Droit pénal spécial

ATF 148 IV 57 (d)

2021-2022

Exploitation de la dépendance d’une personne en institution par un soignant. La question de savoir à quel moment l’exploitation du rapport de dépendance est réalisée selon l’art. 192 al. 1 CP doit être appréciée par rapport à l’intensité du rapport de dépendance. Plus la dépendance est grande, plus la libre détermination en matière sexuelle sera limitée. Par, ailleurs le consentement ne peut pas exclure la punissabilité de l’auteur si le rapport de dépendance a créé la docilité de la victime, tout particulièrement si le rapport sexuel a été initié par l’auteur. Le consentement doit être complètement libre et ne doit pas être influencé par le rapport de dépendance. En l’espèce, le TF retient ce lien de dépendance : la victime souffrait d’un handicap au niveau cognitif, elle était émotionnellement attachée au prévenu (depuis plus de 16 ans), et elle a été contrainte au silence par le prévenu.

Stealthing ; contrainte. Le stealthing (le retrait d’un préservatif à l’insu de son ou sa partenaire durant un rapport sexuel) ne répond pas aux conditions de l’art. 191 CP (actes d’ordre sexuel commis sur une personne incapable de discernement ou de résistance), mais doit être considéré selon l’art. 198 CP (désagréments causés par la confrontation à un acte d’ordre sexuel). Le TF reconnaît que le stealthing porte atteinte à l’intégrité et à l’autodétermination en matière sexuelle, car c’est un caractère essentiel du rapport sexuel et prive la victime de sa liberté de décider du rapport sexuel de façon libre et responsable. Cependant, le TF considère que le deuxième élément constitutif de l’art. 191 CP, la contrainte, n’est pas donné, car la victime se trompe sur la nature protégée de l’acte, mais n’est pas dans un état de faiblesse qui existait avant l’acte et qui est exploité par l’auteur. L’acquittement est donc confirmé pour l’art. 191 CP, mais le TF relève que l’art. 198 CP est toutefois applicable dans le cas d’espèce.

Contrainte sexuelle ; viol ; exigence de la contrainte ; rappel du droit en vigueur. De lege lata, les infractions de contrainte sexuelle (art. 189 CP) et de viol (art. 190 CP) ont pour élément constitutif l’exercice d’une contrainte. En l’espèce, bien qu’il soit possible que la recourante n’ait pas consenti aux rapports sexuels considérés, elle n’a pas manifesté son absence de consentement et rien ne permettait à l’intimé de s’en rendre compte. Il en résulte que les conditions d’application des art. 198 et 190 CP ne sont pas remplies. La question de savoir si la Convention du Conseil de l’Europe du 11 mai 2011 sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (Convention d’Istanbul) impose une interprétation de la loi conforme à la solution du consentement peut demeurer ouverte. D’une part, la Convention ne crée pas de droits subjectifs pour les Etats parties, si bien que la recourante ne saurait s’en prévaloir. D’autre part, une interprétation des art. 189 et 190 CP, fondée sur l’absence de consentement explicite plutôt que de la contrainte, violerait le principe de la légalité (art. 1 CP). Le TF ne dispose enfin d’aucune compétence pour modifier ces dispositions, étant précisé que, de lege ferenda, la solution privilégiée par la Commission des affaires juridiques est celle du refus manifesté (non, c’est non) plutôt que celle du consentement (oui, c’est oui).

Art. 192 CP

Actes d’ordre sexuel avec des personnes hospitalisées. La notion de personnes hospitalisées s’entend largement. Elle inclut les pensionnaires d’une maison de retraite. L’auteur doit se trouver dans un lien de dépendance avec la victime et doit avoir une position dominante à son égard. Il peut s’agir de toutes les personnes prenant soin des patients. La commission de l’infraction présuppose également que l’auteur profite effectivement de ce lien de dépendance. L’infraction n’est pas réalisée si l’on doit conclure, même au bénéfice du doute, que la personne en question a consenti de manière libre, sans être influencée par la situation particulière. Le fait en l’espèce pour l’auteur, infirmier de nuit dans un EMS, de s’en être pris à quatre victimes particulièrement âgées et peu autonomes, en ayant gagné leur confiance peu à peu par de petites attentions et en ayant pris systématiquement l’initiative, permet de conclure que le consentement des victimes résulte effectivement du lien de dépendance, et ce même si aucune d’elles n’a porté plainte.

