Propriété intellectuelle

Exercice illicite des droits, société de gestion. D’après l’art. 73 al. 2 LDA, l’exercice illicite des droits au sens de l’art. 70 LDA est poursuivi et jugé conformément à la DPA. Les dispositions générales du CP sont applicables selon les art. 333 al. 1 CP et 2 DPA. Par conséquent, le principe de la territorialité prévu par l’art. 3 al. 1 CP trouve application. L’infraction de l’art. 70 LDA est une contravention d’après l’art. 333 al. 3 CP. Mais l’art. 104 CP prévoit que les dispositions de la première partie du CP s’appliquent aussi aux contraventions. Vu l’art. 8 al. 1 CP, une contravention est donc réputée commise tant au lieu où l’auteur a agi ou aurait dû agir qu’au lieu où le résultat s’est produit. En l’espèce, le prévenu a facturé depuis Londres des droits d’exécution pour deux concerts ayant eu lieu en Suisse. Dans ce contexte, il a envoyé des e-mails et les factures en question à l’organisateur en Suisse. Bien que le prévenu ait agi à l’étranger, le résultat s’est donc produit en Suisse. Par conséquent, la compétence juridictionnelle des autorités suisses est donnée et le droit suisse s’applique. En vertu de l’art. 73 al. 2 LDA, l’infraction est poursuivie et jugée par l’IPI, qui agit d’office (consid. II.1). D’après l’art. 40 al. 1 let. a LDA, la gestion des droits d’exécution des œuvres musicales non théâtrales est soumise à la surveillance de la Confédération, sous réserve de la gestion par l’auteur lui-même ou ses héritiers. La personne qui gère des droits soumis à la surveillance fédérale doit être au bénéfice d’une autorisation de l’IPI, qui n’est délivrée que si les conditions de l’art. 42 LDA sont remplies. SUISA est la seule société en Suisse à bénéficier de cette autorisation. Une gestion personnelle au sens de l’art. 40 al. 3 LDA n’empêche pas de se faire représenter. Mais la représentation doit alors intervenir dans l’intérêt de l’auteur ou de ses héritiers, qui doivent pouvoir exercer un certain contrôle sur la gestion de leurs droits. Le représentant doit seulement offrir son aide pour la gestion. Les conditions de celle-ci, notamment le montant de la redevance, doivent être fixées par l’auteur lui-même, respectivement ses héritiers. Le représentant ne peut pas être un ayant droit dérivé et exercer les droits pour lui-même. En l’espèce, le prévenu offre un soutien administratif pour que des licences directes puissent être délivrées. Aucun droit ne lui est transféré. Les contrats avec les auteurs sont négociés individuellement et les auteurs déterminent les indemnités de licence à facturer aux organisateurs. Les licences sont délivrées au nom et sur mandat de ces auteurs. Les droits sont contrôlés par les ayants droit durant tout le processus de licence. A la différence d’une société de gestion, le prévenu n’est pas tenu de respecter l’égalité de traitement et d’appliquer les mêmes règles vis-à-vis de tous les auteurs. Ces derniers donnent leurs instructions individuellement, aussi en ce qui concerne la politique de répartition des redevances. Partant, le prévenu n’exerce pas illicitement des droits en Suisse. Mais la réserve de la gestion personnelle selon l’art. 40 al. 3 LDA ne vaut que pour les auteurs et leurs héritiers. Des ayants droit dérivés comme des éditeurs ou des producteurs ne peuvent pas s’en prévaloir et doivent passer par la société de gestion compétente. Or, le prévenu agit aussi pour des ayants droit dérivés. Mais il ne se rend pas coupable de complicité dans une violation de l’art. 70 LDA, car il faut tenir compte des traités internationaux. En l’espèce, il existe un état de fait international car le prévenu, sa société et les ayants droit qu’il représente ont leur domicile ou leur siège à l’étranger. D’après l’art. 5 al. 1 CB, les auteurs bénéficient de la protection minimale prévue par la Convention. Cela vaut aussi pour les ayants droit dérivés vu l’art. 2 al. 6 CB. L’art. 11 al. 1 CB donne un droit exclusif d’exécution et aucune possibilité de restreindre celui-ci n’est prévue par la Convention. Une obligation pour les ayants droit dérivés d’exercer ce droit pas une société de gestion ne peut pas être fondée sur l’art. 17 CB. L’art. 40 al. 1 let. a LDA n’est donc pas compatible avec la protection minimale prévue par la CB. Même dans le cadre de la gestion personnelle au sens de l’art. 40 al. 3 LDA, il serait contraire à la CB d’empêcher un auteur ou ses héritiers de s’adjoindre les services d’un tiers pour exercer le droit exclusif d’exécution. Cette conclusion ne vaut pas pour les artistes suisses car la protection minimale de la CB (qui devrait toutefois s’avérer plutôt désavantageuse en pratique) ne concerne pas les états de fait nationaux. Au surplus, le prévenu n’a exercé aucun droit sans avoir reçu le mandat de le faire. En conclusion, l’infraction de l’art. 70 LDA n’est pas réalisée, serait-ce au stade de la complicité (consid. II.2).

