a deux enfants nés en 1982 et 1984. Le requérant est retourné dans son pays d’origine en 2004 et a annoncé son départ définitif à sa commune. Il revient en Suisse quelques mois plus tard au bénéfice d’un visa touriste et vit chez son épouse, laquelle dépose une demande de regroupement familial en faveur du requérant. La demande est rejetée. Le requérant a entre-temps souffert de problèmes de santé, bénéficié de l’assistance publique à hauteur de 160 000 CHF et fait l’objet de diverses condamnations pour infractions à la LCR et violation de domicile. Les requérants allèguent que le refus d’octroyer une autorisation de séjour ou d’établissement à l’intéressé alors qu’il a passé plus de vingt ans en Suisse constitue une violation de l’art. 8 CEDH. La Cour considère que l’expulsion de résidents de longue date ressort tant de la « vie privée » que de la « vie familiale », deux aspects protégés par l’art. 8 CEDH, et les circonstances de l’affaire l’amènent à axer son jugement sur un volet ou l’autre. En l’occurrence, il s’agit de la vie familiale du requérant qui est touchée, la mesure le tenant éloigné de son épouse et de leurs enfants (§49). Au stade de l’examen de la proportionnalité de l’ingérence, la Cour estime que le bien-être économique du pays ne permet pas de justifier la mesure en cause, compte tenu notamment de la durée considérable du séjour en Suisse des requérants et de leur intégration sociale. La Suisse a donc violé l’art. 8 CEDH.

ATF 139 I 16

2012-2013

Un ressortissant macédonien entre en Suisse en 1994 par le biais du regroupement familial. Il est au bénéfice d’une autorisation d’établissement. En 2010, il est condamné à 18 mois de privation de liberté pour trafic de drogue à la suite de quoi l’autorité cantonale (Thurgovie) lui retire son autorisation d’établissement et prononce son renvoi de Suisse. Le Tribunal fédéral juge le retrait contraire notamment à l’art. 8 CEDH. Lors de l’examen de la proportionnalité de la mesure, le Tribunal fédéral retient que l’intéressé est en Suisse depuis l’âge de sept ans, qu’il y a effectué toute sa scolarité et son apprentissage de peintre. Il était âgé de 19 ans au moment des faits et n’a pas commis de nouvelles infractions depuis sa condamnation. Les juges estiment que l’intéressé n’a de plus pas joué un rôle prépondérant dans le trafic, mais a agi par naïveté due à son âge ainsi que par manque de sens critique. Selon le Tribunal fédéral, l’art. 121 al. 3-6 Cst. (initiative sur le renvoi) n’a aucune influence sur le cas d’espèce car cette disposition n’est pas d’application directe, du moment où elle est en conflit avec les lois en vigueur et le droit international. Les alinéas 3 à 6 de l’art. 121 Cst. doivent donc être transposés par le législateur et ne priment pas sur les droits fondamentaux ou les garanties de la CEDH.

ATF 139 II 121

2012-2013

Un ressortissant portugais ayant séjourné près d’une vingtaine d’années en Suisse se voit notifier une interdiction d’entrée en Suisse d’une durée de dix ans, à la suite de ses différentes condamnations. L’interdiction d’entrée n’est pas régie par l’ALCP, il faut donc appliquer l’art. 67 LEtr, tout en tenant compte des particularités de l’Accord, notamment des droits qu’il confère aux personnes qui en bénéficient. L’interdiction d’entrée destinée à une personne pouvant se prévaloir de l’ALCP doit être conforme à l’art. 5 Annexe I-ALCP (ordre et sécurité publics). Les limites à la libre circulation des personnes doivent s’interpréter de manière restrictive, il faut une menace grave, actuelle et réelle à l’ordre et la sécurité publics. Un ressortissant d’un État tiers n’a en revanche pas besoin d’avoir atteint de manière grave l’ordre et la sécurité publics pour qu’une interdiction d’entrée en Suisse basée sur l’art. 67 LEtr soit justifiée.

