Marchés publics

ATF 148 II 475 (d)

2022-2023

Le dispositif de la décision de la Comco relative au cartel de soumissions de travaux routiers dans les Grisons, interdit à un concurrent (i) d’offrir ou de demander aux autres concurrents des offres de couverture ou de renoncer à une offre en lien avec des travaux routiers, (ii) de procéder – avant l’expiration du délai de dépôt des offres ou avant l’entrée en force de l’adjudication du marché – à des échanges d’informations avec d’autres concurrents en matière de prix, d’éléments de prix, de répartition de clientèles ou de territoires en lien avec des travaux routiers (avec quelques exceptions) et (iii) de procéder à des échanges d’informations quant à son propre intérêt ou à celui de concurrents à participer à de futurs travaux. Des mesures relatives aux comportements futurs des entreprises (art. 30 al. 1 LCart) peuvent être ordonnées à titre préventif dans le cadre d’une décision de la Comco relative à une violation de la LCart, à tout le moins lorsqu’il existe un risque de réitération que ces mesures visent à empêcher. Il importe peu que l’état de fait illicite soit aussi susceptible de sanctions directes (art. 49a al. 1 LCart) ou non ; il est aussi indifférent que la violation soit terminée ou qu’elle perdure au moment de la décision de la Comco. Les mesures ordonnées au titre de l’art. 30 al. 1 LCart contribuent à l’objectif de protection de la concurrence efficace poursuivi par la LCart, et facilitent l’imposition de futures sanctions en cas de récidive, cette dernière constituant alors la violation d’une décision entrée en force (art. 50 LCart) (consid. 4 et 5.3).

Les accords en matière de concurrence constituent soit des conventions, soit des pratiques concertées, lorsqu’elles visent ou entraînent une restriction de concurrence (art. 4 al. 1 LCart). Un échange unilatéral d’informations – portant soit sur des prix ou éléments de prix ou sur l’allocation de clientèle ou de territoires pour des marchés publics en cours, soit sur son propre intérêt ou celui de concurrents de participer à de futurs travaux de construction – peut constituer une pratique concertée visée par l’art. 4 al. 1 LCart lorsque certaines conditions sont remplies, car il peut amener les concurrents à adapter leurs comportements sur le marché en fonction des informations reçues (ATF 147 II 72). La Comco peut valablement ordonner des mesures (art. 30 al. 1 LCart) interdisant à l’avenir de tels échanges d’informations sur des marchés publics en cours de passation ou sur de futurs travaux de construction, dans la mesure où il s’agit de restrictions actuelles ou potentielles de concurrence susceptibles de violer la LCart (consid. 5.4).

Les mesures d’interdiction relatives aux comportements futurs de concurrents respectent le principe de proportionnalité (art. 30 al. 1 LCart et art. 5 al. 2 Cst). Sous l’angle matériel, l’interdiction peut porter sur de futurs échanges d’informations relatifs à l’allocation de territoire, même si une telle violation n’a pas été constatée dans la décision litigieuse, car la mesure ne fait que répéter ce que l’art. 5 al. 3 LCart prévoit déjà (consid. 5.4.4). Sous l’angle géographique, l’interdiction ordonnée peut s’étendre à tout le territoire suisse, même si la décision litigieuse porte sur des cartels de soumission et des échanges d’informations limités au seul canton des Grisons. En effet, l’entreprise recourante a déjà été impliquée dans le passé dans des accords de soumission dans d’autres régions de Suisse, comme l’Argovie ou See-Gaster. Pour la même raison et sous l’angle personnel, l’interdiction peut porter sur des violations à l’encontre non seulement des pouvoirs adjudicateurs victimes des restrictions de concurrence dans la décision litigieuse (à savoir les communes et canton des Grisons), mais aussi à l’encontre de pouvoirs adjudicateurs d’autres cantons ou communes ou de la Confédération ainsi que de maîtres d’ouvrage privés (consid. 5.5 et 5.3). Sous l’angle temporel, l’interdiction ordonnée ne doit pas être limitée quant à sa durée, car elle ne fait que concrétiser des comportements interdits par la LCart de manière illimitée (consid. 5.6).

ATF 148 II 564 (f)

2022-2023

Attribution d’un monopole d’affichage sans appel d’offres par la commune de Lancy à une société A, suivie de la conclusion d’une convention de monopole pour une durée de 10 ans, avec clause de reconduction tacite pour 5 ans. L’art. 2 al. 7 LMI impose deux obligations : d’une part un appel d’offres (qui implique d’organiser une procédure d’appel d’offres et d’attribuer la concession par le biais d’une décision sujette à recours) et, d’autre part, l’interdiction de discrimination (qui s’applique à la fois à la procédure d’appel d’offres, à la détermination des critères de sélection et au choix du concessionnaire, imposant ainsi le respect du principe de transparence qui est son corollaire (consid. 7.1 et 7.3, ATF 143 II 120).

Selon un principe général, la nullité d’un acte commis en violation de la loi doit résulter soit d’une disposition légale expresse, soit du sens et du but de la norme violée. Hormis les cas expressément prévus par la loi, la nullité n’est admise qu’à titre exceptionnel, lorsque l’annulabilité n’offre manifestement pas la protection nécessaire. La nullité d’une décision n’est admise que si elle est entachée d’un vice particulièrement grave, manifeste ou du moins facilement décelable et que si la constatation de nullité ne pas met pas sérieusement en danger la sécurité du droit (consid. 7.2). En l’absence de règle topique dans la LMI, la nullité de la décision d’attribution d’une concession de monopole violant l’art. 2 al. 7 LMI est justifiée par un vice particulièrement grave et facilement décelable, voire manifeste. En l’espèce, le vice est grave car, en attribuant une concession d’affichage pour 10 ans, avec prolongation possible pour 5 autres années, la commune a durablement exclu la concurrence au profit d’une entreprise, et ce sans procéder à aucun appel d’offres. La commune a bafoué les deux exigences fondamentales d’organisation d’un appel d’offres et d’interdiction de la discrimination prévues par l’art. 2 al. 7 LMI, qui concrétisent la garantie d’accès au marché poursuivie par la LMI (art. 1 al 1 LMI), en réduisant ainsi la compétitivité de l’économie suisse et la cohésion économique du pays (art. 1 al. 2 let. c et d LMI). Cette violation va à l’encontre de la liberté économique (art. 94 al. 1 Cst.), des principes de libre concurrence et de neutralité de l’Etat en matière de concurrence (art. 27 et 94 Cst.) ainsi que du droit des concurrents à l’égalité de traitement (art. 27 Cst.), sans aucune justification (consid. 7.4). Le vice est aussi manifeste ou facilement décelable, car tant la commune que A connaissaient ou pouvaient très facilement déceler l’irrégularité de la décision. Le TF avait rendu deux ans auparavant un arrêt de principe sur l’applicabilité de l’art. 2 al. 7 LMI lors de l’octroi d’une concession d’affichage, publié aux ATF (143 II 120) et rendu sur recours de A. A la même époque, A participait à d’autres appels d’offres relatifs à des concessions d’affichage organisés par plusieurs communes genevoises. Enfin, la recourante B avait contacté à plusieurs reprises la commune en exprimant clairement son souhait de participer au prochain appel d’offres qui serait organisé (consid. 7.5). La nullité de la décision d’attribution de la concession d’affichage ne met pas sérieusement en danger la sécurité du droit, car les investissements consentis par A (panneaux d’affichage) paraissent limités et méritent d’autant moins protection que la bonne foi de A est sujette à caution (consid. 7.6).