Tarifs des sociétés de gestion ; équité du tarif ; pouvoir de cognition de la CAF ; surveillance de la Confédération ; autonomie des sociétés de gestion ; frais de la procédure. La question de la licéité d’une modification d’un tarif en vigueur peut rester ouverte, SUISA ayant reformulé sa requête en cours de procédure en déposant un nouveau tarif A. Une telle requête vaut résiliation du tarif actuel (consid. 2.2). Il n’y a pas lieu de refuser d’approuver un projet de tarif couvrant de manière exhaustive un domaine d’utilisation dans l’intérêt de toutes les parties concernées, au motif qu’il régit aussi des utilisations non soumises à la surveillance de la Confédération. Mais, dans ce cas, l’approbation n’affecte le tarif que dans la mesure où il est soumis à la compétence de la CAF d’après l’art. 40 LDA (consid. 4). L’existence de plusieurs tarifs pour un domaine d’utilisation, en l’espèce le tarif A pour la SSR et le tarif commun S pour les diffuseurs privés, relève de l’autonomie tarifaire des sociétés de gestion. Mais l’égalité de traitement doit être respectée (consid. 5.2). Le nouveau tarif A diffère de l’actuel en ce sens que la même indemnité forfaitaire, qui couvre aujourd’hui seulement des utilisations soumises à la surveillance de la Confédération, concernerait à l’avenir aussi d’autres utilisations, à savoir des utilisations en ligne sortant du cadre défini par l’art. 22c LDA. Le contrôle de l’équité implique que la CAF dispose d’une base de calcul claire et précise ainsi que de chiffres fiables. En particulier, lorsqu’un tarif couvre également des utilisations non assujetties à la surveillance de la Confédération, la rémunération correspondante doit être mise en évidence afin que l’on puisse identifier, en cas de procédure litigieuse ultérieure, la part de la rémunération concernée par le contrôle de la CAF. En l’espèce, on ne peut pas chiffrer précisément la réduction de l’indemnité annuelle venant rémunérer les utilisations soumises au contrôle fédéral. SUISA n’a pas fourni d’indications à ce sujet en raison des critères difficilement identifiables de l’art. 22c LDA. De telles indications auraient toutefois pour but de permettre un futur examen. Leur absence ne doit donc pas faire obstacle à l’approbation du présent tarif. Par ailleurs, même en utilisant une hypothèse extrême, la réduction de l’indemnité pour les utilisations soumises au contrôle fédéral est marginale, si bien que le tarif n’est pas inéquitable et ne modifie pas la situation actuelle de manière contraire à l’égalité de traitement (consid. 5.2.1). La taxe d’examen et d’approbation par la CAF est fixée d’après l’intérêt pécuniaire de l’affaire, selon les barèmes de l’art. 2 al. 2 OFIPA. La CAF détermine l’intérêt pécuniaire en fonction des effets économiques du tarif, par rapport à la situation dans laquelle la décision n’aurait pas lieu. En l’espèce, l’intérêt pécuniaire équivaut à la réduction – marginale – de l’indemnité pour les utilisations soumises au contrôle de la Confédération (consid. 6).

Qualité pour participer aux négociations tarifaires ; tarif des sociétés de gestion ; valeur litigieuse ; frais de procédure ; contestation pécuniaire. Les associations d’utilisateurs membres d’une association faîtière n’ont pas de droit à prendre part aux négociations tarifaires, à moins que l’association faîtière n’y participe pas. D’autre part, le TF estime qu’en raison du principe de la bonne foi, une association est légitimée à participer à la procédure d’approbation, même si elle n’est pas directement concernée par l’affaire, si sa qualité n’a pas été contestée durant les négociations tarifaires et devant la CAF. A plusieurs reprises, la CAF a toléré la participation simultanée à la procédure d’une association particulièrement concernée et de son association faîtière (consid. 5.1). Lorsqu’il n’existe pas d’associations d’utilisateurs, les sociétés de gestion négocient parfois directement avec les utilisateurs effectifs ou potentiels. Ceux-ci sont alors admis aussi dans le cadre de la procédure devant la CAF (consid. 5.2). Au regard de l’art. 2 OFIPA, il n’y a pas lieu de distinguer selon que le tarif à approuver est litigieux ou non. Cette question ne joue un rôle que pour déterminer la taxe au sein de l’échelon prévu (consid. 10.2.3). En l’espèce, la taxe est fixée d’après les recettes prévisibles que devrait rapporter le tarif durant sa période de validité (consid. 10.3.1), en tenant compte du fait que le tarif n’est pas litigieux et que la CAF a changé récemment sa pratique concernant la détermination de la taxe (consid. 10.3.2). Le montant décidé respecte les principes de l’équivalence et de la couverture des frais (consid. 10.3.3).

