Droit du sport

(A. c. World Athletics, Russian Athletics Federation). Recours contre la sentence rendue le 23 novembre 2021 par le Tribunal Arbitral du Sport (TAS). Suspension de quatre ans à l’encontre d’une athlète russe pour violation des règles anti-dopage de World Athletics (WA) et disqualification de tous ses résultats obtenus entre le 8 juillet 2013 et le 7 juillet 2017. Le recourant invoquait l’incompatibilité de la sentence attaquée avec l’ordre public dans un grief divisé en plusieurs branches. En premier lieu, le recourant faisait valoir que le TAS n’est ni indépendant ni impartial d’un point de vue structurel, notamment en raison de la désignation, en procédure arbitrale d’appel, du président de la formation arbitrale par la Présidente de la Chambre arbitrale d’appel (ou son suppléant), circonstance qui ne permet pas de garantir une apparence suffisante d’impartialité et d’indépendance. Le TF relève toutefois que le recourant n’avait jamais soutenu cette position au cours de la procédure arbitrale et qu’il ne saurait donc garder un tel moyen en réserve en cas d’issue défavorable de la procédure arbitrale, comme il le fait en l’espèce, sans contrevenir aux règles de la bonne foi. Selon le TF, le moyen pris du défaut d’indépendance et d’impartialité du TAS relève du grief fondé sur l’art. 190 al. 2 let. a LDIP (composition irrégulière du tribunal), le recourant méconnaissant de ce fait le caractère subsidiaire du grief tiré de l’ordre public prévu par l’art. 190 al. 2 let. e LDIP. En outre, selon la jurisprudence du TF, l’indépendance structurelle du TAS ne saurait être remise en cause au motif que le président de la formation arbitrale en procédure d’appel est désigné par la Présidente de la Chambre arbitrale d’appel (cf. TF 4A_644/2020 du 23 août 2021, consid. 4.3.2). En second lieu, le recourant soutenait que la sentence attaquée contrevenait au principe de la présomption d’innocence, dès lors qu’il aurait été reconnu coupable sur la base de pièces dont l’authenticité n’aurait pas été pleinement établie. Le TF rappelle à cet égard que l’application automatique des garanties de droit pénal ne va pas de soi en matière de sanctions disciplinaires prononcées par des associations de droit privé, telles les fédérations sportives (cf. not. TF 4A_644/2020 du 23 août 2021, consid. 6.3 ; TF 4A_462/2019 du 29 juillet 2020, consid. 7.1). Selon le TF, l’application du principe in dubio pro reo en matière disciplinaire privée ne s’appuierait pas sur les mêmes pouvoirs d’investigation et de coercition dont dispose l’Etat dans le cadre de procédures pénales, l’application par analogie de telles garanties en matière de droit privé pouvant ainsi empêcher le bon fonctionnement du système mis en place par les fédérations sportives pour pouvoir lutter contre le dopage (cf. TF 4A_488/2011 du 18 juin 2012, consid. 6.2). En tout état de cause, la Formation s’était fondée sur plusieurs éléments de preuve concordants pour sanctionner le recourant. Recours rejeté.

(L. c. B.). Recours contre la sentence rendue le 10 mai 2021 par le Tribunal Arbitral du Sport (TAS). Décision d’irrecevabilité de l’appel interjeté par le recourant contre une décision rendue le 25 mars 2021 par le Tribunal National du Football. Le TF devait déterminer si la décision de la Présidente de la Chambre arbitrale d’appel violait l’ordre public, le recourant faisant valoir que le TAS n’aurait pas tenu compte du cas de force majeure dont il s’était prévalu, à savoir la cession des activités des services postaux de son Etat, ce qui justifiait selon lui l’envoi tardif du courrier au TAS contenant sa déclaration d’appel. Selon le TF, le grief en question, eût-il été recevable, doit être rejeté, notamment car le motif prétendument de force majeure invoqué par le recourant ne l’a pas empêché de répondre à un envoi du TAS expédié le lendemain dudit courrier et que, dans la mesure où il était assisté d’un avocat, il aurait pu aisément prendre connaissance des règles de procédure applicables et déposer la déclaration d’appel sur la plateforme électronique du TAS prévue à cet effet. Recours rejeté.

(A. c. World Athletics). Recours contre la sentence rendue le 27 août 2021 par le Tribunal Arbitral du Sport (TAS). La recourante invoquait une incompatibilité de la sentence attaquée avec l’ordre public procédural, en faisant valoir qu’elle n’avait pas été placée sur un pied d’égalité avec la partie intimée durant la procédure arbitrale et que la possibilité de prouver son innocence lui avait été niée, faute de pouvoir accéder à certains éléments de preuve. Selon le TF, la recourante tente de présenter, sous un autre angle, des critiques similaires à celles qu’elle a formulées en lien avec une prétendue violation de son droit d’être entendue, qui ont d’ailleurs été écartées. A cet égard, le TF rappelle le caractère subsidiaire de la garantie de l’ordre public procédural. Recours rejeté.

