Protection contre les loyers abusifs, procédure simplifiée. Les actions relatives aux prétentions financières formulées après la fin d’un bail et en dehors de toute procédure liée à la consignation des loyers, à la protection contre les loyers abusifs, à la contestation de la résiliation ou à la prolongation du bail, ne sont pas soumises à la procédure simplifiée (art. 243 al. 2 let. c CPC). Cela s’applique indépendamment du fait qu’il soit nécessaire d’évaluer, à titre préjudiciel, la date et les circonstances de la fin du bail dans le cadre du traitement des conclusions en paiement des prétentions financières précitées.
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Qualification de la situation juridique de chalets construits par les locataires à l’aune du principe d’accession. Le principe d’accession ainsi que les caractéristiques d’une construction mobilière sont déterminés par l’art. 667 CC. L’intention des parties de procéder ou non à un rattachement temporaire revêt une importance décisive pour déterminer si le principe d’accession trouve application. Il s’agit par là de déterminer qui du propriétaire du fonds ou des locataires est propriétaire des chalets et si les dispositions de protection des art. 271 ss CO s’appliquent. L’intention des parties doit être appréciée au moment de la réalisation de la construction examinée. Les documents contractuels sont déterminants à cet égard. Dans le cas d’espèce, les contrats de bail prévoyaient que les chalets devaient être enlevés à la fin du bail, démontrant ainsi la volonté du bailleur d’obtenir la restitution de terrains vierges de toute construction ou aménagement. Il n’est pas déterminant que les maisonnettes en question soient en place depuis des décennies. A teneur de l’arrêt, les chalets visés sont donc des constructions mobilières, propriété des locataires, dont les baux ne sont pas soumis aux dispositions de protection des art. 271 ss CO.
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Loyers indexés, indice des prix à la consommation. Les conventions portant sur l’adaptation du loyer en fonction d’un indice (clauses d’indexation du bail) sont valables pour autant que le bail soit conclu pour une durée minimale de cinq ans et que l’indexation soit effectuée selon l’indice suisse des prix à la consommation. Lorsqu’une clause d’indexation prend fin et que le bail est maintenu sous la forme d’un bail à durée indéterminée, les deux parties peuvent demander l’ajustement du loyer à l’aune de la méthode relative pour la fin de la période d’indexation en respectant le délai de résiliation. A défaut d’y procéder à ce moment, le taux hypothécaire de référence applicable pour les modifications futures est celui en vigueur à la date à laquelle le bail aurait pu être résilié (après la fin de la clause d’indexation) et non celui en vigueur à la conclusion du bail.
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Protection contre les congés, clause pénale. L’art. 243, al. 2, let. c CPC prévoit que la procédure simplifiée s’applique notamment aux litiges concernant les baux à loyer ou à ferme d’habitations et de locaux commerciaux, en ce qui concerne la protection contre les congés. La notion de « protection contre les congés » est interprétée de manière large. Cependant, elle ne s’applique pas aux litiges consécutifs à une résiliation émanant du locataire, qu’il s’agisse d’un bail à durée déterminée ou indéterminée. En effet, dans une telle situation, le locataire ne cherche pas à obtenir une protection contre le congé, puisqu’il ne risque pas d’être contraint de quitter les locaux loués contre son gré dans un avenir proche ou lointain. En matière de réduction d’une clause pénale par le tribunal, l’art. 163 al. 3 CO est une norme impérative. Le débiteur doit alléguer les faits qui justifient une réduction. Concrètement, il doit résulter de ses écritures qu’il considère que le montant de la peine conventionnelle est trop élevé.
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Déclaration de compensation ; tardiveté. Afin de produire ses effets, la compensation suppose une déclaration (art. 124 al. 1 CO). La formulation de l’art. 99 LTF ne précise pas si une exception peut être soulevée pour la première fois devant le Tribunal fédéral. En procédure, la compensation ne peut être prise en compte d’office. La partie qui s’en prévaut doit ainsi alléguer une déclaration de compensation selon les formes prescrites durant la phase d’allégation ou conformément aux règles applicables aux novas. En effet, le principe de la confiance interdit aux parties d’attendre une procédure devant le Tribunal fédéral pour soulever des moyens de défense qui supposent une allégation de fait préalable. Lorsque la déclaration de compensation est formulée pour la première fois devant le Tribunal fédéral, la compensation ne peut pas être prise en compte et n’influence pas le sort du recours, car elle présuppose une déclaration de fait n’ayant pas valablement été introduite dans la procédure.
