Droit social

TF 8C_196/2013

2012-2013

Art. 16 LPGA ; art. 20 LAA

Pour déterminer le revenu que l’assuré aurait réalisé sans invalidité (revenu de valide), il y a lieu de se baser sur le revenu qu’il aurait effectivement pu réaliser selon le degré de preuve de la vraisemblance prépondérante, basé sur les circonstances personnelles et capacités professionnelles de l’assuré au moment déterminant. Cela doit se faire de la manière la plus concrète. En principe, c’est le dernier revenu avant l’accident qui sert de base de calcul, éventuellement adapté au renchérissement.

Le revenu de valide d’un indépendant peut en principe être basé sur les inscriptions au compte individuel AVS. Si ce revenu présente de fortes variations sur une courte période, il y a lieu de se baser sur un revenu moyen calculé sur une période plus longue. Selon les circonstances, il est en principe possible, d’après la jurisprudence du TF, de ne pas se baser sur le dernier revenu réalisé. Ceci est notamment le cas pour les indépendants lorsqu’il y a lieu d’admettre, au degré de preuve de la vraisemblance prépondérante, que l’assuré aurait abandonné (sans accident) son activité indépendante mal rémunérée pour débuter une autre activité mieux rémunérée ou lorsque la période d’indépendance avant l’accident est trop courte pour servir de base suffisante pour le calcul.

Si un assuré s’est contenté durant plusieurs années d’un revenu modeste provenant de son activité indépendante, c’est celui-ci qui est déterminant pour déterminer le revenu de valide, même s’il existait des meilleures possibilités de gain. Le TF exclut en règle générale un parallélisme des revenus en cas d’activité indépendante.

 

TF 8C_291/2013

2012-2013

Art. 61 lit. b 2ème phrase LPGA

Exigences formelles minimales d’un acte de recours émanant de la part d’un mandataire professionnel qualifié (in casu : agent d’affaire breveté).

Lorsqu’un mandataire professionnel a déjà été consulté au cours de la procédure administrative, il ne saurait solliciter un délai supplémentaire en vue de compléter son acte de recours ne répondant pas aux conditions minimales instituées à l’art. 61 lit. b 2ème phrase LPGA (c. 3.1).

En déposant un acte de recours manifestement incomplet et en sollicitant un délai supplémentaire en vue de le compléter, le mandataire commet manifestement un abus de droit au sens de l’ATF 134 V 162. Irrecevabilité du recours sommaire déposé auprès du Tribunal cantonal (c. 3.2).

 

TF 8C_46/2013

2012-2013

Art. 16 et 69 al. 2 LPGA

La SUVA décide de réduire les indemnités journalières et de réclamer, sur la base de l’art. 69 al. 2 LPGA, le remboursement du montant correspondant à la surindemnisation de l’assuré, suite à l’allocation de la rente de l’assurance-invalidité avec effet rétroactif.

Le TF rappelle les conditions légales posées aux art. 68 et 69 LPGA, ainsi que les principes posés par sa jurisprudence pour déterminer le salaire hypothétique que l’assuré aurait pu réaliser s’il n’était pas devenu invalide. Il confirme qu’il faut tenir compte d’une activité accessoire dans l’hypothèse où l’assuré aurait continué, selon toute vraisemblance, à percevoir le revenu accessoire s’il était resté en bonne santé. On tient compte du gain accessoire sans égard au rendement et au temps consacré à son obtention. Le caractère exigible de l’activité accessoire et les limitations de durée du travail hebdomadaire prévues par l’art. 9 Ltr n’entrent pas en ligne de compte (c. 2.3).

Dans le cas d’espèce, l’assuré invoque que son salaire sans invalidité doit être déterminé en tenant compte du revenu que lui aurait procuré le travail auprès d’un second employeur sur la base du contrat conclu peu avant l’accident. Le TF confirme le jugement attaqué, qui refuse de tenir compte de ce revenu accessoire au motif que l’employeur principal aurait certainement refusé d’autoriser l’exercice de l’activité accessoire sur la base de son règlement interne. En exerçant son activité accessoire auprès d’un concurrent, l’assuré se serait rendu coupable de violation de son devoir de fidélité.

Une violation du droit d’être entendu du recourant a été néanmoins admise, l’autorité inférieure n’ayant pas examiné le moyen du recourant selon lequel il aurait trouvé une autre activité accessoire compatible avec son activité principale.

 

TF 9C_168/2013

2012-2013

Art. 7 al. 2 LPGA

En présence d’un état psychique maladif, il y a lieu de se demander si et dans quelle mesure la personne assurée peut, malgré l’atteinte à sa santé psychique, exercer une activité lucrative sur un marché du travail équilibré correspondant à ses aptitudes. Les diminutions de la capacité de gain que l’assuré pourrait empêcher en faisant preuve de bonne volonté ne sont pas considérées comme les conséquences d'un état psychique maladif (cf. art. 7 al. 2 LPGA).

L’autorité inférieure ne peut conclure à l’existence d’un trouble de la personnalité en l’absence de tout diagnostic médical correspondant. L’activité d’un assuré devant évoluer « dans un environnement soutenant et tolérant, sans remarques ni critiques, sans interactions avec d’autres employés et à l’abri de tout stress professionnel » s’apparente à une activité exercée en milieu protégé. Dans ce cadre, il n’est pas arbitraire de retenir que, si de telles limitations sont acceptables dans le cadre d’une activité s’exerçant à titre bénévole en milieu protégé, elles comportent des concessions démesurées pour un éventuel employeur rendant l’exercice d’une activité lucrative incompatible avec les exigences actuelles du monde économique.

En pareil cas, on ne peut raisonnablement exiger de l’assuré qu’il quitte son activité en milieu protégé pour mettre à profit sa capacité de travail résiduelle sur le marché ordinaire de l’emploi.

 

TF 9C_179/2013

2012-2013

Art. 16 LPGA ; art. 28 al. 2 LAI

Suite à une révision de sa rente AI, une assurée s’est vue réduire sa rente entière à un quart de rente (amélioration de sa capacité de gain). L’Office AI lui a reconnu ce droit sur la base d’un taux AI fixé à 48%, après réduction de son revenu d’invalide de 14% en raison des particularités personnelles et professionnelles du cas (Taux d’abattement). La cour cantonale lui a reconnu un droit à une demi-rente fondé sur un taux de 50% (modification du calcul d’invalidité en ajoutant une réduction de 2,6% pour tenir compte de la différence entre le revenu sans invalidité réalisé et celui exigible au niveau national dans le secteur économique spécifique). Le recours de l’Office AI a été rejeté par le TF.

L’arrêt confirme en premier lieu la jurisprudence développée aux ATF 135 V 297 (taux à partir duquel un revenu sans invalidité est inférieur à la moyenne au point de justifier un parallélisme des revenus à comparer ; lorsqu'il est inférieur d'au moins 5 % au salaire statistique usuel dans la branche, le revenu effectivement réalisé est nettement inférieur à la moyenne et il peut - si les autres conditions sont réalisées - justifier un parallélisme des revenus à comparer) et 134 V 322 (lorsqu'un assuré réalise un revenu nettement inférieur à la moyenne en raison de facteurs étrangers à l'invalidité et qu'il ne désire pas s'en contenter délibérément, il convient d'abord d'effectuer un parallélisme des deux revenus à comparer).

Ensuite, s’agissant du taux d’abattement retenu par le tribunal cantonal et critiqué par l’Office AI (15% au lieu de 14% de l’Office AI), le TF estime que la cour cantonale n’a pas violé le droit fédéral et n’a pas commis d’excès ou d’abus de son pouvoir d’appréciation. Il précise que, comme l’ont d’ailleurs fait valoir les premiers juges, le TF applique habituellement à ce genre de déductions des multiples de 5. L’application de chiffres plus fractionnés se révélerait en revanche plus problématique car difficilement concrétisable et vérifiable.

 

TF 9C_430/2013

2012-2013

Art. 16 LPGA

Le TF rappelle les conditions qui régissent l’application du parallélisme des revenus pour calculer la perte de gain due à l’invalidité. Selon cette jurisprudence, il se justifie de calculer la perte de gain due à l’invalidité en opérant un parallélisme des revenus à comparer lorsqu’un assuré a réalisé un revenu considérablement (soit d’au moins 5%) inférieur à la moyenne des salaires suisses dans la branche considérée pour des raisons étrangères à l’invalidité (par exemple, une formation scolaire minime, un manque de formation professionnelle ou un statut de saisonnier) et si rien n’incite à penser que l’assuré désire délibérément se contenter de ce salaire inférieur à la moyenne (ATF 135 V 58 c. 3.1).

En pratique, le parallélisme des revenus à comparer doit porter uniquement sur la part qui excède le taux minimal de 5 % et peut être effectué soit au regard du revenu sans invalidité en augmentant de manière appropriée le revenu effectivement réalisé ou en se référant aux données statistiques, soit au regard du revenu d’invalide en réduisant de manière appropriée la valeur statistique (ATF 134 V 32 c. 4.1).

Dans le cas particulier, le TF a considéré que la recourante ne pouvait se prévaloir de ce calcul, car elle s’était délibérément et volontairement contentée d’un revenu inférieur à la moyenne avant de devenir invalide.

 

TF 9C_226/2013

2012-2013

Art. 17 al. 1 et 16 LPGA

Lorsqu’un cas de révision est constaté, comme en l’espèce la perte d’un emploi, l’office AI doit procéder à un examen complet du droit à la rente. Peu importe en pareil cas que l’état de santé de l’assuré se soit modifié ou non depuis la décision initiale (c. 2.2).