OG ZG S2021 49 (d)

2022-2023

Frais de procédure ; responsabilité des hébergeurs ; stay down ; action en cessation. D’après l’art. 426 al. 2 CPP, lorsque la procédure fait l’objet d’une ordonnance de classement ou que le prévenu est acquitté, tout ou partie des frais de la procédure pénale peuvent être mis à sa charge s’il a, de manière illicite et fautive, provoqué l’ouverture de cette procédure ou rendu plus difficile sa conduite. Il y a un comportement illicite si une personne prévenue enfreint clairement des règles juridiques qui l’obligent à agir ou à abstenir. Les frais de la procédure doivent être dans un rapport de causalité adéquate avec le comportement illicite sous l’angle du droit civil. Il est conforme à la Constitution et à la CEDH de condamner aux frais d’une procédure pénale une personne qui a agi de manière illicite au sens de l’art. 41 CO (consid. 2). L’entreprise des prévenus n’assure pas seulement l’accès à Internet, elle héberge les données de ses utilisateurs et utilisatrices, et est donc étroitement liée aux violations du droit d’auteur. Aussi bien les personnes qui téléversent les fichiers que celles qui les téléchargent sont clientes de cette entreprise. Ses prestations sont ainsi en rapport de causalité naturelle et adéquate avec les violations du droit d’auteur, au contraire de ce qui prévalait dans l’affaire objet de l’ATF 145 II 72 ss (consid. 7.2). L’art. 39d LDA n’était pas encore en vigueur au moment des faits reprochés aux prévenus (consid. 8.1). Une obligation de « stay down » était cependant déjà reconnue par une partie de la doctrine, dans des circonstances particulières et dans le cadre de l’action en cessation. Il fallait cependant un risque sérieux de violation future, tel que celui expliqué dans l’ATF 126 III 161 ss. Et l’ordre du juge était dépendant des possibilités d’intervention et de contrôle du fournisseur (consid. 8.2.1). Les fournisseurs d’hébergement n’ont pas l’obligation de surveiller de manière proactive les contenus placés sur leurs serveurs. Mais ils doivent réagir si des indications détaillées concernant une violation leur sont données. Selon certains avis de doctrine, ils ont un devoir de diligence accru aux conditions de l’ATF 126 III 161 ss, en particulier s’il y a déjà eu des violations dans le passé et que de nouvelles violations sont à craindre (consid. 8.2.2). Le modèle d’affaires de l’entreprise des prévenus était orienté sur le téléchargement et sur la distribution en masse de données (consid. 8.3.2). Il a occasionné un grand nombre de demandes de « take down » et de procédures pour violation du droit d’auteur, particulièrement en Allemagne. En d’autres termes, ce modèle d’affaires était lié à un risque fortement augmenté de violations du droit d’auteur, qui était connu des prévenus. Par conséquent, comme l’imprimeur dans l’ATF 126 III 161 ss, ils avaient un devoir de diligence accru (consid. 8.3.3). Les mesures prises par leur entreprise étaient manifestement insuffisantes (consid. 9.2) : l’anonymat des utilisateurs était toléré (consid. 9.2.1), les filtres utilisés n’étaient pas efficaces (consid. 9.2.2 et 9.2.4) et un « crawler » a été installé trop tardivement (consid. 9.2.3). Les prévenus ont donc provoqué l’ouverture de la procédure pénale de manière illicite et fautive, si bien que les frais doivent être mis à leur charge (consid. 11).

Tarif des sociétés de gestion ; équité du tarif ; valeur litigieuse ; frais de procédure ; contestation pécuniaire. Les sociétés de gestion ont la qualité pour recourir contre une décision de la CAF concernant les frais de la procédure d’approbation tarifaire. En l’espèce, les associations d’utilisateurs n’ont pas demandé à être parties (consid. 1). De jurisprudence constante, un changement de pratique doit reposer sur des raisons objectives sérieuses, qui doivent être d’autant plus importantes – vu le principe de la sécurité du droit – si l’ancienne pratique a été considérée pendant longtemps comme pertinente (consid. 2.2). D’après l’art. 16a al. 1 ODAu, les taxes pour la procédure d’approbation tarifaire se déterminent en appliquant par analogie les art. 1 let. a, 2 et 14 à 18 OFIPA (consid. 3). Par la décision attaquée, la CAF a changé sa pratique concernant les taxes : elle interprète l’ATF 148 II 92 en ce sens qu’en cas de tarif non litigieux elle agirait comme garante de l’intérêt public. Sa fonction ne serait alors pas de décider sur les conclusions des parties, mais de permettre aux sociétés de gestion d’exercer les droits soumis à la surveillance de la Confédération. Selon elle, l’intérêt pécuniaire se détermine donc en comparant les situations avec et sans tarif, en d’autres termes en appréciant les recettes à percevoir pendant la durée de validité du tarif (consid. 4). Cela découlerait aussi de l’effet contraignant du tarif pour les tribunaux, prévu par l’art. 59 al. 3 LDA (consid. 6.1). Toutefois, il ne résulte pas de l’ATF 148 II 92 que l’examen de la CAF irait au-delà d’un contrôle des abus ou aurait un effet constitutif (consid. 6.2). D’après les art. 59 et 60 LDA, la mission de la CAF est de veiller à l’équité des tarifs. Elle doit aussi examiner à titre préalable s’il existe des droits pouvant faire l’objet du tarif qui lui est soumis. Mais sa solution, à cet égard, ne lie pas les tribunaux civils (consid. 6.3). Par conséquent, l’exercice des droits par les sociétés de gestion n’est pas rendu possible sur la base de l’art. 59 LDA (consid. 6.4). Par son argumentation, la CAF se méprend sur sa fonction : cette dernière consiste uniquement à examiner le caractère équitable des tarifs, pas à agir comme garante de l’exercice des droits soumis au tarif (consid. 6.5). L’intérêt pécuniaire ne peut donc résulter que d’éventuelles différences dans l’appréciation de l’équité. Mais, vu la possibilité pour la CAF de modifier un tarif sur la base de l’art. 59 al. 2 LDA, il n’est pas forcément égal à zéro dans le cas d’un tarif consensuel (consid. 7.2). En l’espèce, cependant, la procédure d’approbation a eu lieu par voie de circulation et concernait un tarif sur lequel les parties étaient d’accord. Il n’y a eu ni conclusions contraires de tiers, ni séance d’audition des parties (consid. 7.3). Par conséquent l’intérêt pécuniaire doit être considéré comme faible. La CAF a eu tort de ne pas fixer les coûts de la procédure en retenant un intérêt pécuniaire de « 0 à 10’000 francs » selon le tableau de l’art. 2 al. 2 OFIPA. Comme le changement de pratique de la CAF ne repose sur aucune raison objective, il est inadmissible (consid. 7.4).

