Art. 27 al. 1 et 2 lit. b LDIP ; 296 al. 2 CPC
Reconnaissance d’une décision de reconnaissance de paternité. Une décision étrangère constatant la paternité d’une personne sur la base d’une administration des preuves concluantes quant à la durée de la grossesse, la naissance à terme de l’enfant et la période de conception possible au regard de la date des dernières règles comme aurait pu le faire un juge suisse peut être reconnue en Suisse, même en l’absence d’expertise scientifique. En effet, si l’art. 296 al. 2 CPC favorise la filiation biologique, il n’impose pas l’expertise scientifique comme moyen de preuve.
Art. 9 Cst. et 179 CC
Modification de la contribution d’entretien due à la conjointe lorsque l’époux salarié perd sa place de travail pendant la vie séparée et débute une activité lucrative indépendante. Lorsque, durant la séparation, un époux perd involontairement sa place de travail et commence une activité lucrative indépendante, un changement de circonstances ne saurait être systématiquement retenu. Il convient d’examiner, d’une part, si l’époux a abandonné son travail volontairement, voire dans l’intention de nuire, nonobstant l’existence d’une lettre formelle de licenciement et, d’autre part, si l’époux a tout entrepris pour trouver un travail lui permettant de réaliser un revenu équivalent à celui de son ancienne activité. Deuxièmement, il faut apprécier les pièces justificatives concernant le revenu issu de la nouvelle activité indépendante, au minimum un bilan intermédiaire couvrant une période de plusieurs mois. Finalement, il faut tenir compte du fait qu’en principe deux à trois ans sont nécessaires après le début de l’activité d’indépendant avant qu’un revenu complet puisse être réalisé. Ce fait d’expérience ne donne pas d’indication sur le caractère durable d’une modification de revenu, mais uniquement son ampleur. Il est possible d’en tenir compte au moyen d’une clause de rétablissement ou de réévaluation à la hausse dans un jugement de modification.
Sabrina Burgat, Chloé Gay-Balmaz, Jérôme Saint-Phor
Art. 58 al. 1, 274 et 334 CPC
Interprétation de la ratification judiciaire d’une convention sur les effets du divorce. Une convention sur les effets du divorce homologuée par un juge peut faire l’objet d’une interprétation par ce même juge. En effet, afin d’homologuer la convention, le juge doit examiner si la transaction est claire, complète et équitable. Dans le cadre de cette interprétation, le juge doit se limiter à établir la volonté présumée des parties, sur la base de laquelle il a ratifié la convention de divorce. Est ainsi décisive la volonté des parties telle qu’elle a été comprise et ratifiée par le tribunal.
Sabrina Burgat, Chloé Gay-Balmaz, Jérôme Saint-Phor
Art. 124b al. 1 CC
Renonciation conventionnelle au partage de la prévoyance professionnelle. Le nouveau droit entré en vigueur le 1er janvier 2017 assouplit les conditions de la renonciation. Il n’est plus nécessaire que la prévoyance du conjoint renonçant soit quantitativement et qualitativement « équivalente », mais elle doit être « adéquate ». A cette fin, le juge, qui dispose d’un large pouvoir d’appréciation, doit effectuer une appréciation générale du niveau de prévoyance de l’époux concerné, tenant compte de ses conditions de vie et de son âge. Si l’intéressé ne dispose que d’une prévoyance modeste au moment de l’introduction de la procédure de divorce, le juge vérifiera s’il peut se constituer une prévoyance adéquate après le divorce. En l’espèce, le recourant renonçant au partage, âgé de 42 ans, a de longues années devant lui pour se constituer une prévoyance professionnelle adéquate.
Art. 221 al. 1 lit. d et e CPC
Recevabilité formelle d’une demande en divorce. Une demande de divorce est recevable dès lors que le juge peut comprendre l’objet du litige, les faits et moyens de preuve y relatifs à l’appui desquels le demandeur fonde son argumentation et prend ses conclusions. La composition des allégués de faits en plusieurs phrases ou paragraphes et leur numérotation ne constituent pas des motifs d’irrecevabilité.
