Droit des sociétés

Action en responsabilité ; devoir de fidélité et de diligence. Une société de courtage reproche à un ancien administrateur président au moment des faits, d’avoir violé son devoir de diligence, notamment en accordant des conditions de travail trop libres à un courtier employé, et en le surveillant de manière insuffisante ; elle lui réclamait à ce titre l’indemnisation du dommage de CHF 1.5 millions (causé par le versement d’avances sur commissions au courtier, calculées d’après des transactions fictives annoncées par ce dernier), sur la base de l’art. 754 CO (droit des sociétés) et des art. 321a et 321e CO (droit du travail). Le TF commence par rappeler que la diligence due par les administrateurs et autres dirigeants de société se détermine objectivement, en tenant compte des circonstances concrètes ; l’organe doit notamment faire preuve de diligence dans le choix, l’instruction et la surveillance du personnel de direction, étant rappelé que les activités de l’administrateur ou du directeur comportent un certain risque entrepreneurial. Dès lors, les tribunaux doivent faire preuve de retenue lorsqu’ils doivent juger a posteriori des décisions concernant la conduite des affaires. En outre, le devoir de fidélité ancré dans le droit des sociétés est plus vaste que celui prévu par le droit du travail. In casu, se référant à des circonstances nébuleuses, vagues et mal étayées, le TF considère qu’on ne peut pas retenir, à l’encontre de l’ancien administrateur président, une violation de ses devoirs de fidélité et de diligence (qu’ils trouvent leur fondement dans le droit des sociétés ou le droit du travail).

Responsabilité de l’administrateur ; notion de faute. La faute constitue l’une des quatre conditions de l’art. 754 CO, étant précisé qu’une négligence légère suffit. La faute s’apprécie objectivement (c’est-à-dire en fonction de ce que l’on pouvait raisonnablement attendre de l’administrateur dans les circonstances concrètes). Il y a en principe faute lorsque l’administrateur a manqué à son devoir, c’est-à-dire ne s’est objectivement pas comporté comme un administrateur raisonnable dans les circonstances concrètes. Seules des circonstances exceptionnelles peuvent conduire à la conclusion que l’administrateur qui a failli à ses devoirs est exempt de faute (comportement subjectivement excusable) ; pour qu’il en soit ainsi, il faut que la personne recherchée ait été, au moment des faits, en état d’incapacité de discernement, dans une situation de contrainte absolue ou dans celle d’erreur inévitable sur les faits (provoquée par exemple par la tromperie d’un tiers). Dans le cas d’espèce, le TF a considéré, contrairement à l’instance précédente, que l’administrateur ne pouvait pas s’abriter derrière le fait qu’il s’était fié aux administrateurs actifs dans la gestion et aux paroles rassurantes du directeur de la société. Partant, il ne se trouvait pas dans un état d’erreur inévitable, et c’est fautivement qu’il a manqué à ses devoirs, en omettant de veiller à la tenue régulière de la comptabilité et en faisant constater tardivement l’état de surendettement de la société.

Responsabilité de l’administrateur ; qualité pour agir. Lorsqu’une société subit un dommage direct reposant sur un manquement aux devoirs des organes envers la société, l’actionnaire peut agir en son propre nom et réclamer la réparation en faveur de la société pour le dommage qui lui a été causé, en application de l’art. 756 al. 1 CO. En l’espèce, l’actionnaire de la société (une Sàrl qui détenait 60% du capital-actions) disposait bien de la légitimation active pour intenter une action en responsabilité contre l’administrateur, en réclamant réparation en faveur de la société. L’administrateur avait en effet conclu et exécuté un transfert de patrimoine avec une société tierce, à des prix très largement inférieurs à ceux du marché, la société ayant subi un dommage lorsqu’elle avait dû indemniser un créancier qui souhaitait faire révoquer ledit transfert.

