(A. c. B.). Recours contre la sentence rendue le 30 novembre 2021 par un Tribunal Arbitral CCI avec siège à Lausanne. Voir le récapitulatif des faits pertinents présenté ci-dessus, avant le résumé des considérants de l’arrêt en relation avec l’art. 190 al. 2 let. b LDIP. Le recourant fait valoir que le Tribunal aurait violé à la fois son droit d’être entendu et son droit à l’égalité de traitement en se fondant, dans sa sentence, sur des allégations factuelles introduites par son adverse partie bien après la date butoir (« cut off date ») fixée à cet effet dans les règles de procédure convenues entre le Tribunal et les parties. Pareille argumentation est vouée à l’échec dès lors que le recourant ne démontre pas qu’il ne lui aurait pas été possible d’exciper de la tardiveté de la production adverse, ou de prendre position sur les allégations en question en cours de procédure, et que l’application des règles de procédure par le Tribunal arbitral échappe à la cognition du TF lorsqu’il est appelé à se prononcer sur un recours dirigé contre une sentence arbitrale internationale (consid. 4 et 5). Recours rejeté.
Antonio Rigozzi, Erika Hasler
(A. Ltd, B. c. C. Sàrl). Recours contre la sentence rendue le 24 mars 2020 par un Tribunal arbitral opérant sous l’égide de la Swiss Chambers’ Arbitration Institution avec siège à Lugano. Litige issu d’une série de contrats concernant la distribution, par C. Sàrl, sur les territoires italiens et de la République de San Marin, d’un logiciel de gestion créé par A. Ltd. et B. Les contrats prévoyaient un droit d’option exerçable en cas de cessation des travaux de développement du logiciel, permettant à C. Sàrl d’acquérir une licence d’utilisation exclusive, de durée illimitée, sur les territoires couverts par les accords. Dépôt, après quelques années, d’une demande d’arbitrage par A. Ltd et B., et de demandes reconventionnelles par C. Sàrl Sentence partielle du Tribunal arbitral, constatant notamment que les litiges relatifs à la politique commerciale de C. Sàrl avaient été transigés par la conclusion d’accords ultérieurs entre les parties, que le droit d’option avait été exercé valablement par la défenderesse, et que cette dernière avait violé certaines de ses obligations contractuelles, la détermination de l’existence et du quantum de l’éventuel dommage subi par les demandeurs en raison de ces violations étant réservée à une phase ultérieure de l’arbitrage. Les recourants reprochent au Tribunal arbitral d’avoir enfreint leur droit d’être entendus en rendant une sentence fondée sur un motif imprévisible, à savoir que leur renonciation à l’activité de développement du logiciel, qui avait ouvert la porte à l’exercice du droit d’option de C. Sàrl, pouvait être déduite de l’extension pour une durée prolongée des accords entre les parties. Selon l’adage jura novit curia, tel qu’interprété par la jurisprudence, il appartient aux parties d’envisager les différentes hypothèses juridiques envisageables pour résoudre les questions soumises au Tribunal, et de développer leurs argumentations en conséquence, y compris en présentant des arguments subsidiaires ou alternatifs, répondant à la gamme des considérations qui peuvent entrer en ligne de compte (consid. 5). Recours rejeté.