Lorsque l’assuré réalisait avant l’atteinte à sa santé un revenu se situant clairement en dessous de la moyenne, parce que ses qualités personnelles (formation ou connaissances linguistiques lacunaires, statut de droit des étrangers) ne lui permettaient pas de prétendre à un salaire conforme à la moyenne, on ne peut alors pas admettre qu’il est en mesure d’obtenir un revenu conforme à la moyenne une fois qu’apparaît l’atteinte à la santé. Cette circonstance de fait doit être corrigée par une mise en parallèle des revenus, qui peut se traduire en pratique par une réduction du revenu avec invalidité, à condition que le salaire obtenu soit clairement inférieur aux tabelles ESS de l’Office fédéral de la statistique, soit inférieur d’au moins 5 % (c. 4.4.1).

Une fois ce principe de la mise en parallèle appliqué, une réduction supplémentaire du revenu avec invalidité ainsi déterminé sur une base statistique n’est possible en principe qu’en raison d’une limitation particulière, de façon à ne pas tenir compte deux fois des mêmes éléments. La jurisprudence accorde une telle réduction supplémentaire lorsque l’assuré présente des limitations même dans le cadre d’une activité légère d’auxiliaire. Si au contraire une activité légère ou de difficulté moyenne est exigible, une réduction du revenu avec invalidité n’est en soi pas justifiée, parce que le salaire moyen retenu par les statistiques au niveau 4 tient compte déjà d’un grand nombre d’activités légères ou de difficulté moyenne. La nécessité d’une attention particulière de la part de l’employeur et des collègues de travail en raison d’une pathologie psychiatrique n’est pour l’instant pas reconnue comme une circonstance justifiant à elle seule une telle réduction (c. 4.2.2).

ATF 138 V 281 (d)

2012-2013

Art. 21 al. 5 LPGA

La ratio legis de l’art. 21 al. 5 LPGA commande que le versement d’une rente AI ne soit suspendu que durant la période pendant laquelle la peine est effectivement purgée. Dès lors, si le début de l’exécution de peine est reporté, le versement de la rente doit être maintenu jusqu’au moment de l’entrée en détention.

ATF 138 V 298 (f)

2012-2013

Art. 24 al. 1 et 53 al. 2 LPGA (en lien avec les art. 22 et 25 OPC-AVS/AI)

Depuis l’entrée en vigueur de l’art. 24 al.1 LPGA, la règle selon laquelle il n’est pas possible de verser des prestations complémentaires à titre rétroactif en cas de nouveau calcul des prestations complémentaires (ATF 122 V 19) ne peut être maintenue. Une dérogation à la règle générale pourrait être prévue par voie d’ordonnance, mais la seule dérogation prévue à ce jour (art. 22 al. 3 OPC-AVS/AI) ne s’applique pas dans le cas d’espèce.

ATF 138 V 457 (d)

2012-2013

Art. 16 LPGA

Le moment déterminant pour juger de l’exigibilité de la mise en valeur d’une capacité de travail résiduelle par un assuré proche de l’âge de la
retraite est celui auquel on dispose d’une évaluation médicale fiable permettant de conclure à l’existence d’une capacité résiduelle (cas échéant
partielle).

ATF 139 II 1 (f)

2012-2013

Art. 6 al. 2 et 9 al. 3 LAI (en lien avec les art. 59 LASi et 2 al. 2 ARéf)

Depuis l’adoption de l’art. 59 LASi, la définition autonome de la notion de réfugié donnée par le TFA n’a plus cours (cf. ATF 115 V 4 consid. 2a). Un réfugié admis provisoirement peut donc également se prévaloir de l’art. 2 al. 2 ARéf, et bénéficier de mesures médicales s’il a son domicile et sa résidence habituelle en Suisse.

ATF 139 V 1 (d)

2012-2013

Art. 25 LPGA

Le remboursement de prestations complémentaires versées à tort ne peut être réclamé aux héritiers légaux qui ont été exclus de la succession.
Peu importe qu’ils n’aient pas été exhérédés au sens de l’art. 477 CC et qu’ils n’aient pas contesté la lésion de leur part réservataire.

ATF 139 V 106 (d)

2012-2013

Art. 25 al. 2 LPGA, 29 Cst.

Le droit de l’assureur social de réclamer la restitution de prestations versées à tort se périme par un an à compter du moment où il a eu connaissance de sa créance. Lorsque l’assureur social reçoit d’un autre assureur une information permettant de conclure sans autre au caractère
injustifié du versement de prestations, le délai de péremption court depuis le jour de la réception de l’information correspondante. Le dies a quo ne peut être reporté à plus tard que si des investigations complémentaires sont nécessaires (consid. 7).

ATF 139 V 108 (d)

2012-2013

Art. 69 al. 2 LPGA

Lors d’un calcul de surindemnisation au sens de l’art. 69 al. 2 LPGA, il y a lieu de tenir compte des frais d’avocat supportés par l’assuré.
La notion de « frais supplémentaires » au sens de cette disposition doit être interprétée largement (interprétation téléologique, cf. consid. 5.4 ;
interprétation systématique, cf. consid. 5.5). Il ne peut toutefois s’agir que des frais d’avocat en lien direct avec le cas d’assurance sociale. Les frais d’avocat pour une procédure civile contre un tiers responsable n’ont, eux, pas à être pris en compte. En outre, les frais d’avocat ne doivent être pris en compte que dans la mesure où ils étaient nécessaires, soit dans la mesure où ils excèdent le cours ordinaire des choses (« ausserhalb des üblicherweise zu erwartenden Vorgehens », consid. 6). Le TF laisse la question ouverte de savoir s’il y a lieu de prendre en considération l’intervention d’une assurance de protection juridique.

ATF 139 V 170 (d)

2012-2013

Art. 58 al. 1 LPGA

Le tribunal compétent en matière d’assurances sociales est celui du domicile de l’assuré ou d’une autre partie au moment du dépôt du recours. Lorsqu’un tiers jouit d’un droit de recours propre, bien qu’il n’ait pas un droit direct aux prestations d’assurances, ce n’est pas son domicile,
mais celui de l’assuré, qui est déterminant pour fixer le for. Il en est ainsi lorsqu’un enfant recourt contre le calcul du droit aux prestations
complémentaires de son parent invalide (cf. ATF 138 V 392). Le for est au domicile de ce dernier.

ATF 139 V 492

2012-2013

Art. 47 LPGA; art. 8 ss RPGA

L’assuré a la légitimation pour recourir contre une décision de l’assureur qui refuse de transmettre à son avocat une photocopie de son dossier, parce que si l’avocat doit faire lui-même les copies, il les lui facturera (c. 2).

La décision de l’assureur portant sur les modalités de la consultation de son dossier par l’assuré, respectivement par son avocat, est une décision incidente, même si la consultation du dossier est en principe possible en dehors de tout contentieux. Dès lors que cette décision n’aura pas d’incidence sur le contenu matériel de la décision, l’application de l’art. 46 al. 2 PA est exclue. Il n’y a pas non plus lieu d’admettre une exception à la condition du préjudice irréparable au sens de l’art. 93 LTF, dès lors que le droit d’être entendu de l’assuré n’est pas touché dans sa substance. S’agissant d’une question touchant à l’efficacité de l’activité administrative, tout au plus pouvait-on envisager une dénonciation au sens de l’art. 71 PA.

 

ATF 139 V 6 (d)

2012-2013

Art. 25 al. 2 LPGA

Lorsqu’une caisse de compensation, à l’occasion de la perception de cotisations auprès d’un assuré, apprend un fait susceptible de modifier le droit à des prestations courantes (en l’espèce la suppression d’une rente de veuf), elle doit se laisser imputer la connaissance de ce fait eu égard au délai de péremption d’une année prévu par l’art. 25 al. 2 LPGA.

ATF 139 V 82 (d)

2012-2013

žArt. 26 al. 2 LPGA

L’art. 26 al. 2 LPGA n’est pas une base légale suffisante pour contraindre l’assureur à verser des intérêts moratoires au fournisseur de prestations en cas de retard de paiement. Une base légale dans la convention tarifaire est en règle générale nécessaire.

TF 8C_115/2013

2012-2013

Art. 30 al. 1 Cst; art. 36 al. 3 aLAI

En présence d’un tribunal composé d’un magistrat de siège et de deux assesseurs laïcs, le fait que ces deux derniers aient travaillé ensemble au sein du même hôpital durant de nombreuses années et aient pu développer des liens d’amitié ne permet pas de conclure d’emblée à leur partialité et ne justifie pas leur récusation (c. 2. Pour un commentaire sur cette question, cliquer ici).

Le supplément de carrière prévu par l’ancien art. 36 al. 3 LAI pour les personnes dont l’invalidité survenait avant la 45ème année a été abrogé au 1er janvier 2008, à l’occasion de l’entrée en vigueur de la 5ème révision de l’AI. En l’espèce, le droit à la rente prenant naissance au plus tôt en février 2008, il doit être calculé en application du nouveau droit, de sorte que l’assurée ne peut plus se prévaloir de ce supplément (c. 4).

Le calcul de surindemnisation établi par l’assureur LCA qui a versé des indemnités journalières en attendant que la rente AI soit versée ne peut être attaqué dans le cadre du recours en matière de droit public, mais doit faire l’objet d’une procédure ad hoc, de nature civile, contre l’assureur concerné (c. 5).

 

TF 8C_141/2012

2012-2013

 Art. 97 al. 2 et 105 al. 3 LTF; art. 17, 25 al. 1, 31 al. 1 et 53 al. 2 LPGA

En matière de prestations en espèce de l’assurance militaire ou de l’assurance-accidents, le Tribunal fédéral n’est pas lié par l’état de fait constaté par la juridiction précédente (art. 97 al. 2 et 105 al. 3 LTF). La restitution de telles prestations indûment perçues tombe également dans le champ d’application de la règlementation d’exception.

