Droit des obligations et des contrats

TF 4A_162/2014

2014-2015

Art. 257f et 262 CO

Gérance libre ; sous-location ; résiliation anticipée.

L’obligation du locataire de requérir l’autorisation du bailleur à la sous-location s’applique par analogie au locataire d’une surface commerciale qui confie l’exploitation d’un établissement public en son sein à un tiers par un contrat de gérance libre (consid. 2.2.1). Pour pouvoir exercer valablement son droit de résiliation anticipée en cas de sous-location non autorisée, le bailleur doit enjoindre le locataire de renoncer à la sous-location ou protester contre l’absence de demande d’autorisation et, le cas échéant, l’inviter à lui en communiquer les conditions (consid. 2.2.2).

Art. 262 CO

Appréciation des conditions de la sous-location.

Lorsque le locataire cède l’usage de la chose louée en vue de l’exploitation d’un établissement public, l’appréciation des conditions de la sous-location ne s’effectue pas par rapport aux conditions usuelles dans la branche économique concernée, mais uniquement par rapport aux conditions du bail principal. Les éventuels investissements consentis par le locataire ne sont pas calculés d’après leur valeur intrinsèque, mais d’après la dépense effective de ce dernier (consid. 3 et 5).

ATF 140 III 244

2014-2015

Art. 266al. 2, 266o, 273 al. 1 CO et art. 9 al. 1 OBLF

Utilisation d’une formule officielle agréée périmée (consid. 4.1 s.) ; théorie absolue de la réception pour la détermination du dies a quo pour la contestation du congé (consid. 5.1). Bien que publié durant la période pertinente au présent recueil, l’arrêt a fait l’objet d’un résumé dans l’édition précédente de cet ouvrage sous la référence TF 4A_120/2014.

ATF 140 III 433

2014-2015

Art. 269, 269a let. a et b CO et art. 14 OBLF

Validité de la hausse de loyer ; notion d’immeuble ancien (consid. 3.1). Bien que publié durant la période pertinente au présent recueil, l’arrêt a fait l’objet d’un résumé dans l’édition précédente de cet ouvrage sous la référence TF 4A_565/2013.

ATF 140 III 491

2014-2015

Art. 266nCO

Résiliation du logement de famille ; bail commun ; abus de droit.

Le logement perd son caractère familial suite au départ définitif de l’un des époux. Dans ce cas, la formule officielle n’a pas à être adressée aux deux époux séparément. Lorsque ces derniers sont, en plus, colocataires du bail, le congé peut être donné au moyen d’une seule formule officielle adressée aux deux époux (consid. 4.1 et 4.2). Celui qui a reçu la résiliation commet un abus de droit, lorsqu’il invoque le fait que l’autre époux n’a pas reçu la résiliation alors qu’il se désintéresse totalement de la cause (consid. 4.2.4).

ATF 140 III 496

2014-2015

Art. 271 al. 1 CO

Résiliation contraire aux règles de la bonne foi.

La résiliation donnée en vue de travaux de transformation et de rénovation est abusive quand le projet apparaît manifestement incompatible avec les prescriptions de droit public et que, de ce fait, les autorisations nécessaires ne seront pas octroyées. Reste également abusive la résiliation donnée alors que le projet du bailleur n’est pas suffisamment abouti pour permettre de déterminer avec certitude si le départ du locataire s’avère nécessaire ou non pour le bon déroulement des travaux (consid. 4.1 et 4.2.2).

ATF 140 III 583

2014-2015

Art. 67 et 270 CO

Enrichissement illégitime ; contestation du loyer initial ; absence de notification sur formule officielle.