Antonio Rigozzi, Erika Hasler
(A. [ressortissant français domicilié en Suisse] c. B. [entrepreneur russe domicilié au Royaume-Uni], C. SA [société de droit suisse], D. [filiale de C. ayant son siège en France]). Recours contre la sentence rendue le 11 juin 2021 par un Tribunal arbitral avec siège à Lausanne. Voir le récapitulatif des faits pertinents présenté ci-dessus, avant le résumé des considérants de l’arrêt en relation avec l’art. 190 al. 2 let. c LDIP. Le recourant reproche au Tribunal d’avoir fondé sa sentence sur des motifs imprévisibles en rapport avec la question de la réduction des honoraires du mandataire pour cause d’exécution défectueuse du mandat. Selon le recourant, l’effet de surprise découle de ce que le Tribunal a appliqué, à cet égard, le critère de l’inexécution au lieu de celui de l’inutilité des prestations litigieuses, qui avait été avancé par les défendeurs et sur lequel s’étaient focalisées les écritures des parties dans l’arbitrage. En droit suisse, pour autant que la convention d’arbitrage ne restreigne pas la mission du tribunal arbitral à l’application des seuls moyens juridiques soulevés par les parties, l’adage jura novit curia veut que les arbitres apprécient librement la portée juridique des faits qui leur sont présentés, statuant au besoin sur la base de règles de droit autres que celles invoquées par les parties. A titre exceptionnel, il convient pour le tribunal d’interpeller les parties lorsqu’il envisage de fonder sa décision sur des règles ou considérations juridiques qui n’ont pas été évoquées dans la procédure et dont les parties ne pouvaient pas supputer la pertinence. En l’espèce, compte tenu du caractère central, aux fins de la résolution du litige, des critères à appliquer à la question de la réduction des honoraires pour cause d’exécution défectueuse, le recourant devait nécessairement envisager que le Tribunal puisse prendre en compte et porter son appréciation juridique sur tous les éléments pertinents en vue de rétablir l’équilibre des prestations contractuelles entre les parties, y compris en évaluant l’exécution effective des prestations par le mandataire, au lieu de se confiner à une analyse uniquement basée sur le critère de leur inutilité (consid. 5.2). Recours rejeté.
Antonio Rigozzi, Erika Hasler
(A. c/o X. [investisseur indien], B. c/o X. [investisseur indien] c. République de C. [Etat partie à un traité d’investissement bilatéral]). Recours contre la sentence (Award on Costs) rendue le 17 février 2020 par un Tribunal arbitral CNUDCI avec siège à Genève. Faute de paiement de l’avance de frais requise, le Tribunal avait clos la procédure, fixé les frais de l’arbitrage et statué sur les dépens. Argument des recourants selon lequel ils n’avaient pas disposé du temps nécessaire pour répondre à la « requête sur les coûts » déposée par la partie adverse, compte tenu du fait qu’ils n’étaient plus représentés par leurs conseils. Le TF retient que les recourants avaient bénéficié d’une prolongation de délai et d’une période de plus qu’un mois et demi pour se déterminer sur cette écriture. De plus, la sentence constate que les conseils en question n’avaient résilié leur mandat qu’après l’échéance du délai pour répondre à la requête, ce que les recourants ont reconnu. Dans ces circonstances, les recourants ont bel et bien disposé du temps nécessaire pour se déterminer sur cette requête (consid. 5.2). La garantie du droit d’être entendu n’implique pas, en matière d’arbitrage, un droit absolu à un double échange d’écritures, pour autant que le demandeur ait la possibilité de se déterminer sous une forme ou une autre sur les moyens articulés par le défendeur en second lieu. Ainsi, lorsqu’une partie dépose une écriture spontanée, le Tribunal arbitral n’est pas dans l’obligation d’impartir eo ipso un délai à l’autre partie pour dupliquer. Celle-ci est libre de faire usage, à l’instar de sa partie adverse, de son droit de se déterminer spontanément sur l’écriture déposée, ou de requérir la fixation d’un délai pour se déterminer, ou encore de se plaindre auprès du Tribunal si elle estime que celui-ci devrait lui accorder la possibilité de dupliquer. Les recourants, qui n’ont effectué aucune démarche dans ce sens pendant les deux mois qui se sont écoulés entre le dépôt de l’écriture de l’intimée et le prononcé de la sentence, adoptent un comportement contraire à la bonne foi. Ils auraient pu et dû invoquer ce prétendu vice de procédure en cours d’arbitrage (consid. 5.4). Voir également le consid. 6, résumé ci-dessus en relation avec l’art. 190 al. 2 let. e LDIP.
