Droit de la famille

ATF 140 I 305

2014-2015

Art. 16b LAPG ; 8 Cst. ; 8 et 14 CEDH

Allocations maternité et paternité.

Selon le texte légal clair et la volonté explicite du législateur, les pères ne peuvent déduire de l’art. 16b LAPG le droit à une indemnité pour perte de gain. Il n’y a pas de place pour une interprétation extensive se fondant sur le principe de l’égalité. Aucune discrimination contraire à la loi ou à la jurisprudence de la CourEDH n’existe.

ATF 141 III 1

2014-2015

Art. 105 ch. 4 CC ; 1, 2 et 7 al. 2 Tit. fin. CC

Effet rétroactif.

L’art. 105 ch. 4 CC, entré en vigueur le 1er janvier 2008, prévoit que le mariage doit être annulé lorsque l’un des époux ne veut pas fonder une communauté conjugale, mais éluder les dispositions sur l’admission et le séjour des étrangers. Cette disposition n’est pas applicable rétroactivement aux mariages qui ont été célébrés avant son entrée en vigueur, car elle n’a pas été établie dans l’intérêt de l’ordre public et des mœurs.

ATF 140 III 485

2014-2015

Art. 9 Cst. ; 276 CPC ; 163 et 176 CC

Mesures provisionnelles dans la procédure en divorce et entretien des époux.

La prise en compte d’une quote-part d’épargne implique un calcul concret des besoins des époux durant la vie commune, respectivement des charges afférentes aux deux ménages une fois la vie commune suspendue. Lorsque les besoins ne sont pas calculés de manière concrète, mais en ayant recours à la méthode en deux étapes du minimum vital avec répartition de l’excédent, il est arbitraire de prendre en compte une part d’épargne alléguée, mais qui n’est rendue vraisemblable ni dans son principe ni dans son montant. Un revenu élevé peut être un indice en faveur d’une part d’épargne, mais il est arbitraire de retenir l’existence d’une part d’épargne uniquement sur la base d’un revenu élevé.

ATF 141 III 53

2014-2015

Art. 125, 276 CC

Entretien des époux et des enfants.

Le bonus fait partie du salaire lorsqu’il s’agit d’une rémunération régulière. Lorsque les revenus sont fluctuants (comme ceux d’un indépendant), il faut tenir compte, en général, du revenu net moyen réalisé durant plusieurs années. Quand les parents ont une situation matérielle très aisée (revenus mensuels d’environ CHF 19’000.-), il convient de se baser sur les besoins d’entretien statistiques moyens retenus dans les « Recommandations pour la fixation des contributions d’entretien des enfants » éditées par l’Office de la jeunesse du canton de Zurich.

TF 5A_296/2014

2014-2015

Art. 125 CC

Entretien des époux.

Une contribution d’entretien après divorce est uniquement due si le crédirentier n’est pas en mesure de subvenir à ses propres besoins. La règle, tirée de l’expérience, que les revenus du crédirentier diminuent dès sa retraite doit être relativisée quand son avoir de prévoyance vieillesse provient aussi du partage du 2e pilier selon l’art. 122 CC. Il est en effet possible que les rentes provenant des 1er et 2e piliers soient plus élevées que les revenus perçus durant l’activité professionnelle. Le partage de la prestation de sortie ne sert donc pas exclusivement à combler les lacunes de prévoyance, mais peut aussi remplacer tout ou partie de la contribution d’entretien. Un calcul au cas par cas est indispensable.

TF 5A_46/2015

2014-2015

Art. 125 et 276 CC

Entretien.

Une contribution d’entretien pour l’épouse avec des paliers et une limite dans le temps se justifie compte tenu de la répartition des rôles entre les époux (épouse ne travaillait pas durant la vie commune, n’a pas de formation professionnelle reconnue en Suisse et s’occupe des enfants, dont le cadet a huit ans). Le mari ne peut pas unilatéralement décider de réduire son activité en prétextant une égalité de traitement avec son épouse.

ATF 141 III 13

2014-2015

Art. 201, 204 et 965 ss CC

Consentement du conjoint pour transférer une part de copropriété en instance de divorce.

Le conservateur du registre foncier ne viole pas le droit fédéral en rejetant une réquisition d’inscription, faute de consentement de l’époux copropriétaire. Une suspension de l’inscription dans l’attente du prononcé de divorce n’est au surplus pas envisageable.

ATF 141 III 145

2014-2015

Art. 206 al. 1 et 209 al. 3 CC

Sort de la plus-value conjoncturelle d’un immeuble afférente à un versement anticipé de la prestation de libre passage.

Jusqu’à la survenance d’un cas de prévoyance, le versement anticipé doit être considéré comme un prêt de l’institution de prévoyance. Quand le régime matrimonial est dissout avant la survenance d’un cas de prévoyance, la plus-value afférente au versement anticipé est donc traitée de la même manière que la plus-value liée à un emprunt hypothécaire non remboursé.

ATF 141 III 53

2014-2015

Art. 206 al. 1 et 3 CC

Participation à la plus-value d’un immeuble en copropriété dans la liquidation du régime matrimonial de la participation aux acquêts.