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Conditions générales ; intégration ; règle de l’insolite. Selon la règle de l’insolite, l’adhésion globale aux conditions générales couvre les clauses inhabituelles que lorsque l’attention de la partie la moins expérimentée en affaires a été attirée sur elles, par exemple au moyen d’une mise en gras du texte. Une clause usuelle dans un secteur économique peut être insolite pour qui n’évolue pas dans cette branche. En l’espèce, le Tribunal fédéral applique la règle de l’insolite à deux sociétés commerciales, en soulignant que seule l’une d’entre elles est rompue aux singularités des contrats informatiques. Le Tribunal fédéral qualifie ainsi d’insolite une clause de péremption standardisée intégrée dans les conditions générales, qui impartit au client un délai de trente jours afin de s’opposer aux factures émises par le prestataire et qui lui impose l’envoi d’un courrier recommandé (avec accusé de réception) pour ce faire. Cette clause s’écarte en effet du système légal, qui n’instaure ni un de délai d’opposition sous peine de déchéance, ni de forme à respecter. Le Tribunal fédéral qualifie également d’insolite une autre clause, qui prévoit une indemnité forfaitaire en cas de résiliation en l’absence de faute. Le prestataire n’ayant pas spécialement attiré l’attention du client sur l’existence de ces clauses, elles ne lui sont pas opposables.
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Contrat d’architecte ; intégration de la norme SIA-102. Lorsqu’une facture finale se fonde sur la norme SIA-102 afin de calculer les honoraires d’un architecte, la contestation, par le maître d’ouvrage, des « critères de mises en œuvre » n’est pas suffisante afin de contester l’intégration de cette norme à la relation contractuelle. L’absence de contestation durant la phase d’allégation constitue une acceptation tacite. Par conséquent, la contestation, au stade des plaidoiries finales, de l’intégration de la norme SIA-102 est tardive, ce d’autant plus qu’en l’occurrence une expertise appliquant cette norme n’a pas été contestée.
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Limites de la publicité pour un avocat, envois massifs et indifférenciés de newsletters. L’envoi, par une étude d’avocats, de newsletters présentant des développements législatifs et jurisprudentiels, satisfait au critère de l’objectivité (consid. 5.2). En revanche, l’expédition massive et indifférenciée de newsletters à tous les clients passés et actuels de l’étude constitue une publicité violant l’art. 12 let. d LLCA. Pour être licite, une telle publicité doit être ciblée. Elle ne doit pas s’adresser à des destinataires qui n’ont ni manifesté leur intérêt ni donné leur accord pour la recevoir (consid. 5.4).
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Violation des règles professionnelles, avocats. En matière disciplinaire, la jurisprudence se base sur une conception large de l’exercice de la profession d’avocat, allant au-delà de l’activité de monopole, afin de protéger le public et de préserver la réputation et la dignité de la profession. L’activité lucrative des avocats relève en tout cas du droit disciplinaire lorsque ceux-ci sont chargés d’une activité déterminée au regard de leurs compétences et connaissances particulières d’avocats (consid. 4.1.1). L’avocat désigné par un office cantonal des successions comme exécuteur testamentaire puis administrateur d’une succession (art. 554 al. 2 CC) est soumis à la LLCA (consid. 4.1.3). Il n’est pas contraire à l’art. 20 LLCA de tenir compte, lors du prononcé d’une sanction, de mesures disciplinaires antérieures, dont certaines remontent à plus de 15 ans, mais qui sont radiées du registre en raison de l’écoulement du temps (consid. 5.11).
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Violation des règles professionnelles, avocats. L’existence de la relation de mandat, entre l’avocat et son mandant, est protégé par le secret professionnel (art. 13 al. 1 LLCA). La revendication en justice d’une créance d’honoraires présuppose une levée préalable du secret professionnel (consid. 5.2). Une clause de levée anticipée du secret professionnel de l’avocat en vue du recouvrement d’honoraires n’est en principe pas valable (consid. 5.3-5.4). La levée du secret professionnel doit au moins remplir les critères nécessaires à l’existence d’un motif justificatif de droit pénal selon l’art. 321 ch. 2 CP (consid. 5.6).