Antonio Rigozzi, Erika Hasler
(A. Limitada [société de droit xxx] c. B. SA [société de droit xxx]). Recours contre la sentence rendue le 4 mars 2020 par un Tribunal arbitral avec siège à Genève. Récapitulatif des faits présentés ci-dessus, avant le résumé des considérants en relation avec l’art. 190 al. 2 let. c LDIP. La recourante reproche au Tribunal d’avoir procédé de façon surprenante à la conversion en USD d’un montant réclamé qui, dans les écritures, était libellé en une autre monnaie, sans que l’intimée ne demande une telle conversion, et sans permettre aux parties de s’exprimer sur ce point au préalable. Le TF retient que le Tribunal n’a pas ignoré que le montant en question était libellé en devise « xxx » en non en USD. Cependant, les conclusions de l’intimée lui donnaient la latitude nécessaire pour procéder de cette manière (cf. consid. 5, résumé ci-dessus en relation avec l’art. 190 al. 2 let. c), et il ressort de la sentence que les problématiques relatives à la conversion en USD du montant litigieux et aux différents taux de conversion envisageables à cette fin avaient bien été abordées en cours de procédure, même si elles l’avaient été en lien avec une question préalable autre que celle du montant final à allouer à l’intimée (consid. 6). Recours rejeté.
Antonio Rigozzi, Erika Hasler
(A. GmbH [société de droit allemand], B. GmbH [société de droit allemand], C. GmbH [société de droit allemand] c. D.D. [veuve et héritière de H.D.], E.D. [descendant et héritier de H.D.], F.D. [descendant et héritier de H.D.], G.D. [descendant et héritier de H.D.]). Recours contre la sentence rendue le 19 mai 2020 par un Tribunal arbitral SCAI ayant son siège à Zurich. Tribunal reconstitué après la démission d’un arbitre à un stade avancé de la procédure. Les recourantes reprochent au Tribunal arbitral nouvellement constitué d’avoir violé leur droit d’être entendues par son refus de répéter les actes de procédure déjà accomplis, y compris l’audition de témoins, avec la participation de l’arbitre démissionnaire. Cependant, il apparaît à la lecture du résumé de la procédure dans la sentence qu’une fois reconstitué et avant de rendre sa sentence, le Tribunal arbitral avait bien accordé aux recourantes la possibilité de se prononcer sur cette question. Par ailleurs, les recourantes reconnaissent elles-mêmes qu’un Tribunal reconstitué n’a pas besoin de répéter la procédure dans la mesure où l’arbitre remplaçant a la possibilité de se former une opinion, de manière adéquate et équitable, sur les questions pertinentes pour l’issue du litige. Or, en l’espèce, le nouvel arbitre – informé des reproches formulés à l’encontre de son prédécesseur et après avoir pris connaissance du procès-verbal de l’audience et du dossier de la cause – a décidé, de commun accord avec les autres membres du Tribunal, qu’il n’y avait pas lieu de répéter les actes de procédure déjà accomplis. Enfin, compte tenu du fait que le Tribunal arbitral a tranché le litige sur la base d’une interprétation objective du contrat, le cas présent ne comporte pas une situation dans laquelle la perception directe et immédiate des éléments probatoires par l’arbitre remplaçant (par exemple, l’appréciation de la crédibilité d’un témoin) aurait été déterminante. Ainsi, le Tribunal arbitral n’a pas violé le droit d’être entendues des recourantes (consid. 3). Voir également le consid. 4.2 de cet arrêt, résumé ci-dessous en relation avec l’art. 190 al. 2 let. e LDIP.