La prise d’une activité lucrative par le bénéficiaire d’une rente d’invalidité de l’assurance-accidents constitue, dans une perspective révisionnelle, une modification notable de sa situation économique (art. 17 LPGA). Le revenu nouvellement réalisé doit être pris en compte dans la détermination du degré d’invalidité en tant que revenu d’invalide.

Le fait de taire une prise d’emploi et de ne la communiquer qu’en cours de procédure, alors qu’elle remonte à plus de six mois, constitue une violation de l’obligation d’annoncer en vertu de l’art. 31 LPGA, qui entraîne l’obligation de restitution (art. 25 al. 1 LPGA).

L’assuré ne peut opposer à la restitution de prestations indûment perçues une créance en complément de rente en sa faveur découlant d’un calcul prétendument erroné du revenu de valide. En effet, il n’existe aucun droit à la reconsidération d’une décision d’octroi de prestations (art. 53 al. 2 LPGA; ATF 133 V 50 c. 4.1).

TF 8C_191/2013

2012-2013

Art. 43 LPGA

Conformément à la jurisprudence du TF (notamment l’arrêt 8C_192/2013, c. 3.2), il est permis de procéder à l’observation d’un assuré par un détective privé et de filmer la personne dans sa sphère privée visible (par ex. balcon) dans la mesure où cela paraît objectivement utile et reste raisonnable au niveau de la durée et du contenu.

L’assurance peut ensuite demander rétroactivement le remboursement des prestations indûment perçues par l’assuré, dans la mesure où celui-ci avait un devoir d’information.

 

TF 8C_310/2013

2012-2013

Art. 17 al. 1 et 25 al. 1 LPGA

A l'occasion d'une révision, la SUVA constate l'inexistence de troubles psychiques chez un assuré. Le TF rappelle que, lors d'une révision, on doit comparer la situation existant au moment où la décision de prestations initiale a été rendue à celle prévalant au moment où la décision sur opposition a été établie (c. 3). Il admet en outre que l'administration puisse se fonder à la fois sur des rapports issus d'une surveillance de l'assuré et sur le rapport convaincant d'un psychiatre du SMR (c. 4). Finalement, le TF admet que la décision ait un effet rétroactif remontant au début de la procédure de révision et que le remboursement des prestations indues soit exigé, car l'assuré a feint un mauvais état de santé psychique (cons. 6).

 

TF 8C_338/2013

2012-2013

Art. 59 LPGA ; art. 66 al. 1 RAI

En matière d’assurances sociales, la qualité pour recourir suppose que la personne concernée soit touchée par la décision ou la décision sur opposition et ait un intérêt digne d'être protégé à ce qu'elle soit annulée ou modifiée. Un tiers qui assiste régulièrement l’assuré ou prend soin de lui de manière permanente a le pouvoir de déposer en son nom une demande de prestations et, par conséquent, également de recourir contre une décision négative. Le recours interjeté par le père d’un assuré majeur mais incapable de gérer ses affaires est ainsi recevable, en vertu de son droit propre à demander des prestations, et bien qu’il n’ait pas produit à temps de procuration.

 

TF 8C_625/2012

2012-2013

Art. 17, 20, 25 al. 1 et 2, 47 LPGA; art. 35 al. 4 LAI ; art. 88bis al. 2 lit. b RAI

Révision de rente d’invalidité rétroactive suite à la violation de l’obligation d’informer du bénéficiaire de la rente d’invalidité. Décision de restitution notifiée aux enfants (majeurs) du bénéficiaire pour le montant des rentes pour enfant touchées à tort.

Le TF rappelle que la révision de la rente d’invalidité touche également les rentes accessoires, soit en l’espèce celles des deux enfants. Il rappelle également que ce sont les enfants (resp. leur représentant légal avant la majorité) qui ont l’obligation de restituer les rentes pour enfant perçues en trop suite à la décision de révision de rente du bénéficiaire principal. Cela vaut également pour le cas où ils ne sont pas responsables de la violation de l’obligation d’informer commise par celui-ci (c. 5.2).

Le TF rappelle aussi (c. 6.1) que les délais de l’art. 25 al. 2 LPGA sont des délais de péremption et que la communication du préavis (« Vorbescheid ») suffit pour sauvegarder le délai (ATF 133 V 579).

Enfin, le TF relève que l’OAI a violé l’art. 47 LPGA en refusant aux recourantes (enfants majeurs) de consulter tout dossier en invoquant la protection des données (c. 6.2 ; vice réparé selon le TF en instance cantonale).

 

TF 9C_180/2013

2012-2013

Art. 36 et 43 LPGA; art. 10 al. 1 PA

Le TF rappelle qu’un expert passe pour prévenu lorsqu’il existe des circonstances propres à faire naître un doute sur son impartialité. Il suffit que les circonstances donnent l’apparence de la prévention et fassent redouter une activité partiale de l’expert. L’appréciation des circonstances ne peut reposer sur de simples impressions de l’assuré, mais doit se fonder sur des éléments objectifs. Si l’expert est déjà intervenu dans la procédure, à quelque titre que ce soit, il ne donne l’impression d’être prévenu que s’il a pris position au sujet de certaines questions de manière qu’il ne semble plus exempt de préjugés (c. 2.2).

En l’espèce, le fait que l’expert soit intervenu dans le cadre d’une expertise mandatée par l’assureur LAA et que son expertise ait été critiquée par le TF, qui avait estimé qu’elle ne revêtait pas de caractère probant, ne l’empêche pas d’être désigné par la suite dans le cadre de la procédure AI. Cette situation ne peut justifier sa récusation pour des motifs d’ordre formel (prévention), mais peut au mieux fonder des griefs de nature matérielle à l’encontre de la décision au fond.

Commentaire
Cet arrêt du TF confirme une jurisprudence de plus en plus tranchée depuis l’adoption de l’ATF 137 V 210. La prévention d’un expert est ainsi désormais pratiquement impossible à établir, le lien économique entre lui et l’assureur social n’étant pas une critique recevable, pas plus que le fait que l’expert soit déjà intervenu au préalable. En l’espèce, si l’on comprend cet arrêt dans le contexte de cette jurisprudence, on doute de l’opportunité du résultat. Lorsqu’un expert s’est penché une première fois sur le dossier et a fourni un travail à ce point insuffisant que le TF a refusé de conférer à son expertise toute valeur probante, on peut valablement douter de la capacité de l’expert à se replonger dans l’affaire avec un œil neuf et tenir compte des critiques émises par le TF. Il y a donc tout lieu de penser que l’expert ne se contredira pas lui-même et reprendra la ligne adoptée précédemment. Le rapport qu’il rendra ne pourra donc que susciter la méfiance, y compris des magistrats, de sorte qu’une expertise judiciaire devrait ensuite être ordonnée dans le cadre de la procédure de recours. Si la situation de l’assuré est jugée sur la base de l’avis de cet expert et si la décision lui est défavorable, il restera convaincu, même si les juges confirment l’expertise, d’avoir été victime d’une sorte de machination. La confiance du justiciable en l’intégrité du système judiciaire auquel il est soumis aurait sans doute mérité, dans cette affaire, que la récusation de l’expert soit validée.

TF 9C_293/2013

2012-2013

Art. 58 al. 1 LPGA ; art. 23 ss CC

Pour contester une décision sur opposition d’un assureur, le tribunal des assurances compétent est celui du canton de domicile de l’assuré ou d’une autre partie au moment du dépôt du recours (art. 58 al. 1 LPGA).

Le domicile d’une personne se détermine selon les art. 23 ss CC.

Pour savoir si une personne réside dans un lieu avec l’intention de s’y établir, ce qui importe n’est pas la volonté interne de cette personne, mais les circonstances reconnaissables pour des tiers, qui permettent de déduire une telle intention (5A_733/2012 c. 2.1).

En l’espèce, l’assuré s’était annoncé dans une commune du canton de St-Gall. Aussi, il était reconnaissable pour un tiers qu’il souhaitait se (ré)installer dans ce canton. De plus, il avait régulièrement des contacts avec des autorités du canton de St-Gall, quand bien même il avait déposé auprès du Service des migrations du canton de Thurgovie une demande de changement de canton concernant son autorisation de séjour.

Le Tribunal cantonal des assurances du canton de St-Gall est donc compétent pour statuer sur le recours formé par l’assuré contre la décision de l’assureur-maladie lui refusant la prise en charge de prestations aux Philippines.

TF 9C_457/2013

2012-2013

Art. 8 al.3 LPGA

Lorsque l’autorité de recours statue par une décision de renvoi, l’autorité à laquelle la cause est renvoyée, de même que celle qui a rendu la décision sur recours, sont tenues de se conformer aux instructions du jugement de renvoi. L’autorité inférieure voit ainsi sa latitude de jugement limitée par les motifs du jugement de renvoi en ce sens qu’elle est liée par ce qui a déjà été définitivement tranché par l’autorité de recours. S’agissant en outre de la question du statut dans le cadre de l’évaluation de l’invalidité, celle-ci doit en pratique être tranchée sur la base de l’évolution de la situation jusqu’au prononcé de la décision administrative litigieuse. Enfin, le fait de recourir aux services d’un traducteur dans le cadre d’une expertise médicale ne constitue pas une violation du droit fédéral, quand bien même il serait préférable qu’expert et assuré puissent s’exprimer dans la même langue.