Sabrina Burgat, Chloé Gay-Balmaz, Jérôme Saint-Phor
Art. 4 par. 1, 8 par. 1 CLaH73 ; 10 CLaH70 ; 29 al. 3 LDIP
Droit applicable aux obligations alimentaires et reconnaissance d’un jugement de divorce. Selon l’art. 4 par. 1 CLaH73, la loi de la résidence habituelle du créancier d’aliments régit les obligations alimentaires qui entrent dans le domaine de la convention. Par dérogation, la loi appliquée au divorce (droit applicable) régit les obligations alimentaires entre époux divorcés et la révision de celles-ci (art. 8 par. 1 CLaH73). Ainsi, cette disposition s’applique lorsque l’entretien est demandé dans le cadre du règlement des effets du divorce ou que la modification est litigieuse. À l’inverse, dans le cadre de MPUC, la loi de la résidence habituelle du créancier d’aliments est applicable. Par ailleurs, le principe de l’unité du jugement de divorce ne fait pas partie de l’ordre public suisse, ainsi le fait que les effets accessoires du divorce n’ont pas été réglés dans le jugement étranger ne s’oppose pas à la reconnaissance (art. 10 CLaH70).
Sabrina Burgat, Chloé Gay-Balmaz, Jérôme Saint-Phor
Art. 12 CEDH, 14 Cst. et 283 CPC
Décision partielle sur le principe du divorce et pesée des intérêts. L’art. 283 al. 1 CPC prévoit que le tribunal règle également les effets du divorce dans la décision sur le divorce. Pour de justes motifs, la liquidation du régime matrimonial peut être tranchée dans une procédure séparée (al. 2) ; le partage des prétentions de prévoyance professionnelle également, si des prétentions à l’étranger sont concernées et si une décision relative au partage de celles-ci peut être obtenue dans l’Etat en question (al. 3). Le principe de l’unité du jugement de divorce ne s’oppose pas à une décision partielle sur le principe du divorce. Lorsque l’une des parties ne s’oppose pas au divorce, mais à la décision partielle sur le principe, il faut effectuer une pesée entre les intérêts des parties. À cet égard, le droit fondamental au mariage, qui comprend le droit au remariage (art. 14 Cst. et 12 CEDH), plaide en faveur d’une décision séparée sur le principe du divorce quand les faits sont clairs et que le litige sur les effets accessoires se prolonge fortement. Ce d’autant plus lorsque, comme en l’espèce, l’intéressé est relativement âgé.
Sabrina Burgat, Chloé Gay-Balmaz, Jérôme Saint-Phor
Art. 277 al. 2 CC
Mainlevée définitive. Le jugement qui prévoit expressément le paiement d’une contribution d’entretien au-delà de la majorité constitue un titre de mainlevée définitive, à condition qu’il indique le montant et la durée ou la condition résolutoire (fin de la formation). La mainlevée doit être refusée lorsque le débiteur prouve par titre que la condition résolutoire est réalisée, lorsque le créancier reconnaît sans réserve qu’elle s’est réalisée ou lorsque sa réalisation est notoire. Elle doit également être refusée lorsqu’en raison d’une formulation maladroite, la volonté du juge du fond ne peut pas être déterminée avec certitude.
Sabrina Burgat, Chloé Gay-Balmaz, Jérôme Saint-Phor
Art. 276 al. 2 et 285 al. 2 CC
La contribution de prise en charge de l’enfant selon le nouveau droit. L’entretien convenable de l’enfant englobe le coût lié à sa prise en charge, indépendamment du statut de ses parents, ce qui permet au parent qui s’occupe de l’enfant de prétendre à l’allocation d’une contribution d’entretien pour la prise en charge de l’enfant. Après analyse détaillée, le TF arrive à la conclusion que la méthode des frais de subsistance – qui consiste à retenir comme critère la différence entre le salaire net perçu de l’activité lucrative et le montant total des charges du parent gardien – apparaît comme celle qui correspond le mieux au but du législateur et est la plus adéquate, car elle vise à compenser la perte de capacité de gain du parent gardien en se basant sur des besoins concrets, dans l’intérêt de l’enfant et en suppriment toute inégalité de traitement selon qu’il soit issu de parent marié ou non.