Concours de l’action en restitution et de l’action en responsabilité ; solidarité parfaite. Dans la faillite d’une SA (poursuivie), une SA poursuivante, agissant en tant que créancière cessionnaire, ouvre deux actions : l’une en restitution à l’encontre de la SA actionnaire de la SA poursuivie (art. 678 CO), et l’autre en responsabilité à l’encontre du président d’administration et directeur unique de la SA poursuivie et de la SA actionnaire, ainsi qu’à l’encontre de l’organe de révision de la société poursuivie (art. 754 ss CO). Comme confirmé dans cet arrêt, les deux actions précitées sont en relation de concurrence (action à double fondement, « Anspruchkonkurrenz ») et les responsables répondent selon les règles de la solidarité imparfaite (art. 51 al. 1 CO). En effet, on ne saurait attendre de la société poursuivante qu’elle doive d’abord agir par l’action en restitution, avant d’actionner en responsabilité le conseil d’administration et l’organe de révision. Les différentes parties défenderesses répondent donc solidairement de l’intégralité de la prétention.

ATF 148 III 11 (d)

2021-2022

Responsabilité du conseil d’administration ; légitimation active ; concurrence entre l’action de la société et celle d’un créancier/actionnaire (ayant tous deux subi un dommage) et de la priorité à donner à l’une par rapport à l’autre (consid. 3.2.3.1). Revenant sur les arrêts 131 III 306 et 141 III 112, le TF mentionne qu’il ne s’était alors par explicitement prononcé sur la question de savoir si la priorité de l’action de la société s’appliquait indépendamment du fait que la société soit en faillite ou non. Il précise ici que dans le cas d’une société en activité, il n’y a pas de concurrence entre les deux actions qui peuvent être introduites librement par les ayants droit. Finalement, le TF dresse une liste des dispositions du droit de la société anonyme qu’un créancier peut invoquer pour fonder un dommage. Il se réfère aussi à la notion de normes à double effet protecteur : en font partie les dispositions relatives au bilan ainsi que celles sur le surendettement. L’art. 717 CO (diligence) en revanche ne crée que des obligations envers la société et ne peut pas être invoqué par un créancier. En l’espèce, l’actionnaire ou le créancier voit sa qualité pour agir limitée aux prétentions tendant à la réparation de son dommage direct. Il est rappelé que les prétentions en responsabilité fondées sur l’art. 754 CO peuvent également être formulées par une personne qui n’est plus actionnaire ou créancière de la société au moment où l’action est introduite, pour autant qu’elle ait été directement lésée en cette qualité. Conformément à la maxime des débats, il est indispensable d’établir l’illicéité du comportement adopté par l’organe, afin que le dommage allégué qui en résulte puisse être admis.

Responsabilité des organes de la société anonyme. La responsabilité fondée sur l’art. 754 CO est subordonnée à la réunion des quatre conditions générales suivantes, à savoir la violation d’un devoir, une faute (intentionnelle ou par négligence), un dommage et l’existence d’un rapport de causalité (naturelle et adéquate) entre la violation du devoir et la survenance du dommage. Elle vise tant les administrateurs que toute personne qui s’occupe de la gestion, y compris les organes de faits. Lorsque le manquement reproché est, comme en l’espèce une omission, le rapport de causalité doit exister entre l’acte omis et le dommage. C’est notamment le cas lorsque les créances colloquées dans la faillite sont nées après la date à laquelle l’administrateur intimé aurait dû aviser le juge du surendettement comme dans le cas d’espèce. L’art. 759 al. 1 CO institue une solidarité différenciée. Si plusieurs personnes répondent d’un même dommage, chacune d’elles est solidairement responsable dans la mesure où le dommage peut leur être imputé personnellement en raison de leur faute et au vu des circonstances. Dans l’affaire en cause, le TF retient qu’il semble discutable d’admettre une faute de l’administrateur qui se renseignait régulièrement sur l’état de la société auprès du directeur recourant, relançait ce dernier en cas de retard dans l’établissement des comptes, a requis l’établissement des comptes avant son départ de la société, a prêté plusieurs millions à la société et a postposé ses créances au vu des pertes subies par la celle-ci.

Responsabilité des fondateurs et des organes de gestion. La cession par la masse en faillite des prétentions en responsabilité contre les « fondateurs » inclut les prétentions contre les personnes qui n’étaient pas organes de la société visée. La société qui délègue un administrateur fiduciaire dans une autre société ne devient pas automatiquement organe de fait de celle-ci. La responsabilité des organes de la société anonyme n’est pas de nature contractuelle ou semi-contractuelle ; la réparation doit par conséquent être réclamée dans la monnaie du pays dans lequel l’atteinte patrimoniale s’est produite. Dans le cas concret, la responsabilité de l’administrateur est admise pour l’octroi d’un prêt non garanti qui a été détourné de sa finalité ; la violation des devoirs est admise s’agissant de l’achat d’un immeuble sans que l’organe se soit assuré de la valeur de celui-ci ni renseigné sur le rendement qu’il pouvait en tirer.