La notification du loyer initial sur formule officielle doit intervenir au plus tard le jour de la remise de la chose louée. Si la formule est remise tardivement, mais dans les 30 jours qui suivent cette remise, le dies a quo du délai pour contester le loyer initial est reporté au jour de la notification effective. La communication qui intervient après coup équivaut à une absence de notification. Ce vice entraîne la nullité du loyer fixé (consid. 3.1 ; 3.2.1 s.). Le locataire peut alors agir en fixation du loyer et en restitution des prestations effectuées sans cause sur la base des règles de l’enrichissement illégitime. Le droit du bail ne prévoit pas de règle spéciale limitant l’invocation du vice de forme dans le temps. Le locataire demeure tout au plus limité par les règles de la prescription pour cause d’enrichissement illégitime de l’art. 67 CO (consid. 3.2.3).

ATF 140 III 591

2014-2015

Art. 257d et 271 al. 1 CO

Demeure du locataire pour le paiement des frais accessoires ; résiliation anticipée du bail.

Le congé pour demeure du locataire peut exceptionnellement être contraire aux règles de la bonne foi. Ce peut être le cas si le montant en souffrance est particulièrement insignifiant. Le caractère insignifiant s’apprécie objectivement, sans égard aux capacités financières du bailleur ou au montant du loyer mensuel. Un montant de quelques centaines de francs n’est pas insignifiant (consid. 1 et 2). Peu importe que le locataire en conteste le bien-fondé, il suffit que la créance en souffrance soit exigible. S’agissant des frais accessoires, le locataire doit pouvoir bénéficier du temps nécessaire pour consulter les pièces originales et l’exactitude du décompte (consid. 3.2).

ATF 140 III 598

2014-2015

Art. 271 et 271CO

Bail commun ; annulation du congé.

Sous réserve des dispositions sur le logement de famille, les colocataires doivent agir en commun pour requérir l’annulation du congé donné par le bailleur. Si un seul des colocataires souhaite contester le congé, il peut agir en assignant les autres colocataires aux côtés du bailleur (consid. 3).

ATF 141 III 101

2014-2015

Art. 271a al. 1 let. d CO

Protection contre les congés en cours de procédure.

La protection de l’art. 271a al. 1 let. d CO est valable dès l’ouverture de l’action et jusqu’au prononcé d’un jugement définitif et exécutoire. Il importe peu que le bailleur n’ait pas encore été informé de la procédure au moment où il adresse le congé au locataire (consid. 2).

TF 4A_159/2014

2014-2015

Art. 18 al. 1, 256 al. 1 et 2, 259a al.1 let. a et b CO

Défauts faisant partie de l’état de la chose louée.

Le défaut de la chose louée s’apprécie en comparant l’état effectif avec l’état convenu ou attendu. La convention des parties prime. Son contenu se détermine d’après la volonté concordante et effective des parties. A défaut, le juge recourt à une interprétation objective du contrat (consid. 4.1 et 4.4).

TF 4A_391/2014

2014-2015

Art. 271 CO

Travaux de rénovation ; résiliation.

Des travaux de rénovation d’envergure peuvent justifier la résiliation du bail. Elle se justifie également lorsque le locataire se déclare prêt à rester dans les locaux en travaux et à s’accommoder des inconvénients lorsque sa présence engendrerait des difficultés supplémentaires, un accroissement des coûts ou de la durée des travaux. Le congé est toutefois annulable lorsque la présence du locataire ne compliquerait pas les travaux ou ne les compliquerait que de manière insignifiante (consid. 2).

TF 4A_40/2015

2014-2015

Art. 257d al.1, 271 et 271a CO

Résiliation anticipée ; demeure du locataire dans le paiement des frais accessoires.

Le locataire qui conteste la créance en paiement des frais accessoires et refuse de payer s’expose à une résiliation anticipée du contrat pour demeure. Il suffit que la créance en paiement des frais accessoires soit exigible (consid. 4.2.1).

TF 4A_464/2014

2014-2015

Art. 257f et 271 CO

Résiliation ordinaire ; violation du devoir de diligence du locataire.

Lorsque le locataire enfreint ses devoirs de diligence, le bailleur peut résilier le contrat de manière anticipée moyennant un avertissement préalable. Le bailleur peut également recourir au congé ordinaire, sans octroyer d’avertissement préalable, et résilier le contrat selon les termes et délais prévus. Toutefois, le congé ordinaire peut être annulé s’il est inutilement rigoureux. C’est le cas lorsque le congé est motivé uniquement par la violation des devoirs de diligence du locataire et que l’avertissement écrit aurait pu permettre au locataire de rectifier son comportement (consid. 4).