En l’espèce, l’ensemble des infractions (étendues sur une période de sept ans) pris en compte laisse penser aux juges qu’il y a une délinquance chronique, et une propension à transgresser la loi. Il constitue donc une menace d’une certaine gravité, réelle et actuelle pour l’ordre et la sécurité publics, justifiant une interdiction d’entrée au sens des art. 67 al. 2 LEtr et 5 Annexe I-ALCP. Pour ce qui est de la durée de la peine, l’art. 67 al. 3 LEtr prévoit que la durée de l’interdiction d’entrée peut être supérieure à cinq ans si la personne constitue une menace grave pour la sécurité et l’ordre publics. Ce système est repris de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier. Les juges différencient trois paliers d’intensité dans l’interprétation de l’art. 67 al. 3 LEtr, une « mise en danger ou atteinte », une « menace d’une certaine gravité » ou une « menace grave ». Cette dernière doit revêtir un degré de gravité particulier et son application doit être exceptionnelle, s’examiner au cas par cas et prendre en compte tous les éléments en cause.

En l’espèce, les circonstances du cas ne permettent pas de limiter à plus de cinq ans le droit à la libre circulation de l’intéressé, même si ses agissements constituent une menace réelle et actuelle pour l’ordre et la sécurité publics ; il ne s’agit pas ici d’une « menace grave » au sens de l’art. 67 al. 3, seconde phrase, LEtr. Une mesure d’interdiction d’entrée de cinq ans apparaît toutefois comme nécessaire, adéquate et proportionnée au vu de la gravité des actes reprochés au recourant, de l’importance du risque de récidive, de sa non-prise en compte des avertissements reçus et de sa situation personnelle précaire.

TF 2C_487/2012

2012-2013

Un ressortissant italien qui est né et a grandi en Suisse est condamné à trois ans de peine privative de liberté et expulsé du territoire pour une durée indéterminée. Le Tribunal fédéral rappelle que la durée de l’interdiction peut être exceptionnellement prolongée en vertu de l’art. 67 al. 5 LEtr, mais ne peut être absolue. Une expulsion à durée indéterminée est jugée comme inacceptable par la Cour EDH ainsi que par la CJUE (cf. Arrêt CJUE Shingara et Radiom c. UK du 17 juin 1995 aff. C-65/95 et C-111/95).

En l’espèce, l’intéressé s’est bien comporté depuis ses condamnations, les juges estiment donc que l’intérêt public à ce qu’il soit éloigné de la Suisse perd de l’importance. Cela n’est toutefois pas suffisant, l’intéressé n’ayant pas démontré que la durée de l’interdiction d’entrée violait ses droits personnels. Il n’a de plus pas de travail en Suisse, ne dispose donc pas de ressources suffisantes et ses liens familiaux dans ce pays ne sont pas relevants. Le Tribunal fédéral déboute donc l’intéressé.

TF 2C_65/2012

2012-2013

Une femme originaire de Mongolie entre en Suisse en 2005 et épouse un ressortissant portugais établi dans le canton de Zurich en 2006. Elle est alors mise au bénéfice d’une autorisation de séjour UE/AELE. Le couple a une fille en octobre 2006. En 2007, le fils de la recourante, issu d’un premier lit, vient en Suisse et reçoit également une autorisation de séjour UE/AELE. Suite à la séparation du couple, l’autorité cantonale révoque l’autorisation de l’intéressée. Les recourants se prévalent de l’art. 3 al. 6 Annexe I-ALCP pour fonder un droit de présence indépendant aux enfants et, par conséquent, octroyer un droit dérivé à la recourante.

Selon les juges, cela suppose que les enfants soient déjà en partie intégrés dans des relations qui dépassent le cercle familial, ce qui ne peut dès lors pas concerner les enfants en bas âge. Un enfant dont le parent qui en a la garde et qui n’est pas ressortissant d’un Etat membre UE/AELE ne peut pas fonder un droit de présence sur le fait qu’il fréquente le jardin d’enfants. C’est le cas en l’espèce pour la fille de la recourante, qui ne peut pas non plus se prévaloir de l’art. 24 Annexe I-ALCP pour fonder un droit de séjour en vertu de sa citoyenneté européenne, car elle ne dispose pas de moyens suffisants. La recourante ne peut pas bénéficier d’un droit de présence dérivé de celui de sa fille ou de son fils aîné. Pour ce dernier, les juges renvoient la cause à l’instance précédente pour qu’elle examine s’il peut bénéficier d’une dérogation afin de terminer son apprentissage, mais le fait qu’il ne soit plus dépendant de sa mère empêche celle-ci de se prévaloir d’un droit de séjour en Suisse.

ATAF 2013/1 (d)

2012-2013

Art. 83 al. 4 LEtr

Le TAF juge que « Mossoul est le théâtre de tensions politiques et d’affrontements continuels et violents entre groupements ethniques et religieux. La sécurité de la population civile n’est pas garantie. L’exécution du renvoi vers Mossoul se révèle, d’une manière générale, inexigible ».

