Droit des sociétés

Responsabilité du fait du prospectus. Le présent litige s’apprécie à l’aune de l’ancienne responsabilité de droit privé pour les prospectus de l’art. 752 aCO. Les conditions générales de responsabilité s’appliquant également à la responsabilité découlant du prospectus. Aussi, le rapport de causalité est établi lorsque le préjudice résulte d’une information défectueuse. Le TF prévoit un allègement du fardeau de la preuve limité à la vraisemblance prépondérante. Celle-ci est retenue lorsque d’un point de vue objectif, des motifs importants plaident pour l’exactitude d’une allégation, sans que d’autres possibilités ne revêtent une importance significative ou n’entrent raisonnablement en considération. En l’espèce, les recourants ne parviennent pas à établir qu’ils auraient renoncé à leur investissement dans la société anonyme s’ils avaient été correctement informés par les informations contenues dans le prospectus. Au surplus ces derniers n’étaient pas sans savoir qu’aucun investissement n’est dépourvu de risque.

Art. 33 LB , Art. 34 LB , Art. 35 LB , Art. 36 LB , Art. 37a LB , Art. 37b LB , Art. 37c LB , Art. 37d LB , Art. 37e LB , Art. 37f LB , Art. 37g LB

Acceptation illicite de dépôts du public ; liquidation ordonnée par la FINMA. En cas de liquidation d’un établissement non autorisé, la preuve d’un surendettement formel n’est pas requise, l’existence de circonstances raisonnables et compréhensibles indiquant un surendettement existant ou imminent suffit en droit des marchés financiers. La FINMA dispose donc à cet égard d’une marge d’appréciation (technique) non négligeable. Cette marge d’appréciation s’accompagne toutefois d’exigences accrues en matière de motivation : la FINMA doit suffisamment motiver sa décision dans chaque cas particulier, la simple présomption abstraite de surendettement n’est pas suffisante.

Art. 37g LB

Faillite d’une banque étrangère ; remise du patrimoine situé en Suisse à la masse en faillite étrangère sans faillite ancillaire. La demande d’approbation de la procédure prévue à l’art. 37g al. 2 LB a été formulée par les liquidateurs de la banque étrangère en faillite, et non par l’autorité de surveillance étrangère comme dans l’ATF 145 II 168 (auquel le TF s’est référé par analogie, les faits étant similaires en l’espèce), et la FINMA a également autorisé ceux-ci à faire valoir des créances patrimoniales à l’encontre d’une banque suisse. Toutefois, en l’espèce, une assistance a bien été fournie à une autorité étrangère dans la mesure où l’octroi de l’autorisation de mener la procédure simplifiée requise par les liquidateurs bénéficie à la masse en faillite de la banque étrangère et permet à ceux-ci de remplir plus facilement leur mission publique de liquidation de la banque. Ainsi, l’assistance internationale fournie par la FINMA est de nature administrative, car la décision a été prise, comme dans l’ATF susmentionné, dans le cadre d’une procédure de droit public suisse fondée sur l’art. 37g LB. Le recours en matière de droit public est donc exclu en vertu de l’art. 83 let. h LTF. Tout comme le recours en matière civile (art. 72 ss LTF), étant donné que le législateur a spécifiquement soumis la question des faillites de banques étrangères à un régime spécial de droit public à l’art. 37g al. 1 et 2 LB.

Art. 34 LFINMA

Sanctions du droit des marchés financiers. La publication d’une décision de la FINMA (art. 34 LFINMA), qui est limitée dans le temps de manière appropriée, ne remplit aucun des critères de la jurisprudence « Engel » de la CourEDH permettant de déterminer si une mesure disciplinaire entre dans le champ d’application de l’art. 6 par. 1 CEDH. Par conséquent, la sanction prévue par l’art. 34 LFINMA est une sanction administrative répressive et une mesure préventive de protection, mais elle ne constitue pas une accusation pénale au sens de l’art. 6 CEDH.

Art. 83 let. h LTF ; 37g LB

Reconnaissance d’une mesure d’insolvabilité étrangère. La décision de la FINMA, qui reconnaît en Suisse un plan de résolution bancaire adopté par une autorité étrangère et habilite simultanément celle-ci à réclamer en Suisse le patrimoine que détient la banque en difficulté, doit être qualifiée d’acte d’entraide internationale. L’entraide couvre tous les actes de procédure requis par une autorité étrangère qui lui servent à instruire une cause ou à exécuter une décision. Elle peut donc consister dans le fait d’autoriser une autorité étrangère à effectuer des actes en Suisse. De plus, l’entraide fournie par la FINMA, par l’intermédiaire de sa décision, représente un mécanisme administratif régi par le droit public suisse, soit l’art. 37g LB. Ainsi, le législateur a choisi de confier à une autorité administrative, soit la FINMA, la tâche de reconnaître des décisions de faillites et des mesures similaires étrangères. L’assistance fournie par la FINMA peut par conséquent être qualifiée d’administrative. Au vu de ce qui précède, le recours dirigé contre un arrêt du TAF portant sur la décision de la FINMA susmentionnée n’est pas recevable en tant que recours en matière de droit public (art. 83 let. h LTF). Il ne peut pas non plus être transformé en recours en matière civil dans la mesure où la problématique de la faillite et de l’assainissement bancaire est précisément soumise à un régime spécial de droit public.