ATF 137 IV 208

2011-2012

Art. 197 ch. 3bis CP

Possession de données électroniques à contenu pornographique. La possession de données électronique suppose, d’un point de vue objectif, la détention de celles-ci et, d’un point de vue subjectif, la volonté d’en avoir la maîtrise. L’utilisateur d’un ordinateur dispose d’un pouvoir de disposition sur les données pornographiques interdites qui se trouvent dans la mémoire-cache de ce dernier. L’élément subjectif de la possession de données pornographiques dans la mémoire-cache doit être admis avec retenue. L’utilisateur inexpérimenté d’un ordinateur ou d’Internet, qui ignore tout de l’existence d’une telle mémoire et des données qu’elle contient, ne peut être considéré comme l’auteur d’une infraction à l’art. 197 ch. 3bis CP. Il faut déterminer selon les circonstances concrètes du cas d’espèce s’il a connaissance de ces données. Celui qui consciemment laisse des données pornographiques interdites dans la mémoire-cache remplit l’élément constitutif de la possession de l’art. 197 ch. 3bis CP.

ATF 137 IV 263

2011-2012

Art. 198 al. 2 CP

Désagrément causé par un attouchement d’ordre sexuel. Le supérieur qui caresse avec la main, sous le T-shirt, le dos nu de son apprenti mineur remplit, d’après les circonstances concrètes du cas d’espèce, l’élément constitutif de l’infraction de désagrément causé par un attouchement d’ordre sexuel. Des gestes sur la cuisse, dans la région du genou, par-dessus les habits, ne comportent encore, à eux seuls, aucune connotation sexuelle.

Art. 189 al. 3 cum 22 al. 1 et 190 al. 3 CP

Tentative de contrainte sexuelle qualifiée. Viol qualifié. Unité d’actions. Il suffit que l’auteur menace la victime avec une arme ou un objet dangereux tant et aussi longtemps que la victime oppose une résistance. Lorsque l’auteur a brisé la résistance de la victime en se servant d’une arme ou d’un objet dangereux, les éléments de l’infraction à l’art. 189 al. 3, respectivement de celle à l’art. 190 al. 3 CP, sont réalisés alors même que l’auteur ne menace plus la victime de manière à mettre sa vie en danger pendant l’accomplissement de l’acte sexuel, respectivement d’un autre acte d’ordre sexuel. La peur que ressent subjectivement la victime n’est pas davantage déterminante ; à la différence de ce qui vaut pour le délit de menace, la sensation de peur ne constitue pas un élément objectif des infractions contre l’intégrité sexuelle. Lorsque les agissements considérés, en raison de leur étroite proximité dans le temps et dans l’espace, d’une part, parce qu’ils procèdent d’un seul et même acte de volonté, d’autre part, forment une unité et non pas une pluralité d’actions, le viol absorbe la tentative de contrainte sexuelle.

TF 6B_103/2011

2011-2012

Art. 12 al. 2 ph. 2 et 187 ch. 1 CP

Acte d’ordre sexuel sur un enfant de moins de seize ans. Dol éventuel. Coupable d’avoir laissé son fils lui sucer les seins lorsqu’il avait besoin d’être consolé, une puéricultrice écope définitivement d’une peine de neuf mois de prison avec sursis. Le Tribunal fédéral confirme sa condamnation pour actes d’ordre sexuel. Ancienne directrice d’école, cette mère de famille genevoise avait contesté le caractère sexuel des actes qui lui étaient reprochés. Dans un premier temps, elle avait été acquittée par le Tribunal de police, mais le Ministère public avait recouru et obtenu sa condamnation. Jusqu’à l’âge de sept ans, son fils avait gardé l’habitude de lui téter les seins. En même temps, la mère le caressait sur tout le corps, notamment sur son sexe Pour le Tribunal fédéral, ce comportement a « une connotation sexuelle claire pour un observateur neutre ». Le fait de sucer le sein de sa mère alors qu’elle n’a plus de lait peut encore constituer dans un premier temps un réflexe naturel pour un jeune enfant, admet le Tribunal fédéral, mais ce comportement perd ensuite sa signification originelle. Dans ces conditions, poursuit Mon Repos, « les mobiles de la mère ou la signification que son comportement a pour elle n’importent pas ».