TF 4A_531/2014

2014-2015

Art. 266g CO

Résiliation pour justes motifs.

Le seul fait que l’immeuble loué doive faire l’objet de travaux d’assainissement et qu’une autorisation de démolir ait été délivrée n’est pas suffisant pour permettre une résiliation anticipée pour justes motifs (consid. 2.1).

TF 4A_70/2014

2014-2015

Art. 259g et 259h al.2 CO

Consignation tardive du loyer ; résiliation anticipée.

Lorsque le contrat prévoit que les loyers doivent être payés d’avance au plus tard le dernier jour du mois précédent, la consignation de ces derniers doit intervenir dans les mêmes termes et délais. La consignation tardive qui interviendrait en début du mois courant n’est pas conforme à l’art. 259g al. 1 CO. Elle permet au bailleur d’introduire une action en libération des loyers consignés et n’a aucun effet libératoire à l’égard du locataire. Elle expose ainsi le locataire à la résiliation du bail pour demeure (consid. 4).

ATF 140 III 372

2014-2015

Art. 170 CO

Cession de créances ; mainlevée définitive.

La position du cédant dans la poursuite fait partie des droits accessoires de la cession au sens de l’art. 170 CO. Ils passent au cessionnaire sans procédure particulière. Ainsi, le cessionnaire peut se prévaloir d’un jugement obtenu par le cédant comme titre de mainlevée définitive. Pour ce faire, le cessionnaire n’a pas besoin de faire constater judiciairement la validité de la cession. Il lui suffit de démontrer sa qualité devant le juge de la mainlevée (consid. 3.3).

TF 4A_146/2014

2014-2015

Art. 124 al. 1 et 257dCO

Déclaration de compensation ; demeure du locataire.

Le locataire en demeure du paiement de loyer qui souhaite invoquer la compensation avec des créances en remboursement certes indéterminées, mais déterminables doit déclarer au bailleur son intention de compenser avant l’expiration du délai comminatoire. A défaut, le locataire n’a pas éteint sa dette à temps et s’expose à la résiliation du bail (consid. 1).

TF 4A_153/2015

2014-2015

Art. 33 LCA

Exclusion de risques.

La simple formulation d’une exclusion d’un risque et de ses suites dans le contrat d’assurance n’est pas suffisante pour permettre à l’assurance de réduire ses prestations lorsqu’un risque couvert et un risque non couvert ont chacun individuellement ou ensemble provoqué la survenance de l’évé Une clause d’exclusion doit en effet être interprétée de façon restrictive puisqu’elle va à l’encontre du but d’une assurance (consid. 4.1 et 4.2.2).

TF 4A_376/2014

2014-2015

Art. 6 et 8 LCA

Maintien du contrat malgré la réticence. En cas de réticence (art. 6 LCA), la déclaration de résiliation de l’assurance doit être motivée avec précision. Elle doit contenir la question qui a reçu une réponse inexacte et préciser de façon circonstanciée en quoi consiste le fait important non déclaré ou inexactement déclaré (consid. 2.3.1). La formule « connaissait ou devait connaître » de l’art. 8 ch. 3 et 4 LCA, montre que l’assurance assume le devoir d’examiner de manière attentive et critique les réponses données aux questions qu’elle a posées. Sans devoir se renseigner et rechercher par elle-même les réponses, l’assurance doit rechercher les informations s’il est nécessaire d’écarter des incertitudes ou d’élucider des contradictions. L’assurance ne peut dès lors pas se prévaloir d’un cas de réticence si elle n’a pas respecté cette incombance (consid. 2.4.1).

TF 4A_644/2014

2014-2015

Art. 46 LCA

Prescription.