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Violation des règles professionnelles, avocats. Le défenseur d’office ne peut se démettre unilatéralement de son mandat. Pour être valablement libéré, il doit en faire la requête auprès de la direction de la procédure (art. 134 al. 2 CPP ; consid. 5.1). A défaut, le défenseur d’office reste soumis aux règles professionnelles de la LLCA. Le devoir d’information, couvert notamment par le devoir de soin et diligence de l’art. 12 let. a LLCA, oblige l’avocat de proposer promptement à son client une explication du jugement, indépendamment du fait que celui-ci en souhaitait effectivement une (consid. 5.3). Pour être libéré de ses obligations de défenseur d’office, celui-ci aurait dû demander à la direction de la procédure de le libérer (art. 134 al. 2 CPP ; consid. 5.3).
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Norme SIA 102 ; contrat d’architecte global, honoraires, dernière estimation des coûts. Les règles du mandat s’appliquent à la résiliation d’un contrat mixte portant sur des prestations de planification et de direction des travaux (consid. 3). Lorsque la résiliation du contrat survient après le début des travaux, le calcul des honoraires doit s’effectuer d’après le coût de l’ouvrage (art. 7 norme SIA 102 ; consid 4). En cas de fin prématurée des travaux, seul le coût des travaux que le mandant a accepté d’assumer, selon l’estimation la plus récente, servira de base pour le calcul des honoraires (consid. 7.2).
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Transfert des risques à l’aune de la CVIM, solidarité, volonté. Si le contrat de vente exige un transport de la marchandise et que le vendeur n’est pas tenu de remettre celle-ci à un endroit précis, les risques sont transférés à l’acheteur dès que la marchandise est remise au premier transporteur (art. 67, al. 1, phrase 1 CVIM). Le vendeur qui ne parvient pas à prouver que la marchandise a bien été remise à un transporteur doit en supporter les conséquences (consid. 2.6). Le remboursement du prix d’achat est solidairement supporté par plusieurs vendeurs (art. 143 al. 1 et 2 CO) si une telle solidarité est établie selon le principe de la confiance (art. 18 CO ; consid. 3.1.2).
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Contravention essentielle, résolution, restitution de l’acompte. L’acheteur peut résoudre le contrat si l’inexécution d’une obligation incombant au vendeur en vertu du contrat ou de la CVIM constitue une violation contractuelle substantielle (art. 49 al. 1 let. a CVIM). Le fait de ne pas livrer une marchandise présentant des qualités conformes au contrat constitue une contravention essentielle au sens de l’art. 25 CVIM, libérant les parties de leurs obligations (art. 81 CVIM). Dans ce cas, le vendeur doit non seulement restituer l’acompte déjà versé mais également payer les intérêts courus depuis le jour où il a été reçu (art. 84 CVIM ; consid. 3.3).
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Devis approximatif. Les règles du devis approximatif de l’art. 375 CO ne sont pas étrangères à la norme SIA 118, puisque l’art. 56 de cette dernière traite de cette question. Il est donc possible d’appliquer les règles de l’art. 375 CO parallèlement à celles de la norme SIA 118 (consid. 6.3).
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Réduction du prix en cas de défauts. La méthode relative s’applique pour calculer la réduction du prix en proportion de la moins-value (art. 378 al. 2 CO). Dans ce cadre, il existe deux présomptions jurisprudentielles. La première est que la valeur de l’ouvrage qui aurait dû être livré est égale au prix convenu. La seconde est que la moins-value est égale aux coûts de remise en état de l’ouvrage. Ainsi, la réduction du prix équivaut au coût de l’élimination du défaut (consid. 5). Lorsque les frais de réparation dépassent le prix de l’ouvrage et qu’il est incontesté que la valeur de ce dernier n’est pas nulle, la seconde présomption ne peut s’appliquer (consid. 5.3.2).
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Droit à la réparation du maître propriétaire d’une part d’étage. Lorsqu’un défaut affecte une partie commune d’une PPE, une coordination est nécessaire entre l’application du droit à la réparation prévue par les contrats d’entreprise des différents acquéreurs de la PPE et les règles relatives à la prise de décision de la communauté des propriétaires par étages. Un propriétaire d’étages ne peut pas imposer tout ce qu’il pourrait exiger en soi de l’entrepreneur en vertu de son contrat, sans tenir compte des intérêts des autres copropriétaires (consid. 2.1). En vertu de ce principe de coordination, l’entrepreneur peut refuser au maître une réparation si ce dernier ne s’est pas préalablement concerté avec les autres propriétaires d’étages (consid. 2.5).