(A. Football Club c. B.). Recours contre la sentence rendue le 4 mai 2021 par le Tribunal Arbitral du Sport (TAS). Le recourant invoquait une violation de l’ordre public matériel, en particulier du principe de la fidélité contractuelle, motif pris que le TAS aurait méconnu le principe de la relativité des conventions en le condamnant à payer CHF 520’000 à l’intimé, alors même que l’accord fondant cette prétention n’aurait pas été conclu directement avec l’intimé mais avec l’agence de ce dernier. Selon le TF, même si la Formation arbitrale a certes fait allusion que, d’après l’intimé, l’accord avait été formellement passé par l’agence, précisément représentée par l’intimé, elle n’a en revanche jamais considéré que ledit contrat liait exclusivement l’agence, respectivement que l’intimé n’était pas partie à cette convention. Le principe de fidélité contractuelle, tel qu’envisagé par le TF au sens de l’art. 190 al. 2 let. e LDIP, n’a pas été violé. Recours rejeté.

(Sun Yang c. Agence Mondiale Antidopage (AMA), Fédération Internationale de Natation (FINA)). Recours contre la sentence rendue le 22 juin 2021 par le Tribunal Arbitral du Sport (TAS). Suspension de 4 ans et 3 mois à l’encontre d’un nageur chinois (Sun Yang) pour violation des règles anti-dopage de la Fédération Internationale de Natation (FINA). Le TF devait déterminer si la sentence attaquée était incompatible avec l’ordre public, le recourant faisant valoir que le non-respect par l’intimée du délai pour faire appel au TAS donnait autorité de chose jugée à la décision rendue par la FINA en première instance et que la Formation arbitrale avait méconnu ce principe en se saisissant de la cause litigieuse. Selon le TF, l’autorité de chose jugée suppose l’existence dans le temps de deux procès distincts, avec une seconde litispendance, ce qui exclut de fait la présente situation où il s’agit de deux juridictions de degrés différents qui sont chargées de connaître de la même affaire (en ce sens, cf. not. ATF 140 III 278, consid. 3.3). Dans une seconde branche de ce moyen, le recourant invoquait une incompatibilité de la sentence attaquée avec l’ordre public matériel, celle-ci causant des atteintes à ses droits de la personnalité et à ses droits fondamentaux, en particulier les garanties découlant du droit au respect de la vie privée et familiale ainsi que du droit à la santé. En ce sens, le recourant soutenait que les principes applicables en matière de perquisition pénale devraient s’appliquer par analogie à la procédure antidopage pour garantir la protection des droits des athlètes. Le TF rappelle à ce propos que le moyen pris de l’incompatibilité d’une sentence avec l’ordre public matériel n’est pas recevable s’il tend uniquement à établir la contrariété entre une sentence et une garantie conventionnelle ou une norme de droit suisse, soit-elle de rang constitutionnel. En outre, selon la jurisprudence du TF, l’application automatique des principes de droit pénal et des garanties conventionnelles de la CEDH ne va pas de soi en matière de sanctions disciplinaires prononcées par des associations de droit privé, telles les fédérations sportives (cf. not. TF 4A_462/2019, consid. 7.1 ; TF 4A_178/2014, consid. 5.2), car ces organismes privés ne disposent pas des mêmes pouvoirs d’investigation et de coercition que les autorités pénales de l’Etat, ce qui explique pourquoi l’application par analogie des règles applicables à la perquisition pénale pourrait empêcher le système mis en place par le droit privé disciplinaire de fonctionner correctement pour lutter contre le dopage (cf. not. TF 4A_488/2011, consid. 6.2). Le TF note en outre que la jurisprudence de la CourEDH confirme que la recherche d’un sport équitable est un objectif important et peut justifier de sérieuses atteintes aux droits des sportifs (cf. CourEDH, FNASS et autres contre France, §166). En dernier lieu, le TF rappelle que, s’agissant du grief tiré de l’art. 190 al. 2 let. e LDIP, seule la question de savoir si le résultat auquel aboutit la sentence est contraire à l’ordre public est pertinent et les arguments invoqués par le recourant sont en l’espèce insuffisants à cet égard. Recours rejeté.

(A. Club c. B.). Recours contre la sentence rendue le 13 août 2021 par le Tribunal Arbitral du Sport (TAS). Condamnation d’un club au paiement de dommages-intérêts suite à une rupture injustifiée d’un contrat de travail avec un joueur. Le TF devait déterminer si la sentence du TAS violait l’ordre public matériel, le recourant faisant valoir une violation du principe pacta sunt servanda, en raison d’une prétendue contradiction résultant dans la sentence attaquée, dans laquelle le TAS aurait préalablement reconnu la validité d’une clause « buy-out » prévue dans le contrat entre le club et le joueur, avant de la juger insuffisamment claire pour être valable. Le recourant faisait valoir en conséquence que la Formation aurait, de manière contradictoire, affirmé l’invalidité de la clause « buy-out » litigieuse tout en se référant à la date d’échéance indiquée par ladite clause pour déterminer le dies a quo du cours des intérêts de l’indemnité due à l’intimé. Selon le TF, le recourant ne faisait en réalité que substituer son appréciation juridique des faits pertinents à celle retenue par le TAS en l’espèce, telle démarche étant inadmissible dans le cadre d’un recours en matière civile contre une sentence arbitrale internationale et, dans tous les cas, non constitutive d’une violation de l’ordre public matériel. Recours rejeté.

