Droit du sport

(X c. Oberstaatsanwaltschaft des Kantons Aargau) (destiné à la publication) ; recours en matière pénale contre l’arrêt rendu le 21 novembre 2018 par l’Obergericht du canton d’Argovie ; le recourant, un bodybuilder, a été reconnu coupable de la violation des art. 86 al. 1 let. b et let. c, art. 87 al. 1 let. f et al. 2 de la Loi fédérale sur les médicaments et les dispositifs médicaux (LPTh, RS 812.21) et de violation par métier de l’art. 22 al. 1, al. 2 et al. 3 let. f de la Loi fédérale sur l’encouragement du sport (LESp, RS 415.0), ainsi que de blanchiment d’argent au sens de l’art. 305bis ch. 1 du Code pénal (CP, RS 311.0). Il lui est reproché, en substance, d’avoir acheté, distribué et revendu sans autorisation des produits dopants tels que des anabolisants et des hormones de croissance à des amateurs pratiquant le culturisme dans des centres de fitness, puis d’avoir caché une partie des recettes issues de cette activité à son domicile. Le Tribunal fédéral rappelle que la liste des produits ou méthodes considérés comme « dopants » est établie, en tenant compte des « développements sur le plan international », à l’art. 74 de l’Ordonnance du Conseil fédéral sur l’encouragement du sport et de l’activité physique (OESp, RS 415.01) ainsi que dans son Annexe. Le simple fait que la loi ne définit pas ce qu’on entend par l’expression « à des fins de dopage », utilisée à l’art. 22 al. 1 LESp, ou par le terme « sport », mentionné à l’art. 19 al. 1 LESp, ne constitue pas une violation du principe de la légalité, car le recourant peut aisément reconnaitre le comportement punissable (ainsi que ses conséquences) en se référant à la signification de ces termes dans le langage courant (consid. 2.3). De plus, le Tribunal fédéral confirme que, contrairement à l’opinion du recourant, l’art. 22 LESp punit pénalement le fait d’importer, exporter, fabriquer, distribuer ou revendre des produits ou méthodes dopants même si lesdits agissements interviennent en dehors des compétitions sportives. En effet, lors de la modification de la loi en 2012, le législateur a enlevé toute référence aux « compétitions sportives règlementées » et a ainsi voulu étendre le champ d’application de cette disposition au sport amateur, pour autant que l’utilisation des substances ou méthodes en question ne soit pas strictement personnelle (art. 22 al. 4 LESp). Cette interprétation se justifie également à l’aune des buts poursuivis par la loi, à savoir la promotion de la santé et l’encouragement de « comportements qui inscrivent les valeurs positives du sport dans la société et qui luttent contre ses dérives » (art. 1 al. 1 let. d LESp) (consid. 2.4). Recours rejeté.

ATF 145 IV 154 (f)

2018-2019

(X. c. Ministère public de l’Etat de Fribourg et A.) ; recours en matière pénale contre l’arrêt rendu le 19 novembre 2018 par la Cour d’appel pénal du Tribunal cantonal de l’Etat de Fribourg ; le recourant, un joueur amateur de football, a été condamné pour lésions corporelles simples par négligence pour avoir taclé un adversaire durant un match, lui causant une fracture de la cheville. L’arbitre avait sanctionné l’action avec un carton jaune pour « jeu dur ». La cour cantonale a retenu que le recourant n’avait pas eu l’intention - même par dol éventuel - de blesser l’intimé, mais avait agi par négligence. Cette constatation lie le Tribunal fédéral (art. 105 al.1 LTF). Le Tribunal fédéral rappelle qu’agit par négligence « quiconque, par une imprévoyance coupable, commet un crime ou un délit sans se rendre compte des conséquences de son acte ou sans en tenir compte ». L’imprévoyance est coupable quand l’auteur n’a pas usé des précautions imposées par les circonstances et par sa situation personnelle (art. 12 al. 3 CP). S’agissant d’une lésion corporelle infligée lors d’une rencontre sportive, le comportement accepté tacitement par le lésé (concernant le risque de lésion corporelle inhérent à toute activité sportive) et le devoir de prudence de l’auteur se déterminent en fonction des règles de jeu applicables et du principe de l’interdiction générale de porter atteinte à autrui (neminen laedere). Les règles du jeu ont notamment pour but d’empêcher les accidents et de protéger les joueurs. Selon les règles du football (Loi 12 des Lois du jeu édictées par l’International Football Association Board), un joueur doit être averti notamment s’il commet, par imprudence, une faute au contact sanctionnée par un coup franc direct. En l’espèce, l’arbitre a sanctionné l’auteur du tacle par un carton jaune, car il a considéré que celui-ci avait commis une violation importante des règles du jeu sans tenir compte du caractère dangereux ou des conséquences de son acte pour son adversaire. Au vu de la dangerosité du tacle pratiqué (admise en cours de procédure par le joueur lui-même), la violation de la règle de jeu en question peut être qualifiée de « suffisamment grave pour exclure un consentement tacite de l’intimé concernant le risque de lésion corporelle inhérent à la pratique du football » (consid. 2.5). S’il est vrai qu’en participant à la rencontre l’intimé a accepté tacitement un tel risque, cela ne couvre pas les comportements dangereux – soit ceux qui sont susceptibles notamment de causer des blessures – adoptés par les autres joueurs en violation des règles du jeu. Contrairement à l’opinion du recourant, il n’est pas déterminant que la violation des règles du jeu en question soit sanctionnée, au niveau sportif, par une exclusion (carton rouge) ou par un avertissement (carton jaune). Recours rejeté.