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Art. 82 CO, Art. 82 LP
Exception d’inexécution ; mainlevée provisoire de l’opposition. Lorsque l’acheteur exerce son droit à la réduction du prix en raison des défauts de la chose livrée, il ne peut pas refuser d’en payer le prix réduit en soulevant l’exception d’inexécution. En effet, il n’existe aucun rapport d’échange entre la livraison et la prétention en réduction du prix de vente. L’action minutoire lui permet certes de provoquer unilatéralement la réduction du prix, mais il demeure obligé de s’acquitter du solde, soit la différence entre les éventuels acomptes précédemment versés et le prix réduit. Ce raisonnement vaut aussi bien en droit des contrats qu’en droit des poursuites. Lorsque l’acheteur (poursuivi) se prévaut de la réduction du prix dans une procédure de mainlevée provisoire, il exerce ainsi un moyen libératoire au sens de l’art. 82 al. 2 LP. Il doit alors rendre vraisemblable la communication d’un avis des défauts en temps utile, l’existence dudit défaut, ainsi que l’étendue de la réduction qu’il oppose au vendeur (poursuivant).
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Interprétation des contrats ; contrat d’assurance. La manière dont une partie a effectivement compris un contrat (en l’espèce une police d’assurance) est une question de fait. Après la phase d’allégation, les explications y relatives sont ainsi soumises aux règles relatives à l’introduction des faits nouveaux. En revanche, le sens objectif devant être dégagé de la convention selon les règles de la bonne foi constitue une question de droit. Une partie peut ainsi présenter de nouveaux arguments sur la manière d’interpréter de bonne foi un contrat d’après les circonstances concrètes, sans violer le régime des novas. En l’occurrence, la recourante peut présenter de nouveaux arguments relatifs à l’interprétation du contrat d’assurance au stade des débats principaux, sur la base des circonstances alléguées. Cela ne peut toutefois conduire à un consensus normatif que si elle a allégué en temps utile et conformément aux règles procédurales qu’elle a compris la convention dans ce sens. En effet, un consensus normatif n’est envisageable que si le sens objectif déterminé selon le principe de la confiance correspond à la compréhension effective de l’une des parties.
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Nullité de l’obligation pour cause d’impossibilité objective initiale ; sort du contrat de porte-fort. Les obligations découlant du porte-fort (art. 111 CO) sont en principe indépendantes de l’obligation garantie. La question de savoir si elles perdurent lorsque l’obligation principale est frappée de nullité en raison d’une impossibilité objective initiale est controversée. Selon un premier point de vue, la nullité de l’obligation principale affecte également le porte-fort. Une seconde conception soutient que l’indépendance du porte-fort s’oppose à cette nullité, tout en concédant la faculté de l’invalider pour vice du consentement. Le Tribunal fédéral statue et retient la première solution, soit la nullité du porte-fort. En l’occurrence, le Tribunal fédéral estime que l’obligation illimitée dans le temps d’une société d’édition de vendre un stock de livres à l’obsolescence rapide est initialement et objectivement impossible. La nullité qui en découle s’étend donc à la promesse de porte-fort émise par le gérant de cette société, qui avait fourni une garantie dans l’hypothèse où la société d’édition contrevenait à ses obligations.
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Dommage ; évènement hypothétique ultérieur. La possibilité pour un débiteur de se libérer en objectant que le dommage allégué se serait produit indépendamment de ses actes, en raison d’évènements hypothétiques ultérieurs, est discutée en doctrine et la jurisprudence fédérale n’est pas uniforme à ce titre. En principe, si ces événements se sont produits avant le moment du jugement qui est déterminant pour la fixation du dommage, ils doivent être pris en compte dans son calcul, soit en vertu des dispositions légales y relatives soit en se basant sur la notion de dommage. En l’espèce, le Tribunal fédéral retient qu’un évènement hypothétique ultérieur, soit la conclusion par la donataire d’un contrat d’annulation d’un premier contrat de donation inexécutable, exclut tout dommage résultant de ce dernier. En effet, l’éventuelle violation de son devoir de diligence par l’avocat mandaté pour vérifier le premier contrat de donation aurait de toute façon été neutralisée par la conclusion, des années plus tard, entre la donataire et le donateur, d’une convention d’annulation de ce même contrat. Autrement dit, le dommage résultant de l’inexécutabilité du premier contrat de donation se serait produit, même si l’avocat avait agi conformément à ses obligations contractuelles.