 

TF 9C_525/2013*

2012-2013

Art. 38 al. 4 lit. a et 60 al. 2 LPGA

Les féries de Pâques courent du 7ème jour avant Pâques au 7ème jour après Pâques inclusivement. Selon la compréhension générale, la mention de la fête de Pâques fait référence exclusivement au dimanche de Pâques, et non au lundi, encore moins à la période allant de Vendredi Saint au lundi de Pâques.

TF 9C_680/2013

2012-2013

Art. 6 § 1 CEDH

Les garanties procédurales offertes par l’art. 6 § 1 CEDH comprennent notamment le droit à des débats publics pour quiconque en fait la demande. Si des débats oraux sont expressément requis, le tribunal ne peut renoncer à les ordonner que s’il paraît suffisamment clair que le recours est manifestement mal fondé ou irrecevable. Cette condition doit être interprétée de manière restrictive, dès lors qu’il s’agit de juger à l’avance de questions qui, précisément, devraient faire l’objet des débats requis. Cela étant, on peut envisager différentes situations dans lesquelles il apparaît d’emblée que le moyen est dénué de toutes chances de succès. Le TF mentionne des prétentions qui ne sont pas prévue par la loi, des arguments qui ne se rapportent manifestement pas au cas d’espèce, des développements juridiques manifestement contraires à sa pratique constante, ou encore le recours abusif ou téméraire (c. 2.3)

 

TF 9C_692/2013

2012-2013

Art. 37 al. 4 LPGA; lit. a al. 1 et 4 Disp. Fin. révision 6A LAI du 18 mars 2011

Dans le contexte d’une révision du droit à la rente sous l’angle de la lit. a de la Disposition finale introduite par la révision 6A de la LAI, le TF a confirmé l’octroi à l’assuré de l’assistance judiciaire gratuite pour le complément d’instruction ordonné par l’Office AI après que la cause lui avait été renvoyée par le tribunal cantonal.

Le TF rappelle que la seule mise en œuvre d’une expertise par l’assureur social ne justifie pas en soi l’octroi de l’assistance judiciaire gratuite en procédure administrative. En l’espèce, le fait que l’assuré avait été assisté d’un conseil professionnel pour la procédure cantonale a été retenu comme critère d’appréciation, de même que le fait qu’il n’existait pas encore de jurisprudence établie au sujet de l’application de la disposition finale introduite par la révision 6A de la LAI. Le contexte des SPECDO, en particulier l’application des critères de Foerster, implique en règle générale des complexes de fait qui justifie le recours à l’assistance d’un conseil professionnel.

 

TF 9C_777/2013

2012-2013

art. 52 al.1 LPGA

Le juge appelé à connaître de la légalité d’une décision rendue par les organes de l’assurance sociale doit apprécier l’état de fait déterminant existant au moment où la décision sur opposition litigieuse a été rendue. On ne saurait toutefois déduire de ce principe que l’organe d’exécution du régime des prestations complémentaires est en droit de prendre en considération tous les faits survenus entre sa décision initiale et la décision sur opposition qui la remplace. Il ne peut en tenir compte que dans la mesure où ces faits ont trait aux rapports juridiques sur lesquels il s’est initialement prononcé et sont susceptibles de modifier ceux-ci.

En outre, l’organe chargé de l’exécution du régime des prestations complémentaires est tenu de soumettre aux administrés concernés des calculs non seulement clairs et compréhensibles, mais qui correspondent également au dossier de la procédure.

TF 9C_86/2013

2012-2013

Art. 17 al. 1 et 53 LPGA

Reconsidération d’une décision initiale d’octroi d’une rente entière d’invalidité et d’une allocation pour impotent de degré faible de l’Office AI.

Après réexamen des circonstances de l’événement à la base de l’octroi de la rente d’invalidité (état de stress post-traumatique faisant suite à la survenance d’un incendie survenu dans l’appartement familial), l’Office AI a constaté que les événements relatés par l’assuré se seraient révélés mensongers, l’important incendie invoqué s’étant en réalité avéré n’être qu’un cas bagatelle d’incendie rapidement maîtrisé, sans qu’il n’y ait eu de blessés ni d’importants dégâts matériels. Partant, l’octroi d’une rente entière d’invalidité et d’une allocation pour impotent de degré faible aurait été admis, selon l’Office AI, sur la base d’éléments erronés.

Le TF a toutefois nié que l’on se trouvait dans un cas de reconsidération susceptible de conduire à une suppression pure et simple des prestations allouées, dès lors que la décision initiale s’était fondée sur une expertise médicale pluridisciplinaire. Il a également précisé que rien ne permettait de mettre en doute la version relatée par l’assuré qui s’était trouvé en état de choc après avoir appris le début de l’incendie, ainsi que la phase d’incertitude qui s’en est suivi, en particulier au sujet du sort de l’un de ses enfants. Partant la condition du caractère manifestement erroné de la décision initiale n’est en l’occurrence pas remplie.

Le TF a en outre constaté qu’aucune mesure d’instruction n’avait été entreprise en vue de déterminer si l’on se trouvait en présence d’un motif de révision de rente au sens de l’art. 17 al. 1 LPGA.

TF 9C_863/2013

2012-2013

Art. 37 al. 1 et 3, 49 al. 3 in fine et 60 al. 1 LPGA

La notification irrégulière d'une décision ne doit entraîner aucun préjudice pour l'intéressé (art. 49 al. 3 dernière phrase LPGA). Tant que la partie ne révoque pas la procuration, l'assureur adresse ses communications au mandataire (art. 37 al. 3 LPGA). Pour déterminer si la notification d'une décision est irrégulière, il convient d'examiner si la garantie juridique voulue par le législateur a atteint son but et si l'assuré a été effectivement et concrètement induit en erreur et désavantagé en raison de l'irrégularité de la notification en application du principe de la bonne foi en procédure. En l'espèce, le mandataire de l'assuré, la ligue pulmonaire, a formulé des observations à l'encontre d'un projet de décision de refus de rente du 2 novembre 2012. La ligue pulmonaire avait fait état d'une procuration lui permettant de consulter le dossier et d'assister l'assuré depuis le 12 janvier 2010. La ligue avait demandé et obtenu une prolongation exceptionnelle du délai pour observation. Or, la décision confirmant le refus de rente du 31 janvier 2013 a été adressée, sous pli recommandé, directement à l'assuré avec une copie pour information à la ligue pulmonaire, laquelle n'a été notifiée que 4 jours plus tard.

En invoquant le principe de la confiance ainsi que les nombreux échanges intervenus entre le mandataire de l'assuré et l'Office AI, le TF a considéré que l'Office AI aurait dû notifier la décision à la ligue pulmonaire en sa qualité de représentant de l'assuré afin d'éviter des incertitudes à propos du début du délai de recours. Ainsi, le TF a considéré que le délai de recours avait commencé à courir le lendemain de la réception de la copie de la décision par la ligue pulmonaire et il a annulé le jugement d'irrecevabilité du Tribunal cantonal en lui renvoyant la cause afin qu'il entre en matière sur le recours formulé à temps.

 

TF 9C_912/2012

2012-2013

Art. 61 let. c LPGA

Les dettes portant sur le paiement de primes LAMal et de frais de participation aux coûts des prestations sont portables et doivent être payées au domicile du créancier. Un mode de paiement particulier – tel que le versement sur un compte de chèques postal – peut être proposé par le créancier, mais le paiement ne sera parfait qu’à partir du moment où l’office postal inscrit le montant sur le compte du destinataire et lui remet le coupon du bulletin de versement (cf. ATF 124 III 112 c. 2a). L’assuré doit assumer le risque que l’argent soit perdu entre l’ordre de paiement à La Poste Suisse et l’exécution de cet ordre et son inscription sur le compte de l’assureur, peu importe qu’il soit en possession d’un récépissé postal authentique.

La procédure devant le tribunal compétent en matière d’assurances sociales est régie par le principe inquisitoire qui impose au juge d’établir les faits déterminants pour la résolution du litige, d’administrer les preuves et de les apprécier. Ce principe n’est pas absolu et sa portée peut être restreinte par l’obligation des parties de collaborer à l’instruction de l’affaire (cf. art. 61 let. c LPGA, cf. aussi ATF 125 V 193). La partie qui veut déduire un droit de faits n’ayant pas pu être prouvés ne supporte toutefois le fardeau de la preuve que s’il n’était pas possible d’établir dans les limites du principe inquisitoire un état de fait correspondant au degré de la vraisemblance prépondérante (cf. ATF 138 V 218).

En l’occurrence, la juridiction cantonale s’est contentée d’opposer au récépissé postal produit par l’assuré de simples allégations pour prononcer la mainlevée des oppositions, sans avoir procédé auprès de l’assureur ou de La Poste Suisse à la moindre vérification ou enquête susceptible d’établir au degré de vraisemblance requis la comptabilisation – ou non – des primes sur le compte de l’assureur. Il appartenait au moins aux premiers juges d’interpeller La Poste Suisse pour connaître le résultat des recherches entreprises et de requérir de l’assureur qu’il produise un extrait de compte sur lequel le montant des primes était censé avoir été versé, pour le jour du versement et le lendemain, sous peine de violer le droit fédéral.

TF 9C_917/2012

2012-2013

Art. 8 LPGA

Le TF confirme la jurisprudence publiée aux ATF 137 V 64 et 130 V 352 concernant le caractère invalidant d’un trouble de la santé, notamment en présence d’un trouble dépressif de moyenne importance en concours avec des troubles somatoformes douloureux. Même si l’effet invalidant d’un trouble dépressif moyennement grave ne peut être d’emblée exclu, il faut cependant qu’il ne s’agisse pas seulement d’un symptôme concomitant d’une maladie somatoforme, mais bien plus d’un trouble dépressif indépendant du trouble psychogène douloureux (9C_210/2012). Par ailleurs, il faut suivre de manière conséquente une thérapie contre la dépression qui fait apparaitre – en cas d’échec – son caractère résistant. Si tel n’est pas le cas, il y a lieu de ne pas reconnaitre d’effet invalidant du trouble de la santé.