L’art. 2 al. 7 LMI ne traite pas expressément des conséquences matérielles et procédurales de la violation de l’obligation de procéder à un appel d’offres avant l’attribution d’une concession. Il diffère ainsi de la réglementation sur les marchés publics, en ce qu’il ne vise que certaines garanties procédurales minimales comme celles des voies de droit visées à l’art. 9 al. 1-2 LMI, mais non la règle spéciale de l’art. 9 al. 3 LMI (ég. art. 58 du nouvel AIMP du 15 novembre 2019). Il est admis de manière générale que les autorités peuvent ordonner les mesures nécessaires au rétablissement d’un état conforme au droit sans même qu’aucune base légale ne les y autorise expressément. En conséquence, l’autorité de recours peut se fonder directement sur l’art. 2 al. 7 LMI pour impartir à la commune un délai de 6 mois soit pour procéder à un appel d’offres en vue de réattribuer la concession d’affichage, soit pour réintégrer l’activité d’affichage dans ses propres activités (consid. 8.1-8.3).
Les conventions de concession entre l’autorité et le concessionnaire sont soumises au droit public, à la différence des contrats conclus à la suite de l’adjudication d’un marché public. Les conséquences d’une violation de l’art .2 al. 7 LMI commise lors de la décision d’attribution de la concession (en amont) sur la convention conclue (en aval) appellent des solutions nuancées qui dépendront toujours de la nature de la violation et des effets de celle-ci sur la concession. Ainsi, un juge administratif peut constater la nullité « par ricochet » d’une convention conclue consécutivement à une décision d’attribution de concession frappée de nullité en raison d’une violation crasse de l’art. 2 al. 7 LMI. En revanche, dans l’affaire portant sur une concession relative aux directions de deux théâtres, qui avait fait l’objet d’une mise au concours, qui ne portait que sur trois saisons, lesquelles avaient déjà programmées, et dont les contrats de subventionnement étaient conclus, le TF a jugé que seule l’éventuelle illicéité de la décision pouvait être constatée (consid. 9.1-9.2).

La recourante a pour activité d’analyser le respect par les entreprises de l’égalité salariale entre femmes et hommes (art. 13a ss LEg), en se fondant sur le modèle L&MAba-24 qu’elle a développé. Le Bureau fédéral de l’égalité entre femmes et homme (ci-après : BFEG) refuse de modifier sa directive relative aux contrôles du respect de l’égalité salariale entre femmes et hommes dans les marchés publics de la Confédération, qui prévoit l’utilisation de l’outil d’analyse standard « Logib » (www.ebg.admin.ch > Thèmes > Travail > Plateforme égalité salariale > Contrôles étatiques dans les marchés publics ; ci-après : directive BFEG) La recourante a un intérêt digne de protection à ce que l’acte matériel fasse l’objet d’une décision du BFEG (art. 25a PA), car elle n’aura jamais la possibilité de contester une adjudication en tant que soumissionnaire, ni de contester un appel d’offres privilégiant l’outil « Logib ». Elle est touchée dans sa liberté économique par la directive BFEG (consid. 5.2.1-5.2.3). En vertu de l’art. 26 LMP, il existe une obligation quant au respect de certaines exigences sociales et environnementales, dont l’égalité salariale (art. 12 LMP). L’adjudicateur doit contrôler le respect de ces exigences et peut confier le contrôle à des tiers (art. 12 al. 5 LMP). Conformément à l’art. 26 al. 2 LMP et à l’art. 4 al. 4 OMP, en lien avec l’annexe 3, ch. 1 let. b OMP, tous les soumissionnaires, indépendamment du nombre de collaborateurs, peuvent être tenus d’apporter la preuve du résultat de l’analyse de l’égalité salariale et le rapport de contrôle selon l’art. 13a ss LEg au pouvoir adjudicateur lors de l’adjudication d’un marché public. Un certain nombre de soumissionnaires ayant obtenu un marché sont contrôlés chaque année par le BFEG. Selon la directive BFEG, ces contrôles sont effectués à l’aide de l’outil d’analyse standard « Logib », méthode scientifique et conforme au droit mise gratuitement à disposition des employeurs par la Confédération. Même si la directive BFEG ne s’adresse pas directement à la recourante, qui ne sera jamais soumissionnaire, l’outil « Logib » porte indirectement atteinte à la liberté économique de celle-ci. En effet, Logib est plus souvent utilisé par les soumissionnaires, car ces derniers connaissent son fonctionnement qui repose sur une méthode statistique (le modèle L&MAba-24 repose sur une analyse fonctionnelle). La recourante est touchée par la directive BFEG, car l’appréhension des soumissionnaires à passer au modèle L&MAba-24 rend ce modèle moins attrayant par rapport à l’outil « Logib » (consid. 4.3.1-4.3.4, 5.2.1-5.2.3).

Adjudication d’un marché d’installations de systèmes de gestion du trafic des routes nationales par l’Office fédéral des routes (ci-après : OFROU). L’adjudicataire est inscrit au registre du commerce durant la procédure de passation du marché, suite à sa reprise des actifs et passifs du soumissionnaire initial. Cette reprise entraîne le transfert à l’adjudicataire des références d’entreprises fournies par le soumissionnaire initial au titre de la preuve des critères d’aptitude (arrêt du TAF B-7208/2014 du 13 mars 2016, consid. 5.3 ; B‑5488/2021 du 29 juillet 2022, consid. 7.4.4.2 ; B-4703/2021 du 19 avril 2022, consid. 7.5). En revanche, les références personnelles, à savoir celles liées aux personnes clés, sont liées à ces dernières, de sorte qu’elles ne peuvent être invoquées que tant que ces personnes clés poursuivent leur travail pour l’adjudicataire (arrêt du TAF B-4457/2020 du 8 décembre 2020, consid. 5.5 ; B 5488/2021 du 29 juillet 2022, consid. 7.4.4.2). Si un changement intervient parmi les personnes clés, il convient d’accorder au soumissionnaire un délai raisonnable pour présenter un remplacement équivalent du personnel clé (consid. 5.3-5.5).

Durant la phase de dialogue, le pouvoir adjudicateur a modifié la méthode d’évaluation des critères d’adjudication, en passant de la méthode d’évaluation linéaire à la méthode d’évaluation asymptotique. Le pouvoir adjudicateur s’est réservé dans l’appel d’offres le droit de détailler les critères d’adjudication. Ce droit a été exercé en accordant à tous les participants au dialogue un délai pour modifier leurs offres, et aucun soumissionnaire ne s’est alors opposé à la nouvelle méthode d’évaluation des critères d’adjudication (consid. 7.4). La modification est justifiée, car l’évaluation linéaire de la qualité et l’évaluation asymptotique du prix auraient inévitablement entraîné une concurrence sur les prix qui n’aurait pas correspondu à la pondération initialement annoncée entre le prix (30%) et la qualité (70%) (consid. 7.5.1-7.5.5). Enfin, une modification pendant la phase de dialogue n’est possible que pour les éléments des offres qui n’ont pas déjà été communiqués, afin d’éviter toute inégalité de traitement entre les soumissionnaires. En conséquence, il est licite que certains critères liés à la qualité aient continué d’être évalués selon la méthode linéaire (consid. 7.5.6).