Par ailleurs, « il n’est pas déterminant non plus que l’initiative de lui sucer le sein revienne à son fils ». Parallèlement à la peine de prison assortie du sursis, la mère devra suivre un traitement ambulatoire psychiatrique et psychothérapeutique. Deux expertises avaient décrit un climat « incestueux » au sein de la famille, l’une avait toutefois relevé que l’accusée était une « bonne mère », qui ne présentait pas de danger pour ses enfants. En 2008, le Service de la protection des mineurs (SPMi) de Genève était intervenu. Les enfants avaient été placés une année dans un foyer avant de réintégrer la maison, sous la surveillance du SPMi.

Art. 197 ch. 1 et 3 CP

Pornographie. Celui qui, à partir de bourses d’échange électroniques, télécharge des fichiers images ou vidéo dont le contenu pornographique porte sur des enfants ou des animaux et qui laisse, à tout le moins passagèrement, ces données dans le dossier d’entrée, s’accommode que les données en question puissent être rendues accessibles (surtout) à des personnes de moins de 16 ans.

TF 6B_536/2010

2010-2011

Art. 188 CP et 198 CP

Faute de lien de dépendance et désagréments causés par la confrontation à un acte d’ordre sexuel. Le chef de cuisine qui commet des actes d’ordre sexuel sur une apprentie alors que cette dernière ne lui est pas effectivement subordonnée ne contrevient pas à l’art. 188 CP. L’obligation faite à l’employeur d’instaurer des mécanismes efficaces de protection et de défense contre le harcèlement sexuel sur le lieu de travail, d’une part, la violation de cette obligation et l’éventuelle responsabilité qui en découle, d’autre part, sont sans rapport avec la question de l’existence dans le cas particulier d’une relation de dépendance, au sens de l’art. 188 CP, entre l’auteur et la victime des actes de harcèlement.

TF 6B_536/2010

2010-2011

Art. 188 et 198 CP

Faute de lien de dépendance et désagréments causés par la confrontation à un acte d’ordre sexuel. Le chef de cuisine qui commet des actes d’ordre sexuel sur une apprentie alors que cette dernière ne lui est pas effectivement subordonnée ne contrevient pas à l’art. 188 CP. L’obligation faite à l’employeur d’instaurer des mécanismes efficaces de protection et de défense contre le harcèlement sexuel sur le lieu de travail, d’une part, la violation de cette obligation et l’éventuelle responsabilité qui en découle, d’autre part, sont sans rapport avec la question de l’existence dans le cas particulier d’une relation de dépendance, au sens de l’art. 188 CP, entre l’auteur et la victime des actes de harcèlement.

TF 6B_744/2010

2010-2011

Art. 197 ch. 3 CP

Possession de données stockées dans la mémoire cache d’un navigateur web dont le contenu est pornographique. Celui qui, après avoir visionné des sites Internet de pornographie dure, n’efface pas les données contenues temporairement sur le cache de son navigateur, peut déjà être condamné pour possession de pornographie dure (art. 197 al. 3 CP). Tout dépend, en fait, des connaissances en informatique de la personne, en particulier si elle savait que des fichiers litigieux se trouvaient sur le cache.