(A., B. c. FIFA). Recours contre la sentence rendue le 4 octobre 2021 par le Tribunal Arbitral du Sport (TAS). Les recourants invoquaient une incompatibilité de la sentence attaquée avec l’ordre public en tentant de démontrer le prétendu non-respect du droit suisse par la Formation arbitrale, en particulier le droit découlant de l’art. 75 CC de contester les décisions d’une association suisse de droit privé, telle la FIFA. Selon le TF, l’argument général selon lequel « la protection juridique des individus contre les mesures prises par une association, garantie par l’art. 75 CC, est une composante indispensable de l’ordre public » est insuffisant pour établir l’incompatibilité d’une sentence arbitrale avec l’ordre public (consid. 6.2), si l’on ne démontre pas en quoi le TAS aurait violé un principe procédural fondamental et généralement reconnu concernant la position de dénonciateurs (comme c’est le cas des recourants en l’espèce) dans des procédures disciplinaires de droit privé. Les recourants ne peuvent ainsi être suivis lorsqu’ils tentent d’établir un principe général selon lequel un dénonciateur devrait dans tous les cas avoir la qualité de partie dans une procédure disciplinaire associative (en ce sens, cf. ATF 146 III 358, consid. 4.2). Les recourants faisaient en dernier lieu valoir une incompatibilité de la sentence attaquée avec l’ordre public matériel, le TAS étant selon eux dans l’obligation d’admettre leur légitimation active dans la procédure arbitrale en application des règlements sportifs pertinents. Selon le TF, cet argument constitue en réalité une critique de l’application des règlements sportifs par le TAS, que celui-ci a interprétés autrement que comme l’auraient souhaité les recourants, ce qui ne viole nullement l’ordre public matériel. Recours rejeté.

(FC A. c. B., Fédération Internationale de Football Association (FIFA)). Recours contre la sentence rendue le 10 novembre 2021 par le Tribunal Arbitral du Sport (TAS). Le recourant invoquait une incompatibilité de la sentence attaquée avec l’ordre public, en particulier du principe de la fidélité contractuelle, reprochant à la Formation arbitrale de lui avoir imposé une obligation contractuelle qu’il ne serait nullement obligé d’exécuter. Le recourant faisait, à cet égard, allusion à une obligation attribuable à son « prédécesseur sportif » et estimait qu’aucune base juridique ne permettait de lui imputer de telles obligations et de faire de lui un « ayant droit universel ». Selon le TF, le recourant perd toutefois de vue que la sentence ayant conduit au recours en matière civile concerne la sanction disciplinaire prononcée par un organe de la FIFA suite au non-paiement d’une somme d’argent par le recourant, et non le litige contractuel dont était issue la décision établissant sa qualité de « successeur sportif ». En outre, l’affirmation du recourant selon laquelle il n’existe pas de base légale pour justifier la sanction disciplinaire relève de sa propre interprétation, question qui échappe au pouvoir d’examen du TF dans un recours contre une sentence arbitrale internationale. En second lieu, le recourant faisait valoir que le mécanisme privé d’exécution forcée mis en place par la FIFA violait le monopole de l’Etat en cette matière. Selon le TF, une association de droit privé comme la FIFA peut tout à fait édicter des dispositions conformes à ses buts et soumettre ses membres à leur respect, sans pour autant s’arroger la compétence réservée à l’Etat en matière d’exécution des créances pécuniaires. Le TF précise à cet égard que le système de la FIFA est admissible, pour autant que la base statutaire qui le supporte soit suffisante et qu’elle ne mette pas les sanctions prévues par le droit associatif en conflit avec le monopole de la contrainte revenant à l’Etat (cf. not. TF 4P.240/2006 du 5 janvier 2007, consid. 4.2). En troisième lieu, le recourant faisait valoir que la décision de la FIFA portant sur le litige contractuel (et non disciplinaire) avait été rendue sans qu’il n’y soit partie, en violation de son droit d’être entendu. A nouveau, le TF rappelle que le présent recours porte sur la sentence rendue dans le volet disciplinaire de cette affaire, dans laquelle le recourant ne prétend nullement que des principes fondamentaux de procédure auraient été violés. Recours rejeté.

(A. c. B.). Recours contre la sentence rendue le 10 novembre 2021 par le Tribunal Arbitral du Sport (TAS). Le recourant invoquait une incompatibilité de la sentence attaquée avec l’ordre public, reprochant en particulier à l’Arbitre unique d’avoir violé le principe de la fidélité contractuelle en reconnaissant l’existence d’un contrat tout en refusant d’en ordonner le respect, en raison, selon le recourant, de « considérations non déterminantes » qui auraient conduit l’arbitre à conclure que les clauses litigieuses étaient immorales par nature et que l’attitude du recourant était contraire aux mœurs. Selon le TF, le grief de l’incompatibilité d’une sentence avec l’ordre public est irrecevable s’il tend uniquement à établir la contrariété entre la sentence attaquée et une norme de droit suisse, quel que soit le degré de cette contrariété, à la supposer établie (cf. not. TF 4A_346/2020, consid. 6.2.4 ; TF 4A_248/2019, consid. 9.8.1 non publié aux ATF 147 III 49 ; TF 4A_32/2016, consid. 4.3). A cet égard, le TF ne doit pas céder à la tentation d’examiner avec un plein pouvoir de cognition l’application ou l’interprétation conforme de règles de droit suisse dans le cadre d’un recours contre une sentence arbitrale internationale, comme il le ferait s’il était saisi d’un recours en matière civile contre un arrêt cantonal (cf. not. TF 4A_318/2018 du 4 mars 2019, consid. 4.5.1 ; TF 4A_312/2017 du 27 novembre 2017, consid. 3.3.4.2). Au demeurant, le TF estime que l’arbitre n’a nullement enfreint le principe de la fidélité contractuelle, car il n’a pas refusé d’appliquer une disposition contractuelle en se mettant en contradiction avec le résultat de son interprétation, mais il a considéré que la convention litigieuse, si elle existait bel et bien, devait néanmoins être frappée de nullité pour cause de contrariété aux mœurs. La question de savoir si cette appréciation est correcte échappe à la cognition du TF dans un recours contre une sentence arbitrale internationale. Recours rejeté.