Antonio Rigozzi, Erika Hasler
(A. [acheteur de gaz naturel] c. B. [fournisseur de gaz naturel]). Recours contre la sentence rendue le 18 juin 2020 par un Tribunal arbitral CCI avec siège à Genève. Litige issu de deux contrats pour l’achat et la livraison de gaz naturel, conclus en 1995 et 1997 pour une période de vingt-cinq ans, entre la National Iranian Gas Company (NIGC, ou A. dans le rubrum de l’arrêt) et Türkmengaz, une société détenue par l’Etat du Turkménistan (B. dans le rubrum de l’arrêt). Au fil des ans, les parties avaient adapté les contrats par plusieurs avenants. NIGC avait fait défaut sur un certain nombre de paiements, notamment à cause de l’impact des sanctions internationales imposées par les Etats-Unis et l’UE à l’encontre de l’Iran à partir de 2012. Le 1er janvier 2017, Türkmengaz avait suspendu les livraisons en raison des retards de paiement de NIGC. En mars 2017, NIGC avait déclaré qu’elle n’effectuerait plus de paiements au titre des contrats. Fin 2017, Türkmengaz avait initié une procédure d’arbitrage conformément à la clause compromissoire contenue dans les contrats, sur quoi NIGC avait présenté des demandes reconventionnelles. Dans sa sentence, le Tribunal arbitral avait condamné NIGC à payer les montants en souffrance à partir du 31 décembre 2016. Il avait également retenu que Türkmengaz avait manqué à ses obligations d’ajuster le prix du gaz en raison de défauts de qualité et que sa décision de suspendre les livraisons en janvier 2017 était en violation des contrats ; pour ces motifs, le Tribunal avait reconnu en partie les prétentions soulevées par NIGC à titre reconventionnel. La recourante reproche au Tribunal arbitral d’avoir violé son droit d’être entendue, et plus précisément d’avoir fondé sa sentence sur un motif imprévisible, en prenant l’initiative d’examiner la question de la validité de la suspension des livraisons à un date postérieure par rapport au moment où l’intimée avait définitivement cessé de fournir le gaz, sans avoir interpellé les parties sur ce point, qu’elles n’avaient pas plaidé (consid. 5.3). La recourante ne saurait être suivie lorsqu’elle invoque l’effet de surprise, même s’il est vrai que les parties ont focalisé leur attention sur la suspension des livraisons au 1er janvier 2017. En effet, il faut bien tenir compte du fait que la recourante avait également requis du Tribunal qu’il ordonne à l’intimée de reprendre immédiatement les livraisons, jusqu’au terme des contrats, et que l’intimée avait conclu, à titre reconventionnel, au rejet intégral des conclusions de la recourante. Dès lors, le Tribunal devait, afin de statuer sur ces prétentions, déterminer si l’intimée était légitimée à ne plus fournir de gaz non seulement au 1er janvier 2017, mais aussi tout au long de la période visée par les conclusions des parties. Le fait que le Tribunal ait retenu une date différente de celle avancée par les parties comme moment à partir duquel la cessation des livraisons était justifiée n’a rien d’imprévisible, s’agissant d’une affaire complexe, commandant aux parties d’examiner l’ensemble des scénarios envisageables. Par ailleurs, les documents sur lesquels le Tribunal s’est fondé pour déterminer la date à partir de laquelle la cessation des livraisons était légitime ont été produits par les parties, qui ont eu tout le loisir de s’exprimer à leur sujet en cours d’instance. La recourante fait valoir que les parties elles-mêmes ne s’étaient pas prévalues de ces documents pour déterminer le moment à partir duquel la suspension des livraisons était justifiée. Toutefois, le droit d’entre entendu n’exige pas des arbitres qu’ils sollicitent des parties une prise de position sur la portée de chacune des pièces produites. Bien au contraire, le Tribunal arbitral doit pouvoir apprécier les preuves produites par les parties de manière autonome (consid. 5.4). Les considérants 6 et 7, rejetant les griefs d’ultra petita (art. 190 al. 2 let. c LDIP) et de la violation de l’ordre public (art. 190 al. 2 let. e LDIP) ne sont pas résumés dans cette chronique. Recours rejeté.
