Droit international privé

Art. 23 par. 1 CL

Election de for ; champ d’application personnel et territorial ; désignation d’un tribunal matériellement incompétent. L’application de l’art. 23 CL n’exige pas que le tribunal élu par les parties se trouve sur le territoire d’un Etat contractant différent de celui dans lequel se trouve le domicile de la seule partie qui est domiciliée dans un Etat contractant (consid. 3.3). En vertu du principe in favorem validitatis, une exception doit être faite quant à la nullité d’une élection de for qui désigne un tribunal matériellement incompétent, s’il est possible d’établir la volonté hypothétique des parties de convenir de la compétence internationale d’un Etat particulier malgré l’erreur dans la désignation du tribunal matériellement compétent. Les règles de procédure nationale s’appliquent pour déterminer la compétence matérielle des tribunaux.

Art. 47 par. 2 CL ; 271 al. 1 ch. 6 LP

Mesures conservatoires ; reconnaissance et exequatur des décisions étrangères. En vertu de l’art. 47 par. 2 CL, des mesures conservatoires doivent être accordées automatiquement lorsqu’une décision étrangère est déclarée exécutoire dans l’Etat requis. En Suisse, les mesures conservatoires qui peuvent être imposées pour une prétention non pécuniaire sont celles du CPC, et pour une prétention pécuniaire celles de la LP. Les décisions provisoires étrangères visant à préserver le patrimoine du débiteur peuvent appartenir tant à l’une ou à l’autre des catégories. Une décision étrangère de mesures conservatoires relative à une prétention pécuniaire exécutoire en Suisse peut constituer un titre de mainlevée définitive permettant le séquestre d’un compte sans devoir répondre à des exigences supplémentaires. Une mise sous main de justice de biens prononcée en Grèce peut ainsi être reconnue et exécutée en Suisse en tant que séquestre.

Art. 32 CL ; III ss CNY ; 80 s. LP

Arbitrage ; décision ; reconnaissance et exequatur des décisions étrangères. Lorsque le contenu d’une décision italienne est une question de droit civil matériel qui n’a pas été tranchée dans la décision rendue par un tribunal arbitral, et ne concerne donc pas l’arbitrage en tant que tel ou ne sert pas à le mettre en œuvre, cette décision entre dans le champ d’application de la CL et répond aux exigences de la notion de « décision » de l’art. 32 CL (consid. 5.1.1 et 5.2).

Art. 2 al. 2 CC

Bonne foi et interdiction de l’abus de droit ; reconnaissance et exequatur des décisions étrangères. Le devoir d’agir de bonne foi et l’interdiction de l’abus de droit sont des principes de droit interne qui s’appliquent également aux rapports internationaux. Le procédé qui vise à empêcher le tribunal étranger d’établir la paternité sur un enfant par des moyens scientifiques – notamment en se soustrayant à deux reprises de manière injustifiée à une expertise destinée à constater la paternité – ne mérite aucune protection. L’ordre public formel suisse est respecté si le défendeur a eu la faculté de participer à la procédure probatoire. Il importe peu que le défendeur en ait fait un usage concret (consid. 4.3).

Art. 42 CL

Notification d’une décision d’exequatur. La forme de la communication d’une décision d’exequatur se détermine selon le droit de l’Etat dans lequel l’exécution est requise. En Suisse, les règles du CPC s’appliquent pour déterminer la forme que doit prendre la notification d’une décision d’exequatur (consid. 5.1.1).

Art. 38 al. 1, 54 CL

Annexe V de la CL ; certificat d’authenticité ; reconnaissance et exequatur des décisions étrangères. Dans le cadre de la demande de déclaration de la force exécutoire d’une décision allemande en Suisse, la copie de ladite décision accompagnée du certificat de l’annexe V de la Convention de Lugano (art. 54 CL) suffit à attester de l’existence de la force exécutoire de la décision. Bien que l’Etat d’origine prévoit la délivrance d’un certificat visant à prouver l’authenticité de la décision, il n’est pas nécessaire de joindre ce certificat à la demande d’exequatur, car le certificat de l’annexe V de la Convention de Lugano remplit cette fonction. Les exigences de l’Etat d’origine concernant la force exécutoire d’une décision ne doivent pas être cumulées avec celles de l’Etat requis (consid. 5.3).

Art. 38, 53, 54 CL ; 81 al. 1 LP

Titre de mainlevée définitive ; reconnaissance et exequatur des décisions étrangères. La reconnaissance et l’exequatur d’une décision suédoise s’analyse sur la base des conditions formelles de la CL, alors que la validité de la décision en tant que titre de mainlevée définitive doit être analysée par le juge de la mainlevée selon les conditions de la LP (consid. 3.2.2 et 3.2.3).

