(X. SA [société suisse] c. Y. Inc., Z. [société de droit canadien]). Recours contre la sentence finale rendue le 25 novembre 2015 par un Arbitre unique CCI.
Rappel de la règle jurisprudentielle qui veut que des fautes de procédure ou une décision matériellement erronée ne suffisent pas à fonder l’apparence de prévention de l’arbitre, sauf erreurs particulièrement graves ou répétées qui constitueraient une violation manifeste de ses obligations. Cette règle, qui ne sanctionne que des fautes tout à fait exceptionnelles, ne saurait être détournée pour permettre à une partie ne pouvant pas invoquer avec succès l’un ou l’autre des motifs prévus aux lettres b à e de l’art. 190 al. 2 LDIP d’obtenir l’annulation de la sentence par le biais d’un recours fondé sur l’art. 190 al. 2 let. a LDIP et consistant en une critique en règle des constatations de fait et considérations juridiques de l’arbitre – ce qui reviendrait à faire du TF une simple juridiction d’appel (consid. 3.1). Ni le déroulement de la procédure – au demeurant marquée par le vif antagonisme et comportement procédural inadéquat des parties – ni le contenu de la sentence ne révèlent d’élément qui puisse faire douter de l’impartialité de l’arbitre (consid. 3.3.1). Recours rejeté.
Antonio Rigozzi, Erika Hasler
(Sàrl X. [société de droit algérien] c. Y. AG [société de droit allemand])
Recours contre la sentence finale rendue par un tribunal arbitral CARICI. De jurisprudence constante, des fautes de procédure ou une décision matérielle erronée ne suffisent pas à fonder l’apparence de prévention d’un tribunal, sauf erreurs particulièrement graves ou répétées qui constitueraient une violation manifeste des ses obligations. Par ailleurs, la réserve relative aux fautes graves ou répétées, ouvrant par hypothèse la porte d’un recours fondé sur l’art. 190 al. 2 let. a LDIP, ne saurait être détournée pour servir de base à une critique appellatoire des constatations de fait ou considérations juridiques sur lesquelles repose la sentence, ni pour permettre à une partie ne pouvant pas invoquer avec succès les motifs prévus aux lettres b à e de l’art. 190 al. 2 LDIP d’en obtenir néanmoins l’annulation (consid. 5.3).
Antonio Rigozzi, Erika Hasler
(A. SA [société de droit suisse] c. B. Sàrl [société de droit luxembourgeois])
Recours contre la sentence rendue le 14 novembre 2014 par l’arbitre unique ad hoc. Architecte désigné nommément comme arbitre dans la convention d’arbitrage, ayant décidé de se faire épauler à ses propres frais par deux avocats agissant respectivement en qualité de conseil et secrétaire du tribunal. La mission juridictionnelle de l’arbitre est éminemment personnelle, le contrat d’arbitre étant conclu intuitu personae. Cela implique que l’arbitre ne peut déléguer l’accomplissement de sa mission à autrui, mais n’exclut pas nécessairement qu’il puisse faire appel à l’assistance de tiers dans la conduite de l’arbitrage. Il est généralement admis que la possibilité de nommer un secrétaire du tribunal, prévue en arbitrage interne par l’art. 365 al. 1 CPC, vaut aussi en matière d’arbitrage international. Les tâches du secrétaire sont comparables à celles d’un greffier judiciaire : elles n’excluent pas, en particulier, une certaine assistance dans la rédaction de la sentence, sous le contrôle et selon les directives du tribunal, étant entendu que, sauf convention contraire des parties, les fonctions de nature judiciaire demeurent l’apanage exclusif des arbitres. Sous cette même réserve et dans l’exercice de ses prérogatives en matière procédurale, il est également admis que l’arbitre puisse faire appel à des consultants externes (consid. 3.2.2). En l’occurrence, il ne ressort pas du dossier de l’arbitrage que le rôle joué par les avocats ayant assisté l’arbitre ait été au-delà d’un soutien administratif et juridique dans le traitement de questions de procédure. La sentence indique expressément que les individus en question n’ont pas participé à la prise de décision ni influencé l’issue du litige. Dès lors, le moyen tiré de la composition irrégulière du tribunal tombe à faux (consid. 3.3-3.4). Recours rejeté.