TF 6B_744/2010

2010-2011

Art. 197 ch. 3 CP

Possession de données stockées dans la mémoire cache d’un navigateur web dont le contenu est pornographique. Celui qui, après avoir visionné des sites Internet de pornographie dure, n’efface pas les données contenues temporairement sur le cache de son navigateur, peut déjà être condamné pour possession de pornographie dure (art. 197 al. 3 CP). Tout dépend, en fait, des connaissances en informatique de la personne, en particulier si elle savait que des fichiers litigieux se trouvaient sur le cache.

TF 6B_813/2009

2010-2011

Art. 187 ch. 4, 220 CP

Actes d’ordre sexuel avec des enfants. La jurisprudence se montre exigeante dans la définition du devoir de prudence, en cas d’hésitation sur la majorité sexuelle d’un partenaire. Sous réserve des éventuelles circonstances concrètes susceptibles de conduire l’auteur à croire sérieusement que la personne avec qui il entretient une relation de cette nature a plus de seize ans, celui qui a conscience que la victime est proche de la limite de l’âge de protection doit faire preuve d’une attention accrue. Il ne peut se contenter d’évacuer ses doutes sur la base de la réponse donnée à une simple question, en particulier lorsqu’il a la possibilité de se renseigner auprès de tiers. D’expérience générale, des jeunes filles peuvent mentir sur leur âge pour être prises au sérieux par des hommes plus mûrs qu’elles et entretenir de cette manière l’intérêt qu’elles ont suscité. La pratique plus récente les applique encore, notamment lorsque la différence d’âge est importante et qu’il apparaît qu’un partenaire sexuel pourrait être proche de la limite légale. Le TF ne les a tempérés que dans le cas des amours juvéniles

ž Selon certains auteurs, celui qui refuse de restituer l’enfant mineur ne se rend pas coupable de l’infraction réprimée par l’art. 220 CP lorsque le retour échoue exclusivement en raison du refus du mineur capable de discernement et que l’auteur s’en remet à sa décision. La norme pénale protège cependant au premier chef la paix familiale, respectivement l’exercice de l’autorité parentale ou tutélaire, et non le mineur lui-même, dont la liberté est, par ailleurs, protégée par l’art. 183 CP. Aussi l’interprétation proposée par la doctrine précitée ne pourrait-elle, au mieux, être admise que dans d’étroites limites, soit lorsque le refus est patent et clairement établi et que le surmonter est réellement impossible ou, tout au moins, ne peut être exigé de l’auteur. Lorsque l’auteur ne se borne pas à laisser au mineur le choix du retour, mais prend des mesures concrètes qui ont pour effet d’empêcher les détenteurs de l’autorité parentale de l’exercer, il n’est plus possible de dire que le retour est empêché exclusivement par la volonté du mineur et il y a infraction à l’art. 220 CP.

TF 6B_813/2009

2010-2011

Art. 187 ch. 4, 220 CP

Actes d’ordre sexuel avec des enfants. La jurisprudence se montre exigeante dans la définition du devoir de prudence, en cas d’hésitation sur la majorité sexuelle d’un partenaire. Sous réserve des éventuelles circonstances concrètes susceptibles de conduire l’auteur à croire sérieusement que la personne avec qui il entretient une relation de cette nature a plus de seize ans, celui qui a conscience que la victime est proche de la limite de l’âge de protection doit faire preuve d’une attention accrue. Il ne peut se contenter d’évacuer ses doutes sur la base de la réponse donnée à une simple question, en particulier lorsqu’il a la possibilité de se renseigner auprès de tiers. D’expérience générale, des jeunes filles peuvent mentir sur leur âge pour être prises au sérieux par des hommes plus mûrs qu’elles et entretenir de cette manière l’intérêt qu’elles ont suscité. La pratique plus récente les applique encore, notamment lorsque la différence d’âge est importante et qu’il apparaît qu’un partenaire sexuel pourrait être proche de la limite légale. Le TF ne les a tempérés que dans le cas des amours juvéniles. žSelon certains auteurs, celui qui refuse de restituer l’enfant mineur ne se rend pas coupable de l’infraction réprimée par l’art. 220 CP lorsque le retour échoue exclusivement en raison du refus du mineur capable de discernement et que l’auteur s’en remet à sa décision. La norme pénale protège cependant au premier chef la paix familiale, respectivement l’exercice de l’autorité parentale ou tutélaire, et non le mineur lui-même, dont la liberté est, par ailleurs, protégée par l’art. 183 CP. Aussi l’interprétation proposée par la doctrine précitée ne pourrait-elle, au mieux, être admise que dans d’étroites limites, soit lorsque le refus est patent et clairement établi et que le surmonter est réellement impossible ou, tout au moins, ne peut être exigé de l’auteur. Lorsque l’auteur ne se borne pas à laisser au mineur le choix du retour, mais prend des mesures concrètes qui ont pour effet d’empêcher les détenteurs de l’autorité parentale de l’exercer, il n’est plus possible de dire que le retour est empêché exclusivement par la volonté du mineur et il y a infraction à l’art. 220 CP.