Action en responsabilité de la société contre deux de ses administrateurs. Deux administrateurs d’une société sont victimes d’une « arnaque au président », un escroc se faisant passer pour leur président leur demande d’effectuer un virement dans le but apparent d’échapper à un contrôle fiscal imminent. Le manquement aux devoirs est admis car les administrateurs auraient pu déceler la supercherie. Les administrateurs sont soumis à une convention fiduciaire les exonérant de toute responsabilité ; la question de l’opposabilité d’une telle clause à la société est laissée indécise, car leur faute grave les empêche de toute manière de s’en prévaloir. La causalité est niée pour l’un des administrateurs ; l’ordre de paiement qu’il a validé contenait une erreur et n’a pas été exécuté.

Action en responsabilité de l’actionnaire au titre du dommage de la société (action dérivée ou oblique). La responsabilité est admise pour l’administrateur qui n’a pas convoqué d’assemblée générale ordinaire dans le délai de six mois à compter de la fin de l’exercice, prévu à l’art. 699 al. 2 CO et qui s’est opposé, au nom de la société, à une action judiciaire en convocation d’une assemblée générale intentée par un actionnaire. Le dommage correspond aux frais judiciaires mis à la charge de la société et à ses frais d’avocat.

Action en responsabilité de l’actionnaire au titre du dommage de la société (action dérivée ou oblique). La responsabilité est admise pour l’administrateur qui n’a pas convoqué d’assemblée générale ordinaire dans le délai de six mois à compter de la fin de l’exercice, prévu à l’art. 699 al. 2 CO et qui s’est opposé, au nom de la société, à une action judiciaire en convocation d’une assemblée générale intentée par un actionnaire. Le dommage correspond aux frais judiciaires mis à la charge de la société et à ses frais d’avocat.

Responsabilité de l’organe de révision. Lorsqu’il est reproché à l’organe de révision d’avoir tardé à aviser le tribunal d’un surendettement manifeste, le dommage correspond à l’aggravation du surendettement entre le moment où la faillite aurait dû être prononcée et celui où elle l’a effectivement été. Le point de départ pour le calcul est le moment où l’organe de révision aurait dû constater le surendettement manifeste – et c’est l’état du bilan à cette date qui est déterminant pour le calcul du dommage – et non le moment où ce surendettement est intervenu. Si la partie demanderesse a omis d’alléguer cette date, il n’y a pas lieu d’ordonner une expertise judiciaire en vue d’établir le montant du dommage ; la demande doit être rejetée faute d’allégation des faits pertinents.

Responsabilité de l’auteur de prospectus. Il incombe à la partie demanderesse d’alléguer et de prouver qu’elle s’est basée sur les informations erronées pour acquérir les titres promus par le prospectus d’émission et que, si elle avait été informée correctement, elle ne les aurait pas acquis ou les aurait acquis à un prix inférieur. Le degré de preuve applicable est celui de la vraisemblance prépondérante. Il ne suffit pas d’alléguer en termes généraux que l’on n’aurait pas acquis les titres considérés si l’information avait été correcte ; il faut au contraire alléguer précisément les motifs pour lesquels l’investissement n’aurait pas été réalisé.

Responsabilité des organes de gestion. La radiation de la société au registre du commerce n’a pas d’influence sur la qualité pour agir des créanciers qui se sont fait céder les prétentions en responsabilité contre les organes de la société en faillite. Des directeurs violent leurs devoirs à l’égard de la société en faisant exécuter des travaux par celle-ci, mais en se faisant personnellement rémunérer par le biais d’un contrat simulé avec une société qu’ils contrôlent. La responsabilité est également admise en raison d’une rémunération indue.

