Droit pénal général

ATF 145 IV 65 (d)

2018-2019

Art. 59 al. 4 CP ; 81 al. 1 let. b ch. 3 LTF

Mesure thérapeutique institutionnelle ; délai ; qualité pour recourir du ministère public. La durée de la privation de liberté entraînée par une mesure thérapeutique institutionnelle (maximum cinq ans selon l’art. 59 al. 4 CP) commence de courir au jour de l’entrée en force du jugement la prononçant, dans la situation où l’intéressé n’est pas en liberté avant le début de ladite mesure. En cas de prolongation de cette dernière, le calcul doit se faire à partir du jour de l’échéance de la période initiale ou prolongée de la mesure. Les autorités doivent faire la demande de prolongation avant l’expiration du délai de cinq ans. Par ailleurs, le ministère public devant sauvegarder les intérêts des « autorités touchées » dans le cadre de l’exécution d’une mesure, il est habilité à recourir en matière pénale afin de contester la date de début de la prolongation d’une mesure thérapeutique institutionnelle, et ce même lorsque la demande de prolongation provient de l’autorité d’exécution.

Art. 65 CP ; 5 CEDH

Mesure thérapeutique institutionnelle ultérieure. Pour être conforme à l’art. 5 par. 1 let. a CEDH, une mesure institutionnelle au sens de l’art. 65 CP doit revêtir un lien de causalité suffisant avec le jugement initial. La Cour semble admettre un lien de causalité suffisant en tant que la mesure thérapeutique est une correction du jugement initial suite à la découverte de faits pertinents nouveaux qui a été ordonnée dans le cadre d’une procédure de révision (art. 65 al. 2 CP). En vertu de l’art. 5 par. 1 let. e CEDH, la privation de liberté des personnes atteintes de troubles mentaux est admise si a) l’aliénation de l’individu a été établie de manière probante, b) si le trouble revêt un caractère ou une ampleur légitimant l’internement et c) si l’internement ne peut se prolonger valablement sans la persistance de pareil trouble. L’aliénation doit être établie sur la base d’un rapport d’un médecin expert établi moins de 1.5 ans avant le prononcé de la mesure. L’exécution de la mesure n’est « régulière » que si elle se déroule dans un hôpital, une clinique ou un autre établissement approprié.

Art. 59 CP

Une mesure thérapeutique ou un internement doit être ordonné si les conditions posées par le législateur sont remplies (cf. art. 59 et 64 CP). La question de savoir si les autorités administratives prononceront à la suite du jugement pénal l’expulsion de l’intéressé est sans pertinence. L’expulsion n’étant mise en œuvre qu’après l’exécution de la peine et de la mesure thérapeutique institutionnelle, on ne saurait juger la mesure vouée à l’échec car effectuée à l’étranger, après l’expulsion. La question à trancher est de savoir s’il est à prévoir que la mesure détournera le recourant de nouvelles infractions en relation avec son trouble (art. 59 al. 1 let. b CP) en examinant s’il est suffisamment vraisemblable qu’un traitement institutionnel entraînera dans les cinq ans de sa durée normale une réduction nette du risque de récidive. Une expertise sur ce point précis est nécessaire. L’autorité précédente ne pouvait se libérer de l’obligation de rechercher d’office tous les faits pertinents (art. 6 CPP) pour examiner si la condition visée par l’art. 59 al. 1 let. b CPP est remplie en alléguant qu’elle ou l’expert ne détiendrait pas les informations nécessaires, du fait que le recourant, souffrant d’un trouble délirant et d’un trouble de la personnalité paranoïaque, ne les aurait pas données. Le TF admet partiellement le recours et renvoie la cause à l’autorité précédente pour nouvelle décision.

Art. 64 al. 1bis CP

Internement à vie. Le prononcé d’un internement à vie au sens de l’art. 64 al. 1bis CP requiert que l’auteur soit qualifié de durablement non amendable. Cette condition n’implique pas que la réussite d’un traitement impliquant une baisse notable du risque de récidive soit exclue avec certitude jusqu’à la fin de la vie de l’intéressé. Un pronostic excluant la réussite d’une thérapie sur vingt ans suffit à retenir que l’intéressé est durablement non amendable. Il doit en effet être tenu pour accepté par le législateur le fait qu’il s’avère impossible en dernière analyse d’acquérir des certitudes absolues quant aux perspectives d’amendement.

ATF 139 IV 57 (d)

2012-2013

Art. 64 al. 1 CP

Internement. L’internement suppose en toute hypothèse une atteinte grave (portée ou voulue) à l’intégrité physique, psychique ou sexuelle d’un tiers. Cette condition s’applique aussi bien au catalogue d’actes énumérés à l’art. 64 al. 1 CP qu’à la clause générale. L’existence ou non d’une atteinte grave s’apprécie selon des critères objectifs.

NE CPEN.2012.83

2012-2013

Art. 56, 59 et 63 CP

Mesure institutionnelle ou ambulatoire, portée d’une expertise, proportionnalité. Le tribunal peut s’écarter de l’avis de l’expert et écarter une mesure institutionnelle préconisée lorsque le rapport présente des carences, non écartées par l’audition orale de l’expert, et qu’il en ressort que ce dernier n’a pas tenu compte de tous les éléments déterminants pour apprécier le risque de récidive.

TF 6B_272/2012 (d)

2012-2013

Art. 63 al. 2 CP

Suspension de l’exécution de la peine au profit d’un traitement ambulatoire. A teneur de l’art. 63 al. 2 CP, le juge peut suspendre, au profit d'un traitement ambulatoire, l'exécution d'une peine privative de liberté ferme si la peine n'est pas compatible avec le traitement. Sous l’empire du nouveau droit toujours, l’exécution conjointe de la peine et du traitement est la règle et la suspension de l’exécution l’exception.

Art. 64b CP

Libération conditionnelle de l’auteur interné. L’art. 64b CP, qui impose la périodicité d’examen de la libération conditionnelle de l’auteur interné, n’emporte pas l’obligation de se fonder annuellement sur un nouveau rapport d’expertise, si la dernière conduite demeure actuelle. En particulier, l’art. 64b al. 2 CP ne doit pas être compris dans le sens qu’un rapport d’expertise est annuellement obligatoire. L’autorité compétente pour statuer sur la libération conditionnelle se fonde sur les informations provenant de différentes sources : un rapport de l’établissement, l’audition de la commission prévue à l’art. 62d al. 2 CP, l’audition du prévenu et une expertise indépendante selon l’art. 56 al. 4 CP. Si aucun changement significatif dans la situation de l’interné ne permet de mettre en doute l’actualité de l’expertise, l’autorité peut se fonder sur celle-ci. Il doit toutefois être tenu compte du fait que les milieux de la psychiatrie estiment qu’un pronostic de dangerosité fiable ne peut être établi pour une longue durée.