La part de copropriété d’un immeuble inscrite au registre foncier au nom d’un époux est présumée appartenir à celui-ci. Au moment de son acquisition, elle entre dans l’une des masses de cet époux. Le conjoint qui a contribué, sans contrepartie correspondante, à l’acquisition du bien qui se retrouve à la liquidation avec une plus-value, dispose d’une créance en remboursement et, selon l’art. 206 CC, en participation à la plus-value conjoncturelle enregistrée par cette part de copropriété. Les époux qui veulent exclure l’application de cette règle doivent passer une convention par écrit, conformément à l’art. 206 al. 3 CC. Contrairement à ce que semble admettre l’ATF 138 III 150, il n’y a pas lieu de présumer que les époux ont voulu exclure la participation à la plus-value de l’époux qui a financé l’acquisition, ni qu’ils ont voulu répartir la dette hypothécaire (dont ils sont tous deux débiteurs envers la banque) autrement que par moitié.

TF 5A_201/2015

2014-2015

Art. 124 CC

Partage de la prévoyance professionnelle sous forme d’indemnité.

Lorsque l’indemnité sert d’entretien et que le cas de prévoyance est survenu pour le crédirentier, la forme à privilégier pour l’indemnité est la rente, en particulier lorsque le débirentier est lui-même au bénéfice de prestations de prévoyance sous forme de rente.

TF 5A_739/2014

2014-2015

Art. 123 CC

Exclusion du partage de la prévoyance professionnelle.

Selon l’art. 123 al. 2 CC, le droit au partage par moitié peut être refusé s’il s’avère manifestement inéquitable pour des motifs tenant à la liquidation du régime matrimonial ou à la situation économique des époux après le divorce. « Manifestement inéquitable » signifie totalement choquant, absolument injuste et complètement insoutenable. Le fait que l’époux titulaire du droit ait une fortune considérable ne justifie donc pas, à lui seul, l’exclusion du droit au partage.

TF 5A_957/2014

2014-2015

Art. 122, 125 CC

Partage de la prévoyance professionnelle et entretien.

Les art. 122 et 125 CC ne donnent aucun droit à une égalité entre époux en matière de prévoyance professionnelle, en cas de survenance du cas de prévoyance. Seul un droit au partage des prestations de sortie calculées pour la durée du mariage existe. En outre, un montant pour une prévoyance vieillesse adéquate est pris en considération lors du calcul de l’entretien convenable.

TF 5A_46/2015

2014-2015

Art. 8 CEDH ; 133 CC

Garde alternée.

Bien que l’autorité parentale conjointe n’implique pas nécessairement une garde conjointe ou alternée, le juge doit examiner dans quelle mesure l’instauration d’un tel mode de garde est possible et conforme au bien de l’enfant. Le seul fait que l’un des parents s’oppose à un tel mode de garde et l’absence de collaboration entre les parents qui peut en être déduite ne suffit donc pas nécessairement pour l’exclure.

ATF 141 III 49 (f)

2014-2015

Art. 250 CC

Intérêts d’une dette de droit commun entre époux.

Faute de réglementation particulière découlant du droit matrimonial, la question des intérêts d’une dette de droit commun entre époux s’examine au regard des dispositions du droit des obligations, à tout le moins lorsque l’union est soumise au régime de la séparation de biens.

ATF 140 III 343

2014-2015

Art. 275a CC

Droit à l’information du parent non gardien.

L’obligation du parent détenteur de l’autorité parentale d’informer l’autre parent au sujet de leur enfant (art. 275a 1 CC) n’est pas impérative. Elle disparaît quand l’autre parent ne se préoccupe pas du bien-être de l’enfant et quand les circonstances ne permettent pas de l’exiger du parent ayant l’autorité parentale, par exemple quand un conflit profond et permanent divise père et mère. Mais dans ce cas, le parent dépourvu de l’autorité parentale conserve le droit de s’informer directement auprès des tiers (art. 275a al. 2 CC).

TF 5A_64/2015

2014-2015

Art. 272, 277 al. 2 CC

Entretien d’un enfant majeur.

L’absence de relations personnelles entre l’enfant majeur et l’un de ses parents, attribuable au seul comportement du demandeur d’aliments, peut justifier le refus de toute contribution d’entretien. L’attitude de l’enfant doit lui être imputable à faute : il doit avoir violé gravement les devoirs qui lui incombent en vertu de l’art. 272 CC, et dans les cas où les relations personnelles sont rompues, avoir provoqué la rupture par son refus injustifié de les entretenir, son attitude gravement querelleuse ou son hostilité profonde. La doctrine admet que la contribution d’entretien due sur la base de l’art. 277 al. 2 CC puisse être réduite dans son montant ou sa durée, notamment en raison de la rupture des relations personnelles sans faute exclusive imputable au parent débiteur d’aliments ou à l’enfant majeur. Cette interprétation est confortée par le Message du Conseil fédéral (FF 1974 II 1 ss, p. 58). Pour sa part, le Tribunal fédéral a laissé la question ouverte (ATF 111 II 413, 419) et ne la tranche pas non plus dans le cas d’espèce.

