Art. 179septies CP, Art. 180 CP
Concours. Dans cet arrêt, le TF répond pour la première fois à la question du concours entre les infractions de menace et d’utilisation abusive d’une installation de communication. Le tribunal note que les normes répriment des comportements différents, en protégeant des biens juridiques distincts. In casu, le potentiel de nuisances exigé par 179septies n’a pas été épuisé par les quelques menaces parmi la pléthore de messages envoyés. De ce fait, il retient le concours idéal parfait. Il n’exclut cependant pas que l’utilisation abusive de télécommunication puisse être absorbée par l’infraction de menace dans certains autres cas. Néanmoins, dans ces situations-là, un concours réel doit être retenu avec l’ensemble des communications abusives non menaçantes.
Marie Desaules, Naomie Victoire Jade Dieudonné, Debora Richoz-Martella
Art. 179bis CP, Art. 179ter CP
Enregistrement de conversations sans le consentement des autres interlocuteurs ; notion de conversation non publique ; modification de jurisprudence. Pour déterminer si une conversation est non publique au sens des art. 179bis et 179ter CP, il faut examiner dans quelle mesure elle pouvait et devait être entendue par des tiers au regard de l’ensemble des circonstances. La conversation n’est pas publique lorsque les participants s’entretiennent dans l’attente légitime que leurs propos ne soient pas accessibles à tout un chacun. Pour être qualifiée de « non publique » au sens des art. 179bis et 179ter CP, une conversation ne doit pas nécessairement se rapporter au domaine secret ou privé de ceux qui y prennent part ou intervenir dans un contexte de relations personnelles ou commerciales. En l’espèce, le prévenu a enregistré deux conversations téléphoniques avec un policier, sans l’en avertir. Le TF considère que le policer conserve le droit de pouvoir s’exprimer librement sans craindre que ses propos ne soient enregistrés à son insu et ce indépendamment du fait qu’il a agi dans le cadre de ses devoirs de fonction. L’infraction est donc réalisée en l’espèce.
Allison Beretta
Art. 173 et 98 let. a CP.
A la suite d’une condamnation pour diffamation suite à un post sur un blog, le Tribunal fédéral refuse le recours du ministère public et maintient sa jurisprudence concernant la prescription applicable à la diffamation. Le dies a quo en la matière reste ainsi le jour de publication et n’est pas différent s’agissant d’une publication sur papier ou sur internet.
Lucien Colliander
Art. 179bis et 179ter CP ; 10 CEDH.
Condamnation à des peines pécuniaires de quatre journalistes ayant enregistré à son insu un courtier en assurances donnant une prétendue consultation et ayant diffusé les images contre son gré, en ayant pris soin de le rendre non reconnaissable, ceci dans l’intérêt d’informer le public sur la médiocrité des services de courtage en assurances. Il est incontestable que la condamnation des journalistes constitue dans le cas d’espèce une ingérence des autorités publiques dans le droit à la liberté d’expression. La Cour admet que les art. 179bis et 179ter CP constituent des bases légales suffisantes, en dépit de ce que l’usage d’une caméra cachée n’y est pas expressément mentionné. Elle admet également que ces dispositions pénales poursuivent un but légitime, soit la protection des droits et de la réputation d’autrui, en l’occurrence le courtier. En revanche, la Cour nie que l’ingérence à la liberté d’expression était, dans le cas d’espèce, nécessaire dans une société démocratique au sens du paragraphe 2 de l’art. 10 CEDH. Les journalistes ont en effet abordé un thème d’intérêt général, même si un entretien avec un seul courtier ne permettait pas de démontrer au public la médiocrité des services de courtage en général. La question d’intérêt général étant admise, la Convention ne laisse que peu de place aux restrictions à la liberté d’expression. L’atteinte à la vie privée du courtier est moindre que s’il avait été visé en personne et exclusivement. Malgré l’impact puissant des médias audiovisuels, l’intérêt privé du courtier ne saurait occulter l’intérêt public à l’information. Partant, la condamnation des journalistes viole l’art. 10 CEDH. L’arrêt est définitif.
Gaétan Droz
Art. 179sexies CP.
Est déterminant non l’usage que fera l’acquéreur de l’appareil, mais bien la destination que le fabricant ou le commerçant lui prête. Il ne saurait être exigé que l’appareil serve exclusivement à un but illicite pour tomber dans le champ d’application de l’art. 179sexies CP, il suffit que, selon l’expérience, la fonction principale ou, en tout cas, celle qui vient immédiatement à l’esprit, soit illicite. Un logiciel est un appareil technique au sens de la loi. En l’espèce, la vente d’un logiciel avec pour principale caractéristique d’être indétectable sur l’ordinateur ou le téléphone cible, et qui permet, pour un téléphone, d’écouter directement les conversations téléphoniques ou, pour un ordinateur, de visualiser l’écran surveillé et même d’activer la caméra, ceci à l’insu de l’utilisateur, contrevient à l’art. 179sexies
Gaétan Droz