Des circonstances psychosociales peuvent expliquer médicalement un diagnostic de  dépression moyennement grave, mais non justifier juridiquement une invalidité. Des troubles dépressifs légers, voire moyennement graves, peuvent être traités.

TF 9C_921/2013

2012-2013

Art. 45 al. 1 LPGA; art. 78 al. 3 RAI

Selon l’art. 45 al. 1 LPGA, les frais de l'instruction de la demande sont pris en charge par l'assureur qui a ordonné les mesures. A défaut, l'assureur rembourse les frais occasionnés par les mesures indispensables à l'appréciation du cas ou comprises dans les prestations accordées ultérieurement. Les mesures d’instruction sont prises en charge par l’assurance quand elles ont été ordonnées par l’office AI ou, à défaut, en tant qu’elles étaient indispensables à l’octroi de prestations ou faisaient partie intégrante de mesures de réadaptation octroyées après coup (art. 78 al. 3 RAI). Dans le cas d’espèce, l’office AI, suivi par les premiers juges, refusait de rembourser à l’assureur-maladie les prestations que celui-ci avait servies (pour traiter une insuffisance hypophysaire avec un déficit de l'hormone de croissance) au motif que, selon les art. 45 al. 1 LPGA et 78 al. 3 RAI, l’assureur à qui il incombait de faire des investigations devait en payer les coûts. Or, le cas n’ayant été annoncé à l’assurance-invalidité que le 30 novembre 2011, il n’incombait pas à celle-ci d’honorer des investigations antérieures à cette date. L’assureur-maladie a recouru au TF, soutenant que les investigations faites avant le 30 novembre 2011 avaient conduit au diagnostic d’une infirmité congénitale, laquelle devait être prise en charge par l’assurance-invalidité. Ces investigations étaient par conséquent indispensables au sens de l’art. 78 al. 3 RAI. Pour le TF, l’art. 45 al. 1 LPGA (resp. l’art. 78 al. 3 RAI) contient une réglementation claire justement pour le cas où un assureur n’a pas ordonné de mesures : il lui incombe néanmoins d’en supporter les coûts, si, notamment, ces mesures étaient indispensables. Il n’existe pas de limite temporelle selon laquelle l’assureur ne devrait prendre en charge que les frais d’investigations menées après l’annonce de la demande de prestations. Cela n’implique cependant pas que l’assurance-invalidité doive toujours assumer les frais engendrés par des investigations coûteuses avant le dépôt d’une demande de prestations AI. Elle n’y est tenue que si les investigations étaient indispensables pour l'octroi des prestations ou qu’elles font partie intégrante de mesures de réadaptation octroyées après coup. Dans le cas d’espèce, les investigations menées étaient indispensables pour l’octroi des prestations en vue du traitement de l’infirmité congénitale, dès lors que l’office AI aurait dû de toute façon les ordonner après l’annonce de la demande des prestations. Il doit donc les prendre en charge.

TF 8C_192/2013

2012-2013

Art. 17 al. 1, 25 al. 1 et 31 al. 1 LPGA ; art. 107 al. 1 LTF

A l'occasion d'une révision, la SUVA constate que les atteintes à l'épaule droite d'un assuré droitier se sont amoindries, de sorte que la rente est réduite en conséquence.

Le TF rappelle la jurisprudence publiée aux ATF 137 I 327 c. 5, selon laquelle un rapport de détective privé peut porter sur l'observation d'un domaine privé librement visible par chacun, par exemple un jardin ou un balcon (c. 3.2 et 3.3). En l'espèce, le TF estime qu'il est correct d'utiliser un rapport de détective qui démontre que l'assuré est capable d'effectuer de nombreuses manipulations dans son jardin. Cela est d'autant plus le cas qu'on l'a également surveillé en d'autres endroits, par exemple dans des supermarchés ou au volant de sa voiture, où il pouvait changer sans problème les vitesses avec la main droite. Au surplus, des constatations médicales pertinentes ont été apportées notamment eu égard à l'absence d'atrophie musculaire (c. 5 et 6).

Lorsque l'on établit le revenu d'invalide par le biais de la méthode statistique (ESS), on prend en considération un revenu brut correspondant à une valeur centrale (médiane), qui permet de corriger des valeurs extrêmes (revenus très bas ou très hauts). En principe, la valeur médiane est inférieure à la valeur moyenne. Ainsi, lorsque l'on établit le revenu d'invalide, on ne saurait calculer une moyenne entre les valeurs médianes de deux niveaux de qualification du TA1 (c. 7.2.2). En l'espèce, le TF estime que, au vu du bon niveau professionnel de l'assuré, on doit admettre un niveau de qualification no 3 (c. 7.3.2) et que le facteur de réduction n'est que de 5% eu égard à l'importance moindre de la limitation physique et à l'absence d'autres facteurs de réduction (c. 7.4).

Le TF arrive à la conclusion que le taux d'invalidité retenu par l'autorité précédente et l'administration est trop élevé. Toutefois, l'art. 107 al. 1 LTF prohibe la reformatio in pejus (c. 7.5). Enfin, comme l'assuré a violé son devoir d'avis relatif à l'amélioration de sa situation (art. 31 al. 1 LPGA), la modification de la rente peut avoir lieu avec effet rétroactif (c. 8).

 

TF 8C_207/2012 *

2012-2013

Art. 44 LPGA ; art. 92 LTF

Un recours dirigé contre un jugement incident cantonal qui se prononce sur des motifs de récusation formels soulevés par l’assuré à l’encontre de l’expert désigné par l’assureur est recevable, alors que le TF n’entre pas en matière sur les objections matérielles (rappel de jurisprudence : ATF 138 V 271 c. 1.1). Toutefois, lorsque, comme en l’espèce, le cas soulève des questions de principe, le TF entre en matière, de même que lorsque certains griefs pertinents n’ont pas été examinés par les juges cantonaux (c. 1).

L’expertise pluridisciplinaire doit être privilégiée. La mise en œuvre d’une expertise mono- ou bidisciplinaire ne se justifie que lorsqu’il est évident que la problématique médicale se limite à une seule ou à deux disciplines (c. 3.2). Les experts mandatés ne sont pas liés par les directives de l’assureur (ou du tribunal) s’agissant des disciplines concernées et peuvent les remettre en question (c. 3.3).

Les droits de participation reconnus à l’assuré par l’ATF 137 V 210 lors de la mise en œuvre d’expertises pluridisciplinaires sont également applicables aux expertises mono- et bidisciplinaires. En cas de désaccord, il y a lieu également de statuer par voie de décision incidente. L’assuré a en outre le droit de poser ses propres questions (c. 5.1).

L’attribution aléatoire du mandat d’expertise doit, dans l’hypothèse d’une expertise mono- ou bidisciplinaire, être dans la mesure du possible remplacée par un accord sur le choix de l’expert. Si cela s’avère impossible, une décision incidente est également incontournable (c. 5.2.2.3).

Les considérants de nature appellatoire de l’ATF 137 V 210, s’agissant notamment du contrôle de qualité de l’expertise, sont également transposables aux expertises mono- et bidisciplinaires, le TF avertissant les organes d’application de l’assurance sociale qu’il continuera de surveiller l’évolution de la pratique en matière d’expertises et qu’il se réserve de modifier sa jurisprudence (c. 5.5).

 

TF 8C_663/2013*

2012-2013

Art. 37 al. 4 LPGA; art. 93 LTF

Le jugement cantonal qui statue sur l’indemnité d’office octroyée au conseil au bénéfice de l’assistance judiciaire dans le cadre de la procédure administrative est un jugement incident. Un recours direct au TF n’est possible qu’à la condition d’un préjudice irréparable. Dès lors que le montant de l’indemnité d’office peut être attaqué en même temps que la décision finale, cette condition n’est pas remplie. Le recours au TF de l’avocate concernée est donc irrecevable.

 

TF 8C_69/2013 *

2012-2013

Art. 44 LPGA ; art. 93 LTF

S’agissant d’apprécier l’existence d’un dommage irréparable dans le cadre d’un recours contre une décision incidente portant sur la mise en œuvre d’une expertise, le TF rappelle tout d’abord qu’une expertise ne peut faire l’objet que d’un contrôle judiciaire restreint, compte tenu de la technicité de la matière, alors qu’elle revêt un caractère décisif pour déterminer le droit aux prestations (c. 4.2). La situation doit donc être rééquilibrée grâce aux garanties de procédure. Dans la mesure où il n’existe pas de droit à l’expertise judiciaire, les droits de participation de l’assuré doivent être effectifs au stade de l’expertise administrative déjà. Il n’est pas suffisant que ces droits ne puissent être exercés que plus tard, dans le cadre du contentieux administratif et judiciaire (c. 4.3).

Une expertise injustifiée (à laquelle l’assuré s’oppose) représente une atteinte considérable à l’intégrité physique et psychique. Cela justifie que la condition du dommage irréparable soit considérée comme remplie en procédure cantonale (c. 4.4), mais pas en procédure fédérale, puisque l’assuré peut toujours se plaindre du caractère injustifié de l’expertise avec la décision au fond (c. 4.5). Un jugement cantonal incident par lequel, en l’espèce, le TAF refuse d’entrer en matière sur un recours contre une décision de l’OAIE ordonnant, quant au principe, la mise en œuvre d’une expertise n’est donc pas susceptible d’un recours au TF, faute de préjudice irréparable (confirmation de l’ATF 138 V 271).