TF 6B_920/2009

2010-2011

Art. 191 CP

Actes d’ordre sexuel commis sur une personne incapable de discernement ou de résistance. Le TF a reconnu l’incapacité de résister des patientes allongées sur une chaise d’examen gynécologique. Leur volonté est affectée par leur position sur la chaise d’examen, qui ne leur permet pas de voir ce qui se passe, alors que la capacité d’une personne à réagir selon sa volonté dépend précisément d’une perception préalable des phénomènes extérieurs par les sens. Faute de perception visuelle, seules demeurent les sensations corporelles au niveau génital, lesquelles permettent aux victimes de ne réagir qu’à un stade où l’auteur est sur le point d’abuser d’elles. L’incapacité de résistance est également admise lorsqu’en raison de la position particulière de son corps, la patiente se trouve dans l’incapacité de discerner l’atteinte du thérapeute, à qui elle accorde sa confiance, à son intégrité sexuelle et qu’il abuse sexuellement d’elle par surprise. Incapacité de résister admise s’agissant d’une patiente en sous-vêtements allongée sur une table de massage en position latérale précaire, le dos tourné au physiothérapeute qui frotte son sexe en érection contre ses organes génitaux et ses fesses dépassant la table.

žUne violation du principe res judicata pro veritate habetur en vertu duquel une décision entrée en force ne peut être réexaminée, si ce n’est dans le cadre étroit de la procédure de révision, ne saurait entrer en considération dès lors que les premiers juges n’ont aucunement ignoré ou remis en cause la décision de non-lieu prononcée en 1999. En se référant aux déclarations exprimées dans ce contexte par d’anciennes patientes de X, les autorités cantonales n’ont fait que souligner la similitude troublante des faits dénoncés alors avec ceux rapportés par la victime afin d’étayer la crédibilité des déclarations de cette dernière.

TF 6B_920/2009

2010-2011

Art. 191 CP

Actes d’ordre sexuel commis sur une personne incapable de discernement ou de résistance. Le TF a reconnu l’incapacité de résister des patientes allongées sur une chaise d’examen gynécologique. Leur volonté est affectée par leur position sur la chaise d’examen, qui ne leur permet pas de voir ce qui se passe, alors que la capacité d’une personne à réagir selon sa volonté dépend précisément d’une perception préalable des phénomènes extérieurs par les sens. Faute de perception visuelle, seules demeurent les sensations corporelles au niveau génital, lesquelles permettent aux victimes de ne réagir qu’à un stade où l’auteur est sur le point d’abuser d’elles. L’incapacité de résistance est également admise lorsqu’en raison de la position particulière de son corps, la patiente se trouve dans l’incapacité de discerner l’atteinte du thérapeute, à qui elle accorde sa confiance, à son intégrité sexuelle et qu’il abuse sexuellement d’elle par surprise. Incapacité de résister admise s’agissant d’une patiente en sous-vêtements allongée sur une table de massage en position latérale précaire, le dos tourné au physiothérapeute qui frotte son sexe en érection contre ses organes génitaux et ses fesses dépassant la table. Une violation du principe res judicata pro veritate habetur en vertu duquel une décision entrée en force ne peut être réexaminée, si ce n’est dans le cadre étroit de la procédure de révision, ne saurait entrer en considération dès lors que les premiers juges n’ont aucunement ignoré ou remis en cause la décision de non-lieu prononcée en 1999. En se référant aux déclarations exprimées dans ce contexte par d’anciennes patientes de X, les autorités cantonales n’ont fait que souligner la similitude troublante des faits dénoncés alors avec ceux rapportés par la victime afin d’étayer la crédibilité des déclarations de cette dernière.