Art. 3 al. 2 LBVM ; 2 al. 2 let. d et 7 LPCC

Champ d’application de la LPCC ; SICAF ; société de capital-risque (venture capital). Un fond ou une société de capital-investissement (Private Equity) se distingue des fonds en valeurs mobilières ou des hedge funds par le fait que l’accent est mis sur l’investissement dans une société. C’est particulièrement le cas du financement par capital-risque, qui consiste à acquérir une participation (minoritaire) aux fonds propres (p.ex. des actions) d’une société dans le but d’augmenter la valeur ajoutée de cette entreprise et de réaliser un bénéfice (en général après cinq ou dix ans) en vendant par la suite cette participation. Il y a activité d’investissement en cas de vente de participations à terme, tandis que les rémunérations périodiques (en particulier les dividendes) feront généralement défaut à ce stade. En cas de financement par capital-risque, l’investisseur utilise un véhicule qui permet la concentration des fonds, et qui est considéré légalement comme l’acheteur de la participation (minoritaire). La forme de la société anonyme (éventuellement sous forme de holding) au sens de l’art. 620 CO, ou celle plus spécifique des placements collectifs, telle que la SCPC (art. 98 LPCC) ou la SICAF (art. 110 LPCC) sont les plus adaptées. En outre, le financement par capital-risque se caractérise régulièrement par le fait que la valeur ajoutée de l’investissement pendant la durée du projet est générée par une participation active de l’investisseur dans l’entreprise concernée. Toutefois, il n’est généralement pas prévu de générer des rendements sur la base des investissements durant la durée du projet. La création de valeur escomptée par la participation active de l’investisseur dans la start-up permet de distinguer sans équivoque l’activité de l’investisseur en capital-risque de l’investissement passif dans des placements collectifs de capitaux, dans lesquels l’investisseur place de l’argent qui doit lui être rendu ultérieurement, en sus du revenu, mais sans qu’il n’exerce aucune influence sur son investissement durant cette période (art. 7 al. 1 LPCC). Par conséquent, lorsqu’une société de capital-risque participe activement à la société dont elle détient une participation (minoritaire), celle-ci ne peut être qualifiée de placements collectifs en raison de l’absence de gestion par un tiers (art. 7 al. 1 LPCC) ou d’une activité commerciale ou industrielle active (art. 2 al. 2 let. d LPCC).

ATF 143 II 162 (d)

2016-2017

Art. 5 al. 1 et 164 Cst. ; 24, 25, 28 LBA ; 12 al. 2 let. h, 17, 18 al. 1 let. a et b OBA-FINMA [2010] ; 31 LFINMA ; portée du pouvoir de surveillance de la FINMA sur les organismes d’autorégulation en matière de blanchiment d’argent.

En mars 2014, la FINMA a constaté que le règlement (qui datait de 2009) de PolyReg Association Générale d’Autorégulation (ci-après : PolyReg) n’était plus adapté à la nouvelle législation sur le blanchiment d’argent. Elle a prié PolyReg de modifier son règlement en ce sens. PolyReg a estimé que son autonomie, en tant qu’organisme d’autorégulation, avait été violée par la FINMA et que cette dernière ne disposait pas d’une base légale suffisante pour ordonner la modification. Le TF a cependant jugé que la FINMA avait effectivement le droit de demander ou d’imposer, en vertu de son pouvoir de surveillance, des modifications du règlement des organismes d’autorégulation, pour autant qu’il s’agisse de précisions techniques ayant pour objectif de garantir un standard minimal ou international. En revanche, lorsqu’il s’agit de modifications importantes, notamment l’introduction de nouvelles obligations, une modification de la loi sur le blanchiment d’argent est nécessaire. Les modifications requises en l’espèce étaient justifiées ; il s’agissait notamment de l’adoption d’un nouveau critère concernant les relations d’affaires présentant un risque accru en raison de la « complexité » des structures employées (art. 12 al. 2 let. h OBA-FINMA [2010]) et l’introduction d’une première disposition exigeant que l’admission de relations d’affaires comportant des risques accrus nécessite l’accord d’une personne ou d’un organe supérieur, ou de la direction (art. 17 OBA-FINMA [2010]) et d’une autre disposant que la direction ou l’un de ses membres décide d’une part, de l’admission et, tous les ans, de la poursuite des relations d’affaires avec des personnes politiquement exposées et d’autre part, de la mise en œuvre, de la surveillance et de l’évaluation des contrôles réguliers portant sur toutes les relations d’affaires comportant des risques accrus (art. 18 al. 1 let. a et b OBA-FINMA [2010]).