Commentaire
Etat de fait La situation à l’origine de cet arrêt est tout à fait banale : un assuré (de nationalité suisse, mais domicilié à l’étranger) s’est adressé à l’Office AI pour les assurés résidant à l’étranger (OAIE) en vue d’obtenir des prestations d’invalidité, notamment une rente. Par décision incidente, l’OAIE a ordonné la mise en œuvre d’une expertise pluridisciplinaire dont le mandat devait être attribué par le biais de la plate-forme SuisseMED@P. Le Tribunal administratif fédéral (TAF) a refusé d’entrer en matière sur le recours formé par l’assuré à l’encontre de cette décision. Ce dernier a recouru au Tribunal fédéral (TF), concluant à l’annulation du jugement cantonal et au traitement matériel de son recours. Le TF a à son tour refusé d’entrer en matière sur le recours fédéral. Commentaire Introduction La question du droit de l’assuré à la mise œuvre d’une expertise, en particulier à une expertise judiciaire neutre, a fait l’objet de débats nourris et a été réglée de manière claire dans un arrêt de principe. Depuis l’ATF 137 V 210, rendu le 28 juin 2011, la situation est la suivante : il n’existe pas de droit absolu à l’expertise pluridisciplinaire, ni en procédure administrative, ni en procédure judiciaire. Si l’instruction médicale ne permet pas de statuer valablement sur le droit aux prestations, c’est-à-dire s’il subsiste un doute, même faible, l’assureur doit mettre en œuvre une expertise. En cas de désaccord de l’assuré, soit sur le principe, soit sur les modalités de l’expertise, l’assureur doit rendre une décision incidente. Cette décision est directement attaquable devant le tribunal cantonal des assurances. Si ce dernier constate que l’assureur a refusé, à tort, de mettre en œuvre une expertise, le tribunal doit mettre en œuvre une expertise judiciaire (sauf exceptions, non déterminantes ici). Ces principes sont désormais aussi applicables lorsque l’assureur met en œuvre une expertise mono- ou bidisciplinaire (cf. TF 8C_207/2012). La situation dans laquelle l’assuré s’oppose, quant au principe, à la mise en œuvre d’une expertise que l’assureur entend mettre en œuvre n’a jusqu’ici pas fait l’objet de la même attention (les décisions faisant débat ont trait principalement à la désignation de l’expert). L’arrêt commenté pose quelques questions à ce sujet. Nous en examinons trois ici, sans prétention d’exhaustivité. 1.         Les voies de droit contre la mise en œuvre d’une expertise à laquelle l’assuré s’oppose Tout d’abord, le TF indique, dans un raisonnement un brin schizophrène, que la décision incidente ordonnant la mise en œuvre d’une expertise peut, quant à son principe, être attaquée par le biais d’un recours immédiat devant le tribunal cantonal des assurances, la décision étant de nature à causer à l’assuré un préjudice irréparable. En revanche, le recours fédéral n’est pas possible, faute, précisément de préjudice irréparable. Outre le fait que cette différenciation n’est pas propice à une application uniforme du droit, elle ne repose sur aucun critère objectif. La plupart des lois cantonales sur la procédure administrative reprennent en effet textuellement l’art. 93 LTF s’agissant de définir les conditions d’un recours contre une décision incidente (cf. art. 74 LPA-VD, 57 let. c LPA-GE, 120 al. 2 CPJA-FR. L’art. 27 al. 1 LPJA-NE parle de « grave préjudice »). La procédure administrative fédérale est identique (art. 46 PA). D’après la jurisprudence, le préjudice irréparable au sens de l’art. 93 al. 1 let. a LTF ne doit pas nécessairement être juridique. Il peut être économique dans la mesure où il ne s’agit pas simplement d’éviter l’allongement ou le renchérissement de la procédure (ATF 135 II 30). En l’espèce, le TF indique pourtant bien, dans l’arrêt commenté, que le préjudice irréparable consiste notamment dans l’atteinte importante à l’intégrité physique et/ou psychique subie par l’assuré expertisé. Il est évident que ce préjudice existe sous l’angle de la législation cantonale autant que sous l’angle de la législation fédérale, de même que son caractère irréparable. Le fait que l’assuré puisse, dans le cadre du recours au fond, contester l’inutilité de l’expertise, ne peut le prémunir d’une atteinte irréparable à son intégrité physique et/ou psychique, bien juridique absolument protégé par la Constitution. En matière d’assurances sociales, il est vrai que la loi postule l’obligation, à charge de l’assuré, de se soumettre aux examens médicaux nécessaires et raisonnablement exigibles (art. 43 al. 2 LPGA). Les mesures médicales mettant en danger la santé physique et/ou psychique de l’assuré sont réputées inexigibles (art. 21 al. 4 in fine LPGA). Même si, dans le cadre du recours contre la décision finale, il est finalement admis que l’expertise voulue par l’assureur était objectivement inutile, ou qu’elle n’était objectivement pas exigible, l’assuré aura, dans l’intervalle, dû subir une atteinte à son intégrité physique qui n’est plus réversible. Compte tenu de l’importance des intérêts en jeu, le recours au Tribunal fédéral doit donc être admis contre un jugement incident confirmant la mise en œuvre d’une expertise à laquelle l’assuré s’oppose.   2.         L’admissibilité de l’expertise réalisée sans droit Se pose ensuite la question du sort qui sera réservé à l’expertise réalisée sans le consentement de l’assuré, et dont il s’avère, dans le cadre du recours au fond, qu’elle était effectivement injustifiée, soit parce qu’elle n’était pas nécessaire, soit parce qu’elle n’était pas exigible. Cette expertise, réalisée en violation d’un bien absolument protégé, objet de garanties constitutionnelles, est une preuve recueillie illicitement. La question de savoir si elle peut être versée au dossier doit donc être tranchée en fonction des règles applicables à cette question : dans l’hypothèse où elle ne fait que confirmer des faits figurant d’ores et déjà au dossier, l’expertise devrait être reçue. Si, en revanche, elle contient des éléments nouveaux ou contredit des informations déjà recueillies, notamment par une précédente expertise, on examinera sa recevabilité à l’aune d’une pesée des intérêts entre, d’une part, l’intérêt privé de l’assuré à ne pas voir le contenu de l’expertise pris en considération dans le cadre de l’instruction de son dossier et, d’autre part, l’intérêt public de la collectivité à ne pas financer des prestations indues (pour un exposé détaillé, cf. Margit Moser-Szeless, La surveillance comme moyen de preuve en assurance sociale, RSAS 2013, p. 129). Dans le cadre d’arrêts assez récents (ATF 137 I 327 c. 5.3; ATF 135 I 169 c. 5.5), le TF a admis assez facilement le caractère prépondérant de l’intérêt public. On peut donc légitimement craindre que l’obligation de l’assuré de collaborer à l’établissement des faits (art. 28 al. 1 et 43 al. 3 LPGA) cimente définitivement l’impossibilité de l’assuré de se soustraire à une expertise, y compris lorsque l’assureur utilise la voie de la « second opinion » pour contrer des rapports médicaux trop favorable à l’assuré (même lorsqu’ils émanent de leurs propres services médicaux ou de leurs propres médecins-conseils).   3.         La valeur probante de l’expertise réalisée sans droit Si l’expertise réalisée est versée au dossier, se pose encore la question de la force probante qu’il convient de lui conférer. En matière d’assurances sociales, l’appréciation des avis médicaux fait depuis plusieurs années déjà l’objet d’une jurisprudence monolithique et plutôt imperméable (arrêt de principe : ATF 125 V 351) qui place au sommet de la hiérarchie l’expertise judiciaire, soit l’expertise mise en œuvre par un tribunal. Vient juste après, précisément, l’expertise commandée par l’assureur à un expert externe en application de l’art. 44 LPGA. Ces expertises se voient reconnaître une pleine valeur probante, à moins que des indices concrets ne mettent en doute sa fiabilité (ATF 137 V 210 c. 2.1-2.3). Loin derrière, vient l’avis du médecin-traitant de l’assuré qui ne peut, au mieux, que susciter ce doute. En bonne logique, si l’expertise illicite est versée au dossier, il n’y a pas lieu de lui créer une catégorie spéciale. Elle acquerra le rang d’expertise administrative, et se verra conférer une valeur probante proche de l’absolu. Les avis médicaux antérieurs, par hypothèse divergents, seront écartés s’ils sont de rang inférieur, et justifieront au mieux une expertise judiciaire neutre s’ils suscitent un doute dans l’esprit du juge, pour autant que l’assuré fasse recours contre la décision au fond en parvenant à mettre en avant les contradictions entre les avis médicaux. D’un point de vue purement pragmatique, cette solution est mauvaise, d’une part parce qu’elle rallonge une procédure déjà compliquée, participant ainsi à l’encombrement des tribunaux et aux risques d’une marginalisation définitive de l’assuré, d’autre part parce qu’elle contribue à l’augmentation des coûts du système (une expertise pluridisciplinaire coûte en moyenne Fr. 9'000.-), ce qui est au moins autant contraire à l’intérêt de la collectivité des assurés que le risque de payer des prestations indues. Conclusion L’arrêt commenté doit être lu en parallèle avec un arrêt 9C_471/2013 rendu le 17 juillet 2013. Dans une situation identique, l’autorité administrative avait, en ordonnant la mise en œuvre de l’expertise à laquelle l’assuré s’opposait, retiré tout effet suspensif à un éventuel recours, en application des art. 97 LAVS, 66 LAI et 55 al. 2 PA. La requête de restitution de l’effet suspensif formée par l’assuré dans le cadre du recours cantonal contre la décision a été rejetée par le juge cantonal. Le TF a déclaré irrecevable le recours de l’assuré (portant à ce stade sur la seule question de la restitution de l’effet suspensif), faute toujours de préjudice irréparable au sens de l’art. 93 LTF. Ce second arrêt est encore plus dangereux puisqu’il permet à l’assureur de mettre en œuvre l’expertise avant même que les juges cantonaux n’aient statué sur le recours de l’assuré. En d’autres termes, il est possible de court-circuiter tout simplement l’opposition de l’assuré, vraisemblablement sans préjudice aucun (pour l’assureur) de pouvoir ensuite se prévaloir des résultats de l’expertise. D’un point de vue dogmatique, il est incompréhensible que l’assuré ait moins de droits lorsqu’il s’oppose à une expertise que lorsqu’il la réclame. Une incursion médicale à laquelle l’assuré n’a pas consenti représente une violation de ses droits constitutionnels, qui n’est justifiée ni sous l’angle de l’intérêt public, ni sous l’angle de la proportionnalité. Le TF ne peut donc pas remettre à plus tard l’examen de la constitutionnalité de l’expertise voulue par l’administration, sauf à fouler au pied les principes les plus essentiels de l’Etat de droit. Anne-Sylvie Dupont Remarque : certains éléments de ce commentaire seront publiés dans le cadre de la contribution « Le droit de réplique en droit des assurances sociales », dans l’ouvrage consacré au Droit de réplique, édité par le Prof. François Bohnet à l’occasion de la journée de formation continue organisée par la Faculté de droit de Neuchâtel le 9 novembre 2013.

