Propriété intellectuelle

Art. 140a LBI al. 1, Art. 140a LBI al. 2, Art. 140b LBI al. 1, Art. 140b LBI al. 2, Art. 140d LBI al. 1, Art. 140d LBI al. 2

Selon l’art. 140a al. 1 LBI, l’IPI délivre, sur demande, des certificats complémentaires de protection (ci-après CCP) pour des principes actifs ou des compositions de principes actifs d’un médicament (appelés « produits », art. 140a al. 2 LBI). Selon l’art. 140b al. 1 LBI, le CCP est délivré si, au moment de la demande, « le produit en tant que tel, un procédé de fabrication de ce produit ou son utilisation sont protégés par un brevet » et si un médicament contenant un produit est autorisé en Suisse. Le CCP vise à compenser, par l’octroi d’un droit exclusif distinct, l’inconvénient qui résulte du fait que les médicaments sont soumis à une procédure d’autorisation de mise sur le marché qui prend du temps, raccourcissant ainsi la durée de protection du brevet (consid. 4.3.1). Ce type de protection complémentaire a été repris du droit de l’Union européenne (consid. 4.3.2). Selon l’art. 140d al. 1 LBI, le CCP protège, dans les limites de l’étendue de la protection conférée par le brevet, toutes les utilisations du produit en tant que médicament qui ont été autorisées avant l’expiration du certificat. Un CCP est donc soumis à une double limitation : premièrement, il ne peut en aucun cas être utilisé pour obtenir une protection plus étendue que celle accordée par le brevet sous-jacent, et deuxièmement, la protection est limitée au produit pour lequel l’autorisation en tant que médicament a été accordée (consid. 4.3.3). Compte tenu du fait qu’un CCP est limité au produit autorisé, se pose la question de savoir s’il est possible de lui conférer un champ de protection indépendant, qui aille au-delà de la forme spécifiquement indiquée dans l’autorisation de mise sur le marché (consid. 4.3.4). La doctrine suisse considère de manière unanime que l’étendue de la protection des CCP s’étend également aux formes salines d’un produit qui ne sont pas spécifiquement indiquées dans l’autorisation officielle de mise sur le marché, pour autant qu’elles soient couvertes par le champ de protection du brevet de base et qu’elles n’aient pas d’autre effet pharmacologique. En droit européen, la doctrine part du principe qu’un CCP accorde une protection pour une substance active et ses dérivés, même si l’autorisation de mise sur le marché ne couvre le principe actif que sous une forme spéciale (consid. 4.3.4.2). Comme l’a indiqué la CJUE, le treizième considérant du règlement (CE) no 1610/96 prévoit que le CCP confère les mêmes droits que ceux conférés par le brevet de base et que, par conséquent, lorsque le brevet de base couvre une substance active et ses différents dérivés, le CCP confère la même protection. Par l’introduction du CCP, le législateur avait pour objectif de permettre l’amortissement des coûts de développement dans le domaine particulièrement coûteux de l’industrie pharmaceutique, et de créer ainsi des conditions plus favorables à la recherche. Si un CCP devait uniquement protéger le sel particulier du principe actif (ou la composition de principes actifs) qui est désigné comme principe actif dans l’autorisation de mise sur le marché du médicament, même lorsque le brevet de base protège également les dérivés, tout concurrent pourrait librement faire approuver et commercialiser un autre sel du produit ayant le même effet pharmacologique à l’expiration du brevet. Ce sel, précédemment protégé par le brevet, ne bénéficierait pas de la protection recherchée par le législateur. Le fait que, selon les conceptions suisse et européenne, l’extension de la protection dans le temps soit accordée par un droit exclusif indépendant et non par une extension du brevet, ne change rien au fait qu’un certificat confère les mêmes droits que le brevet (voir art. 140d al. 2 LBI). Ainsi, le champ de protection d’un CCP s’étend aux dérivés du produit, à condition que ceux-ci soient couverts par le champ de protection du brevet de base et présentent le même effet pharmacologique que le produit, tel qu’il est mentionné dans l’autorisation de mise sur le marché (consid. 4.3.4.3).

Art. 69 CBE2000, Art. 76 CBE2000 al. 1, Art. 123 CBE2000 al. 2, Art. 138 CBE2000 al. 1 let. c, Art. 42 LTF al. 2, Art. 32 LTFB, Art. 33 LTFB, Art. 3 LBI let. a, Art. 9 LBI al. 2, Art. 26 LBI al. 1 let. c, Art. 51 LBI al. 2, Art. 58 LBI al. 2