Art. 190 al. 3 CP.

Viol (BJP N°653).

Le fait pour le violeur de ne pas avoir fait usage d’une arme ou d’un autre objet dangereux ne permet pas de conclure automatiquement à l’absence de cruauté. L’abus sexuel par voie anale et vaginale (en concours idéal) perpétré par un inconnu sur une fillette de quatre ans, à la suite duquel la victime a subi des douleurs importantes et souffert d’une blessure grave à l’anus, remplit la condition aggravante de la cruauté au sens de l’art. 190 al. 3 CP. En effet, les douleurs liées au rapport anal ne sont pas à considérer comme les suites nécessaires de l’infraction de base. Que la victime ait dû, immédiatement avant l’infraction, assister à la scène où sa grand-mère a été brutalement frappée à terre et grièvement blessée, a encore accru davantage ses souffrances et sa peur, ce qui est un élément additionnel plaidant en faveur de la réalisation de ce qualificatif.

Art. 198 al. 2 CP.

Attouchements d’ordre sexuel (BJP N°679).

L’art. 198 al. 2 CP entend moins protéger la pudeur ou la décence publiques que la pudeur personnelle et l’honneur de la victime. L’accent est mis sur la forme en laquelle la victime a été importunée (un acte qui doit être d’ordre sexuel) et non plus seulement sur l’intention de l’auteur. L’attouchement est une notion subsidiaire par rapport à l’acte d’ordre sexuel, le législateur ayant visé un comportement moins grave, à savoir un contact rapide, par surprise, avec le corps d’autrui, l’acte devant avoir objectivement une connotation sexuelle. Des tentatives de rapprochement corporel ou des pressions moins intenses que des actes d’ordre sexuel proprement dits suffisent déjà. Ainsi, le seul fait de toucher des parties du corps proches de la poitrine, des fesses ou des organes sexuels (comme les cuisses ou le bas-ventre), même par-dessus les vêtements, suffit pour être qualifié d’attouchement. De même, le lieu dans lequel les attouchements ont lieu n’est pas indifférent, la place de travail n’étant, par exemple, pas un lieu où ces actes pourraient être tolérés, à l’inverse d’un night-club par exemple. Ce qui compte davantage, c’est le comportement de l’auteur vis-à-vis de la victime dans son ensemble, et non dans chacun des détails factuels.

Art. 197 CP.

Pornographie (Jusletter du 21 septembre 2009).

Confirmation de la jurisprudence sur le téléchargement d’images pédophiles (ATF 131 IV 16). De tels actes reviennent à fabriquer de la pornographie dure. En effet, télécharger des images pornographiques va au-delà de la simple possession d’images. Le téléchargement, dans la mesure où il incorpore un risque de transmission à des tiers, excède la simple possession et doit, pour cette raison, être appréhendé comme un acte de fabrication. Ainsi, en téléchargeant des clichés sur son ordinateur, un pédophile devient un « petit producteur ».