Art. 716a CO

Responsabilité au sein d’un groupe de sociétés. Le liquidateur de la société anonyme Swissair a ouvert une action en responsabilité contre plusieurs anciens dirigeants de la holding SAirGroup AG, qui ont notamment consenti à l’octroi de prêts sans garantie d’une filiale à une société mère dans la cadre d’un système de cash-pooling. La demande a été rejetée concernant neuf des anciens membres du conseil d’administration de SAirGroup AG, faute d’avoir agi comme organes de fait de Swissair. Dès 2001, les prêts accordés à l’intérieur du groupe ne correspondaient plus aux conditions du marché et n’étaient donc plus conformes aux dispositions sur le capital-actions ; pour autant, les organes poursuivis n’ont pas violé leur devoir de diligence (art. 717 CO) – qui autorise la prise de risques raisonnables dans l’activité commerciale –, car ces prêts ont été faits dans l’intérêt de SAirGroup AG et de ses filiales (dont Swissair), qui n’auraient pas pu survivre ou continuer leurs activités sans le cash-pooling.

ATF 142 III 23

2015-2016

Art. 754 al. 1 et 757 al. 1 CO

Action en responsabilité ; qualité pour agir de la masse en faillite ou de la masse concordataire.

Dans le cadre d’une action en responsabilité (action sociale) contre les organes de la société, l’administration de la faillite ou du concordat ne dispose pas de la qualité pour agir pour faire valoir le dommage causé exclusivement au patrimoine des créanciers sociaux, sans qu’un dommage ne soit causé au patrimoine de la société elle-même (consid. 1 et 4).

TF 4A_219/2015

2015-2016

Art. 717 al. 1 CO

Action en responsabilité ; business judgement rule.

La pratique jurisprudentielle de la business judgement rule (BJR) est confirmée : le juge doit faire preuve de retenue dans l’appréciation des décisions commerciales, lorsque ces dernières ont été prises au cours d’un processus décisionnel irréprochable, qu’elles reposent sur une base d’informations adaptée et qu’il n’y a pas de conflits d’intérêts.

TF 4A_418/2015

2015-2016

Art. 755 CO

Dommage de poursuite d’exploitation ; responsabilité de l’organe de révision.

Le TF confirme la notion de dommage comme étant une diminution involontaire de la fortune, qui peut se traduire par une diminution des actifs, une augmentation du passif ou une perte de gain. Le dommage peut ainsi consister en l’augmentation de la dette en cas d’avis tardif du surendettement au juge. Il s’agit là d’un dommage de poursuite d’exploitation.

TF 4A_603/2014

2015-2016

Art. 754 CO

Responsabilité des membres du conseil d’administration ; zero balancing cash pool.

La masse concordataire de Swissair a ouvert une action en responsabilité contre les anciens administrateurs du groupe Swissair (SAirGroup AG) et de sa filiale Flightlease AG (chargée de la location d’appareils), pour un montant de 50 millions de francs. Selon la masse concordataire, représentée par son liquidateur, Flightlease AG, en tant qu’elle prenait part au zero balancing cash pool du groupe Swissair, aurait subi un dommage. Ce dommage consisterait en la perte de la part non couverte de ses avoirs dans le cash pool. Autrement dit, la créance que possédait Flightlease AG envers le pool leader pour les liquidités transférées n’était plus couverte, ne pouvait être remboursée et a donc entraîné une perte chez Flightlease AG. Selon le TF, il n’existe cependant pas de lien de causalité entre la décision de participer au cash-pool et le dommage qui en résulte. Ainsi, les dirigeants du groupe n’ont pas causé ou maintenu fautivement une concentration de risques de liquidités (« liquidätsmässiges Klumpenrisiko») ; les dirigeants de Flightlease AG n’ont, quant à eux, pas exposé la société à des risques excessifs de perte de valeur. Enfin, le TF considère qu’un cas de ringfencing n’est pas avéré.

Art. 755 et 41 CO

Responsabilité dans la révision.

Un seul réviseur n’a pas la légitimation passive, car l’illicéité ne résulte pas de la simple violation des devoirs de révision au sens de l’art. 755 CO, mais de l’acte répréhensible de faux dans les titres, qui ne rentre pas dans le cadre des tâches de révision (consid. 4.3).

ATF 136 III 107

2009-2010

Art 757 CO

Clause d’arbitrage.

Une clause d’arbitrage contenue dans les statuts d’une société ne peut être opposée ni à la communauté des créanciers, ni aux cessionnaires de la masse en faillite.