Sabrina Burgat, Chloé Gay-Balmaz, Jérôme Saint-Phor
Art. 285 CC
Frais de prise en charge. Sous l’empire du nouveau droit de l’entretien, la prise en charge de l’enfant par les parents ou les tiers est mise sur un pied d’égalité : les frais de prise en charge par les parents sont pris en compte dans les besoins courants de l’enfant en tant que coûts indirects ; la prise en charge par les tiers fait partie du minimum vital des enfants. L’allocation pour enfant ou l’allocation de formation professionnelle est portée en déduction des besoins de chaque enfant créancier.
Sabrina Burgat, Chloé Gay-Balmaz, Jérôme Saint-Phor
Art. 125, 276a al. 1 et 285 CC ; 13c et 13c bis Tit. fin. CC
Droit transitoire et contribution d’entretien envers l’enfant mineur. Lorsque l’enfant d’un couple marié était déjà au bénéfice d’une contribution d’entretien à l’entrée en vigueur du nouveau droit de l’entretien de l’enfant le 1er janvier 2017, cette dernière peut être modifiée uniquement si des faits nouveaux importants et durables déséquilibrent la charge d’entretien entre les parents : il faut procéder à une pesée des intérêts respectifs de l’enfant et de chacun de ses parents. Pour un couple qui a été marié, l’entrée en vigueur du nouveau droit ne constitue donc pas un fait nouveau justifiant en soi la modification de la contribution de l’enfant, comme c’est le cas pour un couple d’ex-concubins.
Sabrina Burgat, Chloé Gay-Balmaz, Jérôme Saint-Phor
Art. 28, 252, 256 CC
Droit de connaître sa descendance. Le tiers géniteur de l’enfant n’est pas légitimé à contester la paternité du mari, ni à reconnaître l’enfant. Aucune atteinte à la personnalité ne résulte de cette situation juridique. L’art. 28 CC ne fonde pas une action visant à établir la filiation.
Sabrina Burgat, Chloé Gay-Balmaz, Jérôme Saint-Phor
Art. 301a al. 1, 2 et 5 et 307 al. 3 CC
Droit de déterminer le lieu de résidence de l’enfant mineur et autorité parentale conjointe. Depuis l’entrée en vigueur de la révision du droit de l’autorité parentale, le droit de déterminer le lieu de résidence n’est plus lié à la garde, mais constitue une composante de l’autorité parentale. Lorsque les parents exercent l’autorité parentale conjointe et que l’un d’eux souhaite modifier le lieu de résidence de l’enfant, il doit obtenir l’accord de l’autre parent, ou une décision du juge ou de l’autorité de protection de l’enfant si le déménagement influence notablement l’exercice de l’autorité parentale par l’autre parent et les relations personnelles entre ce dernier et l’enfant. Aucune sanction n’est prévue. Une modification du droit de garde pourrait être requise, mais aboutirait à un réexamen de l’ensemble des circonstances d’espèce.
Sabrina Burgat, Chloé Gay-Balmaz, Jérôme Saint-Phor
Art. 260a al. 1 et 260b al. 1 CC ; 59 al. 2 let. a et 296 CPC
Qualité pour agir des collectivités publiques en contestation de la reconnaissance d’un enfant ; admissibilité et conditions de l’exécution coercitive d’une expertise ADN ordonnée par le juge. Dans une affaire de mariage fictif impliquant une reconnaissance de complaisance, ce n’est pas la question de la qualité pour agir qui est déterminante pour l’issue du litige, mais bien la pesée des intérêts entre l’enfant et ceux de la commune d’origine ou de domicile de l’auteur de la reconnaissance. L’intérêt de l’enfant réside dans le maintien de la relation père-enfant. L’intérêt de la commune d’origine ou de domicile de l’auteur de la reconnaissance ou d’une autre collectivité publique doit être digne de protection et prépondérant. L’intérêt de la collectivité publique à combattre les abus dans le domaine migratoire et le versement indu de prestations sociales l’emporte en l’espèce sur un lien de filiation paternelle « plutôt relâché ». Concernant le caractère obligatoire d’une expertise ADN, le droit de l’enfant de connaître ses origines prime sur l’atteinte minime à la personnalité de l’homme en cause. Dans le respect du principe de proportionnalité, le père juridique peut donc se voir également imposer un test ADN.