L’aptitude du soumissionnaire sert à déterminer s’il est capable d’exécuter le marché (art. 27 al. 1, 2 et 3 LMP ; art. VIII AMP 2012) (consid. 6.2.1). Ce n’est pas la forme ou la raison sociale du soumissionnaire, qui peuvent changer suite à une fusion ou à une scission, qui sont importantes, mais le soumissionnaire lui-même. L’aptitude du soumissionnaire ne disparait pas automatiquement avec le changement de propriétaire. En l’occurrence, le soumissionnaire conserve son siège principal et sa marque, et poursuit son activité avec l’équipe de direction existante. La prestation adjugée reste fournie par le soumissionnaire conformément à l’offre soumise et avec les personnes clés prévues. Le pouvoir adjudicateur ne subit pas de désavantage au regard des critères d’aptitude du fait du changement de propriétaire (consid. 6.2.7-6.2.8). De plus, le soumissionnaire avait informé le pouvoir adjudicateur d’un éventuel changement de propriétaire, conformément aux documents d’appel d’offres (consid. 6.2.5).

Un recours contre une décision d’adjudication relative à un marché non soumis aux accords internationaux ne peut tendre qu’à faire constater la violation du droit fédéral (art. 52 al. 2 LMP). Cette constatation doit se faire en relation avec une demande de dommages-intérêts (art. 58 al. 3 et 4 LMP), ce qui fonde l’intérêt à agir du recourant (consid. 1.2.3-1.2.4). Il doit exister un lien de causalité entre l’illicéité de la décision d’adjudication et le préjudice. Aussi bien dans le cadre de la protection juridique primaire que secondaire, la qualité pour agir du recourant nécessite que celui-ci démontre qu’il aurait eu une chance réelle d’obtenir le marché (consid. 1.3.2).

 Adjudication d’un marché par l’Office fédéral des routes (OFROU) à un consortium dont l’offre est anormalement basse (23.92% plus basse que la 2e offre et 41.55% plus basse que la 3e offre). Recours du soumissionnaire classé en 2e position. En vertu de l’art. 38 al. 3 LMP, en lien avec l’art. 24 al. 4 de l’ancienne ordonnance du 11 décembre 1995 sur les marchés publics (RO 1996 518 ; aOMP) et l’art. XV par. 6 de l’Accord révisé du 15 avril 1994 sur les marchés publics (RS 0.632.231.422 ; AMP), l’adjudicateur qui reçoit une offre au prix anormalement bas doit demander au soumissionnaire des clarifications, c’est-à-dire demander s’il remplit les conditions de participation et s’il a compris les modalités du marché. Une adjudication à un prix bas n’est pas interdite, pourvu que l’on puisse admettre que le marché sera correctement exécuté. Il ne suffit pas d’obtenir confirmation des prix proposés auprès du soumissionnaire ; il faut encore obliger ce dernier à justifier ses prix. L’adjudicateur doit faire preuve de diligence et s’assurer, en cas d’offre anormalement basse, que le travail sera effectué dans les règles de l’art, d’autant plus lorsqu’il ressort de l’offre que des prestations d’un montant significatif seront réalisées gratuitement. A défaut de réponse satisfaisante ou s’il existe un risque d’insolvabilité, le pouvoir adjudicateur doit exclure l’offre (art. 44 al. 1 let. b LMP) (consid. 3.2). La demande de clarification a pour objectif d’effectuer une épuration (Bereinigung) technique des offres, sans en modifier le contenu matériel, tant au niveau des prestations prévues que des prix offerts. En l’espèce, les demandes de clarifications portaient sur des prestations initialement non conformes à l’appel d’offres. En réponse, les prestations offertes pour le prix indiqué dans la soumission ont été étendues. Une différence entre les offres de près d’un demi-million de francs ne peut être raisonnablement et de bonne foi considérée comme une modification insignifiante de l’offre et les écarts par rapport au dossier d’appel d’offres sont propres à violer les principes d’intangibilité des offres et d’égalité de traitement entre les soumissionnaires (consid. 3.5.2 et 5.2).

Appel d’offres lancé par la Centrale de compensation (CdC) pour un marché portant sur des services de sécurité et de réception dans un bâtiment. Exclusion de l’offre de la recourante, faute de remplir une spécification technique. L’adjudicateur définit les spécifications techniques requises dans l’appel d’offres ou dans les documents d’appel d’offres (art. 30 al. 1 LMP et art. 7 OMP). Pour qu’une offre soit examinée sur la base des critères d’adjudication, les spécifications techniques doivent être remplies (art. 40 al. 1 LMP) (consid. 4 et 5). En l’espèce, les spécifications techniques prévoient que les collaborateurs disposent d’une formation de base dans le domaine de la sécurité. Des confirmations écrites, certificats ou attestations doivent être fournis comme moyen de preuve (consid. 7.3.1). La CCT pour le domaine des prestations de sécurité privée, conclue par l’Association des entreprises suisses de services de sécurité (ci-après : l’AESS) et UNIA, n’indique par quels contenus doivent être traités dans la formation de base. Seules des recommandations de l’AESS précisent cette question avec, pour chaque thème, les contenus recommandés, les particularités, les compétences opérationnelles et les objectifs d’apprentissage (consid. 6.3.2). Une simple attestation d’adhésion de la recourante à l’AESS ne constitue pas un moyen de preuve suffisant. Elle ne permet pas de conclure que le contenu de la formation de base des collaborateurs est conforme aux recommandations de l’AESS étant donné que cette dernière ne présuppose ni ne vérifie si une entreprise membre a adopté les recommandations AESS pour la formation de base (consid. 8.3.4-8.3.5). Des diplômes établis par la recourante et énumérant les thèmes principaux suivis au cours prescrit par la CCT ne sont pas suffisants. Cette énumération ne permet pas au pouvoir adjudicateur de vérifier qu’il existe un lien entre le contenu de la formation de base et les recommandations de l’AESS (consid. 8.3.1-8.3.2, 8.3.7).

Rectification du prix par l’adjudicataire (augmentation de 14% à 50,2 millions de francs). Lorsque les documents d’appel d’offres sont lacunaires, imprécis ou peu clairs sur certains points, des réserves émises par les soumissionnaires sont justifiées et une rectification est autorisée afin de clarifier le marché en vertu de l’art. 39 al. 2 let. a LMP. De plus, les réserves sont justifiées par la complexité du marché. Enfin, le pouvoir adjudicateur avait expressément prévu la possibilité d’accepter, ainsi que de quantifier et de déduire du prix de l’offre les réserves commerciales, techniques, procédurales et juridiques du soumissionnaire (consid. 6.2-6.2.5).

Lorsque le recours s’avère fondé et qu’un contrat a déjà été conclu avec l’adjudicataire, le recours ne peut porter que sur la constatation d’illicéité de la décision d’adjudication (art. 58 al. 2 LMP) et sur la prétention en dommages-intérêts fondée sur le droit des marchés publics (art. 58 al. 3-4 LMP). Une demande en dommages-intérêts doit être expressément formulée. Si une telle demande en dommages-intérêts est retirée par le recourant, le recours devient sans objet. En droit des marchés publics, l’intérêt à faire valoir des prétentions en dommages-intérêts constitue un intérêt suffisant pour obtenir une constatation d’illicéité de la décision litigieuse. A l’inverse, le retrait de la demande de dommages-intérêts supprime l’intérêt à agir du recourant, car il n’y a plus d’utilité pratique à faire constater le caractère illicite de la décision d’adjudication.