Dans la LCA, le point de départ de la prescription n’est pas lié à l’exigibilité de la créance (art. 41 LCA) mais au « fait d’où naît l’obligation » (art. 46 al. 1 LCA). Celui-ci ne se confond pas nécessairement avec la survenance du sinistre. Selon le type d’assurance envisagée, la prestation de l’assurance n’est due que si le sinistre engendre un autre fait précis. Ainsi, en matière d’assurance-accident complémentaire et de couverture en cas d’invalidité, la prescription court dès la survenance de l’invalidité. Précisément, lorsqu’il faut admettre que les mesures thérapeutiques destinées à conjurer ou à limiter l’atteinte ont échoué. Par contre, il n’est pas nécessaire que l’invalidité soit définitivement déterminée. Son principe est suffisant, à moins que le contrat d’assurance ne prévoie un taux minimal afin que le cas d’assurance soit réalisé. De plus, le moment où l’assuré a eu connaissance de son invalidité n’est pas déterminant. L’art. 46 al. 1 LCA fixe le point de départ de la prescription de façon objective (consid. 2.3).

ATF 141 III 64

2014-2015

Art. 415 CO

Nullité du contrat ; double courtage de négociation immobilière ; déchéance du droit au salaire.

En matière immobilière, le courtier qui conclut un contrat de courtage de négociation non seulement avec le vendeur d’un bien-fonds, mais également avec l’acheteur se trouve inévitablement dans une situation de conflit d’intérêts, puisqu’il est alors amené à défendre des intérêts opposés. En effet, soit il favorise les intérêts financiers de l’une ou de l’autre partie, soit il agit dans son propre intérêt, de sorte qu’il enfreint son devoir de fidélité (art. 412 CO qui renvoie à l’art. 398 al. 2 CO). Le double courtage de négociation immobilière tombe dès lors sous le coup de l’art. 415 in fine CO ayant pour conséquence la nullité des deux contrats de courtage et la perte du droit au salaire du courtier en rapport avec les deux contrats (consid. 4.3).

TF 4A_287/2015

2014-2015

Art. 394 al. 3 CO

Rémunération du mandataire ; rémunération à forfait.

La rémunération du mandataire représente la contre-prestation pour les services qu’il rend au mandant, de sorte que le mandataire qui demeure inactif ou n’agit pas avec le soin requis ne peut pas prétendre à l’entier des honoraires convenus ou à ceux qui seraient équitablement dus à un mandataire diligent. Lorsque la rémunération du mandataire est fixée forfaitairement, il lui incombe donc de démontrer qu’il a correctement exécuté sa prestation s’il veut prétendre à des honoraires (consid. 2.1).

TF 4A_429/2014

2014-2015

Art. 402 CO

Obligation du mandant ; faute du mandataire.

Le mandataire ne peut se voir dédommager des frais encourus ou du dommage subi dans l’exécution du mandat lorsqu’il a manqué à son devoir de diligence (consid. 6.2.5). Dans le cadre d’une gestion de biens à titre fiduciaire, l’éventuel gain ou perte de la valeur des biens est en faveur, respectivement à la charge du mandant. De plus, celui-ci assume les risques des instructions s’agissant de la vente ou de la restitution des biens (consid. 6.3). L’art. 402 CO tout comme l’art. 431 CO sont de nature dispositive. Les droits du mandataire peuvent ainsi être restreints ou étendus.

TF 4A_11/2015

2014-2015

Art. 199 CO

Vente immobilière ; défaut frauduleusement caché.

Il y a dissimulation frauduleuse au sens de l’art. 199 CO lorsque le vendeur qui connaît le défaut envisage la possibilité que l’acheteur ne le découvre pas et accepte ce résultat pour le cas où il se produirait. Pour que le vendeur puisse échapper au grief de dissimulation frauduleuse alors qu’il tait une information dont il ne peut ignorer l’importance pour l’acheteur, il doit avoir de bonnes raisons de penser que celui-ci reconnaîtra le défaut par lui-même (consid. 2.2.2).