Antonio Rigozzi, Erika Hasler
(Club X. SA c. Z. [société de droit espagnol]) (Ne reproduisant pas le consid. 5 résumé ci-après ; cf. TF 4A_282/2013 du 13 novembre 2013)
Recours contre la sentence rendue le 12 avril 2013 par le TAS. Confirmation de la jurisprudence fédérale selon laquelle le grief tiré de la composition irrégulière du tribunal arbitral ne couvre pas seulement le non-respect des règles assurant l’indépendance et l’impartialité des arbitres (art. 180 LDIP), mais également l’hypothèse où le tribunal a été constitué en violation de la convention des parties (art. 179 LDIP). Le nombre d’arbitres est un élément important de ladite convention, tant et si bien que l’art. 360 CPC y consacre une disposition spécifique, applicable par analogie à l’arbitrage international en vertu du renvoi de l’art. 179 al. 2 LDIP (consid. 4).
Cela étant, dans la mesure où elle tranche définitivement une contestation au sujet de la composition de la formation arbitrale, une décision incidente méconnaissant l’accord des parties au sujet du nombre d’arbitres, qu’elle émane du tribunal lui-même ou d’un organe de l’institution, peut et doit être attaquée directement devant le TF (art. 190 al. 3 LDIP), sous peine de forclusion. Question, laissée ouverte, de l’incohérence introduite dans la jurisprudence fédérale du fait que les décisions institutionnelles sur les demandes de récusation ne peuvent pas, quant à elles, faire l’objet d’un recours immédiat (cf. TF 4A_644/2009 du 13 avril 2010, résumé dans l’édition 2009/2010 du présent ouvrage) (consid. 5.3.2). Recours rejeté.
Antonio Rigozzi, Erika Hasler
(X. [Roel Paulissen] c. UCI et Fédération Z. [RLVB])
Recours contre la sentence rendue par le TAS le 23 décembre 2011. La règle jurisprudentielle selon laquelle la partie qui entend récuser un arbitre doit invoquer le motif de récusation dès qu’elle en a connaissance vise aussi bien les motifs de récusation connus de cette partie que ceux qu’elle aurait pu connaître en faisant preuve de l’attention voulue (consid. 2.1.2). Argument du recourant selon lequel, d’une part, l’arbitre nommé par l’UCI aurait manqué à son devoir de révéler une circonstance figurant dans la liste orange des IBA Guidelines on Conflicts of Interest in International Arbitration (art. 3.1.3), à savoir le fait d’avoir été nommé à plus que deux reprises par cette même partie au cours des trois dernières années (en l’espèce, en tout cas cinq fois, dont quatre avant sa nomination dans l’affaire concernant le recourant, le tout en moins d’une année), et, d’autre part, du fait même de ce manquement et parce que toutes les affaires concernées portaient sur la même question juridique, cet arbitre ne présentait pas des garanties suffisantes d’indépendance et d’impartialité (consid. 2.2.1). Les connaissances du conseil ayant représenté le recourant devant le TAS (un « spécialiste de l’arbitrage sportif et, singulièrement, de la jurisprudence du TAS ainsi que des arcanes de cette institution ») sont attribuables au recourant. Il n’est pas contesté qu’à la date de l’audience ce dernier connaissait au moins trois des sentences rendues dans les cinq affaires susmentionnées. Une ancienne publication du conseil du recourant montre, par ailleurs, qu’il avait une plus ample connaissance de la propension de l’intimée à désigner régulièrement l’arbitre en question. Partant, pour remplir son devoir de curiosité, le recourant aurait dû, au plus tard à l’audience, demander formellement à cet arbitre combien de fois il avait été nommé par l’UCI pour siéger dans une formation du TAS, et de révéler les parties concernées et les questions soumises aux formations dans ces affaires. En l’occurrence, le fait d’avoir demandé à l’arbitre « s’il y a[vait] quelque chose de nouveau » suite aux sentences dont le recourant avait déjà connaissance à cette époque n’était pas suffisant. Le devoir de révélation de l’arbitre n’existe qu’à l’égard de faits dont l’arbitre a des raisons de penser qu’ils ne sont pas connus de la partie qui pourrait s’en prévaloir. Or, pour les raisons déjà évoquées, tenant à la personne du conseil du recourant, l’arbitre questionné « pouvait admettre de bonne foi que cette exception trouvait à s’appliquer en l’espèce ». Recourant forclos à remettre en cause la régularité de la composition de la formation par le biais d’un recours contre la sentence (consid. 2.2.2). Question de l’applicabilité de la note explicative n° 6 relative à l’art. 3.1.3 des IBA Guidelines à l’arbitrage du TAS laissée ouverte (cf. consid. 2.2.1 in fine résumant la position – favorable – du TAS à cet égard) (voir également le résumé dans le chapitre Droit du sport au sujet de cet arrêt). Recours rejeté.