Ouverture d’une enquête par la Comco concernant un éventuel cartel de soumission. Décision incidente de la Comco accordant un accès partiel, mais non complet, au dossier pour X.SA durant la procédure d’enquête, afin de protéger des secrets d’affaires et d’éviter des comportements collusoires durant l’enquête (art. 23 al. 1 LCart). Un recours n’est recevable qu’aux conditions de l’art. 46 al. 1 PA, qui exige notamment le risque d’un préjudice irréparable (art. 46 al. 1 let. a PA). Le préjudice irréparable peut être de nature juridique ou factuelle. Il sert à déterminer l’existence d’un intérêt digne de protection à recourir immédiatement contre une décision incidente, en ce sens que le préjudice ne pourrait pas être levé par un recours contre la décision finale (consid. 2.2-2.6). En l’espèce, le risque de préjudice réputationnel et économique allégué par X.SA n’est pas démontré. Le droit d’accès au dossier peut être temporairement restreint durant l’enquête de la Comco. Les parties à l’enquête ont toujours le droit de prendre position sur la proposition de décision (art. 30 al. 2 LCart). La partie peut faire valoir une éventuelle violation du droit d’être entendu en lien avec l’examen et l’administration des preuves soit devant la Comco, soit dans un recours devant le TAF (consid. 3.4.2). L’article de presse produit ne fait que mentionner la prise de position de X.SA quant à l’ouverture de l’enquête par la Comco. Les interruptions et répétition de procédures de passation de marchés publics par le canton sont sans lien avec l’ouverture de l’enquête ou avec la demande d’accès au dossier de X.SA. Les préjudices réputationnels et économiques allégués par X.SA ne résultent pas de la décision de refus partiel d’accès au dossier, mais de l’ouverture d’une enquête par la Comco. Même en cas d’annulation de la décision incidente attaquée, le préjudice ne pourrait pas être évité (consid. 3.4.3).

Décision d’exclusion d’un soumissionnaire pour non-respect de critères d’aptitude impératifs ou minimaux et des moyens de preuve y relatifs, désignés comme tels dans les documents d’appel d’offres. Les exigences figurant dans l’appel d’offres, y compris celles figurant dans les documents d’appel d’offres et dont l’importance est identifiable d’emblée, doivent être attaquées immédiatement (art. 53 al. 1 et 2 LMP). Les griefs y relatifs ne sont plus recevables dans un recours contre une décision ultérieure (consid. 4.4). Dans la mesure où la recourante conteste la nécessité de certains critères d’aptitude impératifs ou minimaux mentionnés dans les documents d’appel d’offres, ses griefs sont irrecevables (consid. 4.7-4.8). Le pouvoir adjudicateur peut exclure un soumissionnaire dont l’offre s’écarte de manière importante des exigences obligatoires fixées dans l’appel d’offres (art. 44 al. 1 let. b LMP). Le non-respect des critères d’aptitude entraîne en règle générale l’exclusion, à moins que celle-ci ne soit disproportionnée ou constitue un formalisme excessif. L’adjudicateur définit de manière exhaustive dans l’appel d’offres ou les documents d’appel d’offres les critères d’aptitude auxquels doivent répondre les soumissionnaires. Ces critères doivent être objectivement nécessaires et vérifiables pour le marché concerné (art. 27 al. 1 LMP). Ils servent à restreindre le cercle des soumissionnaires à ceux qui sont aptes à fournir l’objet du marché selon la qualité souhaitée. Les critères d’aptitude sont interprétés et appliqués de la manière dont les soumissionnaires pouvaient et devaient les comprendre de bonne foi, la volonté subjective du pouvoir adjudicateur n’entrant pas en considération. Le pouvoir adjudicateur dispose d’un large pouvoir d’appréciation dans la formulation et l’application des critères d’aptitude, qui n’est pas examiné au titre de l’opportunité dans le cadre d’un recours (art. 56 al. 3 LMP). Le non-respect d’un critère d’aptitude ne peut pas être compensé par le « sur-respect » d’un autre critère d’aptitude. Les critères faisant l’objet d’une évaluation graduée peuvent constituer à la fois un critère d’aptitude, sous la forme d’un niveau minimal à atteindre, et un critère d’adjudication pour les niveaux ultérieurs (consid. 5.1). Les spécifications techniques définissent les caractéristiques techniques de l’objet du marché (art. 30 al. 1 LMP). Elles sont, à l’instar des critères d’aptitude qui se rapportent aux soumissionnaires, de nature absolue, et constituent ainsi des critères impératifs (Musskriterien). Leur non-respect peut entraîner l’exclusion de l’offre, sans nécessité de comparer celle-ci aux autres offres (consid. 5.2 et 5.3). En l’espèce, la recourante ne remplit pas les critères obligatoires relatifs à la formation, aux personnes clés et à l’organisation du projet, désignés comme impératifs dans les documents d’appel d’offres. Il ne s’agit pas d’un simple vice formel d’importance secondaire, de sorte que l’exclusion de la recourante ne constitue pas du formalisme excessif (consid. 6.1.5-6.1.6 ; 6.2.6-6.2.7 ; 6.3.5-6.3.6).

La recourante peut, sur demande, consulter les pièces relatives à l’évaluation de son offre et les autres pièces de la procédure déterminantes pour la décision, à moins qu’un intérêt public ou privé prépondérant ne s’y oppose (art. 57 al. 2 LMP). Dans le cadre d’un recours contre une décision d’exclusion d’une offre incomplète, les pièces relatives à l’évaluation des autres offres en vue de l’adjudication ne sont pas « déterminantes pour la décision », de sorte que l’accès est refusé. De plus, il n’y a, dans le domaine des marchés publics, aucun droit général à consulter les offres des concurrents, qui contiennent des secrets d’affaires et du know-how. La question de savoir si l’offre de la recourante respectait les exigences impératives fixés dans les documents d’appel d’offres dépend principalement de l’examen de cette offre (consid. 9.3).

Recours contre la décision de l’OFROU d’interrompre la procédure de passation pour un marché de travaux dans le 2e tube du Gothard, en raison d’une modification importante du projet, après que le TAF ait annulé une première adjudication et renvoyé l’affaire pour nouvelle décision à l’OFROU. L’interruption de la procédure de passation, définitive ou provisoire (i.e. en vue du lancement d’une nouvelle procédure), ou la révocation d’une adjudication, sont possibles pour un motif important (sachlicher Grund) (art. 30 al. 3 aOMP du 11 décembre 1995) (consid. 7.1-7.5). Un motif important ne doit pas être admis facilement, de sorte qu’il est soumis à un standard de preuve élevé. Tel est le cas lorsque le pouvoir adjudicateur n’a plus besoin de l’objet du marché, lorsque la définition initiale de l’objet du marché ne permettrait pas d’acquérir le produit ou service dont l’adjudicateur a besoin, lorsqu’une adjudication conforme au droit s’avère impossible ou que la procédure de passation déboucherait sur un résultat inutilisable. L’interruption ne doit pas viser à discriminer de manière ciblée certains soumissionnaires, ni constituer une violation du principe de la bonne foi par le pouvoir adjudicateur (consid. 8.3). Si l’objet du marché est modifié de manière importante, les principes de transparence et de publicité imposent d’interrompre la procédure de passation et d’en lancer une nouvelle, afin que d’autres soumissionnaires potentiels aient la possibilité de soumettre une offre, voire d’obtenir l’adjudication (consid. 8.8). Le pouvoir adjudicateur doit mener ses procédures de passation de marché en respectant le principe de la bonne foi. Il découle de ce principe que le motif important justifiant l’interruption de la passation du marché ne doit pas être prévisible déjà au moment de l’appel d’offres pour le pouvoir adjudicateur, ni lorsque ce dernier aurait adressé des requêtes ultérieures aux soumissionnaires (consid. 9.2). Les soumissionnaires doivent pouvoir se fier à des négociations sérieuses et loyales. L’adjudicateur agit de manière contraire à la bonne foi s’il entreprend ou poursuit des négociations contractuelles alors qu’il sait ou devrait savoir que la conclusion du contrat n’entre plus en considération (consid. 9.3). En l’espèce, le pouvoir adjudicateur a lui-même à l’origine du motif important ayant nécessité l’interruption de la procédure de passation. En achetant une partie des prestations dans un autre lot, avec pour conséquence une baisse corrélative importante des prestations du lot initial, il savait ou devait savoir dès le 22 août 2021 que cela conduirait à l’interruption de la procédure de passation. Après l’annulation par le TAF d’une adjudication relative à ce même marché et le renvoi pour nouvelle décision à l’OFROU, le pouvoir adjudicateur a attendu 4 mois avant d’entreprendre des négociations avec la recourante, puis a demandé à celle-ci le 13 juillet 2022 de prolonger la validité de son offre jusqu’au 31 décembre 2022, et a enfin publié le 31 août 2022 une décision d’interruption de la procédure (consid. 9.6).