TF 4A_614/2014

2014-2015

Art. 25 et 49 CVIM

Vente internationale de marchandises ; contravention essentielle ; résolution du contrat.

Dans le cadre de l’art. 49 al. 1 let. b CVIM, l’acheteur ne peut pas résoudre le contrat sans qu’il ait au préalable imparti un délai supplémentaire raisonnable au vendeur. Ce délai doit être précis (consid. 5.7). La notion de contravention essentielle du contrat d’après l’art. 25 CVIM doit être interprétée de façon restrictive. En cas de doute, il faut partir du principe qu’une telle contravention n’est pas donnée. La résolution du contrat doit en effet rester l’exception. L’acheteur doit en premier lieu user des autres moyens de droit mis à sa disposition (consid. 6.1).

ATF 141 III 106

2014-2015

Art. 366 CO

Contrat comportant plusieurs prestations indépendantes ; non-respect du délai intermédiaire fixé pour l’une des prestations.

Le maître ne peut pas se départir de l’ensemble du contrat selon l’art. 366 CO lorsque le contrat comporte plusieurs prestations indépendantes et que l’entrepreneur n’est en retard que pour l’une d’elles. L’analyse s’effectue au regard de l’indépendance technique des prestations (production / montage) et d’une pesée d’intérêts. Il n’est pas déterminant que les prestations soient regroupées au sein d’un même contrat assorti d’un délai final et qu’un rabais soit offert en raison de l’offre combinée (consid. 16.2).

TF 4A_2/2015*

2014-2015

Art. 366 al. 2 CO

Exécution par substitution ; avance de frais.

Dans le cadre d’une exécution par substitution (art. 366 al. 2 CO), le maître n’a pas besoin d’avancer lui-même les frais de réfection. Il a droit au paiement préalable des frais probables. L’avance de frais est uniquement un acompte qui est pris en compte lors du décompte des frais effectifs. Ainsi, lorsque le montant est trop élevé, le maître doit le solde à l’entrepreneur. Inversement, si le montant est insuffisant, l’entrepreneur doit couvrir les frais restants. Un jugement fixant l’avance de frais détermine définitivement le montant de l’avance. Il n’a toutefois pas d’influence sur la demande de restitution de la somme reçue en trop ou sur la demande de paiement complémentaire (consid. 3.3).

TF 4A_96/2014

2014-2015

Art. 366 et 377 CO

Rupture prématurée des relations contractuelles.

Le maître ne peut pas se départir du contrat (art. 366 al. 1 CO) ou procéder à l’exécution par substitution (art. 366 al. 2 CO) sans fixer à l’entrepreneur un délai convenable pour parer à ces éventualités (art. 107 CO sous réserve des cas prévus par l’art. 108 CO ; consid. 3). De plus, lorsque le maître se départit du contrat en vertu de l’art. 377 CO, il ne peut pas faire valoir la mauvaise exécution ou les retards imputables à l’entrepreneur survenant en cours de travaux, comme motifs justificatifs permettant la réduction, voire la suppression de l’indemnité due à ce dernier, car ces éventualités sont déjà couvertes par l’art. 366 CO. La perte de confiance du maître en l’entrepreneur ne saurait en outre constituer à elle seule un motif suffisant (consid. 4.1).

ATF 141 IV 71

2014-2015

41, 60, 63 et 67 CO, art. 141bis CP

Paiement de l’indu ; prescription ; enrichissement illégitime.

L’interprétation de l’art. 141bis CP doit intervenir au regard du principe de subsidiarité du droit pénal par rapport au droit civil. Un simple refus de restituer des valeurs patrimoniales n’est pas une « utilisation » répréhensible et ne donne donc pas matière à une action délictuelle (art. 41 CO) permettant de bénéficier d’un délai de prescription de sept ans (art. 60 al. 2 CO ; consid. 7). Les intérêts des ayants droit sont suffisamment sauvegardés par l’action civile en répétition de l’indu (art. 63 CO) dont le délai de prescription est d’un an (art. 67 CO). Même si ce délai est considéré comme excessivement bref par le Conseil fédéral et que le législateur fédéral est saisi d’une proposition tendant à lui substituer un délai de trois ans, ce délai plus long ne peut pas être appliqué de façon anticipée (consid. 8).

