Droit du travail

Vacances ; salaire afférent. En cas d’emploi à temps plein auprès du même employeur, l’inclusion exceptionnelle du salaire afférent aux vacances dans le salaire global au motif que le salaire dû varie d’un mois à l’autre est exclue. Cet arrêt a fait l’objet d’une analyse par Me Diane Tettü Pochon publiée in Newsletter droitdutravail.ch juin 2023.

Heures supplémentaires ; vacances ; fonction dirigeante élevée ; indemnité pour vacances non prises. En l’espèce, le travailleur occupait une fonction dirigeante élevée au sens de l’art. 9 OLT 1. En effet, il dirigeait la section des sports nautiques, soit une partie essentielle de l’offre par laquelle l’employeuse se positionnait sur le marché ; il accomplissait des tâches d’importance stratégique (achats, budget, investissement, développement, RH) ; il était généralement suivi par le directeur général et le Conseil d’administration dans les décisions très importantes et totalement libre dans les décisions moins importantes ; il était directement subordonné au directeur général et gagnait à peine moins qu’un membre de la direction de l’entreprise (consid. 3.4). Tous ces éléments, pris dans leur ensemble et dans le déroulement effectif de la relation de travail, attestent d’une fonction dirigeante élevée (consid. 3.4.3). La façon de calculer l’indemnité pour vacances non prises est une question de droit (consid. 5.3).

Congé abusif ; vacances ; contrats en chaîne ; délai de congé ; indemnité. N’est pas arbitraire la décision de la cour cantonale selon laquelle les relations contractuelles liant l’employeuse et une salariée, enseignante de français, entre le deuxième et le troisième contrat de travail conclus respectivement les 22 août 2016 et 21 juin 2017, n’ont jamais cessé et qu’aucune nouvelle période probatoire n’a dès lors commencé à courir à la suite de la signature du troisième et dernier contrat de travail (consid. 3). La cour cantonale n’a pas enfreint le droit fédéral en retenant que le congé était abusif, puisqu’il avait été signifié en réaction aux prétentions salariales émises de bonne foi par la salariée (consid. 4.3). L’indemnité de licenciement abusif octroyée, située dans la fourchette haute, n’est pas critiquable (consid. 4.4). En règle générale, le salaire relatif aux vacances doit être versé au moment où celles-ci sont prises et il n’est pas admissible d’inclure l’indemnité de vacances dans le salaire total. L’indemnité de vacances peut exceptionnellement être incluse dans le salaire total, lorsque, outre la nécessité objective due à une activité irrégulière (première condition), la part du salaire global destinée à l’indemnisation des vacances est mentionnée clairement et expressément dans le contrat de travail lorsqu’il est conclu par écrit (deuxième condition), ainsi que sur les décomptes de salaire périodiques (troisième condition). La simple indication selon laquelle l’indemnité afférente aux vacances est comprise dans le salaire total ne suffit donc pas ; la part représentant cette indemnité doit être fixée en pourcentage ou en chiffres et cette mention doit figurer aussi bien dans le contrat de travail écrit que dans les décomptes de salaire. Si les conditions ci-dessus ne sont pas réunies, l’employeur doit payer le salaire afférent aux vacances. Que l’employé ait pris ses vacances en nature n’y change rien (rappel de jurisprudence, consid. 5.1).

Vacances ; rémunération incluse et versée mensuellement ; la rémunération relative aux vacances ne peut être versée concomitamment avec le salaire mensuel qu’en cas d’activité irrégulière et à condition d’être clairement et expressément séparée du salaire de base, tant dans le contrat de travail écrit que dans chacun des bulletins de salaire. Un emploi à plein temps n’est pas nécessairement exclusif d’une activité irrégulière (rappel de jurisprudence). La cause doit être renvoyée à l’instance cantonale pour qu’elle examine si l’activité était régulière ou non.