TF 4A_168/2023 (d)

2022-2023

Oeuvre photographique ; enrichissement illégitime ; restitution ; moyen de preuve. L’instance inférieure considère à juste titre que la valeur du marché fait foi pour déterminer le droit à la restitution dans le cadre de l’action en enrichissement illégitime. L’ATF 132 III 379, qui rejette la fixation du dommage selon la méthode de l’analogie avec la licence, ne vaut que pour l’action en dommages-intérêts de l’art. 41 CO et n’est donc pas pertinent en matière d’enrichissement illégitime. Le recourant ne conteste pas que l’art. 42 al. 2 CO puisse être appliqué par analogie lorsqu’il s’agit d’évaluer la valeur du marché (consid. 3.1). L’autorité inférieure a constaté sans arbitraire que le recourant n’avait pas prouvé que les recommandations de prix de l’association professionnelle SAB (Association Suisse des Banques d’Images et Archives Photographiques) représentaient la valeur du marché (consid. 3.3 et 3.4). En conséquence, elle pouvait à juste titre se fonder sur les moyens de preuve de la partie intimée (consid. 4.1). Les constatations qu’elle a effectuées sur cette base ne sont pas arbitraires et aucune erreur d’appréciation n’est établie. Il n’est pas démontré que le recourant se soit prévalu en première instance du tarif de ProLitteris de manière conforme aux règles de la procédure ; de même, l’autorité inférieure a tenu compte de la pratique de facturation du recourant, mais elle en a déduit sans arbitraire qu’il réclamait lui-même des licences inférieures aux recommandations de la SAB. On ne voit pas en quoi l’intégration automatique d’un filigrane dans la photographie augmenterait la valeur du marché de son utilisation, ni pourquoi il faudrait attribuer une plus grande valeur à une utilisation non autorisée parce que l’auteur n’a pas eu la possibilité d’influence les détails de l’utilisation de son œuvre (consid. 4.2).

TF 4A_317/2022 (f)

2022-2023

Programme d’ordinateur ; contrat de travail ; droit public ; droits moraux ; droit à la paternité de l’œuvre. Selon le principe du créateur de l’art. 6 LDA, l’auteur est la personne physique qui a créé l’œuvre. Cette personne dispose de prérogatives morales, dont le droit de faire reconnaître sa qualité d’auteur. L’intérêt d’une personne physique à faire constater qu’elle est l’auteur d’une œuvre ne saurait disparaître par l’écoulement du temps (consid. 3.1.1). En principe, la création d’une œuvre dans le cadre d’un contrat de travail n’empêche pas l’employé d’acquérir le statut d’auteur. L’employeur peut toutefois prévoir contractuellement un transfert en sa faveur des droits d’auteur sur une œuvre créée par le travailleur dans le cadre des rapports de travail (consid. 3.2). D’après l’art. 17 LDA, l’employeur est seul autorisé à exercer les droits exclusifs d’utilisation sur un logiciel créé par le travailleur dans l’exercice de son activité au service de l’employeur et conformément à ses obligations contractuelles. Historiquement, le projet de loi sur le droit d’auteur prévoyait une réglementation calquée sur l’art. 332 al. 1 CO, c’est pourquoi la formulation de l’art. 17 LDA correspond très largement à celle de l’art. 332 al. 1 CO. L’application de l’art. 17 LDA suppose la réalisation de deux conditions cumulatives, dont la formulation est analogue à celle de l’art. 332 CO, à savoir que le logiciel en question ait été créé par un travailleur « dans l’exercice de son activité au service de l’employeur » et « conformément à ses obligations professionnelles ». Il doit y avoir un lien étroit entre la création du programme informatique et l’activité de l’employé au sein de l’entreprise. D’après la jurisprudence relative à l’art. 332 CO, les deux critères précités sont interdépendants : si l’employé accomplit une obligation contractuelle, il agit forcément dans l’exercice de son activité. Il n’est en revanche pas décisif que le travailleur ait conçu le logiciel pendant ses heures de travail ou durant son temps libre, respectivement sur son lieu de travail ou ailleurs. La nature juridique du régime prévu par l’art. 17 LDA est controversée. Une partie de la doctrine y voit une cession légale en faveur de l’employeur, une autre une licence légale, une autre encore une présomption légale selon laquelle l’employeur a le droit d’utiliser le logiciel. Quoi qu’il en soit, le régime prévu par l’art. 17 LDA ne remet nullement en cause le principe du créateur : la personne qui a créé un logiciel dans le cadre de ses obligations professionnelles conserve en principe le droit à la reconnaissance de sa qualité d’auteur (consid. 3.3). Toutefois, selon la doctrine majoritaire, l’art. 17 LDA ne s’applique pas aux logiciels créés par des collaborateurs dans le cadre de rapports relevant du droit public (consid. 3.4). En l’espèce, il n’est pas nécessaire de trancher la question de savoir si c’est l’art. 17 LDA ou l’art. 70 al. 2 de la loi cantonale sur l’Université de Lausanne qui trouve application, et si le régime juridique prévu par ces deux dispositions est identique. L’autorité précédente a considéré que la loi cantonale réglait les droits d’utilisation des programmes informatiques de la même manière que l’art. 17 LDA. Or, la recourante ne conteste pas ce point. En l’espèce, la cour cantonale a retenu que la mention « travail de thèse » figurant dans le cahier des charges de la recourante englobait toute démarche relative à la réalisation de la thèse en question. Elle a en outre constaté, sans arbitraire, que les logiciels litigieux étaient un outil indispensable à la rédaction de la thèse de l’intéressée et que son travail n’aurait pas pu aboutir sans leur utilisation. L’affirmation de la recourante selon laquelle les logiciels qu’elle a conçus peuvent être utilisés dans d’autres domaines que le champ d’études de sa thèse n’y change rien (consid. 5.2.4). C’est donc bien l’Université de Lausanne qui peut exercer les droits d’auteur sur lesdits logiciels.