ATF 136 III 14

2009-2010

Organe de fait. La banque, qui ne fait qu’exécuter les instructions données par son client, ne peut être considérée comme organe de fait, quand bien même elle s’intéresse à la situation de son client et lui demande de fournir des pièces ou de prendre certaines mesures, lorsque ces demandes sont dans l’unique intérêt de celle-ci, ou même lorsqu’elle aide son client dans sa gestion, et ce pour autant qu’elle ne dispose pas de pouvoirs durables. Le retard dans le dépôt du bilan est en principe préjudiciable à la société ; partant, un créancier social ne peut agir à titre individuel contre un administrateur que si son action repose sur un fondement juridique distinct, par exemple un acte illicite ou la violation d’une norme du droit de la SA conçue exclusivement pour protéger les créanciers sociaux.

ATF 136 III 148

2009-2010

Art. 754 s. CO

Responsabilité des organes d’une société anonyme. L’administrateur peut opposer en compensation à la créance invoquée par le cessionnaire de la masse en faillite la créance personnelle qu’il détient contre la société, pour autant que celle-ci soit née avant la faillite.

TF 4A_271/2009

2009-2010

Art. 32 ss CO et 722 CO

Responsabilité de la société anonyme pour les actes commis par ses organes dans la gestion des affaires sociales. L’on peut déduire du silence de la société une ratification des actes de son représentant lorsque ces actes s’inscrivent dans le prolongement des relations contractuelles entre la société et son client : tel est le cas lorsque le représentant de la société a utilisé le papier à en-tête de celle-ci et a fait verser au client sa prestation sur un compte de la société, et ce quand bien même le représentant ne dispose pas des droits de représentation inscrits au registre du commerce dont il se prévaut.

TF 4A_431/2009

2009-2010

Art. 83 al. 2 CPC/VD

Appel en cause et solidarité différenciée.

Le principe de solidarité différenciée des art. 759 al. 1 CO et 827 CO ne justifie pas le refus de l’appel en cause d’un tiers chargé de la gestion de la société. Le défendeur qui dispose d’une action récursoire peut contraindre ce tiers à participer au procès avant le prononcé du jugement. Le tribunal ne peut refuser l’appel en cause que s’il prouve qu’en raison de circonstances particulières, la participation du tiers alourdit exagérément la procédure.

TF 4A_462/2009

2009-2010

Art. 42 et 760 CO

Faillite tardive de la société.

Lorsque que le dommage réside dans l’augmentation du surendettement en raison de l’avis tardif au juge, le surendettement effectif doit être comparé à celui qui aurait existé si la faillite avait été prononcée plus tôt (consid. 3.2). Le degré de surendettement doit être déterminé uniquement sur la base des valeurs de liquidation. L’ouverture de la faillite entraînant la fin de la société, les valeurs de continuation n’ont plus de signification à ce stade (consid. 3.2.1). L’évaluation du dommage ne peut dès lors s’effectuer en comparant les valeurs de liquidation effectives avec les valeurs de continuation au moment où l’avis au juge aurait dû être donné. L’ensemble des créances colloquées peut servir d’indice dans l’évaluation de l’augmentation du surendettement, en particulier lorsque les dividendes de liquidation auraient été proches de zéro au moment où le juge aurait dû être avisé (consid. 3.3). La fixation du dommage au sens de l’art. 42 al. 2 CO doit intervenir d’office indépendamment des postes du dommage allégué par le lésé (consid. 3.4.5). Le délai de prescription de l’art. 760 al. 1 CO court dès le jour où le lésé a effectivement connaissance du dommage et non dès celui où il aurait pu en avoir une connaissance suffisante d’après l’attention requise par les circonstances (consid. 4.1). Dans le cadre de l’action introduite par le créancier cessionnaire de la masse, le dommage survenu en raison d’une mise en faillite tardive ne peut être fixé qu’au terme de la procédure de collocation (consid. 4.2). La prescription relative de cinq ans de l’action en responsabilité de l’ensemble des créanciers cessionnaires ne peut commencer à courir avant que la faillite de la société ne soit ouverte, leurs créances n’étant exigibles qu’une fois la faillite ouverte (consid. 4.4).

TF 4F_5/2010

2009-2010

Art. 755 et 760 CO

Dies a quo du délai de prescription de l’action en responsabilité dans la révision. Le délai de l’art. 755 CO commence à courir au jour où le lésé a eu connaissance du dommage et de la personne qui en est responsable. La première de ces conditions est remplie lorsque le lésé acquiert une connaissance suffisante pour pouvoir agir en justice, notamment lorsqu’il détient assez d’éléments pour être en mesure d’apprécier le dommage. En l’espèce, le dommage invoqué porte sur la perte de valeur d’un paquet d’actions et nécessite d’estimer la valeur hypothétique des actions si les malversations alléguées n’étaient pas survenues. Cette évaluation ne nécessite pas de connaître le préjudice subi par la société elle-même. Partant, la durée des investigations qui ont été nécessaires pour élucider ledit préjudice n’a aucune incidence sur le point de départ du délai de prescription.