Sabrina Burgat, Chloé Gay-Balmaz, Jérôme Saint-Phor
Art. 195a al. 2 et 209 CC
Régime matrimonial : présomption d’exactitude de l’inventaire et présomption de non emploi des biens propres. L’inventaire des biens des époux, établi par acte authentique est présumé exact lorsqu’il a été dressé dans l’année à compter du jour où les biens sont entrés dans une masse ; il s’agit d’une présomption légale d’exactitude qui entraîne un renversement du fardeau de la preuve. Lors de la détermination des récompenses dues entre époux, il faut tenir compte de la présomption de fait selon laquelle les époux n’entament pas la substance de leurs biens propres pour couvrir leur entretien courant, car les frais d’acquisitions du revenu et les impôts doivent être supportés par les acquêts.
Sabrina Burgat, Chloé Gay-Balmaz, Jérôme Saint-Phor
Art. 14 LF-EEA ; 12, 26 al. 3 et 42 CLaH80
Notion de résidence habituelle au sens de la CLaH80. La notion de résidence habituelle, non définie par la CLaH 80, est basée sur une situation de fait et se détermine selon les critères suivants : le centre effectif de la vie et des attaches, la durée du séjour, la régularité, la maîtrise de la langue, les conditions et les raisons du séjour sur le territoire et la nationalité de l’enfant. Ainsi, elle coïncide donc souvent avec le centre de vie d’un des parents, les relations familiales du très jeune enfant avec le parent qui en a la charge étant en principe déterminantes. L’enfant peut cependant avoir deux résidences habituelles alternatives et successives, en particulier en cas de garde alternée pendant une période assez longue pour entraîner régulièrement un changement de la résidence habituelle.
Sabrina Burgat, Chloé Gay-Balmat, Jérôme Saint-Phor
Art. 317 al. 1 CPC
Faits et moyens de preuves nouveaux en cas de maxime inquisitoire. Les faits et moyens de preuves nouveaux sont admissibles en appel pour autant qu’ils soient invoqués ou produits sans retard et qu’ils n’aient pas pu l’être en première instance, bien que la partie qui s’en prévaut ait fait preuve de la diligence requise. En l’espèce, le TF considère que l’application stricte de l’art. 317 al. 1 CPC n’est pas justifiée en cas de maxime inquisitoire illimitée. Il y a donc lieu d’admettre que les parties peuvent dans un tel cas présenter des nova en appel même si les conditions de l’art. 317 al. 1 CPC ne sont pas réunies.
Sabrina Burgat, Chloé Gay-Balmaz, Jérôme Saint-Phor
Art. 133 al. 1 et 2, 298 al. 1 et 2, 279 al. 1, 285 lit. d et 296 al. 3 CPC
Force obligatoire d’une convention sur les effets du divorce pour le juge. Un accord entre les époux concernant le sort des enfants ne lie pas le tribunal mais a le caractère d’une conclusion commune (cf. art. 285 let. d CPC) et doit être pris en compte par le juge, même lorsqu’il se présente sous la forme d’une convention de divorce. Le critère du bien de l’enfant peut justifier de s’écarter des conclusions communes des parties.
Sabrina Burgat, Chloé Gay-Balmaz, Jérôme Saint-Phor
Art. 316 al. 1 CC
Autorisation de placement d’un enfant; qualité pour recourir contre la délivrance d’une autorisation ; droit cantonal. Lorsqu’un canton prévoit la compétence d’une autre autorité que l’autorité de protection de l’enfant en matière d’autorisation de placement d’enfants, il lui incombe de régler exhaustivement la procédure applicable. Le fait que la mère d’enfants placés auprès de parents nourriciers ne soit pas légitimée à recourir à l’encontre de la délivrance d’une telle autorisation ne viole pas le droit fédéral.
Sabrina Burgat, Chloé Gay-Balmaz, Jérôme Saint-Phor