Antonio Rigozzi, Erika Hasler
(A. [actionnaire du groupe G. via Société B.], Société B. [société mauricienne] c. Z. Ltd [société de droit mauricien et investisseur du groupe G.]). Recours contre la sentence rendue le 15 septembre 2020 par un Tribunal arbitral LCIA avec siège à Genève. Dans un litige ayant donné lieu à plusieurs procédures parallèles, y compris devant la High Court of England and Wales (EWHC), après avoir suspendu l’arbitrage jusqu’à droit connu dans la procédure devant la cour anglaise, le Tribunal arbitral avait rendu une première sentence en mai 2018. Dans cette sentence, le Tribunal avait incorporé le contenu d’une « décision par consentement » préparée par l’intimée et agréée par les recourants, qui reflétait des pans du jugement de la EWHC. Après cette sentence, la procédure arbitrale s’était poursuivie : l’intimée avait partiellement modifié et complété ses conclusions, le Tribunal avait rendu une sentence partielle en novembre 2018, puis tenu une audience par vidéo-conférence en mai 2020, et finalement rendu sa sentence finale en septembre 2020. Les recourants reprochent au Tribunal arbitral, en premier lieu, de leur avoir refusé un report de l’audience de quelques semaines et de les avoir ainsi privés de la possibilité de présenter leur défense et de contre-interroger les témoins de la partie adverse, nonobstant leurs requêtes réitérées, provoquées par la crise sanitaire et les circonstances exceptionnelles résultant de la pandémie du COVID. Le TF relève que les recourants ont été consultés à plusieurs reprises au sujet du calendrier procédural de l’arbitrage. Après s’être opposés à la date d’audience proposée par l’intimée, ils avaient requis la clôture de la procédure au motif que la majorité des prétentions de l’intimée avaient été tranchées par la EWHC et que les demandes restantes devaient plutôt être traitées dans un autre arbitrage. Dans les mois précédant la tenue de l’audience, les recourants avaient changé de conseil, puis leur nouvelle étude avait annoncé qu’elle avait cessé de les représenter. Peu après, alors que le Tribunal venait de proposer de tenir l’audience par vidéo-conférence pour parer aux difficultés résultant de la crise sanitaire, les recourants avaient encore soulevé des objections et maintenu leur requête de clôture de l’arbitrage. Le Tribunal avait refusé de reconsidérer sa décision de rejet de la requête de clôture et avait fixé la date de l’audience par vidéo-conférence, qu’il avait ensuite reportée de 2 semaines à la demande de l’intimée. Le recourants n’avaient pas participé aux essais techniques pour la vidéo-conférence et aux échanges de correspondance y relatifs, pas plus qu’ils n’avaient déposé de mémoire en réponse, ou répondu aux interpellations du Tribunal au sujet de leur intention de participer à l’audience. Tard le soir de la veille de l’audience, un ancien avocat des recourants avait annoncé qu’il les représentait à nouveau et sollicité un report. L’audience s’était tenue comme prévu le lendemain, sans la participation des recourants (leur nouveau conseil s’étant limité à comparaître au début de la session pour en demander encore une fois le report, demande derechef refusée par le Tribunal). A l’issue de l’audience, le Tribunal avait clôturé la procédure, sous réserve des écritures à déposer par les parties au sujet des frais de l’arbitrage, puis il avait rendu sa sentence finale. Le TF observe que les recourants ont attendu le prononcé de la sentence pour se plaindre du rejet de leur demande de report d’audience, au lieu de solliciter la tenue d’une nouvelle audience en cours de procédure. Cependant, leur comportement ne contrevient pas nécessairement aux règles de la bonne foi, sachant que le Tribunal a clôturé la procédure à l’issue même de l’audience (consid. 5.4). Quoi qu’il en soit, force est de constater que les recourants ont causé des retards contraires à l’exigence de célérité de l’arbitrage tout au long de la procédure, en invoquant des difficultés logistiques non mieux précisées. Ils n’établissent pas avoir été empêchés de déposer une réponse et des déclarations de témoins, et n’expliquent pas ce qui les a retenus de se manifester et d’exposer leurs difficultés lorsque le Tribunal les interpellait. Par ailleurs, dans leur recours, ils ne cherchent pas à démontrer quels éléments de preuve, ou quels arguments de fait ou de droit pertinents ils auraient pu présenter s’ils avaient bénéficié du report demandé. Dans cette configuration, le Tribunal pouvait refuser le report de l’audience sans enfreindre le droit d’être entendus des recourants (consid. 5.5). Quant à l’argument selon lequel un report d’audience aurait été accordé à l’intimée en violation du principe de l’égalité de traitement, le TF relève que l’intimée a activement collaboré à l’avancement de la procédure et n’a demandé un report de la date d’audience qu’en réponse à la question du Tribunal, qui avait invité les deux parties à lui signaler si des ajustements étaient nécessaires par rapport à la date initialement retenue. Après avoir modifié la date à la demande de l’intimée, le Tribunal avait encore recommandé aux deux parties de lui signaler dès que possible d’éventuelles difficultés liées à la nouvelle date. Les recourants n’avaient pas réagi. Dans ces conditions, le fait que le Tribunal ait accordé le report demandé par l’intimée alors qu’il avait refusé celui requis par les recourants ne représente pas une inégalité de traitement des parties (consid. 5.6). Voir également le consid. 6 de cet arrêt, résumé ci-dessous en relation avec l’art. 190 al. 2 let. e LDIP.