TF 4A_188/2008

2008-2009

La société radiée ensuite de liquidation n’a plus d’existence juridique. Une remise de dette découverte ultérieurement n’intervient pas dans le calcul du dommage (consid. 4.4). Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, c’est en fonction des intérêts de la société concernée que se mesure la diligence des organes sociaux et non en fonction de l’intérêt du groupe (consid. 4.5). Il n’existe pas un devoir juridique général de la société mère d’aider ses filiales (consid. 5.2).

TF 4A_267/2008

2008-2009

Le demandeur peut actionner les défendeurs responsables solidairement pour la totalité du dommage et exiger du juge, dans la même procédure, qu’il fixe les obligations de dédommagement de chaque défendeur personnellement. Le demandeur qui actionne plusieurs responsables pour l’ensemble du dommage supporte les frais et les risques d’indemnisation seulement envers une partie adverse et non envers chaque défendeur. La répartition des coûts selon l’art. 759 al. 2 CO est impérative seulement pour la procédure de première instance. En cas de recours, les procédures cantonales peuvent s’appliquer pour la répartition des frais (consid. 7.1).

TF 4A_478/2008

2008-2009

L’organe de révision recherché en responsabilité ne peut pas opposer au demandeur qui exerce l'action de la communauté des créanciers sur la base d'un mandat procédural le fait que les créanciers postposés, respectivement la société faillie, auraient consenti au dommage. Quant au fait que les créances postposées n'aient ultérieurement pas été produites dans la faillite, il est dépourvu d'incidence sur le calcul du dommage subi directement par la société et indirectement par les créanciers de celle-ci. En effet, ce dommage consiste dans l'augmentation du découvert entre le moment où la faillite aurait été prononcée si la recourante n'avait pas manqué à ses devoirs et le moment où elle a effectivement été prononcée (consid. 4.3).

Est un organe, au sens de l’art. 55 al. 2 CCS, celui qui participe effectivement et d'une façon décisive à la formation de la volonté sociale, durablement et dans un vaste domaine dépassant les affaires. La qualité d'organe peut découler de trois sources différentes : l'organe formel est tout d'abord la personne ou le groupe de personnes qui, à l'instar des membres du conseil d'administration dans une société anonyme, sont chargés par la loi ou par les statuts de gérer et de représenter la personne morale. L’organe de fait est celui qui, sans en porter le titre, exerce effectivement la fonction de l'organe, à l'instar de l'actionnaire unique d'une société anonyme qui dirige lui-même sa société. Est un organe apparent celui qui a été désigné par la personne morale comme disposant des pouvoirs de l'organe, alors même que ce n'est pas le cas. Une banque ne crée pas l’apparence que son directeur-adjoint a la qualité d’organe par le fait qu’elle lui ait conféré un pouvoir de signature au registre du commerce et qu’elle lui ait attribué de vastes bureaux et une secrétaire (consid. 2.3).

TF 4A_61/2009

2008-2009

Responsabilité des fondateurs d’une Sàrl dont les statuts indiquent des apports surévalués (consid. 4.1), compte tenu de la mention d’un bien immobilier dont la société ne peut librement disposer en l’absence d’un transfert de propriété valable (consid. 4.2).

Responsabilité des fondateurs. En cas de violation des dispositions sur les apports en nature, le dommage correspond à la différence entre la valeur effective de la chose apportée et le montant auquel elle est comptabilisée. Dans le cas d’espèce, la société n’a pas acquis un droit inconditionnel à l’inscription de l’immeuble au registre foncier alors qu’elle était déjà surendettée.

Art. 41 CO, art. 97 CO

Lorsqu’il existe uniquement une diminution des actifs patrimoniaux, le dommage correspond à la différence entre la situation avant et après l’événement préjudiciable.