(A. c. Comité International Olympique (CIO)). Recours contre la décision rendue le 24 septembre 2020 par le Tribunal Arbitral du Sport (TAS). Inéligibilité d’une biathlète russe pour la prochaine édition des Jeux Olympiques d’hiver et disqualification de ses résultats obtenus lors des Jeux Olympiques de Sotchi. Dans un moyen divisé en deux branches, la recourante dénonçait d’abord une violation de l’ordre public procédural, en particulier de son droit à une audience publique, en alléguant que les parties ne se seraient pas entendues pour limiter l’accès à la salle d’audience à un nombre restreint de personnes préalablement identifiées. Le TF rappelle en premier lieu que la violation de l’art. 6 par. 1 CEDH, invoquée par la recourante, ne constitue pas un motif de recours contre une sentence arbitrale internationale au sens de l’art. 190 al. 2 LDIP, même si les principes découlant de cette garantie conventionnelle peuvent servir, cas échéant, à concrétiser l’un des griefs limitativement énumérés à l’art. 190 al. 2 LDIP. Le TF relève en outre que la recourante n’a jamais fait valoir ses critiques au cours de l’audience arbitrale, ni même déclaré n’avoir pas consenti librement au maintien de l’audience en question aux conditions fixées par la Formation, ni que cette audience devait être retransmise en direct sur le site internet du TAS. Selon le TF, il est incompatible avec les règles de la bonne foi de s’en prévaloir a posteriori, compte tenu de l’issue de la procédure arbitrale. En deuxième lieu, la recourante invoquait une violation de l’ordre public matériel, faisant valoir qu’il est contraire au sentiment de justice de sanctionner une personne en violation du principe de la présomption d’innocence. Le TF relève tout d’abord que l’application automatique des principes de droit pénal et des garanties correspondantes figurant dans la CEDH ne va pas de soi en matière de sanctions disciplinaires prononcées par des associations de droit privé, telles que les fédérations sportives, en raison notamment de la différence notable en matière de pouvoir d’investigation et de coercition entre les autorités publiques de l’Etat et les organes disciplinaires associatifs. En outre, le TF note que la recourante tentait en réalité de rediscuter certaines questions factuelles au stade du recours en matière civile, questions qui échappent à son pouvoir d’examen. Recours rejeté.

(A. [club de football professionnel] c. B. et C [joueurs professionnels de football]) ; recours contre une sentence du TAS rendue le 25 février 2021 (procédure arbitrale d’appel). Sous le couvert d’une violation de l’ordre public, le recourant se plaint du fait que la formation arbitrable aurait violé le principe du double degré de juridiction en statuant elle-même sur les prétentions litigieuses en lieu et place de les renvoyer à l’organe juridictionnel de la fédération concernée agissant en tant qu’autorité de première instance. Tout d’abord, le TF souligne, en accord avec sa propre jurisprudence, que l’exigence d’une double instance ou d’un double degré de juridiction ne relève pas de l’ordre public procédural au sens de l’art. 190 al. 2 let. e LDIP (cf. arrêt TF 4A_384/2017, consid. 4.2.3 et réf.). De plus, le TF relève qu’en l’occurrence l’épuisement des instances sportives a été respecté, le fait que l’organe juridictionnel de la fédération ait décliné sa compétence pour un motif de procédure ne remettant pas en cause ce constat. Recours rejeté.