ATAF 2013/2 (d)

2012-2013

Art. 83 al. 4 LEtr

Examinant la situation en Turquie, le TAF considère que « les provinces de Hakkari et de Sirnak se trouvent dans une situation de violence généralisée ».

ATAF 2013/5 (d)

2012-2013

Art. 1 A ch. 2 CR ; art. 3 LAsi

Arrêt de principe.

Le TAF modifie la jurisprudence publiée dans la décision JICRA 2006/25, en ce sens « qu’on peut admettre que les personnes du Darfour bénéficient en principe désormais d’une possibilité de protection interne compte tenu de la situation existant dans la région de Khartoum, à la condition supplémentaire que le critère de l’exigibilité soit rempli, conformément à la pratique actuelle définie à l’ATAF 2011/51 ».

Art. 84 al. 7 let. c et 96 LEtr

Une ressortissante de Russie, respectivement apatride, ne peut obtenir ni la nationalité russe, ni la nationalité ukrainienne, cela en raison de son refus de collaborer. Les conditions d’application de l’art. 83 al. 7 let. c LEtr paraissent ainsi réalisées. Toutefois, bien que cette disposition soit formulée de manière absolue, l’autorité doit tenir compte de l’art. 96 LEtr dans l’application de cette norme et apprécier la situation notamment sous l’angle du principe de la proportionnalité. Dans cette optique, les juges administratifs fédéraux relèvent que les autorités russes se désintéressent du cas de A., qu’elles indiquent ne plus traiter les demandes de nationalité émanant de personnes ne disposant pas de revenus acquis légalement, que l’intéressée a quand même fourni un certain nombre de documents et qu’elle vit en Suisse depuis presque 20 ans. Ainsi, pour ce cas limite, il convient, au regard de l’art. 96 LEtr, que l’admission provisoire soit accordée pour cause d’impossibilité du renvoi.

ATAF 2012/21 (d)

2012-2013

Art. 8 LAsi ; art. 12, 13, 32 al. 2, 49 let. b et 63 al. 3 PA

Le TAF précise que « l’arrêt sur recours doit être prononcé sur la base du dossier tel qu’il se présente au moment où l’autorité de recours statue. Par conséquent, pour l’appréciation de la décision attaquée de l’ODM, les faits et moyens de preuve nouveaux qui sont invoqués pendant la procédure de recours sont également déterminants dans l’appréciation du bien-fondé de la décision attaquée de l’ODM. Exceptionnellement, des frais de procédure peuvent être mis à la charge de la partie qui a gain de cause si elle les a occasionnés en violant des règles de procédure (art. 63 al. 3 PA). Dans un tel cas, les frais engagés par le recourant pour sa représentation et pour d’éventuelles autres dépenses ne peuvent pas être considérés comme indispensables au sens de l’art. 64 al. 1 PA ».

ATAF 2012/31 (d)

2012-2013

Art. 3 et 12 CDE ; art. 83 al. 4 LEtr ; l’art. 12 CDE est directement applicable.

Dans le cadre d’une procédure d’asile, « la représentation de l’enfant par ses parents suffit pour autant que leurs intérêts soient convergents ». Partant, il est possible de renoncer « à l’audition de l’enfant lorsque son opinion ressort suffisamment des pièces du dossier ».

Art. 34 al. 2 let. b LAsi ; art. 16 par. 1 Règlement Dublin II

Arrêt de principe.

Bien que le Règlement Dublin II prévoit, lorsque les conditions sont réalisées, l’obligation d’examiner toute demande d’asile sur le fond, le TAF juge « qu’une décision de non-entrée en matière selon la LAsi peut (...) être prise dans une procédure dans laquelle la Suisse est, sur la base des critères établis dans le Règlement Dublin II, déclarée compétente pour mener la procédure d’asile et de renvoi et dans laquelle elle est tenue de prendre ou de reprendre en charge un requérant d’asile ».

ATAF 2013/6 (d)

2012-2013

Art. 34 al. 2 let. d LAsi ; art. 29a al. 1 et 2 OA 1 ; art. 5 al. 2, 10 ss, 24 al. 2 et 29 al. 2 Règlement Dublin II

Arrêt de principe.

Selon le TAF, « en conformité avec le principe de réciprocité du droit international public, les règles générales sur la rétroactivité et les dispositions transitoires explicites du Règlement Dublin II, les dispositions dudit règlement s’appliquent également à un événement (correspondant à un critère de rattachement) antérieur à leur entrée en vigueur pour la Suisse ».