ATF 132 III 342

2007-2008

Art. 120 et 757 CO

Responsabilité dans le droit de la société anonyme; qualité pour agir du créancier cessionnaire; objection de compensation. Il appartient à l'autorité de surveillance en matière de poursuites pour dettes et faillite, et non au juge, de contrôler la légalité de la décision de cession prise par l'administration de la faillite (c. 2.2.1). La qualité de créancier de celui dont la créance a été admise de manière définitive dans la faillite de la société débitrice ne peut pas être examinée dans le cadre du procès en responsabilité dirigé contre les organes (c. 2.3). L'admission définitive à l'état de collocation suffit pour que la condition de qualité pour agir dans le procès en responsabilité soit remplie (c. 2.3.2). Le créancier dont la créance a été colloquée définitivement dans la faillite de la société a le droit d’exercer la compensation à l'égard de créances de même nature appartenant à la société pour autant que les conditions de la compensation aient été remplies au moment de l'exercice du droit et que la condition de la réciprocité des créances ait existé au moment de l'ouverture de la faillite déjà (c. 4.2).

ATF 133 III 116

2007-2008

Art. 147 al. 2 et 148 CO

Responsabilité solidaire des administrateurs : une transaction passée entre le créancier et l’un des codébiteurs solidaires a-t-elle un effet libératoire pour les autres ? Accord transactionnel entre un créancier et l’un de ses codébiteurs selon lequel ce dernier paie un pourcentage de la dette qui est inférieur à la part qu’il aurait dû supporter à l’interne. Si l'un des débiteurs solidaires est libéré sans que la dette n’ait été payée, sa libération ne profite aux autres que dans la mesure indiquée par les circonstances ou la nature de l'obligation (art. 147 al. 2 CO). Lorsque le créancier recherche l'un ou les autres coobligés, ceux-ci peuvent se retourner contre le codébiteur libéré par le créancier pour le montant qui dépasse sa quote-part interne (art. 148 al. 2 CO). La question de savoir si la transaction intervenue avec l'un des débiteurs a eu pour effet de libérer tous les autres relève de l’interprétation de la volonté des parties à l’accord (c. 4.2). Ainsi, lorsqu’un créancier accorde une remise de dette partielle à un débiteur solidaire, le simple fait que les autres codébiteurs puisse lui réclamer le solde, et par là même rendre la remise de dette illusoire, peut être un indice pour conclure que le créancier entendait libérer tous les débiteurs. Ce n’est cependant pas une règle et l’effet libératoire général demeure donc une question d’interprétation de la transaction en question (c. 4.3).


TF 4A_188/2007

2007-2008

Art. 675, 680, 725 et 754 CO

Responsabilité des administrateurs. Le versement de dividendes cachés peut constituer un manquement de l’administrateur à ses devoirs et, partant, fonder une action en responsabilité fondée sur l’art. 754 CO (c. 4.3.2). Les montants versés en plus de la rémunération du travail, et qui entament le capital-actions et les réserves, ne constituent pas des prestations excessives au sens de l’art. 678 al. 2 CO tant qu’elles ne dépassent pas ce qui est considéré comme admissible à titre d’indemnités de licenciement, 6 mois de rémunération en l’espèce. Le versement d’indemnités de licenciement équivalant à 6 mois de rémunération ensuite de la cessation abrupte des activités commerciales de la société n’était pas en disproportion évidente avec la contre-prestation des employés, compte tenu de la marge d’appréciation laissée à la société selon l’usage des affaires (c. 4.3.4). Dans une situation de surrendettement manifeste, l’administrateur manque fautivement à ses devoirs lorsqu’il établit un bilan de liquidation excédentaire et qu’il soumet le bilan à l’administration fiscale, entraînant la perception d’impôts (c. 5.3).

TF 4A_325/2007

2007-2008

Art. 754 CO

Responsabilité des administrateurs; organes de fait. Inexécution par les administrateurs d’une cession de créances remise en garantie à la banque. Action en responsabilité de cette dernière. Défendeurs invoquant l’immixtion de la banque dans la gestion de la société (c. 3.2). Moyen jugé infondé par le TF en raison de la latitude suffisante dont jouissaient les administrateurs dans la gestion des factures, des encaissements et des virements (c. 3.4).

TF 4A_5/2008

2007-2008

L’action exercée sur la base de l’art. 260 LP présuppose-t-elle que la société n’ait pas encore été radiée du RC ? Question laissée ouverte en l’espèce.