TF 8C_756/2012

2012-2013

Art. 93 al. 1 LTF; art. 53 al. 1 et 55 al. 1 LPGA ; art. 67 al. 1 PA

Une décision de renvoi à l’autorité inférieure pour nouvel examen est une décision incidente au sens de l’art. 93 LTF. En règle générale, une telle décision ne met pas fin à la procédure et n’est pas non plus de nature à causer un préjudice irréparable aux parties. Néanmoins, si le renvoi ne laisse aucune latitude de jugement à l’autorité inférieure appelée à statuer à nouveau et contient des instructions impératives, il est assimilé à une décision finale. Par ailleurs, lorsque l’autorité administrative à laquelle la cause est renvoyée dispose de la qualité pour recourir au Tribunal fédéral, elle doit pouvoir attaquer un arrêt de renvoi lui enjoignant de rendre une décision qu’elle juge contraire au droit ; à défaut, elle subirait un préjudice irréparable au sens de l’art. 93 al. 1 let. a LTF (cf. également TF 9C_168/2013).

En l’espèce, la caisse de chômage a recouru contre la décision du Tribunal cantonal lui demandant de rendre une nouvelle décision de sursis à la restitution de prestations litigieuses.

Un acte de défaut de bien, délivré après qu’une décision de restitution de prestations de l’assurance-chômage a été rendue, ne peut être invoqué comme nouveau moyen de preuve important constituant un motif de révision au sens de l’art. 53 al. 1 LPGA lorsqu’il est produit plus d’une année après sa délivrance. En effet, l’art. 57 al. 1 LPGA, en lien avec l’art. 67 al. 1 PA, prévoit un délai péremptoire de 90 jours dès la découverte du motif de révision pour déposer une demande écrite à l’autorité qui a rendu la décision.

 

TF 9C_475/2013

2012-2013

Art. 44 LPGA ; art. 93 al. 1 LTF

Lorsqu’un office AI ordonne la mise en œuvre d’une expertise mono- ou bidisciplinaire, il s’efforce de trouver un accord avec l’assuré s’agissant de l’expert à désigner (confirmation de l’arrêt 9C_207/2012). Les critiques de l’assuré à l’encontre du processus de désignation ne peuvent toutefois donner lieu à un recours au Tribunal fédéral, à moins qu’il ne soulève des motifs formels de récusation. Les inconvénients structurellement inhérents au système des COMAI ne représentent pas de tels motifs et ont été traités de manière exhaustive à l’ATF 137 V 210 (cf. également 9C_305/2013).

 

TF 9C_486/2013*

2012-2013

Art. 37 al. 4 LPGA; art. 93 LTF

Lorsque la décision de l’assureur social porte exclusivement sur la question de l’octroi de l’assistance judiciaire gratuite dans le cadre de la procédure administrative (art. 37 al. 4 LPGA), le recours dirigé contre cette décision donne lieu à un jugement qui doit être qualifié de jugement incident au sens de l’art. 93 LTF. En conséquence, un recours immédiat au TF n’est recevable que si la condition de la menace d’un préjudice irréparable est remplie. En revanche, si la décision de l’assureur social porte sur le droit aux prestations, mais que l’assuré limite son recours à la question de l’octroi de l’assistance judiciaire gratuite, soit que l’assureur ait fait droit à sa demande, soit que l’assuré n’entende par contester le refus, le jugement cantonal est un jugement final au sens de l’art. 90 LTF.

En l’espèce, il s’agit d’un jugement incident, et le recours est jugé irrecevable faute de préjudice irréparable, dès lors que la procédure administrative pour laquelle l'assistance juridique a été refusée est terminée et le mandataire du recourant a déjà fait son travail. Dans une telle situation, l'assuré ne court pas le risque de ne pas pouvoir faire valoir ses droits en raison du refus de l'assistance juridique. Il s'agit exclusivement de savoir qui réglera les honoraires de son avocat. Ce point pourra être résolu de manière définitive une fois qu'aura été rendue une décision sur le fond sur le droit aux prestations de l'assuré.

 

ATF 139 V 106

2012-2013

Art. 25 LPGA ; art. 29 Cst

Le droit de l’assureur social de réclamer la restitution de prestations versées à tort se périme par un an à compter du moment où il a eu connaissance de sa créance Lorsque l’assureur social (en l’espèce l’assureur-invalidité) reçoit d’un autre assureur une information permettant de conclure sans autres au caractère injustifié du versement de prestations, le délai de péremption court depuis le jour de la réception de l’information correspondante. Le dies a quo ne peut être reporté à plus tard que si des investigations complémentaires sont nécessaires (c. 7).

Sous l’angle du droit à un procès équitable, le TF a jugé que l’assureur aurait dû, avant d’exiger la restitution de prestations par voie de décision, communiquer à la personne concernée (en l’espèce l’ex-épouse de l’assuré, qui avait perçu directement les rentes pour leurs trois enfants durant une période pour laquelle le droit avait été supprimé) toutes les pièces lui permettant de juge du bien-fondé de la demande de restitution, ainsi que du départ du délai de péremption. La question de savoir si cette communication devait prendre la forme d’un préavis au sens de l’art. 57a LAI n’a pas été tranchée (c. 6).

TF 8C_996/2012

2012-2013

Art. 29 al. 3 Cst., 37 al. 4 LPGA, 61 lit. f LPGA, 93 al. 1 lit. a LTF

Examen de la question du droit à l’assistance d’un avocat dans le cadre d’une procédure de préavis suite à l’annonce d’une aggravation de l’état de santé.

Le TF rappelle que le droit à l’assistance par un avocat dans la procédure administrative de l’assurance sociale n’existe qu’exceptionnellement. Il estime que l’assurée n’avait pas besoin des services d’un avocat dans le cadre de la procédure de préavis ouverte suite à la nouvelle annonce avec simple production d’un rapport médical et qu’elle aurait pu se faire aider par une tierce personne spécialisée / de confiance ou par une institution sociale en lieu et place d’un avocat professionnel (c. 4).

Il est admissible de ne statuer sur la requête d’assistance judiciaire déposée dans le cadre de la procédure de recours devant le tribunal cantonal contre le refus d’assistance judiciaire par l’Office AI qu’avec la décision au fond (c. 3.2).

Dans la mesure où la décision du tribunal cantonal nie le droit à l’assistance gratuite d’un avocat, elle constitue une décision incidente pouvant causer un préjudice irréparable (c. 5).

TF 9C_716/2012

2012-2013

art. 8 al.3 ; 16 LPGA ; art. 28a al. 3 LAI ; art. 27bis RAI

Le TF rappelle que lorsque la méthode mixte d’évaluation de l’invalidité est applicable, l’invalidité des assurés pour la part qu’ils consacrent à leur activité lucrative doit être évaluée selon la méthode générale de comparaison des revenus (art. 28a al. 3 LAI en corrélation avec l’art. 16 LPGA) ; pour la part qu’ils consacrent à leurs travaux habituels au sens des art. 28a al. 2 LAI et 8 al. 3 LPGA, leur invalidité doit être évaluée selon la méthode spécifique d’évaluation de l’invalidité (art. 28a al. 3 LAI en corrélation avec l’art. 27bis RAI).

S’agissant plus spécifiquement de la prise en compte de l’empêchement dans le ménage dû à l’invalidité et de l’aide des membres de la famille, le TF confirme sa jurisprudence d’après laquelle l’assuré doit organiser son travail et demander l’aide de ses proches dans une mesure convenable s’il n’accomplit plus que difficilement ou avec un investissement temporel beaucoup plus important certains travaux ménagers en raison de son handicap.

Dans le cas particulier, le TF juge arbitraire d’admettre chez l’assurée un empêchement dans les « emplettes et courses diverses » pour le seul motif que nier tout empêchement dans ce domaine reviendrait à exiger du mari une aide disproportionnée dans la mesure où il participe déjà à d’autres tâches ménagère. Le TF ajoute à cet égard que la juridiction cantonale était mal fondée à s’écarter du rapport d’enquête économique sur le ménage qui tenait compte de l’aide du mari pour ce poste de manière conforme au droit fédéral.