ATF 145 II 360 (f)

2019-2020

Art. 19 LTr

Jours fériés ; autorisation de travailler. En application de l’art. 89 al. 2 let. d LTF, combiné avec l’art. 58 LTr, les associations des employeurs et des travailleurs intéressés ont, de par la loi, qualité pour recourir au TF contre les décisions des autorités cantonales et fédérales rendues en application de la LTr (rappel de jurisprudence, consid. 1.2). L’interdiction de travailler les jours fériés, qui avait au départ une justification religieuse, répond désormais également – voire prioritairement – à un but de politique sociale. Au sens de la législation, les jours fériés ne sont pas seulement des jours « analogues » aux dimanches, censés être fêtés, mais bien des jours « identiques » à ceux-ci qui visent aussi à accorder aux travailleurs un temps libre supplémentaire (consid. 3.1). Les dérogations au principe général de l’interdiction de travailler les dimanches et les jours fériés doivent en toute hypothèse être interprétées restrictivement et non pas extensivement, quand bien même les habitudes des consommateurs auraient subi une certaine évolution depuis l’adoption de la règle. Il n’appartient en effet pas au juge d’interpréter de manière large et contraire à l’esprit de la loi les exceptions au travail dominical, car cela reviendrait à vider de sa substance le principe de l’interdiction de travailler le dimanche expressément inscrit à l’art. 18 LTr. La même circonspection doit prévaloir s’agissant des dérogations à l’interdiction de travailler un jour férié (consid. 3.4). Une ouverture dominicale peut être autorisée notamment lorsque l’on peut constater une étroite corrélation entre, d’une part, l’animation résultant d’un marché de Noël, manifestation d’envergure organisée depuis plusieurs années avec le concours de nombreux commerces locaux et, d’autre part, l’animation due à l’ensemble de l’activité commerciale de la place, qu’il existe une véritable tradition d’ouverture dominicale des commerces liée à cet événement et que la dérogation permet de parer aux effets d’une âpre concurrence étrangère (consid. 3.5). Il semble arbitraire d’assouplir l’interdiction de travailler un jour férié uniquement parce qu’il tombe sur une journée qui est d’ordinaire ouvrable : la fonction des jours fériés protégés par l’art. 20a LTr est précisément d’offrir la même protection que les dimanches, mais un autre jour de semaine. Si un canton considère qu’il n’est plus nécessaire d’assurer une tranquillité « dominicale » lors de certains jours considérés comme « fériés », il incombe à son législateur – et non au juge – d’intervenir et d’abolir le ou les jours fériés devenus désuets (consid. 3.7). Le régime restrictif devant prévaloir en matière d’autorisation de travailler les dimanches et les jours fériés en application de l’art. 19 al. 3 LTr n’empêche pas le développement de manifestations culturelles ou sportives, mais uniquement de celles qui présentent un caractère essentiellement commercial (consid. 3.8).

Art. 329 et 329d al. 2 CO

Vacances ; délai de congé. En règle générale, l’interdiction de remplacer les vacances par des prestations en argent s’applique aussi après la résiliation des rapports de travail. Ce principe n’est toutefois pas absolu puisque, une fois le contrat dénoncé, le travailleur doit chercher un autre emploi et l’employeur doit lui accorder le temps nécessaire pour ce faire (art. 329 al. 3 CO) ; cette recherche étant incompatible avec la prise effective de vacances, il faut examiner dans chaque cas, au vu de l’ensemble des circonstances, telles que la durée du délai de congé, la difficulté à trouver un autre travail et le solde de jours de vacances à prendre, si l’employeur pouvait exiger que les vacances soient prises pendant le délai de congé ou s’il doit les payer en espèces à la fin des rapports de travail. Si le salarié, comme dans le cas présent, a été libéré de l’obligation de travailler jusqu’au terme du contrat, le point de savoir si le solde de vacances non prises doit être indemnisé en espèces repose sur le rapport entre la durée de la libération de l’obligation de travailler et le nombre de jours de vacances restants. Il faut en particulier que, durant cette période, le salarié congédié, en plus de ses vacances, ait suffisamment de temps à consacrer à la recherche d’un nouvel emploi (rappel de jurisprudence, consid. 4.1). En l’espèce, la cour cantonale a estimé que le travailleur avait disposé du temps nécessaire pour trouver un nouvel emploi. Savoir si le temps disponible pour chercher du travail était ou non suffisant est une question d’appréciation que le Tribunal fédéral ne revoit qu’avec réserve (consid. 4.5).