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Responsabilité contractuelle ; responsabilité de l’Etat ; légitimation passive. La patiente qui, suite à une opération chirurgicale effectuée dans un hôpital, exerce une action en responsabilité contractuelle contre le médecin l’ayant opéré doit alléguer et prouver que le contrat de mandat a été conclu avec le médecin en personne. Le seul fait qu’elle l’ait consulté dans son cabinet privé avant son opération n’est pas suffisant à ce titre, à tout le moins si le statut juridique de l’hôpital en cause et le statut d’indépendant du médecin ne sont pas précisés dans le cadre des allégués. De son côté, le médecin peut se limiter à contester l’existence d’un tel contrat, sans alléguer les faits permettant de retenir que le contrat en cause a été conclu avec l’hôpital.
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Contrat de vente ; erreur essentielle ; constructibilité d’une parcelle. Une erreur au sens de l’art. 24 al. 1 ch. 4 CO peut porter sur un fait futur, si les parties pouvaient le qualifier d’objectivement certain au moment de la conclusion du contrat. Le cocontractant doit, de bonne foi, reconnaître que la survenance de l’évènement futur constituait, pour l’autre partie, une condition nécessaire à la conclusion du contrat. En l’espèce, l’acheteuse ne pouvait pas tenir pour certaine l’obtention d’un permis de construire pendant des mois, voire des années, après la conclusion du contrat, ce d’autant plus qu’il était connu que la construction en zones rurales se compliquerait à l’avenir. L’acheteuse doit ainsi assumer le risque lié au changement d’affectation de la parcelle, qui ne constitue pas une erreur essentielle.
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Indemnisation LAVI, dommage matériel. Le salaire non perçu est un dommage matériel, dont l’indemnisation est exclue par l’art. 19 al. 3 LAVI (consid. 3.4). L’employé, victime de traite d’êtres humains pour lequel son employeur a été condamné par jugement pénal, ne dispose pas d’un droit subjectif à l’indemnisation de son salaire impayé par l’autorité cantonale LAVI. L’art. 4 CEDH, interprété à l’aune de l’art. 15 de la Convention sur la lutte contre la traite des êtres humains ne prévoit pas d’obligation positive, à charge de l’Etat, d’instaurer un mécanisme d’indemnisation subsidiaire des salaires impayés des victimes de traite d’êtres humains (consid. 4.3).
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Droit à un procès équitable, prescription de l’action engagée par une victime d’un dommage différé. L’application d’un délai absolu de prescription qui commence à partir du moment où la victime a été exposée à de l’amiante est contraire à l’art. 6 § 1 CEDH en raison d’un défaut d’accès à un tribunal. Cet arrêt, devenu définitif le 13 mai 2024, ne relève aucun motif justifiant de s’écarter du raisonnement de l’affaire Howald Moor et autres c. Suisse (requêtes n° 52067/10 et 41072/11).
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Dommage, marchés publics, procédure d’adjudication. Le dommage causé par la conclusion d’un contrat allant au-delà d’une décision adjudication, en violation du principe de la bonne foi (art. 9 Cst), est soumis à la LRFC (consid. 6). Dans la mesure où le droit des marchés publics ne connaît pas l’obligation de contracter, la personne lésée par un acte ou une omission illicite du pouvoir adjudicateur ne peut prétendre à des dommages-intérêts positifs (consid. 7.3). Seuls peuvent être réclamés des dommages-intérêts négatifs équivalant, par exemple, au coût de la participation à la procédure d’adjudication interrompue (consid. 8.3).
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Responsabilité du détenteur de véhicule automobile, accidents successifs de la circulation routière, causalité naturelle, pluralité de causes. La victime qui, sans faute de sa part, est impliquée dans un premier accident en tant que conductrice de son véhicule puis dans un second accident en tant que passagère d’une dépanneuse, a le fardeau de prouver la causalité naturelle (art. 8 CC ; consid. 3.1). Il y a causalité alternative lorsqu’un préjudice résulte de plusieurs causes entières, dont une seule peut avoir provoqué le préjudice, sans qu’il soit possible de déterminer laquelle. Dans un tel cas de figure, la responsabilité est exclue, car la simple possibilité de causer un préjudice ne suffit pas à établir un lien de causalité (consid. 4).
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