Art. 83 let. d ch. 1 LTF ; art. 29 al. 1 Cst., art. 109 al. 4 LAsi

Une personne étrangère visée par une demande d’extradition de l’Etat dont elle cherche à se protéger peut saisir le TF au moyen d’un recours en matière de droit public contre une décision du Tribunal administratif fédéral dans le domaine de l’asile. Par ailleurs, l’argument relatif aux obstacles au renvoi (admission provisoire) est recevable devant le TF. Dans le cas particulier, le TAF viole le principe de célérité en n’ayant statué que près de 21 mois après avoir reçu le recours. Il a violé le principe de célérité. Une réparation est possible par la constatation de la violation et un règlement des frais favorable.

ATAF 2013/11 (d)

2012-2013

Art. 3 LAsi ; art. 1 A CR

Arrêt de principe:

Le TAF examine la situation des Yézidis en Turquie et opère un changement de jurisprudence par rapport à la décision JICRA 1995 no 1. Il juge désormais que « la communauté yézidie en Turquie ne fait pas l’objet d’une persécution collective au sens de la jurisprudence ».

ATAF 2013/12 (d)

2012-2013

Art. 3 LAsi

Selon le TAF « les chrétiens du centre de l’Irak ne subissent pas de persécution collective au sens de la jurisprudence ».

ATF 138 II 513 (d)

2012-2013

Art. 2 al. 1, art. 3, 6a et 7 LAsi

La qualité de réfugié est niée à un ressortissant de Macédoine appartenant au groupe ethnique des Roms, car il aurait pu faire appel aux autorités de son pays pour obtenir protection.

Art. 63 al. 2 LAsi

Pour le TAF, « l’asile peut être révoqué pour le troisième motif prévu à l’art. 63 al. 2 LAsi, même si le fait justifiant la révocation est antérieur à la décision d’octroi de l’asile ».

ATF 139 II 65 (f)

2012-2013

Art. 33 CR ; art. 3 CEDH ; art. 25 al. 2 et 3 Cst. ; art. 5, 64 al. 1 let. d et art. 65 LAsi ; art. 62, 63 et 64 LEtr

Selon le TF, « les autorités cantonales peuvent décider de ne pas renouveler ou de révoquer un titre de séjour qu’elles ont accordé à un étranger au bénéfice de l’asile, puis prononcer et exécuter le renvoi, sans que l’asile ne doive être révoqué au préalable. Toutefois, l’autorité cantonale qui entend ne pas renouveler ou révoquer une autorisation de séjour ou d’établissement d’un étranger au bénéfice de l’asile et prononcer le renvoi de l’intéressé en application de l’art. 64 al. 1 let. c LEtr, doit veiller à ce que, outre le respect des conditions des art. 62 ss LEtr, les exigences de l’art. 65 LAsi soient respectées ».

ATF 139 II 1 (f)

2012-2013

Art. 24 par. 1 let. b CR ; art. 59 LAsi ; art. 2 al. 2 ARéf

Pour le TF, « sous l’empire de l’art. 59 LAsi, un réfugié admis provisoirement peut également se prévaloir de l’art. 2 al. 2 ARéf ».

Art. 8 CEDH ; art. 121 al. 3 Cst. (version du 28 novembre 2010) ; art. 63 al. 1 let. a en relation avec l’art. 62 let. b ainsi que l’art. 96 LEtr

Malgré un long séjour en Suisse, une personne étrangère qui commet une infraction qualifiée à la loi sur les stupéfiants peut faire l’objet d’une révocation d’une autorisation d’établissement.

Art. 8 CEDH ; art. 5, 190 et 121 al. 3-6 en relation avec l’art. 197 ch. 8 Cst. ; art. 62 let. b, art. 63 al. 1 let. a et b, ainsi que al. 2 LEtr

Les alinéas de l’art. 121 Cst. (renvoi des étrangers criminels) « ne sont pas directement applicables et nécessitent une transposition par le législateur ; ils ne priment pas sur les droits fondamentaux ou les garanties de la CEDH ». Par ailleurs, « il y a lieu de tenir compte des jugements de valeur exprimés par le constituant dans la mesure où cela n’entre pas en contradiction avec le droit supérieur ni en conflit avec la marge d’appréciation que confère la CourEDH aux Etats contractants dans la mise en oeuvre de leur politique de contrôle de la migration et des étrangers ».