TF 4A_517/2014

2014-2015

Art. 67, 269 et 270 CO

Nullité du loyer initial ; prescription de la créance en restitution de l’indu.

Lorsque le loyer initial est nul, la créance en restitution de l’indu se prescrit à compter du jour où le locataire acquiert la connaissance effective de sa prétention, soit lorsqu’il sait que l’absence de formule officielle, respectivement de l’indication du loyer du locataire précédent ou de la motivation de la hausse entraîne la nullité du loyer initial, que le loyer qu’il a versé était trop élevé et qu’il était, partant, abusif. Le fait de démontrer que le locataire aurait pu ou dû connaître le vice ne suffit pas à faire courir la prescription (consid. 4.1.2 et 4.2).

TF 4A_125/2014

2014-2015

Art. 24 al. 1 ch. 4 CO

Erreur de base.

Est subjectivement et objectivement essentielle l’erreur du locataire portant sur la suppression de nuisances sonores – par le bailleur ou un tiers – avant la prise de possession de la chose louée, de même que l’erreur portant sur la source de ces nuisances, leurs conséquences et le respect des normes légales en matière de bruit ambiant (consid. 3).

ATF 140 V 82

2014-2015

Art. 9 CO et art. 52 LPGA

Retrait de la renonciation à former opposition ; forme du retrait.

Une renonciation à former opposition au sens de l’art. 52 LPGA ne peut, en principe, être révoquée. Toutefois, il s’agit d’une manifestation de volonté sujette à réception. Tout comme l’offre de conclure, elle peut être révoquée si le retrait parvient avant l’offre ou en même temps à son destinataire. Un retrait effectué par courriel, parvenu à son destinataire avant la renonciation à faire opposition, est valable et la renonciation à faire opposition ne produit pas ses effets (consid. 4.1 à 4.3).

TF 4A_258/2014

2014-2015

Art. 1, 18 et 165 CO

Modification du contrat par acte concluant ; cession du contrat.

La conclusion et la modification du contrat de bail ne sont soumises à aucune forme. Au décès du locataire, ses héritiers sont devenus colocataires de l’appartement. Le désintérêt total dont font preuve certains héritiers peut être interprété par le bailleur comme une renonciation de leur part au bail au profit des autres héritiers. Dans pareil cas, il y a modification du contrat par actes concluants. Il ne s’agit pas d’une cession de créances nécessitant la forme écrite (consid. 1.3).

ATF 140 III 404

2014-2015

Art. 8 LCD

Utilisation de conditions générales abusives ; application rétroactive du nouvel art. 8 LCD aux contrats conclus avant le 1er juillet 2012 ; clause de renouvellement automatique du contrat d’abonnement (consid. 4). Bien que publié durant la période pertinente au présent recueil, l’arrêt a fait l’objet d’un résumé dans l’édition précédente de cet ouvrage sous la référence TF 4A_475/2013.

TF 4A_551/2014

2014-2015

Art. 18 al. 1 CO

Simulation.

Un contrat est simulé lorsque les parties conviennent que les effets juridiques correspondant au sens objectif de leur déclaration ne se produiront pas et qu’elles n’ont voulu créer qu’une apparence d’acte juridique à l’égard des tiers. Celui qui se fonde sur une simulation doit prouver que la volonté véritable des parties diffère de la lettre du contrat. Il s’agit d’une question de fait que le TF ne revoit pas, sauf aux conditions des art. 97 et 105 LTF (consid. 3).

TF 4A_608/2014

2014-2015

Art. 18 al. 1 CO

Interprétation d’une clause d’adaptation de loyer.