(A. [athlète sud-africaine de niveau international] c. IAAF [International Association of Athletics Federations] et ASA [Athletics South Africa]) et TF 4A_398/2019 du 25 août 2020 (f), destiné à la publication (Athletics South Africa [ASA] c. IAAF [International Association of Athletics Federations] et A. [athlète sud-africaine de niveau international]) ; recours contre la sentence du TAS rendue le 30 avril 2019 (procédure arbitrale ordinaire). La recourante soutient que la sentence attaquée viole - à plusieurs égards - l’ordre public matériel au sens de l’art. 190 al. 2 let. e LDIP. Premièrement, elle fait valoir que la sentence est contraire au principe de non-discrimination. Deuxièmement, elle soutient qu’elle est victime d’une atteinte à ses droits de la personnalité au motif que la sentence viole, à ses yeux, plusieurs droits fondamentaux. Troisièmement, elle invoque une atteinte à sa dignité humaine. L’arrêt commence par un résumé particulièrement détaillé des enjeux du litige, de la procédure arbitrale ainsi que du rôle du TF dans le cadre d’un recours contre une sentence arbitrale. Ensuite, le TF rappelle que les violations de la Cst. féd. et de la CEDH ne font pas partie des griefs exhaustivement énumérés à l’art. 190 al. 2 LDIP de sorte que le grief est irrecevable s’il « tend simplement à établir que la sentence serait contraire aux garanties [de rang constitutionnel ou conventionnel] ». Toutefois, il est précisé que les principes sous-jacents à ces instruments peuvent être pris en compte dans le cadre de l’ordre public « afin de concrétiser cette notion ». S’agissant du premier moyen invoqué par la recourante (à savoir une violation de l’interdiction de discrimination), le TF note que la jurisprudence fédérale a déjà constaté que ce principe fondamental fait partie de l’ordre public « dans l’idée de protéger au premier chef la personne vis-à-vis de l’Etat ». A cet égard, la recourante fait valoir (« non sans pertinence » selon les termes de notre Haute Cour) que la relation entre une athlète et la fédération sportive internationale gouvernant un sport au niveau mondial (telle que l’IAAF) présente des similitudes avec celle entre un particulier et l’Etat. Sur ce point, le TF laisse ouvertes deux questions distinctes : (i) celle de savoir si l’interdiction de discrimination du fait d’une entité privée entre dans la notion d’ordre public et (ii) si la relation entre un athlète et sa fédération internationale est, sur ce point, comparable à celle entre un individu et l’Etat. Au fond, il rappelle que l’interdiction de discrimination n’interdit pas toute distinction fondée sur l’un des critères de l’art. 8 al. 2 Cst. féd. mais fonde plutôt une présomption de « distinction inadmissible ». En matière d’égalité entre les sexes, « un traitement distinct est possible s’il repose sur des différences biologiques excluant catégoriquement un traitement identique ». En l’espèce, le TF reconnait que l’examen auquel s’est livré le TAS était « approfondi » et « circonstancié ». A la suite de cette analyse, la formation arbitrale était parvenue à la conclusion que, bien que le « règlement régissant la qualification dans la catégorie féminine (pour les athlètes présentant des différences du développement sexuel) "règlement DSD" » était prima facie discriminatoire, il était nécessaire, raisonnable et proportionné en vue de « garantir une compétition équitable ». A la lumière de cet objectif, reconnu comme étant « légitime », la différenciation entre hommes et femmes doit être admise et, partant, il peut s’avérer juste, dans l’optique de cette distinction, de se référer à des facteurs biologiques intrinsèques plutôt qu’au sexe légal de l’athlète. La formation arbitrale a reconnu que la testostérone est un « facteur principal » des avantages physiques entre ces deux catégories. Sur la base des éléments avancés par les parties et les différents experts au cours de la procédure arbitrale, le TAS est arrivé à la conclusion que les athlètes féminines « 46 XY DSD », sensibles aux androgènes, jouissent « d’un avantage compétitif significatif », de sorte que le règlement DSD – bien que prima facie discriminatoire – est raisonnable et constitue une mesure appropriée. Deux précisions importantes sont apportées à ce stade par le TF: (i) la procédure arbitrale n’était pas soumise au droit matériel suisse et (ii) les constatations factuelles (essentiellement scientifiques) auxquelles le tribunal arbitral est parvenu ne peuvent plus être remises en cause au stade du recours contre la sentence. Sur cette base, la nécessité de la mesure doit dès lors également être admise. Quant au principe de proportionnalité au sens strict, le TF reconnait que l’examen du TAS est « complet » et insiste ensuite sur l’intérêt poursuivi par la mesure, soit « l’équité sportive », qui est susceptible, selon notre Haute Cour, « de justifier de sérieuses atteintes aux droits des sportifs ». Il s’ensuit que la séparation entre catégories doit nécessairement reposer sur certains critères de distinction choisis par la fédération gouvernant un sport et que les athlètes ne disposeront jamais de facto des mêmes chances de succès. Il n’appartient pas au TF d’opérer « abstraitement » mais aux fédérations internationales concernées d’apprécier si un avantage physique est susceptible de fausser la compétition. Il est ajouté, à juste titre, que le règlement en question ne vise pas uniquement à protéger l’équité des compétitions (intérêt propre à l’IAAF) mais également ceux des autres athlètes féminines qui seraient « désavantagées et privées de chances de succès lorsqu’elles doivent affronter des athlètes 46 XY DSD ». Dans un deuxième moyen du même grief, la recourante se plaint d’une violation de ses droits de la personnalité en raison d’une atteinte à son intégrité corporelle, à son identité, à sa sphère intime ainsi qu’à sa liberté économique. En particulier, la recourante fait valoir que l’obligation qui lui est imposée de prendre des contraceptifs oraux afin d’abaisser son taux de testostérone au-dessous de la limite règlementaire constitue une violation à l’essence même de son droit à l’intégrité physique. Sur ce point, le TF reconnait que le consentement de l’athlète ne peut pas justifier une telle atteinte (car il n’est pas librement exprimé) et que la prise de ces contraceptifs implique « des effets secondaires significatifs ». Toutefois, de l’avis du TF, ces éléments ont été pris en compte dans l’analyse effectuée par la formation arbitrale qui est arrivée à la conclusion que la mesure est proportionnée. Le TF considère qu’une telle conclusion ne viole pas l’ordre public. Dans une troisième – et dernière – branche du moyen invoqué, la recourante se plaint d’une violation de sa dignité humaine – ce que le Tribunal fédéral reconnait comme étant un principe entrant, « de manière incontestable », dans la notion d’ordre public. Notre Haute Cour est d’avis que dans certains contextes aussi particuliers que celui du sport de compétition, on peut admettre que les caractéristiques biologiques puissent, « à des fins d’équité et d’égalité des chances », éclipser le sexe légal ou l’identité de genre d’une personne. En l’occurrence, la prise de pilules contraceptives ne constitue pas un traitement forcé pour les athlètes féminines « 46 XY DSD » qui conservent toujours la possibilité de refuser de se conformer aux prescriptions. A cet égard, le TF concède que ce refus débouchera sur l’impossibilité de prendre part aux compétitions mais est néanmoins d’avis que « on ne saurait admettre qu’une telle conséquence puisse, à elle seule, porter atteinte à la dignité humaine d’une personne ». Recours rejeté.