Art. 22c, 24b, 33, 35, 60 LDA

D’après les arrêts du TAF du 20 janvier 2012 (recte : 3 janvier 2012) et du TF du 20 août 2012 sur le tarif A télévision de Swissperform, le droit à rémunération de l’art. 35 LDA ne s’éteint pas lorsqu’un phonogramme disponible sur le marché est intégré dans un vidéogramme. Mais le support est alors protégé uniquement comme vidéogramme. Si ce vidéogramme est réalisé en vue d’une diffusion, il ne sera généralement pas « disponible sur le marché », si bien que c’est la protection de l’art. 33 al. 2 LDA qui s’applique, et pas celle de l’art. 35 LDA. L’artiste a le droit exclusif de déterminer si le phonogramme contenant sa prestation sera intégré dans un vidéogramme. Si ce dernier est reproduit à des fins d’émission, l’art. 24b LDA ne s’applique pas puisque le vidéogramme n’est pas « disponible sur le marché ». En revanche, l’artiste peut faire valoir son droit exclusif selon l’art. 33 al. 2 lit. c LDA. Quant à la mise à disposition du support selon l’art. 22c LDA, elle est soumise à la gestion collective obligatoire même si ce support n’est pas « disponible sur le marché », pour autant qu’il contienne des œuvres musicales non théâtrales (consid. II 3.2. d). La musique contenue dans des films musicaux n’est pas de la musique « non théâtrale » au sens des art. 22c et 24b LDA, car elle a une plus grande valeur que le film et ne lui est pas subordonnée. De surcroît, elle n’est pas interchangeable puisqu’elle détermine la dramaturgie du film. Enfin, le film ne peut pas être joué sans la musique (consid. II 3.3.b). Les revenus qu’un diffuseur réalise grâce à la vente de ses programmes ou aux licences données sur ceux-ci sont directement en relation avec les activités de diffusion et font donc partie des recettes brutes sur lesquelles doit être calculée l’indemnité prévue à l’art. 60 LDA (consid. II 3.5. b). D’après ce principe des recettes brutes, il faut de plus prendre en compte les recettes publicitaires et de sponsoring sans déduction des frais d’acquisition correspondants. Le fait qu’une telle déduction ait été tolérée dans le passé d’un commun accord n’y change rien : les diffuseurs n’ont pas de droit à une telle déduction (consid. II 3.6. b). Le code ISRC doit en principe être communiqué à Swissperform par le diffuseur. S’il n’a pas été délivré, le tarif prévoit la remise d’autres données à titre subsidiaire. Le passage du tarif selon lequel le code IRSC doit être livré « pour autant qu’il soit étayé par des documents ou qu’il ait été communiqué à la SSR sous une forme lisible par le fournisseur de l’enregistrement au moment de la livraison, à partir de l’entrée en vigueur du tarif » doit être supprimé. Quant au code ISAN destiné à identifier les films musicaux, il ne doit être communiqué à Swissperform que si la SSR l’a reçu dans une forme lisible par ses systèmes informatiques (consid. II 3.7. b).

Art. 5 al. 4, 29, 190 Cst. ; 1 al. 2, 10 al. 2 lit. e, 10 al. 2 lit. f, 19 al. 1 lit. a, 22 al. 2, 46 al. 2, 47 al. 1 LDA