La clause qui prévoit que le loyer d’un bail commercial sera rediscuté à l’échéance de la première année d’exploitation et adapté à la hausse ou à la baisse ne constitue pas une déclaration d’intention, mais bel et bien une clause d’adaptation du loyer. Lorsque le mode d’adaptation n’est pas réglé dans le contrat, mais fait l’objet d’un accord ultérieur, c’est ce dernier qui lie les parties. Il en va ainsi lorsque les parties ont convenu ultérieurement d’attribuer à un tiers la compétence de déterminer l’adaptation du loyer (consid. 3).

TF 4A_530/2014*

2014-2015

Art. 462 CO

Représentation par un organe de fait ou un mandataire commercial.

La représentation d’une personne morale par un organe de fait au cours de l’audience de conciliation, à laquelle la présence des parties est obligatoire, n’est pas valable (consid. 2). Le représentant d’une personne morale à cette audience doit non seulement disposer des pouvoirs de représentation du mandataire commercial, mais doit bénéficier également d’une procuration expresse (consid. 3).

TF 4A_691/2014

2014-2015

Art. 253 CO

Conclusion par actes concluants.

Le prêt à usage se transforme en bail à loyer lorsque les parties ont manifesté leur volonté en ce sens de manière concordante. Pour qu’une telle transformation s’opère par actes concluants, il faut que l’emprunteur ait effectivement payé le loyer demandé par le prêteur. Le fait de ne pas avoir discuté le montant avancé par le prêteur ne suffit pas (consid. 5).

ATF 141 III 112

2014-2015

Art. 41, 97 al. 1 et 112 al. 2 CO

Stipulation pour autrui ; indemnités journalières ; responsabilité des administrateurs.

L’assurance collective d’indemnités journalières conclue par l’employeur est une stipulation pour autrui parfaite en faveur de l’employé. Ce dernier peut réclamer personnellement à l’employeur le paiement des primes à l’assurance, au sens de l’art. 112 al. 2 CO (consid. 4.3). Lorsque l’employeur ne satisfait pas aux obligations auxquelles il s’est engagé, par exemple s’il ne conclut pas le contrat d’assurance prévu, n’acquitte pas des primes dues à l’assurance ou n’annonce pas à temps la maladie d’un employé, ce dernier peut demander réparation du dommage subi tant à la société employeuse (art. 97 CO) qu’à ses administrateurs à titre personnel (art. 41 CO ; consid. 4.5 et 5).

ATF 141 III 97

2014-2015

Art. 47 et 49 CO

Réparation morale ; comportement de l’auteur de l’acte illicite au procès.

Le juge tient compte des circonstances particulières lors de la fixation de l’indemnité équitable à titre de réparation du tort moral. Le genre et la gravité de la lésion, l’intensité et la durée des répercussions sur la personnalité de la victime, le degré de la faute de l’auteur et l’éventuelle faute concomitante de la victime figurent parmi les circonstances principales qui peuvent justifier l’application de l’art. 47 CO (consid. 11.2). En revanche, le juge ne peut pas tenir compte du comportement de l’auteur durant le procès, respectivement de son assurance, pour fixer l’indemnité. Si le comportement du responsable en procédure dépasse les limites de l’acceptable et conduit à une offense de la victime, c’est alors l’art. 49 CO qui est applicable afin de sanctionner l’atteinte grave portée aux droits de la personnalité de celle-ci (consid. 11.4).

Art. 41, 44, 47 et 58 CO

Responsabilité de l’exploitant des pistes de ski.

La responsabilité est de nature tant contractuelle (contrat de transport) que délictuelle (art. 41 et 58 CO ; consid. 3.2). Pour déterminer le devoir de sécurité de l’exploitant de pistes de ski, le TF se base sur des directives émanant d’associations reconnues (SKUS et RMS ; consid. 3.4.1). Toutefois, des mesures de sécurité supplémentaires peuvent également être exigées en présence de dangers reconnaissables. Une pesée d’intérêts doit alors intervenir afin d’établir ce qui peut raisonnablement être exigé de l’exploitant (consid. 3.4.5). La faute concomitante de la victime (art. 44 CO) est analysée en fonction de son comportement, de sa capacité de discernement et des règles FIS (consid. 4.1 ss). Une faute des parents, skiant derrière un enfant victime d’un accident, ne doit pas être imputée à l’enfant (consid. 4.6). Le capital reçu d’une assurance de somme privée ne doit pas être un critère de fixation du tort moral (art. 47 CO ; consid. 5.3.2).