Art. 4, 8 CLaH 73 (sur la loi applicable aux obligations alimentaires)

Mesures provisionnelles ; divorce ; droit applicable. La contribution d’entretien provisoire demandée à la suite d’un jugement de divorce est régie par le droit applicable au divorce en vertu de l’art. 8 CLaH 73. La demande de contribution d’entretien à la suite du divorce ouvre une procédure destinée à régler les effets accessoires du divorce, ce qui justifie l’application de l’art. 8 CLaH 73. Cette situation doit être distinguée de la demande de contribution d’entretien alors que les époux sont séparés, mais qu’un jugement de divorce n’a pas encore été rendu. Dans ce deuxième cas de figure, l’art. 4 CLaH 73 trouve application pour déterminer le droit applicable à la contribution d’entretien (consid. 3.3).

Art. 86 LDIP

Demande de renseignements ; compétence. L’art. 86 LDIP doit être appliqué dans le cas où l’aspect contractuel d’un rapport juridique n’est pas invoqué et qu’il y a donc lieu d’admettre que la prétention revêt une nature successorale. En l’espèce, l’intimé veut obtenir des informations concernant des œuvres d’art en possession de tiers (les recourants), car à son sens, il y a lieu de penser que ces biens devraient être réintégrés dans le patrimoine successoral du défunt (consid. 4.2).

Art. 12 CLaH 80 ; LF‑EEA

Déplacement illicite d’enfant ; requête en retour de l’enfant. Le litige est renvoyé à l’instance précédente pour nouvelle décision prise sur la base de la CLaH 80, dont l’application avait été écartée dans le jugement précédent qui n’avait pas prononcé le retour immédiat de l’enfant en Allemagne depuis la Suisse (actuellement chez sa mère, laquelle refuse de le faire rentrer chez son père). La présence de deux résidences habituelles simultanées n’est pas possible au sens de la CLaH 80, alors que des résidences habituelles alternatives et successives peuvent être admises, surtout si le droit de garde est alterné et que le temps passé par l’enfant dans les deux résidences est assez long (comme en l’espèce). Il y a lieu d’analyser si l’enfant jouit en l’espèce d’une résidence habituelle en Suisse, en Allemagne ou de « résidences habituelles alternatives et successives » (consid. 5.2 et 5.3).

CLaH 80 ; art. 296 al. 1 CPC

Déplacement d’enfant ; maxime inquisitoire illimitée. A défaut de règles de procédure dans la CLaH 80 ou la LDIP, le juge applique les règles de procédure du CPC de manière subsidiaire. Lorsqu’il est saisi d’une question relative aux enfants en matière de droit de la famille, la maxime inquisitoire illimitée s’applique (art. 296 al. 1 CPC). Cela ne libère pas pour autant les parties du fardeau de la preuve. En cas d’absence de preuve, la partie qui veut déduire un droit d’un élément de preuve manquant en supporte les conséquences (consid. 5.2).

Art. 12 al. 1 let. b CLaH 70

Requête d’entraide judiciaire internationale ; secret bancaire ; qualité de partie du titulaire de compte. La requête d’entraide judiciaire internationale initiée par l’Etat requérant contre une banque n’est pas de nature contentieuse. La requête est dirigée contre la banque et non pas contre le titulaire du compte, qui n’a pas la qualité de partie en première instance. Le titulaire de compte peut, tout au plus, avoir la qualité de partie lors d’un éventuel recours contre la décision admettant la requête d’entraide pour se prévaloir de la violation de ses droits fondamentaux.

Art. 3 let. c, 23 CLaH 70

Entraide judiciaire en matière civile. Une demande d’entraide judiciaire doit indiquer « la nature et l’objet du litige, avec un bref descriptif des faits » selon l’art. 3 let. c CLaH 70. En plus, la réserve faite par la Suisse sur la base de l’art. 23 CLaH 70 concernant le « pre-trial discovery of documents » doit être respectée. Elle impose un lien direct et nécessaire entre la demande et la procédure envisagée (consid. 5.1). L’autorité requérante doit fournir des informations suffisantes à la constatation de ce lien direct par l’autorité requise (suisse), surtout lorsque le demandeur n’est pas partie à la procédure principale étrangère (consid. 5.3.3).

Art. 5, 27 ss CL ; 137 al. 1 LDIP ; 59 al. 2 let. a, 88 CPC

Droit des cartels ; action en constatation négative. L’intérêt légitime et digne de protection est une notion devant être examinée selon le droit national et, en tant que condition pour débuter une procédure, est soumis aux règles procédurales internes du for (consid. 3 et 4), le droit suisse en l’espèce. Le Tribunal fédéral a jugé qu’une société suisse avait un intérêt digne de protection à intenter une action en constatation négative en Suisse, contre un défendeur anglais, en vue de s’assurer un for en Suisse (dans un contexte de forum running) (consid. 5.2 et 5.4).