Si la CAF entend modifier elle-même la proposition tarifaire des sociétés de gestion, elle doit accorder aux parties le droit d’être entendu (consid. 2.2). Dans le domaine du droit d’auteur, en matière de droit à rémunération, les autorités doivent tenir compte du droit international public. Les traités internationaux et le droit interne font partie d’un système juridique uniforme, les particuliers ne pouvant se prévaloir des premiers que s’ils ont un caractère « self executing ». Tel est le cas lorsqu’un traité contient des normes claires et suffisamment déterminées permettant de trancher un cas particulier, mais pas lorsqu’il s’adresse au législateur en prescrivant comment une matière doit être réglementée (consid. 3.2). En revanche, les tribunaux suisses n’ont pas à respecter la jurisprudence européenne, lorsqu’il y a des raisons objectives de consacrer une solution différente (consid. 3.3). La LDA doit être interprétée de manière compatible avec les accords ADPIC (consid. 3.4). Les garanties minimales découlant du droit d’être entendu englobent le droit à une orientation préalable, à pouvoir s’exprimer, à être écouté, à consulter le dossier et à recevoir une décision motivée. Les parties ont le droit de recevoir toutes les écritures déposées, qu’elles apportent ou non des éléments nouveaux ou importants, et de prendre position à leur sujet (consid. 4.4.1). Une violation du droit d’être entendu peu importante peut exceptionnellement être réparée si la partie concernée a la possibilité de s’exprimer en procédure de recours. Même en cas de violations graves, il faut renoncer à un renvoi afin d’éviter le formalisme excessif et les retards inutiles. Mais la doctrine s’exprime majoritairement pour un renvoi en cas de telles violations graves du droit d’être entendu (consid. 4.4.3). En l’espèce, la CAF a invité les sociétés de gestion à déposer un tarif totalement nouveau, qu’elle a approuvé sans en informer les parties adverses et le Préposé à la surveillance des prix, et sans requérir leur détermination. De plus, le tarif aurait dû entrer en vigueur dès avant la motivation écrite de la décision d’approbation (consid. 5.1). Ces violations du droit d’être entendu sont graves, n’étaient pas justifiées par des impératifs de rapidité ou par des droits de tiers et n’étaient pas proportionnées. Elles ne peuvent être réparées en procédure de recours, car les parties lésées seraient privées d’une instance judiciaire. La décision doit donc être annulée (consid. 5.4). En l’espèce, on peut se demander si le devoir de négocier au sens de l’art. 46 al. 2 LDA a été respecté, car les mêmes positions ont été répétées de fois en fois, sans entrer en matière sur les arguments des parties adverses. Mais la question peut rester ouverte, car le devoir de négocier a de toute manière été violé s’agissant du nouveau projet tarifaire déposé directement devant la CAF, ce qui était une raison supplémentaire pour que celle-ci requière la détermination des parties adverses (consid. 6.2). Enfin, la CAF a négligé de demander l’avis du Préposé à la surveillance des prix sur ce nouveau projet (consid. 6.3). Nonobstant le renvoi, pour des questions d’économie de la procédure, il convient de trancher déjà les questions préalables de droit matériel et celle de savoir si des tarifs séparés sont possibles (consid. 7.2 et 7.3). Le droit de retransmission de l’art. 10 al. 2 lit. e LDA n’est pas identique à celui que consacrait l’aLDA, dans la mesure où il n’exige pas une communication publique. On ne peut donc pas déduire de l’ATF 119 II 62 (consid. 3b) que la distribution d’un signal dans des chambres d’hôtes représenterait une retransmission (consid. 8.5). Le droit de faire voir ou entendre une émission au sens de l’art. 10 al. 2 lit. f LDA implique qu’il n’y ait pas d’autres installations entre l’appareil de réception et le public, mis à part les amplificateurs et les haut-parleurs. Ce droit englobe tout ce qui ne représente pas un usage privé au sens de l’art. 19 al. 1 lit a et b LDA. En d’autres termes, il concerne la réception publique (consid. 8.6). Ce qui est « public » en droit d’auteur n’est défini que pour le droit de divulgation (art. 9 al. 3 LDA) et qualifie un grand nombre de personnes ne constituant pas un cercle privé au sens de l’art. 19 al. 1 lit. a LDA. Cette notion est vague et doit être interprétée (consid. 8.7). Pour déterminer ce qui était une « communication publique » dans le cadre du droit de retransmission de l’aLDA, le TF ne se basait pas sur le nombre d’abonnements, mais sur l’étendue territoriale du réseau. Aujourd’hui, le nombre d’abonnés est déterminant d’après l’art. 22 al. 2 LDA. (consid. 8.7.2). Ce nombre, d’emblée, doit être restreint (consid. 8.7.3). Quant à elle, la CJUE admet le caractère public d’une diffusion dans des chambres d’hôtel, parce qu’elle prend en compte aussi les personnes se trouvant dans d’autres endroits de l’hôtel et parce que les personnes qui occupent les chambres se succèdent rapidement. Contrairement à ce qui vaut en droit allemand, ce critère n’implique pas que les personnes qui se succèdent consultent la même œuvre (consid. 8.7.4). Le droit de communiquer publiquement des émissions de l’art. 11bis al. 1 ch. 2 CB implique l’existence d’un nouveau public. Tel est le cas lorsque la communication intervient dans un but lucratif ou devant un cercle de personnes plus large que celui visé par l’auteur lorsqu’il a accordé son autorisation de diffusion [à l’organisme de radio ou de télévision] (consid. 8.7.5). D’après l’art. 8 WCT, la communication est publique si le contenu est disponible pour chacun, de l’endroit et au moment qu’il choisit individuellement. Ce ne sont pas les différents accès qui sont déterminants, mais la mise à disposition effectuée au même moment pour tous. L’art. 8 WCT n’est toutefois pas applicable à la réception d’émissions (consid. 8.7.6). Ce qui est « public » n’est donc pas défini uniformément en droit d’auteur et n’est pas apte à distinguer les utilisations libres de celles qui sont soumises à redevance (consid. 8.7.6). L’opposé de l’usage public est l’usage privé au sens de l’art. 19 al. 1 lit. a LDA. Les personnes étroitement liées au sens de cette disposition ne doivent pas être réunies au hasard, leur nombre doit être restreint et il doit exister entre elles une communauté de destin. Tel est le cas entre les élèves d’un internat, entre les habitants d’un même logement ou d’une pension familiale, mais pas entre les clients d’un hôtel qui ne se connaissent que superficiellement et qui changent rapidement (consid. 8.8.1). Les chambres d’un hôtel sont toutefois des lieux privés, sous réserve d’une appréciation économique ou de la reconnaissance d’un caractère public parce que les divers occupants se succèdent rapidement (consid. 8.8.2). D’un point de vue économique, l’application de l’exception d’usage privé à des actes de nature commerciale peut sembler inadmissible. Cette argumentation est essentiellement fondée sur le texte de l’art. 22 aLDA. Mais même sous l’empire du nouveau droit, l’exception d’usage privé implique que l’utilisation ne procure aucune recette et ne porte pas atteinte à l’exploitation normale de l’œuvre (consid. 8.8.3). La jurisprudence du TF rendue en application de l’art. 22 aLDA a d’ailleurs été reprise pour interpréter la loi actuelle (consid. 8.8.4). Un but lucratif de l’utilisateur d’œuvre est donc incompatible avec l’exception de l’art. 19 al. 1 lit. a LDA (consid. 8.9.2). En l’espèce, il faut se demander qui est l’utilisateur d’œuvres (consid. 8.9.3). Les actes visés par l’art. 10 al. 2 lit. a-f LDA sont accomplis par des intermédiaires, et non par la personne qui bénéficie de l’œuvre. Ils se produisent avant la « consommation » de l’œuvre (consid. 8.9.4). L’utilisateur d’œuvres dans des chambres d’hôtes n’est donc pas l’occupant de la chambre, mais l’intermédiaire, par exemple l’hôtelier (consid. 8.9.6). Cette approche pourrait certes être remise en cause par la convergence des technologies, à savoir le fait que des émissions peuvent être reçues sur les propres appareils du client (tablettes, ordinateurs portables ou smartphones). On peut en effet se demander quel degré d’infrastructure l’hôtelier doit mettre à disposition pour être débiteur de redevances. La fourniture d’un réseau WLAN ne suffit pas. De plus, la perception d’une rémunération lorsqu’il n’y a pas de nouveau public peut paraître inopportune. Il appartient cependant au pouvoir politique d’adapter le droit au progrès technique (consid. 8.10). La réception d’émissions dans des chambres d’hôtes est donc soumise à redevance (consid. 8.11). Un tarif complémentaire est admissible lorsqu’il s’agit de compléter un tarif existant jusqu’à la fin de sa période de validité, que la situation juridique est incertaine et qu’un vide tarifaire menace. Le tarif complémentaire doit cependant être intégré dans le tarif principal à son échéance, afin que l’art. 47 LDA soit respecté (consid. 9.2).