Art. 14 al. 1, 18 al. 1 let. e, 24 al. 1 let. b, 28 al. 3 LBA ; 89 al. 1 let. c LTF ; exercice sans autorisation d’une activité d’intermédiaire financier ; liquidation de la société, interdiction d’exercer de l’administrateur et publication de la décision ordonnée par la FINMA.

Au moment du jugement, tant que la société recourante n’as pas encore été radiée du registre du commerce, elle dispose d’un intérêt digne de protection à recourir (art. 89 al. 1 let. c LTF). Après l’exclusion de l’intermédiaire financier d’un organisme d’autorégulation reconnu, l’intermédiaire exclu doit immédiatement requérir de la FINMA une autorisation d’exercer (art. 14 al. 1 LBA). Cette obligation existe dès l’ouverture par l’organisme d’autorégulation de la procédure de décision de sanction. Une activité d’intermédiaire financier ne peut être exercée durant deux mois sans surveillance au sens des art. 24 al. 1 let. b et 18 al. 1 let. e LBA, et donc l’art. 28 al. 3 LBA ne s’applique pas par analogie, compte tenu de l’importance de l’objectif législatif (protection de l’intégrité des places financières suisses par le biais de la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme). L’obligation de requérir auprès de la FINMA une autorisation d’exercer (art. 14 al. 1 LBA) immédiatement après l’exclusion d’un organisme d’autorégulation, ne peut pas non plus être reportée par le dépôt d’un recours contre la décision d’exclusion.

Art. 31 à 33, 44 LFINMA ; exercice sans autorisation d’une activité d’intermédiaire financier ; liquidation de la société, interdiction d’exercer de l’administrateur et publication de la décision ordonnée par la FINMA.

L’exercice sans autorisation d’une activité soumise à autorisation selon les lois sur les marchés financiers constitue une infraction pénale au sens de l’art. 44 al. 1 ou 2 LFINMA et constitue une violation grave des dispositions légales de surveillance. Le droit suisse des marchés financiers repose sur le concept de surveillance des institutions, mais les personnes physiques, qui remplissent des fonctions d’organes ou les personnes qui exercent une fonction dirigeante dans une institution peuvent également être les destinataires de décisions prises sur la base des art. 31 à 33 LFINMA. Par conséquent, la FINMA peut aussi rendre des décisions visant au rétablissement de l’ordre légal à l’encontre des personnes physiques qui agissent comme organes factices d’institutions agissant illégalement.

Art. 33 LB ; dépôts du public ; licence bancaire ; liquidation.

A SA (ainsi que la société holding C SA et la filiale B Sàrl) est une société proposant des « investissements directs » dans des plantations d’oliviers en Espagne. Les investisseurs concluent un contrat d’achat-location-réméré (« Kauf-, Miet- und Rückkaufsvertrag ») qui leur permet d’acquérir alors un certain nombre d’arbres pour une durée de 10 ans, après quoi la société rachète les arbres au prix initial. La société paie à l’investisseur, à titre de loyer, 10% du montant initial par année, ce qui permet de doubler l’investissement initial sur 10 ans. La FINMA a reproché au groupe de sociétés d’avoir accepté des dépôts du public à hauteur de 5.3 millions de francs, en faisant de la publicité pour leur activité, sans avoir au préalable obtenu une licence bancaire. Le groupe a de ce fait gravement enfreint la Loi sur les banques ; la FINMA met donc les trois sociétés en liquidation. Le groupe de sociétés considère qu’il n’a pas accepté de dépôts du public : selon lui, le prix versé par les investisseurs est le prix d’achat des arbres et non un dépôt. Le TAF, et subséquemment le TF, donnent raison à la FINMA. En l’espèce, les transactions ont été structurées de sorte à éluder les dispositions légales (« Sachverhaltsfiktion »). Ce n’est donc pas la structure même des transactions qui est déterminante, mais le but économique visé. En l’espèce, le TF appuie son raisonnement sur le fait que le business plan de la société ne montrait pas comment la société pourrait garantir le paiement des « loyers » chaque année ; la plupart des « loyers » versés l’avaient été grâce aux fonds récoltés chez de nouveaux investisseurs.