Antonio Rigozzi, Erika Hasler
(X. Sàrl c. Z. SA). Recours contre la sentence arbitrale finale rendue le 18 mars 2019 par un arbitre unique siégeant à Genève. L’arbitre unique a imputé les frais de la procédure arbitrale et les dépens de chaque partie à raison de deux tiers à la charge de la demanderesse et d’un tiers à celle de la défenderesse. Parmi d’autres critères, l’arbitre a pris en considération le « comportement des parties », constatant en particulier que la demanderesse avait considérablement augmenté son travail par la manière dont elle avait plaidé l’affaire, dans la mesure où elle n’avait pas pris position sur certains arguments et développements juridiques avancés par la défenderesse, ou ne l’avait fait que de manière incomplète. La demanderesse (recourante devant le Tribunal fédéral) conteste cette répartition des frais et dépens et soutient que l’arbitre aurait dû lui donner l’occasion de prendre position sur son propre comportement procédural et sur l’incidence de ce comportement dans ladite répartition. La jurisprudence invoquée par la recourante n’est pas pertinente en l’espèce, car elle concerne le devoir d’un tribunal arbitral d’interpeller les parties sur la répartition des frais et dépens lorsque l’une d’elles renonce à l’arbitrage sur la base de l’art. 378 al. 2 CPC. Dans une procédure arbitrale ayant abouti à une sentence finale, comme c’est le cas ici, la répartition des frais et dépens n’est qu’un point accessoire de cette sentence ; on ne saurait raisonnablement exiger du tribunal arbitral qu’il reporte son prononcé et recueille préalablement les prises de position des parties sur un projet de répartition motivé. Le moyen tiré de l’art. 393 let. d CPC est donc dénué de fondement. Recours rejeté.
Antonio Rigozzi, Erika Hasler
(X. [avocat à Genève] c. Z. [avocat à Genève])
Recours contre la sentence rendue le 30 août 2018 par un arbitre unique siégeant à Genève. Arbitrage fondé sur une clause compromissoire dans un contrat d’association entre deux avocats. Recourant faisant grief à l’arbitre d’avoir totalement omis d’examiner l’exception de compensation soulevée par lui dans l’arbitrage (art. 393 let. d CPC). La créance compensante invoquée est une prétention en dommages-intérêts, réclamée sur la base d’une prétendue violation de l’obligation de loyauté par l’ancien associé du recourant. A teneur de l’art. 42 al. 1 CO, il incombait au recourant d’alléguer, dans l’arbitrage, un dommage d’un montant déterminé, ou de mettre en avant tout élément propre à permettre l’estimation réservée par l’art. 42 al. 2 CO, ce qu’il s’est abstenu de faire. Le recourant n’a pas non plus fait allusion à un éventuel préjudice moral, ni cherché à démontrer une atteinte à sa personnalité susceptible de justifier une réparation en argent sur le fondement de l’art. 49 CO. L’exception de compensation n’était donc pas motivée, sinon par la seule allégation d’un acte illicite. Cela n’est de toute évidence pas suffisant. Aussi, dans ce litige empreint d’un fort esprit d’animosité, l’arbitre unique pouvait voir dans l’exception ainsi soulevée une simple récrimination supplémentaire plutôt qu’un moyen de défense sérieux et apte à influencer l’issue de la cause. Dans ces circonstances, l’arbitre pouvait se dispenser de mentionner et discuter l’exception, sans violer, par-là, le droit du défendeur d’être entendu en procédure contradictoire (consid. 7). Recours rejeté.
Antonio Rigozzi, Erika Hasler
(Joueur de football c. club belge).
Prise en considération des observations de l’arbitre pour rejeter le grief de la violation du droit d’être entendu (en l’espèce pas d’effet de surprise ni violation du devoir minimum d’examiner et traiter les problèmes pertinents pour l’issue du litige) (consid. 2.2.2-2.3).