Le recours au TF doit être suffisamment motivé (art. 42 al. 2 LTF) (consid. 1.1). Cela ne s’applique toutefois pas sans autres aux conclusions subsidiaires, par lesquelles la recourante conteste les frais et dépens de la décision attaquée, indépendamment du fait qu’elle ait ou non gain de cause sur le fond (consid. 1.2.1). En principe, les conclusions ayant pour objet une somme d’argent doivent être chiffrées, même lorsqu’elles portent sur la contestation des frais et dépens prononcés par la juridiction inférieure indépendamment du sort de la cause principale. Toutefois, dans de tels cas, il suffit en réalité que la motivation du recours indique dans quel sens la décision attaquée doit être modifiée (consid. 1.2.2). En l’espèce, les dépens alloués par le Tribunal fédéral des brevets (TFB) se partagent entre une somme allouée pour les frais de conseil en brevets et une autre, moins importante, pour les frais de représentation par un avocat. La recourante se plaint du fait que la première somme soit plus importante que la seconde, et demande que les dépens soient au moins réduits de la différence (consid. 1.2.3). Selon l’art. 26 al. 1 lit. c LBI, le juge constate la nullité du brevet lorsque l’objet de ce dernier va au-delà du contenu de la demande de brevet dans la version qui a déterminé sa date de dépôt. Cette cause de nullité est tirée de l’art. 138 al. 1 lit. c CBE 2000. Ces deux dispositions sont liées, en ce qui concerne la procédure de délivrance européenne, à l’art. 123 al. 2 CBE 2000, qui limite la recevabilité des modifications dans la procédure de demande. En conséquence, la demande de brevet européen et le brevet européen ne peuvent être modifiés de telle manière que leur objet dépasse le contenu de la demande antérieure telle qu’elle a été déposée. De même, l’art. 76 al. 1 deuxième phrase CBE 2000 prévoit qu’une demande divisionnaire européenne ne peut être déposée que pour des éléments qui ne vont pas au-delà du contenu de la demande antérieure telle qu’elle a été déposée (consid. 2.1.1). Ces dispositions ont pour but d’éviter que le détenteur d’un brevet n’améliore sa position en revendiquant des protections pour des objets n’ayant pas été couverts par la demande de brevet initiale. Elles servent notamment un but de sécurité juridique, car le public ne devrait pas être surpris par des revendications qui ne pouvaient pas être attendues sur la base de la demande initiale (consid. 2.1.2). Dans ce contexte, l’ « objet du brevet » ne doit pas être compris comme l’ « étendue de la protection » au sens des art. 51 al. 2 LBI et 69 CBE 2000, telle que déterminée par les revendications. Il s’agit plutôt de l’ « objet » au sens de l’art. 123 al. 2 CBE 2000 (ou de l’article 58 al. 2 LBI), incluant l’ensemble des éléments divulgués dans la description et les dessins. Selon la jurisprudence de l’Office européen des brevets, l’art. 123 al. 2 CBE 2000 n’autorise une modification après le dépôt de la demande que dans les limites de ce que l’homme du métier est objectivement en mesure, à la date du dépôt, de déduire directement et sans équivoque du contenu global de la demande initiale telle qu’elle a été déposée, en se fondant sur les connaissances techniques générales dans le domaine considéré (test du « gold standard »). Les modifications inadmissibles peuvent consister tant en des ajouts qu’en des omissions d’informations (consid. 2.1.3). D’un point de vue procédural, une demande divisionnaire constitue une demande séparée, indépendante de la demande parente. Les modifications sont donc soumises aux exigences générales de l’art. 123 al. 2 CBE 2000. La question de savoir si la demande divisionnaire elle-même entre dans le champ d’application du contenu de la demande parente s’apprécie cependant selon l’art. 76 al. 1 deuxième phrase CBE 2000 (consid. 2.2). La question est de savoir dans quelle mesure il est admissible, durant la procédure de demande, de choisir des éléments individuels dans plusieurs listes, chacune comportant plusieurs modes de mise en œuvre ou caractéristiques alternatives (problématique du « singling out ») (consid. 3.1). La problématique de la suppression d’éléments de listes durant la procédure de demande a été souvent traitée dans la jurisprudence de l’Office européen des brevets. Le point de départ est la question de savoir si l’objet ou la combinaison d’éléments revendiqués dans le brevet litigieux peut être déduit directement et sans équivoque par l’homme du métier à partir des documents déposés dans la demande d’origine. Fondamentalement, la limitation d’une liste à une seule caractéristique est admissible. De même, la suppression d’éléments de plusieurs listes est en principe admissible si plusieurs alternatives sont encore revendiquées pour chacune d’elles, laissant ainsi subsister un groupe générique qui ne se distingue de l’objet de la demande initiale que par sa taille réduite. En revanche, la sélection d’un unique élément dans chacune des listes n’est généralement pas admise, dans la mesure où un tel procédé crée artificiellement une combinaison de caractéristiques précises, sans fondement dans la demande initiale. Dans un tel cas, la modification limite la protection du brevet, et apporte une contribution technique par rapport à l’objet initialement divulgué. La situation peut être différente s’il y avait déjà des références à cette combinaison dans la demande initiale, comme par exemple si les caractéristiques finalement sélectionnées avaient été indiquées comme « préférées ». Les circonstances spécifiques du cas d’espèce doivent toujours être prises en compte (consid. 3.2). Conformément à l’art. 32 LTFB, le TFB fixe les dépens selon le tarif visé à l’art. 33 LTBF. Selon l’art. 3 lit. a FP-TFB, les dépens alloués à la partie qui a gain de cause comprennent le remboursement des frais nécessaires. Ceux-ci comprennent l’indemnité du conseil en brevets, s’il intervient à titre de consultant uniquement (art. 9 al. 2 FP-TFB) (consid. 5.1). Le TFB, qui peut apprécier librement si une dépense doit être remboursée en tant que dépense nécessaire, a indiqué que dans le cadre d’une action en nullité les frais du conseil en brevets peuvent dépasser ceux de représentation par un avocat. La recourante ne parvient pas à démontrer d’erreur d’appréciation du TFB qui puisse être corrigée par le TF (consid. 5.3).