(A. [équipe de football] c. B. [club de football]) ; recours contre le Termination Order rendu par Présidente suppléante de la Chambre d’appel du TAS (procédure arbitrale d’appel). Le recourant, partie appelante dans la procédure arbitrale, fait valoir l’incompatibilité de la décision avec l’ordre public procédural en lien avec (i) l’application arbitraire d’une disposition du Code du TAS et (ii) la violation du formalisme excessif. La Présidente suppléante, constatant que l’appelant n’avait pas nommé son arbitre dans le délai fixé, a décidé de clôturer la procédure, en application de l’art. R36 du Code. De l’avis du recourant, cette disposition s’applique uniquement aux cas dans lesquels un arbitre « démissionne, décède, est récusé ou révoqué » et ne vise donc nullement la situation d’espèce (soit le défaut de nomination de l’arbitre dans le délai fixé). Ainsi, le TAS aurait violé de manière arbitraire une « règle essentielle » de la procédure et privé l’intéressé de son droit à un procès équitable. A ce sujet, le TF commence par constater qu’une interprétation même arbitraire d’un règlement d’arbitrage ne constitue pas « en soi » une violation de l’ordre public. Il relève ensuite qu’il est douteux de qualifier l’art. R36 du Code comme étant une « règle essentielle » de la procédure. Il concède au recourant qu’à sa lecture, l’art. R36 du Code ne vise pas la situation à l’origine du litige. Cela étant, de l’avis du TF, l’application faite par la Présidente « n’apparait pas critiquable », en particulier si on considère le fait que le TAS avait préalablement rendu attentive la partie intéressée qu’en cas de défaut de nomination de son arbitre, la procédure aurait été clôturée. Le recourant invoque également la violation du formalisme excessif en arguant que la Présidente suppléante aurait dû lui accorder un bref délai de grâce, en application de l’art. R48 du Code. Le recourant a également souligné que qu’une nomination tardive de l’arbitre « n’a pratiquement pas d’impact » sur le déroulement de la procédure alors que la décision attaquée, elle, a des conséquences particulièrement graves pour lui. Sur ce point, le TF fait valoir que seules des « violations caractérisées » du formalisme excessif entrent dans la notion (restrictive) d’ordre public procédural. Il rappelle ensuite sa jurisprudence selon laquelle il n’y a pas de violation du formalisme excessif en cas de (i) déclaration d’irrecevabilité du recours pour défaut de paiement à temps de l’avance de frais lorsque les parties ont été averties de « façon appropriée » (ATF 133 V 402) ou (ii) de décision d’irrecevabilité suite à l’envoi d’une déclaration ou un mémoire d’appel par fax ou par simple e-mail (arrêts TF 4A_556/2018, consid. 6.5, TF 4A_238/2018, consid. 5.6). En l’espèce, il en va de même. Premièrement, parce que l’art. R48 du Code du TAS, qui prévoit la possibilité d’accorder un bref délai pour corriger les déclarations d’appel incomplètes, ne s’applique pas au présent litige. Deuxièmement, parce que le fait que le recourant ait remédié rapidement à son erreur est sans pertinence. Enfin, les règles de procédure visent à assurer l’égalité de traitement entre les parties et il n’est dès lors pas envisageable de punir plus ou moins sévèrement le non-respect d’un délai de procédure. Recours rejeté.

(A. A.S. [club de football professionnel] c. Union des Associations Européennes de Football [UEFA]) ; recours contre la sentence du TAS rendue le 30 juillet 2020 (procédure arbitrale d’appel). Le recourant fait grief à la formation arbitrale d’avoir omis de traiter un argument qu’il avait pourtant valablement soulevé au cours de la procédure arbitrale. A ce sujet, le TF se limite à relever que le recourant est démenti à la seule lecture de la sentence attaquée, de sorte que l’argument doit être rejeté. Recours rejeté.

(A. [joueur de football professionnel] c. Hellenic National Council for Combating Doping (ESKAN)) ; recours contre la sentence du TAS rendue le 29 octobre 2019 (procédure arbitrale d’appel). Le recourant prétend que la décision émanant de l’organe de première instance de la fédération concernée ne contenait aucune indication des voies de droit ; à suivre la thèse du recourant, il s’ensuivrait que l’arbitre unique du TAS aurait violé l’ordre public procédural en omettant de constater un tel défaut. Tout d’abord, le TF constate prima facie qu’il est « douteux » que l’absence d’indication des voies de recours puisse entrer dans la notion d’ordre public procédural. Ceci dit, notre Haute Cour retient que lorsque les indications de voies de droit font défaut, il appartient au justiciable de faire preuve de diligence en faisant les recherches nécessaires, en particulier lorsque, comme c’était le cas en l’espèce, le destinataire de la décision est représenté par un mandataire professionnel. Enfin, le TF constate qu’en l’occurrence, les voies de droit contre la décision ressortent clairement à la simple lecture de la loi nationale pertinente, de sorte que le recourant était bel et bien en mesure d’identifier l’autorité vers laquelle diriger son recours. Recours rejeté.