TF 4A_310/2014

2014-2015

Art. 46 al. 1 CO

Calcul du dommage ; perte de gain actuelle et future.

La victime de lésions corporelles a droit aux dommages-intérêts qui résultent de son incapacité de travail. La loi distingue la perte de gain actuelle et future. Est actuelle la perte de gain éprouvée au jour de la décision de la juridiction cantonale devant laquelle il est possible pour la dernière fois d’invoquer des faits nouveaux. Est future la perte de gain subie par la victime devenue totalement ou partiellement invalide. Les deux postes font toutefois partie du même dommage et les principes de calcul demeurent les mêmes (consid. 2.2). Il s’agit pour le juge d’estimer le gain que la victime aurait réalisé si elle n’avait pas subi l’accident (consid. 4.1.2).

TF 4A_557/2014

2014-2015

Art. 41 CO

Frais d’avocats ; concours d’actions.

Le CPC détermine les dépens auxquels le plaideur victorieux peut prétendre. Il n’y a pas de place pour une action fondée sur le droit de la responsabilité civile tendant au remboursement des frais d’avocat. Il existe toutefois un concours entre l’action fondée sur l’art. 41 CO et le remboursement des dépens du droit de procédure civile lorsque le plaideur victorieux s’est heurté à un comportement illicite de la partie qui succombe en cours de procédure. C’est le cas notamment du plaideur téméraire qui savait ou devait savoir sa position indéfendable (consid. 2.1).

TF 6B_768/2014

2014-2015

Art. 47 CO et art. 122 CPP

Tort moral suite à une transmission du HIV.

La fixation de l’indemnité pour tort moral s’effectue en deux phases. La première suit des critères objectifs déterminant un montant de base comme point d’orientation. La deuxième consiste à l’adaptation de ce montant au regard des circonstances concrètes du cas particulier. Concernant une contamination HIV, le montant de base ne saurait être calqué sur un jugement rendu à une époque où les moyens thérapeutiques étaient considérablement moins efficaces qu’actuellement. De plus, dans l’hypothèse où plusieurs personnes auraient subi des actes délictueux similaires du même auteur, le juge se doit de procéder à une appréciation individuelle des circonstances propres à chaque victime. Par rapport à l’exercice d’une action civile par adhésion à la procédure pénale (art. 122 CPP), les prétentions civiles doivent se fonder exclusivement sur l’acte pénalement répréhensible (consid. 3.3 s.).

Art. 97 et 378 CO

Contrat d’entreprise ; impossibilité subséquente d’exécuter l’ouvrage.

Si l’impossibilité d’exécuter la prestation survient après la conclusion du contrat, les dispositions générales relatives à l’impossibilité subséquente (art. 97 et 119 CO) sont en principe applicables (consid. 4.2). Le droit du contrat d’entreprise contient certes une disposition spéciale, à savoir l’art. 378 CO, primant les règles générales sur l’impossibilité subséquente. Son application est toutefois conditionnée à l’absence de faute de l’entrepreneur dans la survenance de l’impossibilité de réaliser l’ouvrage (consid. 4.3). Comblement judiciaire d’une lacune de l’art. 97 al. 1 CO en accordant au créancier, en cas d’impossibilité objective subséquente imputable au débiteur, le droit formateur de résoudre le contrat avec effet rétroactif, dans le cas où la partie exécutée de la prestation a perdu tout intérêt pour lui. Cela implique donc que le créancier est libéré d’exécuter sa contre-prestation et qu’il peut demander au débiteur fautif le versement de dommages-intérêts négatifs (consid. 4.5). Ce droit formateur doit s’exprimer par une manifestation de volonté claire et dépourvue d’incertitudes (consid. 4.6).