Art. 15, 16 WPPT ; 12 CR ; 190 Cst. ; 49 PA ; 82 lit. a, 86 al. 1 lit. a, 90 LTF ; 47, 59, 60 LDA

D’après la systématique de l’art. 15 WPPT, des réserves au sens de l’alinéa 3 ne sont nécessaires que s’il s’agit de déroger au principe de l’alinéa 1, c’est-à-dire à la redevance équitable elle-même. Aussi longtemps qu’une telle redevance équitable est prévue, l’art. 16 WPPT ne s’applique pas (c’est-à-dire notamment l’obligation de ne pas instaurer, dans le domaine des droits voisins, des exceptions plus larges qu’en droit d’auteur) (consid. 6.2). Ni l’art. 12 CR, ni l’art. 15 WPPT, ne précisent ce qu’il faut entendre par redevance « équitable ». Les législateurs nationaux ont donc une marge de manœuvre relativement large pour transposer les obligations internationales. Le simple fait que les droits d’auteur et les droits voisins doivent tous deux être protégés ne signifie pas qu’ils doivent être valorisés de la même manière : la valeur des droits voisins est indépendante de celle des droits d’auteur et la relation entre ces deux catégories de droits varie selon les circonstances. Il est possible de leur attribuer la même valeur, mais cela n’est pas obligatoire (consid. 6.3). Les pourcentages de 10 %, respectivement de 3 %, prévus par l’art. 60 LDA, ne représentent pas des taux normaux, mais sont des limites supérieures qui ne peuvent être dépassées qu’à la condition prévue par l’art. 60 al. 2 LDA, à savoir que lesdits pourcentages ne suffisent pas à procurer une rémunération équitable aux ayants droit. Mais, à cette condition, un dépassement est alors possible (consid. 6.4). Pour juger de ce qui est équitable, il est difficile de se baser sur des valeurs du marché réelles, car la gestion collective obligatoire empêche justement le développement d’un marché comparable. Et si l’on voulait rechercher des valeurs du marché fictives, il faudrait tenir compte des difficultés pratiques auxquelles se heurterait la gestion individuelle, qui conduiraient souvent à une rémunération moindre, voire à une disparition de la rémunération. La détermination d’un prix concurrentiel fictif semble donc plutôt hypothétique (consid. 6.5). Dans ces conditions, il ne peut être reproché au législateur d’avoir concrétisé la notion d’équité sur la base d’une appréciation politique, et d’avoir attribué aux droits voisins une autre valeur qu’aux droits d’auteur. Le rapport légal 10:3 est compatible avec les traités internationaux et lie le TF d’après l’art. 190 Cst. La loi prévoit certes expressément une possibilité de déroger aux limites maximales, donc au rapport 10:3, s’il y a pour cela des raisons particulières. Une interprétation ayant pour conséquence une dérogation générale à ce rapport ne serait toutefois plus conforme à la loi, et n’est pas imposée par l’art. 15 al. 1 WPPT (consid. 6.6). La déduction des frais d’acquisition de la publicité de l’assiette de la redevance peut être rediscutée dans le cadre d’un tarif futur, mais le rapport 10:3 s’oppose à ce qu’elle soit compensée par un supplément seulement pour les droits voisins, et pas pour les droits d’auteur (consid. 7.1). Il n’est pas démontré que le marché en ligne soit comparable à celui de la radio et de la télévision, et l’affirmation selon laquelle les droits de reproduction étaient plus valorisés avant d’être soumis à la gestion collective obligatoire (le 1er juillet 2008) n’est pas suffisamment étayée (consid. 7.2). D’après la jurisprudence du TF, les comparaisons tarifaires avec l’étranger sont certes admissibles et judicieuses ; elles n’ont cependant qu’une valeur limitée, vu que les législations nationales connaissent des critères différents et que les circonstances de fait peuvent varier. Néanmoins, étant donné les difficultés à apprécier la rémunération équitable, la comparaison avec l’étranger est encore l’un des critères les moins discutables, pour autant que l’on puisse tenir compte de manière appropriée des différences pertinentes (consid. 7.3.1).