TF 2C_401/2012

2012-2013

Révocation d’un permis d’établissement d’un Portugais né en Suisse et ne parlant pas sa langue d’origine, condamné à 6 reprises à des peines privatives de liberté pour un total de 4 ans.

TF 2C_923/2012

2012-2013

L’ALCP et la CEDH n’excluent pas le renvoi d’étrangers qui résident depuis de nombreuses années en Suisse ou qui y ont passé toute leur existence. Il faut toutefois que les limites imposées par l’art. 5 Annexe I-ALCP soient interprétées restrictivement, en fonction de la menace actuelle et du risque réel de récidive. En l’espèce, la révocation de l’autorisation d’établissement d’un ressortissant français ayant fait l’objet de 9 condamnations pénales et qui totalise 14 ans de peines privatives de liberté est confirmée par le Tribunal fédéral.

ATF 139 IV 128 (d)

2012-2013

Art. 115 LEtr

La fouille opérée sur une femme, fortement alcoolisée, arrêtée à 7h15 dans un bar qui fait office de « Kontaktbar » dans le milieu de la prostitution, permet de trouver un chip de Swisscom, un i-phone et une liste d’adresses (icône Contacts, accessible sans code d’accès). On déduit des éléments récoltés qu’elle exerce une activité lucrative, sans autorisation, en tant que prostituée. Un certain B., contacté ultérieurement comme témoin, confirme qu’il entretient avec l’intéressée des relations sexuelles tarifées. Partant, il y a violation de l’art. 115 al. 1 let. a et b LEtr et la condamnation à une peine privative de liberté de 45 jours est confirmée.

TF 6B_196/2012

2012-2013

Directive sur le retour ; art. 115 LEtr

Un ressortissant du Kosovo est condamné à une peine de 90 jours-amende à CHF 10.- le jour pour infraction à l’aLSEE et à la LEtr. Le Tribunal fédéral rappelle que le séjour illégal est un délit continu, d’où l’application de la LEtr, car même si le séjour illégal a commencé sous l’empire de l’aLSEE il continue sous le régime de la LEtr. Cela dit, l’intérêt principal de l’arrêt a trait à la Directive sur le retour 2008/115/CE et l’impact de la jurisprudence de la CJUE en droit suisse (affaires El Dridi et Achughbabian). Les juges de l’Union considèrent qu’un État membre de l’UE ne peut ordonner l’emprisonnement d’une personne étrangère en situation irrégulière pour la seule raison qu’elle continue de se trouver de manière illégale sur le territoire de l’État après qu’un ordre de quitter le territoire national lui est notifié et que le délai imparti dans cet ordre est arrivé à échéance. Saisi de la question, le TF relève qu’il n’est pas lié par la jurisprudence précitée de la CJUE, « même si une interprétation conforme du droit suisse doit être privilégiée ». Il ne saisit cependant pas l’occasion pour examiner de manière approfondie cette question et contourne le problème en jugeant que dans l’affaire en cause, la personne étrangère « ne se trouve pas dans les hypothèses visées par les arrêts européens ».

Directive sur le retour ; art. 115 LEtr

Les deux arrêts ici cités font suite à celui du TF 6B_196/2012 du 24 janvier 2013 relatif à l’articulation entre la réglementation Schengen, plus particulièrement la Directive sur le retour, et le droit pénal. Dans la première affaire (TF 6B_617/2012), une Éthiopienne ne collabore pas à l’exécution de son renvoi en ce sens qu’elle refuse de rentrer volontairement dans son pays, ce qui a pour effet de provoquer le refus de l’ambassade de délivrer un laissez-passer. S’agissant de la seconde affaire (TF 6B_618/2012), elle vise une ressortissante de Mongolie qui doit quitter la Suisse déjà depuis juillet 2002. Toutefois, elle se trouve toujours en Suisse et refuse de rentrer volontairement dans son pays. Or, d’après les indications fournies par l’ODM, jusqu’à ce jour, aucun renvoi vers la Mongolie n’a pu être exécuté et seul le retour volontaire est envisageable. Dans ces conditions, pour les deux affaires, le prononcé d’une sanction pénale n’est pas, selon la Haute Cour, incompatible avec les normes découlant de la Directive sur le retour.