Un soumissionnaire qui ne propose pas des personnes clés répondant aux exigences minimales de l’adjudicateur figurant dans l’appel d’offres (formation et références) doit être exclu (art. 44 al. 1 LMP). En vertu du principe de la transparence (art. 2 let. b LMP), le pouvoir adjudicateur doit se tenir aux critères d’aptitudes et aux moyens de preuve qu’il a lui-même définis. Il ne peut attribuer aux indications figurant dans les documents d’appel d’offres un autre sens que celui qui ressort d’une interprétation conforme au principe de la bonne foi. En l’espèce, rien ne permet d’affirmer raisonnablement et de bonne foi que la personne clé « responsable de l’environnement et de la durabilité » devait occuper le poste de conducteur des travaux au sein du bureau technique sur le chantier (consid. 6.3.1-6.3.4).

Le non-respect des exigences minimales conduit à l’exclusion de l’offre d’un soumissionnaire, que ces exigences minimales soient publiées dans l’appel d’offres ou dans les documents d’appel d’offres (art. 35 let. n, 36 et 44 al. 1 LMP). Le fait que, en l’espèce, l’appel d’offres ne contienne pas d’exigences minimales relatives aux personnes clés et que celles-ci figurent uniquement dans les documents d’appel d’offres n’y change rien. Les soumissionnaires doivent contester les prescriptions contenues dans les documents d’appel d’offres dont l’importance est identifiable doivent être contestées déjà dans le cadre du recours formé contre l’appel d’offres (art. 53 al. 2 LMP) (consid. 4.1, 4.4.1-4.4.2).

La méthode des deux enveloppes, selon laquelle la prestation et le prix sont proposés par le soumissionnaire dans deux enveloppes distinctes, permet au pouvoir adjudicateur d’évaluer d’abord les meilleures offres d’un point de vue qualitatif, puis d’évaluer dans un second temps les prix totaux (art. 38 al. 4 LMP). Cet instrument peut être utilisé à la discrétion du pouvoir adjudicateur et le respect des principes généraux en matière de marchés publics (consid. 6.2.3). Une éventuelle rectification des offres et de leur prix (art. 39 LMP) précède nécessairement l’évaluation des offres au regard des critères d’adjudication (art. 40 LMP). Le pouvoir adjudicateur peut, après l’ouverture de l’offre commerciale, rectifier la note attribuée à l’offre technique lorsqu’il s’aperçoit que le prix offert ne correspond pas à la prestation indiquée dans l’offre technique. Les rectifications à la hausse par le soumissionnaire recourant des prix offerts après la clarification ont démontré les faiblesses de l’offre technique. Il serait manifestement contraire au droit des marchés publics de maintenir l’évaluation qualitative de l’offre technique alors que les prix soumis traduisent des prestations offertes moins bonnes que prévues initialement. En règle générale, le pouvoir adjudicateur doit clarifier les réserves et les doutes sur l’offre technique avant l’ouverture de l’offre financière. Une adaptation de la notation de l’offre technique après l’ouverture de l’offre financière ne se justifie que si des éléments se révèlent seulement à la suite de l’ouverture de celle-ci (consid. 6.2.3).

Recours contre un appel d’offres en procédure ouverte par l’aéroport de Zurich pour des installations de chauffage et de refroidissement. Si le recourant n’a pas l’intention de présenter lui-même une offre, il n’est pas un soumissionnaire potentiel de la prestation en question, mais seulement un fournisseur potentiel de tels soumissionnaires. Il n’est qu’indirectement concerné par l’appel d’offres, et n’a pas qualité pour recourir (art. 48 al. 1 let. b et c PA, art. 55 LMP et art. 37 LTAF) (consid. 2.1-2.8).

Il découle des principes de stabilité du marché et d’intangibilité des offres que l’objet du marché ne peut pas être modifié après l’ouverture des offres, d’une part et, d’autre part, que le soumissionnaire ne peut pas modifier, compléter ou corriger son offre. Le pouvoir adjudicateur peut corriger d’office les erreurs manifestes de calcul (art. 38 al. 1 LMP) et peut demander aux soumissionnaires des explications sur leurs offres en cas d’erreurs involontaires (art. 38 al. 2 LMP), afin de permettre la comparabilité des offres. Le principe d’égalité de traitement impose de permettre à tous les soumissionnaires de fournir des explications, lorsque celles-ci sont nécessaires. La modification d’une offre, en réponse à une demande d’explications, doit en outre être documentée afin de pouvoir être retracée (consid. 2.2.1.1-2.2.1.2). Il en va différemment de la rectification des offres au titre de l’art. 39 al. 2 LMP qui n’est possible que si (let. a) la modification est indispensable pour clarifier l’objet du marché ou les offres ou pour rendre celles-ci objectivement comparables sur la base des critères d’adjudication ou si (let. b) la modification des prestations est objectivement et matériellement nécessaire, pour autant que l’objet du marché, les critères et les spécifications ne soient pas adaptés au point de modifier la prestation caractéristique ou le cercle des soumissionnaires potentiels. Une adaptation du prix ne peut être demandée que dans le cadre d’une rectification effectuée pour l’une des raisons précitées (art. 39 al. 3 LMP). Les rectifications doivent être consignées dans un procès-verbal (art. 39 al. 4 LMP). Une négociation sur les prix est interdite (art. 11 let. d LMP). En conséquence, une modification du prix doit toujours être corrélée avec une modification de l’offre au sens de l’art. 39 al. 2 LMP. Conformément au principe de la bonne foi et à l’interdiction du « venire contra factum proprium », le pouvoir adjudicateur doit indiquer clairement si sa demande d’explications vise soit à obtenir du soumissionnaire des informations sur le contenu de son offre, soit à inviter le soumissionnaire à modifier son offre, en particulier suite à une modification des conditions d’appel d’offres (consid. 2.2.1.3-2.2.1.4). En l’espèce, le pouvoir adjudicateur a clairement demandé aux soumissionnaires de préciser leur prix dans l’hypothèse d’un report des travaux d’une année. Le soumissionnaire recourant ne pouvait pas en déduire qu’il pouvait modifier son offre, et son prix, au-delà de cette seule hypothèse (consid. 2.3.2-2.3.8).