[(X. [entraîneur de football] c. Jamaican Football Federation et FIFA)]
Le droit de faire administrer des preuves doit être exercé en temps utile et selon les règles de forme applicables. En l’occurrence, la demande de l’entraîneur tendant à obtenir l’audition par le TAS d’un nouveau témoin au cours d’une nouvelle audience a été formulée tardivement. La formation arbitrale était donc en droit de la rejeter en application des art. R55 et R56 du Code TAS. Ce faisant, les arbitres n’ont pas violé le droit d’être entendu du recourant (consid. 2.3.2). Le principe de l’égalité de traitement des parties ne comporte pas le droit de demander une deuxième audience afin de faire entendre un nouveau témoin (consid. 2.3.3).
Art. 190 al. 2 let. d LDIP
(X.__ GmbH c. Y.__ Sàrl)
Le droit d’être entendu au sens de l’art. 190 al. 2 let. d LDIP impose au tribunal arbitral un devoir minimum d’examiner et traiter les problèmes pertinents pour l’issue du litige (consid. 4.3.1). Même s’il n’y a pas d’obligation pour les arbitres de discuter tous les arguments invoqués par les parties au cours de la procédure, y compris les moyens objectivement dénués de pertinence, quand il appert, à la lecture de la sentence, qu’un argument apparemment important pour la solution du litige n’a pas été traité par les arbitres, il appartient à ces derniers ou à la partie intimée de justifier cette omission en démontrant que l’argument en question n’était pas pertinent ou qu’il a été écarté implicitement par le tribunal arbitral. En l’espèce, rien dans la sentence ni dans les observations déposées par le tribunal devant le TF ne permet d’établir que les arguments (indéniablement pertinents) développés par la recourante sur la question de la prescription absolue ont été examinés et réfutés, même implicitement, par les arbitres. Au vu de la nature formelle du droit d’être entendu, la sentence qui viole ce droit doit être annulée indépendamment des chances du recourant d’obtenir un résultat différent sur le fond (consid. 4.3.2). Recours admis.
[(Fédération X. [association de droit suisse avec siège à Lausanne] c. Fédération A., Fédération B., Fédération C., Fédération D., Fédération E. [fédérations française, allemande, suisse, ukrainienne et états-unienne] et F. [entité de droit américain] Inc.)].
Ayant demandé de sa propre initiative aux parties de se déterminer sur la répartition et le montant des dépens et après avoir reçu de leur part des requêtes motivées tendant à obtenir un délai supplémentaire pour ce faire, le TAS a violé le droit d’être entendu des parties en rendant une sentence finale qui tranchait également la question des dépens avant que celles-ci n’aient pu soumettre leurs observations à cet égard (consid. 4.2).
[(X. [société turque avec siège à Ankara] (Turquie) c. Y GmbH (société polonaise avec siège à Sosnowiec (Pologne))].
Y a-t-il des circonstances dans lesquelles un tribunal arbitral serait dans l’obligation, afin de préserver le droit d’être entendu et l’égalité de traitement des parties, de nommer un expert indépendant - par exemple lorsque les connaissances techniques nécessaires à résoudre un litige complexe lui font défaut et que les parties sont assistées chacune par son expert ? Dans ce cas particulier, il n’est pas nécessaire d’approfondir la question, entre autre du fait que la recourante ne s’est pas plainte en temps voulu, soit pendant l’arbitrage, des vices de procédure dont elle affirme avoir été victime. Elle n’est plus, de ce fait, habilitée à les invoquer dans le recours contre la sentence (principe de la bonne foi) (consid. 3.2).
Art. 190 al. 2 lit. d LDIP (droit d’être entendu)
(X. GmbH [société active dans la production de machines de forage] c. A [agent])
Le TA peut refuser d'administrer une preuve, sans violer le droit d'être entendu, si le TA, en procédant à une appréciation anticipée des preuves, parvient à la conclusion que sa conviction est déjà faite et que le résultat de la mesure probatoire sollicitée ne peut plus la modifier ; in casu l'arbitre n'était pas un spécialiste des questions de forage, mais les déclarations des témoins et les descriptifs des machines constituaient des éléments du dossier qui autorisaient le juge à considérer qu'il maîtrisait la technique par rapport aux questions à résoudre. Il ne s'agissait pas en effet de difficiles questions relatives au détail du fonctionnement d'une machine compliquée, mais à la fonction et aux services que pouvaient rendre ces machines ; art. 190 al. 2 lit. d (égalité de traitement) ; le principe de l’égalité de traitement n’est pas violé si l’arbitre unique exige la production de pièces relatives aux ventes seulement d’une partie.