TF 4A_501/2007

2007-2008

Art. 716b et 754 CO

Il n’y a pas de délégation valable de la gestion en l’absence de clause statutaire valable. Une délégation licite présuppose un règlement d’organisation formel. En cas de délégation illicite, les membres du conseil d’administration ne peuvent s’exculper au sens de l’art. 754 al. 2 CO.

TF 4A_505/2007

2007-2008

Art. 729b al. 2 et 755 CO

Responsabilité de l’organe de révision, avis obligatoires. L’organe de révision ne saurait s’exculper au motif que les administrateurs n’auraient pas donné suite à son invitation à déposer le bilan. Il appartient précisément à l’organe de révision d’aviser le juge lorsqu’il constate, au terme d’un délai de 4 à 6 semaines, que le conseil d’administration ne satisfait pas à ses obligations d’aviser le juge (art. 729 al. 2 CO) (c. 4.3.2). Le surendettement est manifeste lorsque tout homme raisonnable peut se rendre compte sans autres recherches que les actifs ne peuvent couvrir les engagements; il n’est pas nécessaire que le surendettement soit important, dès le moment où il résulte clairement des circonstances (c. 4.1.2). En l’espèce, l’incertitude relative à la valeur d’un chantier commandait de comptabiliser une provision dont le seul montant, supérieur aux fonds propres, aurait conduit à constater le surendettement manifeste (c. 4.3.3).


TF 4A_507/2007

2007-2008

Art. 757 CO ; art. 8CC

Le montant des créances colloquées ne fonde pas l’existence d’un dommage dans le cadre d’une action en reponsabilité. En l’espèce, le dommage retenu par l’autorité cantonale ne relevait pas de l’état de collocation mais de la constatation d’un engagement contracté par la société sans contre-prestation.

TF 4A_76/2007

2007-2008

Art. 754 CO

Dommage indirect. Droit statutaire de l’actionnaire à l’usage exclusif d’un appartement ainsi qu’à une part au gain en cas de vente de l’immeuble. Soustraction de la part au gain par une personne autorisée à procéder à la vente sur mandat de l’administrateur suite au décès de l’actionnaire. L’action des héritiers en réparation du dommage est exclue dès lors que la société conserve sa dette à l’égard de l’actionnaire et que la société est encore solvable.

TF 4C.362/2006

2007-2008

Responsabilité des organes ; preuve du dommage. Action rejetée par la cour cantonale au motif que le demandeur n’avait pas produit sa créance à l’état de collocation et n’avait pas prouvé le caractère substantiel du dommage. La première question n’est pas examinée par le TF dès lors que l’absence de preuve du dommage suffit à écarter le recours (c. 4).

TF 4C.363/2006

2007-2008

Art. 760 CO

Responsabilité des organes ; prescription de l’action. Refus du Tribunal fédéral de considérer comme un seul acte d’une certaine durée plusieurs violations de devoirs étalées dans le temps ; commencement indépendant de la prescription pour chaque violation (c. 4.1). Conditions de l’interruption de la prescription selon l’art. 135 al. 2 CO : une poursuite intentée par un créancier en vue d’obtenir payement d’une créance en son nom propre n’est pas de nature à interrompre la prescription d’une action en responsabilité qui ne pouvait être intentée à l’époque que par la société ou les actionnaires (action hors faillite selon l’art. 756 CO) (c. 4.2 – 4.5). Dans l’action fondée sur l’art. 757 CO, le lien de causalité doit exister entre la violation du devoir et le dommage subi par la société et non par le créancier en particulier (c. 5 – 5.2).

TF 4C.436/2006

2007-2008

Art. 729b CO

Responsabilité de l’organe de révision. Lorsqu’une créance est postposée afin d’éviter l’avis au juge, le montant de la postposition doit au moins correspondre au surendettement (c. 4.1). L’organe de révision peut renoncer à l’avis du juge lorsque le conseil d’administration finance personnellement la société et entreprend des démarches concrètes en vue de la reprise de la société (c. 4.2 – 4.5). Le juge peut réduire le montant des dommages-intérêts dus par les administrateurs sur la base des art. 43 s. CO lorsque ceux-ci ont tenté un assainissement dont l’échec est dû à des facteurs sur lesquels ils n’ont aucun pouvoir. Le TF fait preuve de réserve dans l’appréciation de la réduction opérée par le premier juge (c. 5 – 5.4).