ATAF 2013/4 (d)

2012-2013

žArt. 5 al. 2 et art. 13 al. 1 Cst. ; art. 67 al. 2 let. a et art. 67 al. 3 LEtr ; art. 80 al. 1 OASA ; art. 8 CEDH ; art. 94 et 96 CAS ; art. 3 al. 1 CDE

Malgré plusieurs condamnations à des peines privatives de liberté pour des délits commis avec violence, le TAF réduit l’interdiction d’entrée à huit ans. En effet, en liberté depuis février 2010, la personne étrangère « a fondé une famille et s’efforce d’assumer sa responsabilité de père de famille. » Pour le TAF, « il convient d’offrir une perspective à la jeune famille ».

ATF 139 I 37 (d)

2012-2013

Art. 8 CEDH ; art. 13 al. 1 et art. 29 al. 1 Cst. ; art. 34 Code des visas ; art. 5, 10 et 17 LEtr ; art. 6 et 11 OASA ; art. 2, 4, 15 en relation avec l’art. 16 OEV

Pour le TF, « le droit au regroupement familial ne s’éteint pas lorsqu’une personne se marie durant la validité d’un visa Schengen accordé aux fins de visite, raison pour laquelle l’autorité de police des étrangers est tenue, en cas de requête déposée dans le délai, d’ouvrir la procédure d’autorisation et d’examiner le droit au regroupement familial. En cas de réponse négative en première instance durant un séjour toléré sans autorisation, l’intéressé doit attendre la décision à l’étranger, à moins que les conditions d’admission, respectivement d’autorisation, paraissent, avec une grande vraisemblance, réalisées au sens de l’art. 17 al. 2 LEtr ».

Art. 3 et 8 CEDH ; art. 7 et 35 al. 1 et 3 Cst. ; art. 50 al. 1 let. a, resp. art. 50 al. 1 let. b en relation avec al. 2 LEtr.

Un cas de rigueur au sens de l’art. 50 al. 1 let. b et al. 2 LEtr peut résulter de contraintes psychiques d’une certaine constance et intensité.

ATF 138 II 393 (f)

2012-2013

Art. 50 al. 1 let. b et al. 2 LEtr

De manière prétorienne, le TF pose la présomption « que le décès du conjoint suisse constitue une raison personnelle grave qui impose la poursuite du séjour en Suisse du conjoint étranger survivant, sans qu’il soit nécessaire d’examiner encore le caractère fortement compromis de la réintégration de ce dernier dans le pays de provenance », et ce « lorsqu’aucune circonstance particulière ne permet de douter du bien-fondé du mariage ni de l’intensité des liens entre les conjoints. »

TAF C-4686/2012

2012-2013

Art. 2 al. 1 OEV, art. 5 Code frontières Schengen, art. 5 LEtr

Une ressortissante du Cameroun, née le 11 septembre 1977, célibataire, se voit refuser l’octroi d’un visa pour rendre visite à son père malade. Son recours est admis. Le TAF rappelle qu’il existe un risque de non-retour au Cameroun compte tenu des différences de niveau de vie entre ce pays et la Suisse.

Toutefois, plusieurs éléments de la situation personnelle montrent que le départ de Suisse au terme du visa est assuré : l’intéressée s’occupe de sa sœur et de son frère, lesquels n’ont pas encore terminé leur formation universitaire ; elle est responsable de l’administration d’un terrain reçu en héritage par son père ; elle travaille comme secrétaire dans une étude d’avocat et dispose d’un salaire de sept à dix fois supérieur au salaire moyen au Cameroun. Par ailleurs, le non-respect des termes et conditions du visa peut entraîner des conséquences négatives pour le futur et les sanctions pénales (art. 115 à 122 LEtr) ainsi qu’une interdiction d’entrée peuvent être prononcées.

ATAF 2012/32 (d)

2012-2013

Art. 51 al. 1 et 4 LAsi

Le regroupement familial au sens de l’art. 51 LAsi requiert la réalisation de deux conditions : la séparation par la fuite et l’absence de circonstance particulière ne s’opposant pas à l’octroi de l’asile familial. En effet, le but de cette institution est de « permettre de recomposer une communauté familiale séparée par la fuite et non pas de créer de nouvelles relations ou reprendre des relations terminées ». Pour le TAF, « un réfugié qui constitue une communauté de vie analogue au mariage avec une nouvelle compagne et qui fonde avec elle une famille met tacitement fin à sa relation avec son épouse restée au pays. Les conditions pour autoriser cette dernière à entrer en Suisse ne sont dès lors pas remplies ». Par ailleurs, il juge que le fait « d’invoquer une nouvelle communauté de vie analogue au mariage et vécue comme telle pour rester en Suisse constitue une circonstance particulière justifiant le refus d’octroi de l’asile familial à l’épouse ».