Art. 190 al. 2 lit. d LDIP
(X. SA [société XX] c. Y., Inc. [société américaine]).
Le droit d'être entendu est violé lorsque, par inadvertance ou malentendu, le TA ne prend pas en considération des arguments présentés par l'une des parties et importants pour la décision à rendre. En l'espèce, le raisonnement tenu par les arbitres implique le rejet, à tout le moins implicite, des arguments avancés par la recourante, donc pas de violation du droit d’être entendu en l’espèce.
Art. 190 al. 2 lit. d LDIP
(X. Kft c. Y. AG)
La recourante tente de plaider, sans succès, l’application surprenante du droit.
(X. c. Y., toutes deux spécialisées dans le commerce de produits pétrochimiques)
Art. 190 al. 2 lit. d ; violation du droit d’être entendu (non).
Art. 190 al. 2 lit. d LDIP
(X. [José Ignacio Urquijo Goitia] c. Y. [Liedson Da Silva Muñiz])
Le recourant reproche au TAS d’avoir fondé sa sentence sur un motif juridique imprévisible pour les parties (application de la Loi fédérale sur le service de l’emploi et la location de services (LSE) à la relation entre un joueur de football et un agent). Recours admis, car la LES ne s’applique qu’à une activité de placement « en Suisse » (art. 2 al. 1 LSE). In casu, l’activité de l’agent s’est déroulée exclusivement à l’étranger. Le TAS aurait dû interpeller les parties pour leur donner l’occasion de faire valoir leur moyen s’agissant de l’applicabilité de la LSE.
Art. 190 al. 2 let. d LDIP
(X. SA [société XX] c. Y. Inc. [société américaine])
Le droit d'être entendu est violé lorsque, par inadvertance ou malentendu, le TA ne prend pas en considération des arguments présentés par l'une des parties et importants pour la décision à rendre. En l'espèce, le raisonnement tenu par les arbitres implique le rejet, à tout le moins implicite, des arguments avancés par la recourante.
Art. 190 al. 2 let. d et e LDIP
(X. SA c. Y. SA)
Retrait de recours, émolument.
Art. 190 al. 2 let. d LDIP
(X. SA contre Y. Inc. [société des Iles Caïman])
Le droit d'être entendu n'implique pas le devoir pour le juge d'attirer l'attention des parties sur les faits décisifs pour le jugement. A plus forte raison, ladite garantie n'oblige pas le juge ou l'arbitre à informer une partie, avant de rendre son jugement ou sa sentence, que les éléments de preuve versés à la procédure sont insuffisants pour établir un fait décisif.
Art. 190 al. 2 let. d LDIP ; art. 190 al. 2 let. e LDIP
(X. [club de football turc] c. TAS)
Notion de sentence arbitrale. Un courrier du Secrétaire général du TAS confirmant une décision antérieure de la chambre d'appel de ne pas ouvrir une procédure (pour non-respect des conditions formelles de la demande d'appel) ne constitue pas une décision pouvant faire l'objet d'un recours au sens de l'art. 190 LDIP.
(X. [fédération de football argentine] c. Y. SAD [société sportive espagnole])
Art. 190 al. 2 let. e : sentence incompatible avec l'ordre public (non).
Art. 190 al. 2 let. d : violation du droit d'être entendu (non).
(X. GmbH [société allemande] c. Y. Corporation [société russe])
Art. 190 al. 2 let. b LDIP : recours contre une sentence sur compétence par laquelle le TA s'est déclaré incompétent (sentence finale). Groupe de contrats : clauses compromissoires différentes dans des contrats conclus entre les mêmes parties. Non-application de la clause en question à d'autres contrats.
Art. 190 al. 2 let. d LDIP : violation du droit d'être entendu (non).