(A. [athlète] c. World Athletics) ; recours contre une sentence du TAS rendue le 23 octobre 2020 (procédure arbitrale d’appel). Le recourant, un athlète paralympique américain, fait valoir une violation de l’ordre public matériel en lien avec (i) le principe d’interdiction de discrimination, (ii) le principe de la fidélité contractuelle et (iii) la dignité humaine. Se référant à l’arrêt TF 4A_248/2019, le TF rappelle que les règles spécifiques pour le recours contre une sentence arbitrale en matière internationale, notamment l’art. 190 al. 2 LDIP, qui définit la liste des griefs invocables, ainsi que le pouvoir d’examen restreint du TF lorsqu’il est saisi d’une violation de l’ordre public matériel, sont conformes à la CEDH. Encore une fois, est laissée indécise la question de savoir si l’interdiction de discrimination lorsqu’elle a trait aux relations entre particuliers est couverte par la notion d’ordre public matériel. Ensuite, notre Haute Cour constate que le recourant, se fondant (de manière inadmissible) sur des constatations factuelles qui ne ressortent pas de la sentence attaquée, part d’une prémisse erronée selon laquelle la formation arbitrale aurait appliqué, directement ou indirectement, la règle « MASH (Maximum Allowable Standing Height) ». Selon le TF, la formation arbitrale n’était pas confrontée à la question de savoir si cette règle était discriminatoire (comme le prétend le recourant) mais bien plutôt à celle de savoir si l’athlète paralympique jouissait ou non d’un « avantage compétitif global » du fait de l’utilisation de ses prothèses. En l’occurrence, la réponse à laquelle est parvenue la formation arbitrale était affirmative. S’agissant d’une prétendue violation du principe de la fidélité contractuelle, le grief est mal fondé puisque la formation arbitrale a bien appliqué les dispositions règlementaires pertinentes. L’interprétation qui a été faite par le tribunal arbitral sort du champ d’application de la notion « restrictive » de ce principe donnée par la jurisprudence dans le cadre d’un recours fondé sur l’art. 190 al. 2 let. e LDIP. Quant à l’argument tiré d’une prétendue violation de la dignité humaine, la position du recourant n’est pas soutenable dans la mesure où le litige ne concerne pas l’obligation pesant sur une certaine catégorie de personnes (en l’occurrence les athlètes d’origine africaine ou afro-américaine) de se soumettre à la règle MASH. En effet, il ressort de la sentence attaquée que le seul point pertinent devant la formation arbitrale était celui de juger si les prothèses utilisées par l’athlète lui permettaient de courir à une hauteur sensiblement plus importante que la taille qui eût été la sienne s’il avait eu des jambes biologiques intactes, et lui conféraient, de ce fait, un avantage compétitif. Recours rejeté.

(A. Football Federation c. B. [entraîneur de football professionnel]) ; recours contre une sentence du TAS rendue le 18 novembre 2020 (procédure arbitrale d’appel). Le recourant se plaint d’une violation de l’ordre public matériel en lien avec la violation du principe pacta sunt servanda. Le TF rappelle que toute violation dudit principe doit être appréciée « restrictivement » dans le cadre du grief de l’ordre public matériel. Ainsi l’art. 190 al. 2 let. e LDIP n’est violé que si l’arbitre refuse d’appliquer une clause contractuelle tout en admettant qu’elle lie les parties ou, à l’inverse, s’il leur impose le respect d’une clause dont il considère qu’elle ne les lie pas. Le processus d’interprétation d’une clause contractuelle ainsi que les conséquences juridiques qui en sont logiquement tirées sortent du champ d’application du principe pacta sunt servanda. Le recourant méconnait le sens « restrictif » donné à ce principe par la jurisprudence fédérale. En l’espèce, l’arbitre a appliqué la clause litigieuse mais l’a interprétée à l’encontre du sens voulu par le recourant. Recours rejeté.

(A. [club de football professionnel] c. FIFA, D. [joueur de football professionnel] et E. [club de football professionnel]) ; recours contre une sentence du TAS rendue le 30 novembre 2020 (procédure arbitrale d’appel). Le recourant invoque l’incompatibilité de la sentence avec l’ordre public procédural en lien avec la violation du formalisme excessif. Le recourant soutient que l’arbitre a, à tort, déclaré irrecevable l’appel contre une décision rendue par la Chambre de Résolution des Litiges de la FIFA en arguant qu’il n’avait pas requis les motifs de ladite décision conformément à l’article 15 du Règlement sur le Statut et le Transfert de Joueurs (RSTJ) de sorte que la décision serait devenue définitive et exécutoire. En particulier, la position du recourant consiste à faire valoir que la FIFA aurait dû comprendre la volonté d’attaquer la décision du simple fait que le club avait interjeté appel au TAS et, par conséquent, rendre une décision motivée. D’après la jurisprudence, seules les « violations caractérisées » de l’interdiction du formalisme excessif sont susceptibles d’entrer dans la notion d’ordre public procédural. En l’espèce, il est établi que l’appelant connaissait l’article 15 RSTJ et qu’il devait dès lors requérir les motifs de la décision avant de l’attaquer devant le TAS. De l’avis du TF, la position du recourant n’est pas soutenable dans la mesure où les autres parties à la procédure doivent pouvoir s’attendre à ce qu’une autorité (en l’occurrence la FIFA) applique et respecte les dispositions qu’elle a elle-même adoptées dans son propre règlement. Recours rejeté.