Antonio Rigozzi, Erika Hasler
(Etat X. [Israël] c. Société Z. [NIOC])
Recours contre la sentence rendue le 10 février 2012 par un Tribunal arbitral ad hoc. Cas particulier dans lequel l’arbitre du recourant a été désigné par une décision d’un tribunal français, avant que le siège de l’arbitrage ait été fixé en Suisse (à Genève) par le tribunal arbitral, une fois constitué. S’il est vrai qu’en Suisse, selon la jurisprudence du TF, la décision du juge d’appui de désigner un arbitre ne jouit pas de la force de la chose jugée, tel ne peut être le cas en l’espèce, eu égard à la configuration juridique très particulière de cette affaire, de la décision finale rendue par la plus haute juridiction civile de France (la Cour de cassation), confirmant la désignation en pleine connaissance de tous les éléments pertinents et après un ample débat contradictoire au sujet de la compétence internationale des tribunaux français pour désigner un arbitre à la partie récalcitrante (consid. 3.3.2). Recours rejeté.
Antonio Rigozzi, Erika Hasler
(X. [société turque] c. Y. [société américaine] Inc.)
Recours contre la sentence rendue le 8 décembre 2011 par le Tribunal arbitral CCI.
La décision de la Cour internationale d’arbitrage de la CCI rejetant la demande de récusation visant les trois membres du tribunal après l’annulation de leur première sentence, émanant d’un organisme privé, ne pouvait faire l’objet d’un recours direct au TF. Elle ne lie pas la Haute cour, qui peut revoir librement si les circonstances invoquées à l’appui de la demande de récusation sont de nature à fonder le grief de composition irrégulière du tribunal (consid. 2.1).
--> (sur ce point, et sur la différence de traitement entre les décisions sur récusation émises par les instances compétentes des institutions arbitrales et celles rendues par le juge d’appui, cf. 4A_14/2012 du 2 mai 2012, consid. 2.2.1-2.2.3).
Le même tribunal est en principe compétent pour statuer derechef en cas d’annulation d’une sentence par le TF. Argument de la recourante selon lequel, au vu des circonstances particulières résultant du déroulement de la procédure arbitrale et de l’annulation de leur première sentence, les membres du tribunal n’avaient plus l’indépendance d’esprit nécessaire pour reprendre le dossier sereinement afin de rendre une nouvelle décision. Les arbitres ne pouvant réexaminer que les questions laissées ouvertes dans la décision du TF leur renvoyant la cause suite à l’annulation de leur première sentence (en l’occurrence, un seul point spécifique), étant au surplus liés par cette sentence, le reproche d’un défaut d’impartialité par rapport à l’objet du litige est sans fondement. Par ailleurs, selon la jurisprudence du TF, seules des fautes de procédure particulièrement graves ou répétées, constituant une violation manifeste des obligations du tribunal, sont propres à fonder l’apparence de prévention (consid. 2.2.3).
Recours rejeté.