TF 5A_748/2014*

2014-2015

Art. 119 Cst. ; 2, 4 LPMA ; 25, 27, 32 al. 2, 70 LDIP

Partenaires enregistrés demandant la reconnaissance de liens de filiation établis à l’étranger après recours à une mère porteuse.

Le recours à une mère de substitution est interdit en Suisse. Il n’est pas en soi contraire à l’ordre public de reconnaître un lien de filiation envers deux hommes liés par un partenariat enregistré. En revanche, les circonstances de l’espèce démontrent la volonté des intéressés, qui n’ont pas de lien avec les Etats-Unis, de contourner l’interdiction du droit suisse en allant recourir à une mère porteuse en Californie. Reconnaître le lien de filiation avec le partenaire du géniteur de l’enfant aurait, dans ces circonstances, pour effet de promouvoir le tourisme de procréation et de rendre inopérante l’interdiction du recours à une mère de substitution.

ATF 140 III 337

2014-2015

Art. 9 Cst. ; 163 et 176 CC ; 92 et 93 LP

Entretien de l’époux, prise en compte des impôts et des redevances de leasing dans le calcul du minimum vital.

Si la situation financière d’un couple le permet, la charge fiscale peut être prise en compte dans le calcul du minimum vital. Plus la situation financière est difficile, plus les tribunaux doivent respecter les principes établis au regard de l’art. 93 LP. Tous les cantons suivent cette jurisprudence bien établie, à l’exception de Soleure et Saint-Gall, qui intègrent dans leurs directives la charge fiscale dans le minimum vital, indépendamment de la situation financière. Ces directives cantonales sont en contradiction claire avec la jurisprudence fédérale. Par conséquent, la décision prenant en compte les impôts dans le calcul du minimum vital dans une situation financière difficile est arbitraire. Il est en revanche admissible de tenir compte de l’entier des redevances de leasing d’un véhicule qui a la qualité d’objet de stricte nécessité.

TF 5A_1017/2014

2014-2015

Art. 163 et 176 CC

Entretien de l’enfant en cas de garde partagée.

Quand les parents se partagent la garde et prennent l’enfant en charge à parts égales, il n’est pas exclu que l’un d’eux doive, outre la prise en charge, verser une contribution pécuniaire. Mais la méthode de calcul de l’entretien sur la base d’un pourcentage du revenu mensuel ou de la capacité de gain du débirentier ne peut généralement pas mener à un résultat adéquat.

TF 5A_876/2014

2014-2015

Art. 163 et 176 CC

Frais de garde.

Lorsque l’attribution du droit de garde est modifiée en appel, il incombe au juge de constater d’office si des frais de garde par des tiers sont à prévoir et, cas échéant, d’en déterminer le montant. A défaut, le jugement est arbitraire.

ATF 140 III 241

2014-2015

Art. 308 al. 1 et 2 CC

Curatelle éducative.

Quand la menace pour le bien de l’enfant est circonscrite à des difficultés dans l’exercice du droit de visite, l’autorité doit instituer une curatelle et limiter les pouvoirs du curateur à la surveillance des relations personnelles (art. 308 al. 2 CC), sans le mandat éducatif général de l’art. 308 al. 1 CC. La curatelle a simplement pour but de faciliter, malgré les tensions entre les père et mère, le contact entre l’enfant et le parent non gardien et de garantir l’exercice du droit de visite.

ATF 140 III 529

2014-2015

Art. 314 et 445 CC

Mesures provisionnelles dans la procédure de protection de l’enfant. Curatelle éducative.

La fin de la procédure de mesures provisionnelles doit faire l’objet d’une décision formelle de l’autorité de protection de l’enfant. Pour le cas où cette autorité rend d’abord une mesure provisionnelle immédiate sans entendre les participants à la procédure, la loi prévoit impérativement qu’elle leur donne en même temps l’occasion de prendre position et rende ensuite une nouvelle décision.

TF 5A_584/2014

2014-2015

Art. 176 al. 2, 179, 273 al. 1 et 274 al. 2 CC

Protection de l’enfant en cas de déplacement illicite.

Le déplacement ou le non-retour d’un enfant viole l’art. 3 al. 1 let. a CLaH80 s’il contrevient à un droit de garde attribué par le droit de l’Etat où l’enfant avait sa résidence habituelle immédiatement avant son déplacement ou son non-retour. L’art. 13 CLaH80 prévoit plusieurs exceptions au retour de l’enfant, notamment s’il existe un risque grave que le retour de l’enfant ne l’expose à un danger physique ou psychique, ou le place dans une situation intolérable. Seuls des risques graves doivent être pris en compte, partiellement précisés à l’art. 5 LF-EEA. Dans tous les cas, le retour doit être intolérable pour l’enfant, et non pour le parent ravisseur. Le fait que le retour de l’enfant le sépare du parent ravisseur ne place pas l’enfant dans une telle situation, sauf si cela conduit à éloigner un enfant de moins de deux ans de sa mère, pour qui le retour dans l’Etat de provenance de l’enfant serait intolérable.