Recours par un soumissionnaire classé au deuxième rang contre l’adjudication par les CFF d’un marché de construction pour la réalisation de nouvelles zones agricoles et de travaux d’aménagement paysager afin de compenser la nouvelle installation ferroviaire à Arbedo-Castione. Durant la procédure de recours, les CFF révoquent l’adjudication et interrompent la passation du marché en raison du refus d’approbation par l’Office fédéral des transports (OFT). Une procédure de passation se termine soit par une décision d’adjudication, soit par une décision d’interruption. L’interruption de la procédure de passation est une Kann-Vorschrift (art. 43 al. 1 LMP), pour laquelle le pouvoir adjudicateur dispose d’une large marge d’appréciation. Une obligation d’interruption existe toutefois en cas de modifications importantes des conditions du marché (consid. 4.2.1). En l’espèce, l’interruption de la passation du marché est justifiée par une modification importante des prestations demandées (art. 43 al. 1 let. f LMP), car le pouvoir adjudicateur n’a pas reçu les autorisations attendues de l’OFT. Une condition indispensable sur laquelle reposait l’appel d’offres, et sans laquelle l’objet du marché ne peut plus être réalisé, n’est ainsi plus remplie. Le pouvoir adjudicateur doit rechercher de nouveaux sites alternatifs et il ignore encore quels travaux y seront nécessaires (consid. 4.2.2). Le motif d’interruption de la procédure de passation, à savoir le refus d’autorisation par l’OFT, reste licite en l’espèce, même s’il était prévisible pour le pouvoir adjudicateur (consid. 4.2.3).

La certification ISO 14001 définit des exigences reconnues mondialement pour un système de gestion environnementales. Il s’agit d’un critère d’aptitude (art. 27 al. 2 LMP) et non d’une spécification technique (art. 30 al. 1, 2e phrase LMP). En effet, les prestations de dragage (exploitation, logistique et entretien des machines, manipulation des matériaux d’exploitation, transport et élimination des déblais) ont des implications environnementales directes. Le marché en question ne constitue pas une simple mise à disposition d’excavateurs et de machines (consid. 6.1-6.5).

L’exigence d’un système de gestion environnementale équivalant à la certification ISO14001 n’est pas contraire à la volonté de favoriser la participation des PME dans les marchés publics selon la nouvelle LMP du 21 juin 2019. Le Message du Conseil fédéral concernant la révision totale de la LMP (FF 2017 1695) n’évoque pas la promotion des PME comme but de la loi. L’art 31 al. 1 LMP reconnaît le principe des consortiums, mais seulement pour autant que ceux-ci ne soient pas exclus. Enfin, la LMP met en œuvre l’AMP révisé (RS 0.632.231.422), mais cette dernière révision a renvoyé les aspects liés à la durabilité ou à la promotion des PME à des programmes de travail spécifiques (consid. 11.1-11.4).

Absence de preuve de l’existence d’un système de gestion environnementale, sous la forme d’une certification ISO 14001, pour l’un des deux membres d’un consortium. Non-respect d’un critère d’aptitude. En l’absence d’une indication expresse dans l’appel d’offres ou dans les documents d’appel d’offres, il n’existe ni disposition pertinente ni pratique constante sur la question de savoir si les critères d’aptitude doivent être remplis par tous les membres du consortium ou uniquement par le chef de file (consid. 2.5.5). Selon l’art. 27 al. 1 LMP), l’adjudicateur fixe de manière exhaustive, dans l’appel d’offres ou dans les documents d’appel d’offres, les critères d’aptitude. Ces critères doivent être interprétés selon le sens que les soumissionnaires pouvaient et devaient comprendre de bonne foi (consid. 7.1-7.2, 8). En l’espèce, le marché ne concerne pas une location de services où l’adjudicateur loue du personnel externe qui travaille avec des équipements fournis par l’adjudicateur et où la responsabilité de la mise en œuvre des exigences environnementales auraient incombé à l’adjudicateur. Si tel avait été le cas, la preuve d’un système de qualité ou de gestion de l’environnement aurait pu n’être apportée que par le chef de file du consortium. Pour le marché en cause (prestations de dragage pour un marché de travaux avec fourniture de machines et d’appareils de construction et de génie civil avec opérateurs), des machines avec du personnel sont demandées et les soumissionnaires sont responsables de l’organisation. De plus, la section « aptitude » de la notice « Communautés de soumissionnaires : admission et restriction » Conférence des achats de la Confédération (CA) et Conférence de coordination des services de la construction et des immeubles des maîtres d’ouvrage publics (KBOB) précise que chacun des membres doit remplir les critères d’aptitude requis dans son domaine des prestations. Enfin, les deux sociétés fournissent des prestations de dragage avec des risques élevés pour l’environnement, de sorte qu’elles auraient pu et dû comprendre ce critère d’aptitude comme signifiant qu’elles devaient chacune remplir ce critère et fournir aussi chacune une preuve de l’existence d’un système de gestion environnementale équivalant à la certification ISO14001 (consid. 9.1-9.5).

L’obligation pour le pouvoir adjudicateur d’appliquer les critères d’aptitude fixés dans l’appel d’offres et les documents d’appel d’offres a pour but d’assurer d’une part la transparence de la procédure et, d’autre part, la confiance des soumissionnaires dans les « règles du jeu » annoncées. Ces principes concrétisés par la LMP, mais aussi garantis par les art. 5 al. 3 et art. 9 Cst, protègent les soumissionnaires qui soumettent leurs offres et moyens de preuve en se fiant au fait qu’ils correspondent aux exigences fixées dans les documents d’appel d’offres. La détermination des critères d’aptitude et des moyens de preuve y relatifs doit prendre en compte l’objectif d’une concurrence efficace entre les soumissionnaires prévus par l’art. 2 let. d LMP. Des critères formulés de manière restrictive réduisent le cercle des soumissionnaires potentiels (consid. 3.4). En l’espèce, les moyens de preuve exigés au titre du critère d’aptitude relatif à « l’expérience et la compétence professionnelle » consistent en trois références relatives à des constructions d’une valeur et d’une complexité comparables, effectuées par le soumissionnaire. L’adjudicataire du marché estimé à 43 millions de francs, a présenté trois références pour des travaux de 10, 14 et 6,5 millions de francs (consid. 3.6). Même si les travaux en cause sont divisés en quatre « paquets », les moyens de preuve de l’aptitude exigés dans les documents d’appel d’offres concernent des références comparables à la valeur de la construction dans son ensemble (Bausumme), et non pas à certaines parties seulement de cette construction (consid. 3.9). Le fait que les moyens de preuve exigées pour le critère d’aptitude du « chiffre d’affaires » se limitent en l’espèce à un chiffre d’affaires annuel minimal de 5 millions de francs durant les 5 dernières années ne permet pas non plus de conclure que les références de travaux de valeur comparable (au titre du critère de l’expérience professionnelle) concerneraient seulement des parties du marché de travaux (consid. 3.11).

La Pharmacie de l’armée (BLA) résilie un contrat conclu en 2013 pour une durée de 10 ans avec un fournisseur de comprimés d’iode. Demande du fournisseur d’obtenir une décision en constatation relative au futur lancement d’un appel d’offres. Seules les décisions énumérées à l’art. 53 al. 1 LMP peuvent faire l’objet d’un recours, tandis que les autres décisions prises en vertu de la LMP ne sont pas sujettes à recours (art. 53 al. 5 LMP). L’adjudicateur ne peut pas contourner la protection juridique accordée par l’art. 53 LMP (consid. 2-3). La question de savoir si une décision en constatation concernant un éventuel futur appel d’offres entre dans le cadre de la LMP reste ouverte. L’autorité compétente a qualité pour constater par une décision l’existence, l’inexistence ou l’étendue de droits ou d’obligations individuels et concrets (art. 25 al. 1 PA). Une décision en constatation peut aussi porter sur des droits ou d’obligations découlant de faits futurs, pour autant que ceux-ci soient déjà suffisamment concrétisés. En l’espèce, l’acquisition de comprimés d’iodure de potassium par la BLA constitue un état de fait suffisamment concrétisé, car la prochaine distribution, organisée selon un rythme décennal, aura probablement lieu en 2033/2034 et car la BLA elle-même reconnaît son obligation de lancer un appel d’offres à l’avenir en raison des besoins d’approvisionnement à partir de 2024 (consid. 5.1-5.4). Toutefois, le fournisseur concerné ne dispose pas d’un intérêt digne de protection à l’obtention d’une décision en constatation (art. 25 al. 2 PA). Bien que l’intérêt du fournisseur d’obtenir le nouveau marché paraisse évident, rien ne garantit que son offre sera retenue et cette incertitude fait partie de ses risques d’exploitation.