En ce qui concerne le poste « lessive et entretien des vêtements », le TF juge également arbitraire d’augmenter de 20% à 50% le taux d’empêchement de l’assurée dès lors que celle-ci est censée planifier de la meilleure façon possible la lessive en demandant à son époux « qui exerce la profession de mécanicien et rentre à la maison pour le repas de midi, qu’il porte le linge, l’introduise dans la machine, l’en sorte et le porte à nouveau, qu’il monte la planche à repasser et qu’il range le nécessaire de repassage ».

TF 9C_9/2013

2012-2013

Art. 61 lit. c LPGA,  4 LAI, art. 28a LAI

Examen de la question de savoir si l’assuré, né en 1950 et mis au bénéfice d’une retraite anticipée à partir du 1er janvier 2012, doit être considéré comme une personne active ou non.

L’invalidité d’une personne active doit se déterminer au moyen d’une comparaison des revenus de valide et d’invalide, alors que dans le cas d’une personne sans activité lucrative, on procédera à un examen des empêchements dans le cadre des activités quotidiennes.

Dans le cas présent, il s’agit de se demander si les troubles à caractère invalidants, en l’occurrence des lésions cérébro-vasculaires survenues en janvier 2011, sont survenues avant le choix de l’assuré de prendre une retraite anticipée ou non.

En l’occurrence, le TF constate que sans la survenance des troubles invalidants, l’assuré aurait continué de travailler au-delà du 31 décembre 2011. La décision de l’assuré de prendre une retraite anticipée a en effet été motivée en raison de la survenance de son atteinte à la santé. Partant, la méthode de la comparaison ordinaire des revenus de valide et d’invalide doit lui être appliquée. Le recours de l’Office AI a été rejeté et l’allocation d’une rente entière d’invalidité, fondée sur un taux de 71%, confirmée par le TF.

TF 9C_979/2012

2012-2013

Art. 8 LPGA, art. 28 LAI

Le revenu sans invalidité se détermine en général d'après le dernier salaire que l'assuré a obtenu avant l'atteinte à la santé. En cas d'heures supplémentaires réalisées uniquement durant cette année-là, il y a lieu de considérer que l'on se trouve en face de fluctuations importantes à relativement court terme et de prendre en considération un revenu moyen réalisé pendant une période assez longue (ch. 3024 de la Circulaire (CIIAI) de l'OFAS, en l'espèce 5 ans.

ATF 138 V 218 (d)

2012-2013

Art. 25 al. 1 LPGA

La personne qui continue de percevoir une rente de veuf alors qu’elle s’est remariée et qu’elle n’a pas annoncé son remariage à la caisse de compensation ne peut prétendre être de bonne foi et, partant, bénéficier d’une remise. D’éventuelles confusions dans la gestion du dossier par la caisse de compensation n’y changent rien, et ne permettent pas à l’assuré de se prévaloir d’un renversement du fardeau de la preuve s’agissant de l’annonce du remariage. Toute personne au bénéfice d’une rente de veuf doit en effet se douter qu’un changement d’état civil peut entraîner une modification sous l’angle du droit aux prestations.

ATF 139 V 108

2012-2013

Art. 69 al. 2 LPGA

Lors d’un calcul de surindemnisation au sens de l’art. 69 al. 2 LPGA, il y a lieu de tenir compte des frais d’avocat supportés par l’assuré. La notion de « frais supplémentaires » au sens de cette disposition doit être interprétée largement (interprétation téléologique, cf. c. 5.4 ; interprétation systématique, cf. c. 5.5). Il ne peut toutefois s’agir que des frais d’avocat en lien direct avec le cas d’assurance sociale. Les frais d’avocat pour une procédure civile contre un tiers responsable n’ont, eux, pas à être pris en compte. En outre, les frais d’avocat ne doivent être pris en compte que dans la mesure où ils étaient nécessaires, soit dans la mesure où ils excèdent selon le cours ordinaire des choses (« ausserhalb des üblicherweise zu erwartenden Vorgehens », c. 6). Le TF laisse la question ouverte de savoir s’il y a lieu de prendre en considération l’intervention d’une assurance de protection juridique.

TF 8C_18/2013

2012-2013

Art. 17 LPGA, art. 53 LPGA, art. 55 LPGA

Révision du droit à la rente d’invalidité d’un assuré après que l’OAI a découvert sa participation régulière à des compétitions de parapente. Le TF confirme qu’il s’agit d’un fait « nouveau » justifiant l’application de l’art. 53 al. 1 LPGA (révision procédurale), à l’exclusion des art. 17 (révision de la rente comme prestation durable) et 53 al. 2 LPGA (reconsidération). Il s’agit également d’un fait « important »: la méconnaissance par les premiers experts de la participation régulière par l’assuré à des compétitions de parapente fait apparaître leur appréciation initiale de la capacité résiduelle de travail comme manifestement erronée (c. 3.1).

Le TF donne tort à l’instance cantonale qui rejette pourtant l’application de l’art. 53 al. 1 LPGA au motif que l’OAI n’aurait pas respecté le délai de 90 jours pour se prévaloir du motif de révision (art. 67 PA applicable par renvoi de l'art. 55 al. 1 LPGA). Il rappelle que si l’OAI peut déduire des faits ou moyens de preuve nouveaux uniquement des indices qu’un motif de révision procédurale pourrait entrer en considération, il se doit d’entreprendre toutes les mesures d’instruction nécessaires pour s’en assurer. Dans ce cas, le délai relatif de 90 jours commence à courir seulement dès le moment où l’instruction a permis de confirmer l’existence d’un motif révision, ou l’aurait permis si elle avait été menée avec toute la diligence requise (c. 3.2). Dans le cas d’espèce, le délai ne commençait donc pas à courir au moment où l’OAI a pris connaissance de la participation par l’assuré à des compétitions de parapente, cela ne constituant qu’un indice en faveur d’une éventuelle révision, mais dès le moment où, après avoir mené les investigations médicales nécessaires, il disposait de l’ensemble des rapports médicaux permettant d’en déterminer l’influence éventuelle sur l’évaluation de la capacité résiduelle de travail. A défaut, l’importance du fait « nouveau » n’eut été que pure spéculation. En outre, ce mode de faire garantit les droits de l’assuré à participer à la procédure de préavis dès lors qu’il peut prendre position sur les conclusions et conséquences juridiques résultant des investigations médicales (c. 3.2, 7.1 et 7.2).

TF 9C_52/2013

2012-2013

art. 17 LPGA ; art. 88a et art. 88bis al. 2 lit. b OAI

Il n’est pas arbitraire de retenir qu’une assurée qui, avant la survenance de la maladie, avait déjà augmenté son temps de travail après son divorce, pour des raisons financières et parce que les enfants n'avaient plus besoin de sa présence constante, aurait travaillé à 100% sans l’atteinte à la santé. En conséquence, l’invalidité doit être évaluée sur la base de la méthode ordinaire, d’autant plus qu’au moment de la survenance de la maladie, les enfants de l’assurée étaient adultes, et elle-même avait repris sa formation, interrompue à cause de l’atteinte à la santé.

TF 9C_937/2012

2012-2013

Art. 17 al. 1 LPGA ; 53 al. 2 LPGA

L’Office AI peut modifier une décision de rente lorsqu’elle est manifestement erronée et que sa rectification revêt une importance notable, même si les conditions de la révision de rente ne sont pas remplies.

Examen du cas lorsqu’une condition matérielle s’est modifiée, en particulier les aspects économiques à la base de la décision de rente à reconsidérer. Le TF analyse le cas d’espèce (comparaison des revenus de valide et d’invalide) et retient que la solution initiale ne convainc pas totalement et qu’une autre solution peut être envisagée.

Cela ne suffit cependant pas pour modifier la décision initiale. En effet, il n’existe alors pas de possibilité pour le juge d’entériner une décision de révision rendue à tort pour le motif substitué que la décision de rente initiale était sans nul doute erronée, pour autant que sa rectification revête une importance notable (ATF 125 V 368).

TF 9C_953/2012

2012-2013

Art. 17 al. 1 LPGA ; art. 53 al. 1 et 2 LPGA ; art. 61 lit. c LPGA

L’OAI a, dans le cadre d’une révision de rente, supprimé le droit à la rente d’invalidité d’un assuré, précédemment au bénéfice d’une rente entière ; l’OAI s’est fondé sur un rapport de détective (contenant des images vidéo) ainsi que sur une expertise psychiatrique administrative basée en partie sur ce rapport.

Acceptant partiellement le recours de l’OAI, le TF annule le jugement cantonal lucernois, qui avait scotomisé certains faits (constatation incomplète des faits) et en particulier les deux documents susmentionnés au bénéfice d’une expertise privée déposée par l’assuré, et renvoie la cause à l’instance cantonale en vue notamment de la mise en œuvre d’une expertise psychiatrique judiciaire ; le TF demande également que soit versé en la cause le dossier de la procédure d’asile de l’assuré.

Le TF rappelle que viole le principe de la libre appréciation des preuves (art. 61 let. c LPGA) le fait de ne pas tenir compte de certains faits (travail au noir, fraudes) ou de certains moyens de preuve (rapport de détective) qui invalident les faits admis trop facilement et sans nuance par l’expert privé (déclarations de l’assuré).

La Haute Cour met en doute l’ESPT (PTBS) totalement incapacitant retenu tant au début qu’à la fin de la période déterminante fixant le cadre de la révision.

Le TF demande enfin que l’affaire soit - en fonction des résultats de l’instruction complémentaire - réexaminée par la Cour cantonale non seulement sous l’angle de la révision de rente (art. 17 al. 1 LPGA), mais tant sous l’angle de la révision procédurale (art. 53 al. 1 LPGA) que sous celui de la reconsidération (art. 53 al. 2 LPGA).