TF 6B_494/2008

2008-2009

Art. 190 al. 3, 47 CP

Viol avec cruauté ; fixation de la peine. En cas de viol, la gravité de l'acte et, partant, de la faute se détermine en premier lieu en fonction des moyens de contrainte utilisés par l'auteur. Lorsque l'auteur a fait preuve de cruauté envers la victime, le juge doit tenir compte, lors de la fixation de la peine, du degré de cruauté avec lequel la victime a été traitée. Le comportement de la victime peut constituer une circonstance atténuante au sens de l’art. 48 CP, si la victime provoque l'auteur par un comportement initial. La conduite de la victime doit avoir été si provocante que même un homme conscient de ses responsabilités aurait eu de la peine à y résister. Le juge ne saurait retenir cette circonstance atténuante au motif que la morale de la victime serait douteuse ou que l'auteur se serait vu offert une occasion favorable; un éventuel comportement de la victime proche du consentement peut toutefois être pris en compte lors de la fixation de la peine dans le cadre de l'art. 47 CP. En revanche, le comportement de la victime en réaction à l'acte de contrainte est en règle générale sans pertinence. Ainsi, il n'y a pas lieu d'atténuer la peine du seul fait que la victime n'a pas opposé de résistance et s'est prêtée de plein gré aux entreprises de l'auteur. En l’espèce, une peine privative de liberté de trois ans et demi pour un viol avec cruauté commis en menaçant la victime et en la blessant avec un tesson de bouteille est exagérément clémente. Le fait que la victime ait feint le consentement sous l’effet de la menace n’est d’aucune pertinence.


TF 6B_75/2009

2008-2009

(BJP N°618)

Désagréments causés par la confrontation à un acte d’ordre sexuel ; utilisation abusive d’une installation de télécommunication. Se rend coupable de harcèlement sexuel (art. 198 al. 2 CP) celui qui importune une personne par des attouchements d’ordre sexuel ou par des paroles grossières. Il n’est pas indispensable que le harcèlement se produise dans un lieu public. La connotation sexuelle de propos doit s’apprécier à l’aune des circonstances concrètes et du contexte général. Doit être prise en compte la question de savoir si l’on pouvait attendre de la victime qu’elle se soustraie au harcèlement, ce qui est en règle générale plus difficile au lieu de travail et dans des lieux semblables que par exemple dans des locaux publics. D’un point de vue subjectif, l’art. 198 al. 2 CP exige que l’auteur ait à tout le moins accepté l’éventualité que la victime se sentît importunée par ses propos. Des incitations et questions grossières et obscènes d’ordre sexuel qui émanent d’un appelant inconnu, beaucoup plus âgé, et qui portent sur la vie sexuelle de la victime sont manifestement propres à importuner une adolescente de 14 ans. Remplit les conditions de l’art. 179septies CP celui qui, par méchanceté ou par espièglerie, aura utilisé abusivement une installation de télécommunication pour inquiéter un tiers ou pour l’importuner. L’art. 179septies CP protège le droit à la personnalité de la personne concernée contre certaines atteintes par téléphone. Il peut dès lors entrer en concours idéal avec l’infraction de harcèlement sexuel exécutée au moyen de paroles grossières selon l’art. 198 al. 2 CP, qui protège le bien juridique de l’autodétermination sexuelle de la victime. Un tel concours n’est toutefois possible que si le téléphone n’est pas uniquement utilisé comme instrument de l’infraction en vue de transmettre un seul message obscène. Il faut que l’auteur ait assailli sa victime au moyen de nombreux appels téléphoniques obscènes et qu’il ait ainsi tiré profit de l’effet potentiellement harcelant des installations de télécommunication (pour la relation entre la contrainte selon l’art. 191 et l’art. 179septies CP, cf. ATF 6S.559/2000, 29.12.2000, consid. 5 et les références citées). Celui qui fait un usage conscient des possibilités offertes par les installa­tions de télécommunication aux fins d’entrer en contact avec des victimes adolescentes de façon anonyme et de manière à les importuner, ce qui ne lui aurait pas été possible sans l’abus ciblé du téléphone, se rend coupable à la fois de harcèlement sexuel et d’utilisation abusive d’une installation de télécommunication, dès lors que le contenu illicite de son comportement ne s’épuise pas en la violation de l’intégrité sexuelle de la victime.

ATF 133 IV 31

2007-2008

Art. 197 CP

Pornographie, images d’enfants nus : des photographies prises au vol d’une fillette assise nue sur une chaise longue, sans aucune participation demandée à l’enfant, ne réalisent pas l’infraction de pornographie avec des enfants.