(A. [club de football professionnel] c. B.[entraîneur], C.) ; recours contre une sentence rendue le 18 novembre 2020 par le TAS (procédure arbitrale d’appel). Le recourant se plaint d’une incompatibilité de la sentence avec l’ordre public au motif d’une violation du principe de la fidélité contractuelle. En particulier, le recourant soutient que les arbitres ont rendu le dispositif de la sentence à l’issue de l’audience alors qu’ils avaient spécifiquement convenu avec les deux parties que celles-ci pouvaient encore envoyer leurs écritures après audience. A ce sujet, le TF rappelle que seules les violations « qualifiées » du principe pacta sunt servanda entrent dans la notion (restrictive) de l’ordre public. Ceci dit, le grief tel que formulé par le recourant n’a rien à voir avec le principe de la fidélité contractuelle, puisque la formation arbitrale n’a jamais conclu de contrat avec les parties. Recours rejeté.

(A. [club de football professionnel] c. F. [joueur de football professionnel], C.) ; recours contre une sentence rendue le 25 novembre 2020 par le TAS (procédure arbitrale d’appel). Dans un unique moyen, le recourant se plaint du fait que la formation arbitrale a violé l’ordre public procédural, au motif qu’elle aurait entériner une violation du principe de célérité en refusant d’annuler une décision de la chambre nationale de résolution des litiges qui « a mis plus que 5 mois pour statuer ». Le moyen est sommairement écarté par le TF qui considère que le délai dans lequel la chambre nationale de résolution des litiges a statué « apparait tout à fait raisonnable ». De plus, le TF souligne la contradiction intrinsèque du raisonnement du recourant qui, tout en invoquant le principe de célérité, se plaint du fait que les arbitres auraient dû annuler la décision et renvoyer la cause à l’instance sportive inférieure, ce qui aurait eu comme effet de prolonger (davantage) la durée de la procédure. Recours rejeté.

Art. 190 LDIP al. 2 let. e

(A. [société turque], B. [société turque], V. [club professionnel de football] c. Turkish Football Federation [TFF], C. [société turque] W. [club professionnel de football] et Fédération Internationale de Football Association [FIFA]) ; recours contre la sentence du TAS du 30 juillet 2019 (procédure d’arbitrage d’appel). Les recourants invoquent la violation de l’ordre public (procédural et matériel) en lien avec trois différents aspects. Premièrement, ils font valoir que le tribunal arbitral aurait violé le droit à une audience publique tel que garanti à l’art. 6 (1) CEDH. A cet égard, le TF rappelle, une fois de plus, qu’une partie à la convention d’arbitrage ne peut pas se plaindre directement dans le cadre du recours contre une sentence internationale de la violation de l’art. 6 (1) CEDH « même si les principes de cette disposition peuvent servir, le cas échéant, à concrétiser les garanties invoquées sur la base de l’art. 190 al. 2 LDIP » (consid. 4.1). Le TF rejette donc la thèse avancée par les recourants selon laquelle une violation de l’art. 6 (1) CEDH constituerait un grief « sui generis » s’ajoutant « implicitement » aux motifs de recours prévus à l’art. 190 al. 2 LDIP. D’après notre Haute Cour, une violation de l’art. 6 (1) CEDH n’implique pas « eo ipso » une violation de l’ordre public procédural au sens de l’art. 190 al. 2 let. e LDIP de sorte il incombe aux recourants de démontrer en quoi la prétendue violation de la garantie conventionnelle constituerait également une violation de l’ordre public procédural, ce que les recourants ont omis de faire. En l’espèce, selon le TF, l’applicabilité des garanties de procédure de l’art. 6 (1) CEDH est « d’emblée exclue », dans la mesure où les recourants ne sont pas affectés dans leurs « droits et obligations de caractère civil » (consid. 4.2). Il s’agit de « simples dénonciateurs » qui ne peuvent pas prétendre à l’existence d’un droit à ce qu’une procédure disciplinaire soit ouverte à l’encontre d’un autre club (consid. 4.3). Deuxièmement, les recourants font valoir que la TFF et la FIFA ont adopté un comportement contraire à la bonne foi (art. 2 CC), en décidant de ne pas appliquer un certain nombre de règles qu’elles avaient elles-mêmes édictées afin de lutter contre les manipulations sportives alors que les infractions commisses étaient avérées. Or, en agissant de la sorte, la TFF et la FIFA auraient trahi les expectatives légitimes des recourants. Quant à cet argument, le TF constate qu’une violation de l’art. 2 CC « ne rend pas – per se
– la sentence incompatible avec l’ordre public matériel » et qu’en l’espèce les recourants n’ont pas fait la démonstration qu’on était face à une « violation grave » de l’art. 2 CC tendant à la contrariété de la sentence avec l’ordre public procédural de sorte que leur argument doit être rejeté à défaut de motivation suffisante. Troisièmement, les recourants soutiennent que la sentence viole l’ordre public car la formation arbitrale aurait « cautionné » des actes de corruptions avérés. A ce sujet, le TF se limite à observer que la sentence attaquée ne porte pas sur la question (relevant du droit de fond) de savoir si des actes de corruptions ont été effectivement perpétrés mais uniquement sur celle (préliminaire) de savoir si les recourants avaient la qualité pour agir. Recours rejeté.