Art. 99 al. 2 LTF, art. 10 al. 2 lit. f LDA, art. 37 lit. b LDA, art. 67 al. 1 lit. h LDA, art. 67 al. 1 lit. i LDA, art. 69 al. 1 lit. e LDA

En instance cantonale, les recourantes n’avaient pris aucune conclusion basée sur l’art. 67 al. 1 lit. h LDA concernant le droit de retransmettre une œuvre. Une telle conclusion devant le TF est donc nouvelle et, partant, irrecevable d’après l’art. 99 al. 2 LTF (consid. 1.2). L’art. 67 al. 1 lit. i LDA réprime pénalement la violation du droit accordé à l’auteur par l’art. 10 al. 2 lit. f LDA de faire voir ou entendre son œuvre. Comme exemples d’application de cette dernière disposition, la doctrine cite le cas du restaurateur dont la clientèle peut voir une émission télévisée, celui du grand magasin qui diffuse de la musique ou celui du coiffeur qui travaille avec un poste de radio allumé. En revanche, elle considère que le cas de l’hôtelier dont les clients ont la possibilité de regarder la télévision ne constitue pas une mise à disposition au sens de l’art. 10 al. 2 lit. f LDA (consid. 2.1.1). L’art. 69 LDA n’assure pas la protection du droit d’auteur mais celle des droits voisins. L’art. 69 al. 1 lit. e LDA sanctionne une infraction au droit exclusif de l’organisme de diffusion de faire voir ou entendre son émission selon l’art. 37 lit. b LDA. Ce droit correspond à celui conféré aux auteurs par l’art. 10 al. 2 lit. f LDA (consid. 2.1.2). En l’espèce, les œuvres diffusées n’étaient pas transmises par les intimés à leurs clients de manière à ce qu’ils puissent en profiter. La prestation des intimés consistait à permettre à leurs clients d’accéder à un serveur leur délivrant les codes de décryptage de programmes télévisés codés, cela sans payer l’abonnement officiel y relatif. Ainsi, les intimés ne diffusaient pas directement les programmes des recourantes sans installation supplémentaire, comme le restaurateur ou le coiffeur dans les exemples précités. L’hôtelier rend également « perceptible » à ses clients les programmes de télévision que ceux-ci peuvent visionner dans leurs chambres grâce à des postes de télévision. La doctrine considère cependant qu’il ne s’agit pas là d’un cas d’application de l’art. 10 al. 2 lit. f LDA. Cette disposition n’est donc pas violée en l’espèce (consid. 2.4).

Art. 33 ss LDA

La protection des artistes interprètes est accordée à la personne qui a exécuté l’œuvre ou qui a collaboré à l’exécution sur le plan artistique. Ce qui est protégé, c’est l’exécution d’une œuvre, soit d’une création de l’esprit. Lorsque l’action créatrice et l’exécution coïncident de manière à ne pas pouvoir être séparées, on ne pourra accorder en principe que la protection du droit d’auteur, puisqu’au moment de la prestation immatérielle il n’y a pas encore d’œuvre qui pourrait être exécutée. Cela vaut notamment pour la musique improvisée (consid. 3.a). En cas de diffusion de musique par la TV, les droits voisins sont dus en plus des droits d’auteur, même si les DJs touchent eux-mêmes un cachet et s’il leur arrive d’utiliser des phonogrammes qu’ils ont eux-mêmes créés ou d’accompagner la diffusion des mix d’une animation à caractère artistique (consid. 3.b).