TC/NE CDP.2022.367

2022-2023

La procédure de concours est définie par le pouvoir adjudicateur selon les cas et se réfère aux règles appliquées par les organisations professionnelles, notamment le règlement des concours d’architecture et d’ingénierie SIA 412 (art. 15 al. 4 LCMP et art. 8 al. 1 et 2 RELCMP). En l’occurrence, le programme du concours prévoit l’exclusion du concours en cas de conflit d’intérêts entre les bureaux (et leur personnel) et un membre ou un suppléant du jury, par analogie au règlement SIA 412. En l’espèce, il y a conflit d’intérêts en raison de l’implication de deux associés gérants d’une même société, l’un en tant que spécialiste-conseil indiqué comme pouvant être sollicité par le jury, l’autre en tant que spécialiste ayant collaboré au projet de la recourante. Il importe peu que les deux gérants travaillent dans deux secteurs différents de la société et sur des sites distincts. Ils exercent collectivement la gestion de la société au sens de l’art. 809 CO. Même si la recourante n’a pas fait le rapprochement entre les deux associés gérants, le conflit d’intérêt est si évident qu’aucune autre mesure que l’exclusion n’est envisageable (consid. 4).

TC/NE CDP.2022.367

2022-2023

Le pouvoir adjudicateur peut demander au soumissionnaire des références qui n’avaient pas été indiquées dans l’offre et les utiliser au détriment du soumissionnaire, à condition que ce dernier puisse exercer son droit d’être entendu avant que l’autorité ne statue. A contrario, lorsque le pouvoir adjudicateur se prononce au détriment d’un participant à un concours en fonction d’éléments figurant dans l’offre, il n’a pas à accorder au soumissionnaire un droit d’être entendu avant de statuer (consid. 3).

TC/NE CDP.2022.367

2022-2023

La Loi cantonale neuchâteloise sur les marchés publics et le Règlement d’exécution de la loi cantonale ne confèrent pas de pouvoir décisionnel au jury d’un concours. Une décision d’exclusion de la procédure de passation relève de la compétence du pouvoir adjudicateur (art. 15 al. 1 AIMP et art. 42 al. 1 LCMP). L’incompétence qualifiée de l’autorité ayant rendu une décision est un motif de nullité. En l’espèce toutefois, le pouvoir adjudicateur est l’auteur de la proposition d’exclusion soumise pour approbation au jury. La décision d’exclusion prise par le jury reflétant la volonté du pouvoir adjudicateur, la déclarer nulle serait une vaine formalité (consid. 2).

La rectification de son offre par l’adjudicataire, qui en retire une réserve liée à l’inflation, viole-t-elle les principes de non-discrimination et d’égalité de traitement (§ 27 al. 2 et 28 al. 1 Verordnung zur Interkantonalen Vereinbarung über das öffentliche Beschaffungswesen du 15 décembre 2004) (SRSZ 430.130) (ci-après : IVöB/SZ), abrogé par Kantonsratsbeschluss (SZ) über den Beitritt zur Interkantonalen Vereinbarung über das öffentliche Beschaffungswesen du 16 février 2022 (IVöB ; SRSZ 430.120) Selon le principe de l’immutabilité de l’offre après son dépôt, une rectification n’est autorisée qu’en cas d’erreurs manifestes. L’erreur n’est manifeste que si elle ressort à la lecture de l’offre elle-même, sans qu’une indication ou que des explications du soumissionnaire ne soient nécessaires (consid. 1.4.1). De plus, il faut que la volonté réelle du soumissionnaire apparaisse clairement, de sorte que la clarification ultérieure n’affecte pas le contenu de l’offre (consid. 1.4.3). La volonté réelle du soumissionnaire peut résulter de l’offre, des circonstances ou de la demande d’explications au soumissionnaire. Elle doit être clairement établie sur la base des explications fournies par le soumissionnaire. Si l’erreur n’est pas manifeste ou que la volonté réelle du soumissionnaire ne peut pas être établie, l’offre doit être interprétée de bonne foi. L’offre n’est, en règle générale, pas exclue de la procédure de passation, à moins qu’elle ne réponde pas à certaines exigences du droit des marchés publics ou que l’erreur ait entraîné une lacune ou une ambiguïté importante et contraire à l’appel d’offres (consid. 1.4.3). En l’espèce, la réserve concernant l’inflation, telle que formulée dans l’offre, n’était pas claire et les explications demandées par le pouvoir adjudicateur ne sont pas critiquables en vertu du § 28 al. 1 IVöB/SZ. La réserve faisait référence à l’évolution extraordinaire des prix et à l’application de l’art. 59 de la norme SIA 118, qui est de toute façon applicable lorsqu’un prix fixe est convenu et qu’un renchérissement est exclu. La mention de l’art. 59 de la norme SIA 118 dans l’offre n’était dès lors ni nécessaire ni dommageable. L’offre déposée correspondait d’emblée aux documents d’appel d’offres et aucune rectification au sens du § 27 al. 2 IVöB/SZ n’était nécessaire.

Exclusion d’une offre en raison de l’utilisation de prix unitaires d’un centime (CHF 0,01.) dans certains postes du cahier des charges. La décision de l’instance inférieure ne tombe pas dans l’arbitraire (art. 9 Cst.) lorsqu’elle considère que la précision de l’appel d’offres contient une exigence formelle en matière de fixation des prix et que le droit cantonal prévoit l’exclusion en cas de violation des exigences formelles essentielles (consid. 5.1). D’abord, des prix de substitution ou des prix non réels violent les conditions de l’appel d’offres selon lesquelles des prix unitaires réels doivent être proposés pour chaque poste. Cela constitue également une violation du principe de transparence et d’égalité de traitement en ce sens qu’une comparaison avec les autres offres est rendue impossible (consid. 5.2). Ensuite, les documents d’appel d’offres contiennent une exigence formelle de fixation des prix. Il ressort de la formulation desdits documents que des soumissionnaires de bonne foi ne peuvent les comprendre que dans le sens où chaque poste doit indiquer le prix par unité de mesure ou par pièce afin de calculer le prix total par poste en multipliant la quantité et le prix. De plus, un cahier des charges détaillés n’a de sens que si tous les postes sont complets, avec des prix effectifs (consid. 6.1-6.2).

Marché pour un contrat-cadre adjugé à trois soumissionnaires. L’effet suspensif est partiellement accordé au recours du soumissionnaire évincé, classé au 4e rang, en ce qu’il suspend la décision d’adjudication envers l’adjudicataire 3, mais non envers les adjudicataires 1 et 2. La recourante ne risque aucun préjudice irréparable (art. 93 al. 1LTF), car elle pourrait toujours obtenir l’adjudication en lieu et place de l’adjudicataire 3. Le fait que les contrats-cadres aient déjà été conclus pendant la procédure de recours avec les adjudicataires 1 et 2, et qu’ils ne puissent ainsi plus être attribués à la recourante, ne désavantage en rien cette dernière, qui ne subit pas un désavantage juridique du fait de ne pas être classée en 1ère ou 2e position (consid. 1.2-1.3.5).