Art. 329c al. 2 CO

Vacances ; moment de l’annonce des vacances. Aux termes de l’art. 329c al. 2 CO, l’employeur fixe la date des vacances en tenant compte des désirs du travailleur dans la mesure compatible avec les intérêts de l’entreprise ; s’il s’abstient de prendre en considération les désirs du travailleur ou qu’il ordonne la prise de vacances sans laisser un délai suffisant au travailleur, ce dernier peut refuser de prendre ses vacances ; le travailleur doit exercer son droit de refus sans retard et proposer ses services durant la période de vacances initialement prévue par l’employeur, faute de quoi il est réputé avoir accepté de les prendre (consid. 2.1).

Art. 329d CO

Vacances ; versement du salaire afférent aux vacances. Trois conditions doivent être remplies pour que le salaire afférent aux vacances puisse ne pas être versé au moment où les vacances sont prises : une nécessité objective due à une activité irrégulière, la mention claire et expresse de la part du salaire global destinée à l’indemnisation des vacances, tant dans le contrat de travail (lorsqu’il est conclu par écrit), que sur les décomptes de salaire périodiques (rappel de jurisprudence, consid. 3.1). En l’espèce, deux des conditions définies par la jurisprudence pour admettre l’inclusion de l’indemnité de vacances dans le salaire total ne sont pas remplies : d’une part, l’activité de l’employé, fixée à 42,5 heures par semaine, est régulière ; d’autre part, le contrat de travail écrit ne mentionne pas la part du salaire global destinée à l’indemnisation des vacances, un défaut que ne sauraient pallier l’envoi des décomptes de salaire comprenant cette mention et l’absence de réaction de l’employé à réception de ceux-ci (consid. 3.4). Rien ne laissant supposer que l’employé intimé, qui ne touchait aucune rémunération lorsqu’il ne travaillait pas, disposait des ressources suffisantes et ne subissait aucune pénalisation salariale pendant ses vacances, sa prétention – même élevée un an et demi après les faits – n’est pas abusive (consid. 4.4).

Art. 329 CO.

Un travailleur malade, qui prétend bénéficier d’un solde de 32,67 jours de vacances – solde qu’il n’aurait pas pu compenser entièrement durant les deux mois de son délai de congé, compte tenu du temps nécessaire pour ses visites médicales et pour la recherche d’un nouvel emploi selon l’art. 329 al. 3 CO –, voit cette prétention lui être refusée par les juges à juste titre, dès lors qu’il n’a pas allégué avoir subi des examens médicaux durant cette période et qu’il a admis ne pas avoir voulu chercher un autre emploi (consid. 6.3).

Art. 329d1er CO.

Un travailleur au salaire fixe et payé exclusivement à la commission sur ses affaires personnelles ne peut être contraint à recevoir uniquement son salaire fixe durant ses vacances, de manière à ce qu’il ne soit pas traité de manière différente suivant qu’il soit en vacances ou au travail. Celui-ci doit pouvoir recevoir un salaire complété par une somme égale à la moyenne des commissions perçues sur une période déterminée, sans jamais toutefois que celle-ci ne crée un accroissement du revenu comme il peut en être le cas dans certaines situations considérées comme des exceptions par la doctrine ; situations par exemple où l’absence de revenu du travailleur pendant ses vacances se compenserait par le fait qu’il puisse grouper des contrats avant ou après son retour de vacances. Il est en effet essentiel de souligner que le travailleur n’a en aucun cas le droit à un salaire supplémentaire.

Art. 329d CO ; 2 al. 2 CC.

Les vacances doivent en principe être prises en nature et l’indemnité y afférent doit être versée au moment de la prise des vacances. Cependant, en cas de travail à temps partiel irrégulier, il est possible de verser une indemnité relative aux vacances pour chaque heure de travail effectuée. Pour qu’une telle pratique soit valable, elle doit être prévue dans le contrat de travail et chaque fiche de salaire doit mentionner clairement la part du salaire relative à l’indemnisation des vacances. Si l’employé, qui sait que le salaire versé contient l’indemnité des vacances, a attiré l’attention de son employeur sur l’irrégularité formelle des fiches de salaire, il ne commet pas d’abus de droit à réclamer une nouvelle fois le paiement de ses vacances.