L’AIMP du 15 novembre 2019, qui consacre un délai de recours de 20 jours contre une décision d’adjudication (art. 56 al. 1 AIMP 2019), est entré en vigueur le 1er juillet 2021 dans le canton d’Argovie. Il se justifie de protéger la bonne foi d’un soumissionnaire, résultant de l’indication erronée d’un délai de recours de 20 jours au titre des voies de droit. La procédure d’adjudication devait être menée sous l’ancien droit, selon la disposition transitoire de l’art. 64 AIMP 2019. L’art. 15 al. 2 AIMP 1994/2001 prévoyait un délai de recours de 10 jours. La décision d’adjudication, adoptée en l’espèce le 18 octobre 2021, rend l’erreur dans l’indication des voies de recours non facilement identifiable par le soumissionnaire ou son mandataire (consid. 3-3.5).

Des adaptations ultérieures d’un contrat faisant l’objet d’un appel d’offres entre le pouvoir adjudicateur et l’adjudicataire, de gré à gré, vont à l’encontre des principes fondamentaux du droit des marchés publics. Au moment de l’adjudication, tous les éléments essentiels du contrat doivent être fixés. Des négociations contractuelles sur de simples points secondaires après la clôture de la procédure d’adjudication sont admises (ATF 134 II 297). En l’espèce, i le contrat d’entreprise conclu suite à la décision d’adjudication sera révisé après une première phase et sur la base d’un projet d’exécution qui doit encore être approuvé. Cependant, les éléments essentiels du contrat ont fait l’objet d’un appel d’offres en procédure ouverte et aucun élément ne doit être négocié de gré à gré entre l’adjudicateur et l’adjudicataire après la décision d’adjudication. Les différentes phases d’exécution du marché font l’objet du contrat existant. En outre, le projet de contrat règle une éventuelle adaptation du prix de l’ouvrage pour les livraisons et les prestations qui n’ont pas fait l’objet d’un appel d’offres, pour les coûts supplémentaires résultant de modifications nécessaires et de modifications de la commande du maître d’ouvrage, pour les coûts supplémentaires prouvés dus à la prolongation des délais dont l’entrepreneur n’est pas responsable, et pour les coûts supplémentaires dus au déclenchement des options (consid. 3.1).

La disposition transitoire de l’art. 62 LMP, dans sa nouvelle version du 21.06.2019 entrée en vigueur le 01.01.2021, prévoit que « les procédures d’adjudication qui ont été lancées avant l’entrée en vigueur de la présente loi sont régies par l’ancien droit jusqu’à leur clôture ». La notion « ancien droit » concerne exclusivement les procédures de passation de marchés publics selon l’ancienne LMP du 16.12.1994, mais non les dispositions prévues antérieurement par la LTF. Selon l’art. 46 al. 2 let. e LTF, introduit avec la nouvelle LMP, les féries judiciaires ne s’appliquent pas en matière de marchés publics. Cette règle vise à assurer la célérité dans les procédures de passation de marchés publics et à protéger la sécurité juridique en harmonisant les règles relatives aux recours au TF contre des marchés publics fédéraux ou cantonaux. Elle fait écho à l’art. 56 al. 2 LMP, qui prévoit l’inapplication des féries judiciaires résultant de la PA et de la LTF. Selon la disposition transitoire de l’art. 132 al. 1 LTF, la LTF s’applique aux procédures introduites devant le TF après l’entrée en vigueur de cette loi. Cette disposition s’applique aussi aux modifications ultérieures de la LTF. Elle concrétise un principe général de droit intertemporel, selon lequel les nouvelles règles de procédure s’appliquent immédiatement dès leur entrée en vigueur, sous réserve de dispositions légales contraires. L’art. 62 LMP ne constitue pas une telle disposition dérogatoire. En conséquence, l’art. 46 al. 2 let. e LTF s’applique à tous les recours au TF contre des décisions en matière de marchés publics fédéraux prises après l’entrée en vigueur de cette disposition le 1.1.2021, même si la procédure de passation a été engagée sous l’empire de l’ancienne LMP (consid. 2-4).

Recours contre l’appel d’offres prévoyant une pondération de 50% pour le critère d’adjudication relatif au prix, dans un marché public relativement simple. Question juridique de principe selon l’art. 83 let. f ch. 1 LTF (consid. 1.3-1.4). Même dans le cas d’un marché public complexe, le critère d’adjudication relatif au prix doit être pondéré à hauteur d’au moins 20%, sans dilution ultérieure par le biais de la méthode d’évaluation (consid. 1.6). Une commune, en tant que pouvoir adjudicateur, dispose d’une marge d’appréciation, resp. d’une autonomie, importante dans la détermination des critères d’adjudication, pour autant que ceux-ci soient directement fonction de l’objet du marché en cause (consid. 2.3). Le droit intercantonal et cantonal en vigueur permet une adjudication fondée sur le seul critère du prix le plus bas (pondération du prix : 100%) pour un marché public portant sur une fourniture ou un service largement standardisé. Il s’agit d’une norme potestative (Kann-Vorschrift), et non d’une obligation. Le terme « largement » signifie que la standardisation ne doit pas être complète. Il suffit que l’objet du marché public en cause soit à ce point standardisé que, hormis le prix, il ne faille s’attendre à aucune autre différence pertinente, en particulier quant à la qualité. Le caractère largement standardisé peut découler soit de normes techniques applicables, soit de spécifications techniques très détaillées dans l’appel d’offres (consid. 3.1). En l’espèce, des rouleaux en tissu pour le séchage des mains, de même que les services de transport et de nettoyage y relatifs constituent un marché peu complexe (consid. 3.3 et 3.7). Pour les marchés publics portant sur les objets les plus simples (biens largement standardisés), une pondération minimale de 60% doit être respectée pour le critère d’adjudication relatif au prix. A partir de ce seuil minimal pour le critère « prix », il appartient au surplus au pouvoir adjudicateur de fixer la pondération des critères d’adjudication dans chaque cas d’espèce (consid. 3.8-3.9).

Les dispositions de la LTF sur le recours constitutionnel subsidiaire ne contiennent pas de droit de recours des autorités (consid. 2.2). La COMCO a uniquement qualité pour former un recours en matière de droit public, limité aux décisions soulevant une question juridique de principe et aux marchés publics qui atteignent la valeur seuil déterminante (ATF 141 II 113, consid. 1.5) (consid. 2.3). L’art. 9 al. 2bis LMI, permettant à la COMCO de déposer un recours afin de faire constater qu’une décision restreint indûment l’accès au marché, ne constitue pas une base légale spéciale qui légitimerait cette dernière à exercer un recours constitutionnel subsidiaire (consid. 3.3.1-3.3.4). De plus, le recours constitutionnel subsidiaire s’adresse aux personnes physiques et morales de droit privé, de sorte que les collectivités ou personnes morales de droit public, en tant que détentrices de la puissance publique, ne sont pas titulaires de droits constitutionnels (ATF 146 I 195, consid. 1.2.1 ; ATF 145 I 239, consid. 5.1). Finalement, la COMCO n’est pas dotée de la personnalité juridique et elle ne peut être touchée par une décision d’adjudication puisqu’elle garantit le bon fonctionnement de la concurrence, à savoir des intérêts publics et non privés (consid. 3.4).