Arbitrage

TF 4A_386/2010

2010-2011

[(Alejandro Valverde Belmonte c. Agence Mondiale Antidopage (AMA), Union Cycliste Internationale (UCI) et Real Federacion Espanola de Ciclismo (RFEC))]. Il n’est pas incompatible avec la nature de la procédure d’appel devant le TAS au sens de l’art. R57 du Code TAS que la formation arbitrale (instance supérieure) se prononce elle-même sur le fond du litige si elle estime que la décision de l’instance sportive inférieure doit être annulée, même si la première décision se limitait à refuser d’entrer en matière. Ce faisant, le TAS n’a pas outrepassé ses pouvoirs : s’il est vrai que la jurisprudence tend à ne pas admettre de façon trop désinvolte qu’une convention d’arbitrage a été conclue quand ce point est litigieux entre les parties, une fois le principe de l’arbitrage admis et en conformité avec les principes d’utilité et d’économie de la procédure, cette même jurisprudence fait preuve de souplesse quant à la portée matérielle de la convention d’arbitrage – sans pour autant que cela implique une présomption en faveur de la compétence des arbitres (consid. 5.3.4).

ATF 136 III 385

2010-2011

La mainlevée – provisoire ou définitive – de l’opposition ne peut être prononcée par un tribunal arbitral (consid. 2.1).

L’arbitrabilité des causes patrimoniales au sens de l’art. 177 LDIP peut se trouver limitée par des règles de compétence qui réservent impérativement à une autorité étatique la connaissance de certains différends. De même, sous réserve d’une clause expresse (à laquelle s’appliqueraient par analogie les critères de validité dégagés dans la jurisprudence du TF au sujet de l’art. 192 LDIP), la convention d’arbitrage ne prive pas le poursuivant du droit de requérir du juge étatique la mainlevée provisoire (consid. 2.2).

Absence de litispendance entre la procédure de mainlevée provisoire et l’action en paiement devant un tribunal arbitral (consid. 2.3).

TF 4A_404/2010

2010-2011

[(A. [footballeur professionnel] c. Trabzonspor Kulübü Dernegi [club de football turc] et Turkish Football Federation (TFF))]. En tant que tribunal arbitral, le TAS ne pourra se considérer compétent pour statuer sur un litige qu’en présence d’une convention d’arbitrage valable entre les parties ou lorsque les lois, statuts ou règlements applicables prévoient spécifiquement une telle compétence. Le fait qu’en absence de clause d’arbitrage une partie serait par hypothèse privée d’accès à la justice est sans pertinence.

TF 4A_44/2011

2010-2011

[(A.X. c. B.X [père de A.X], C.X [frère de A.X], D.X [frère de B.X] et V.X. [société de droit néerlandais] BV)]. Portée subjective de la convention d’arbitrage. Par exception au principe de la relativité contractuelle, la jurisprudence admet qu’une convention d’arbitrage peut lier des tiers non-signataires dans certains cas de figure comme la cession de créance, la reprise de dette, le transfert de contrat ou encore, à condition qu’on puisse en déduire la volonté du tiers d’être partie à la clause arbitrale, son immixtion dans l’exécution du contrat. La question de savoir si le bénéficiaire d’une stipulation pour autrui est lié par la clause arbitrale contenue dans le contrat générateur d’obligations entre le stipulant et le promettant demeure débattue. Cela étant, sauf convention spécifique en sens contraire, il convient également d’admettre que le bénéficiaire d’une stipulation pour autrui parfaite au sens de l’art. 112 al. 2 CO acquiert contre le débiteur ou promettant une créance, avec tous les droits accessoires à celle-ci, y compris, cas échéant, la clause compromissoire, de telle sorte qu’il sera habilité à faire valoir ses prétentions afférentes au contrat par la voie arbitrale (consid. 2.4.1).

TF 4A_46/2011

2010-2011

(X.__ GmbH c. Y.__ Sàrl). Le TF analyse le grief tiré de la violation d’un mécanisme contractuel constituant un préalable obligatoire à l’arbitrage sous l’angle de l’art. 190 al. 2 let b LDIP (consid. 3.3).

La question de la sanction qui doit s’attacher à la violation d’un tel mécanisme demeure controversée. Cela étant, l’on ne saurait exclure a priori qu’une sanction de nature matérielle comme les dommages-intérêts puisse être combinée avec la sanction procédurale consistant en une déclaration d’irrecevabilité (voire le rejet en l’état) de la demande. Par ailleurs, un courant doctrinal semble s’affirmer en Suisse, selon lequel la sanction la plus appropriée pour une telle violation serait la suspension de la procédure arbitrale et la fixation d’un délai aux parties pour qu’elles puissent réparer l’omission (consid. 3.4).

Caractère obligatoire ou non des mécanismes contractuels prévoyant la mise en œuvre d’un expert et d’une tentative de conciliation préalables à l’arbitrage. Pour ce qui est de l’exigence d’une tentative de conciliation, sur le vu des critères dégagés dans la jurisprudence (décision 4A_18/2007), pour être obligatoire, une stipulation à cet effet doit contenir des éléments concrets permettant d’établir que la tentative de conciliation est conçue comme une mesure préalable nécessaire à la recevabilité de la procédure arbitrale et décrire de façon suffisamment claire, spécifique et détaillée la procédure de conciliation envisagée, en indiquant par exemple si l’intervention d’un médiateur est requise et/ou si la procédure doit être initiée dans un délai particulier. De plus, le principe de la bonne foi et l’interdiction de l’abus de droit exigent que la partie qui affirme le caractère obligatoire du mécanisme préalable essaie de le mettre en œuvre en temps voulu (consid. 3.5.2).

TF 4A_482/2010

2010-2011

[(X. [opérateur téléphonique] SA c. A.Y.__ SA, B.Y.__ SA, C.Y.__B.V. (anciennement Z.__BV) et D.Y.__SA)]. Un tribunal arbitral est habilité à trancher des questions préjudicielles n’entrant pas dans le champ d’application matériel de la clause arbitrale, voire à élucider, toujours à titre préjudiciel, des points qui ne sont pas en eux-mêmes susceptibles d’arbitrage, dans la mesure où l’issue du litige qui lui est soumis dépend de ses déterminations quant à ces questions ou points. Ce faisant, le tribunal n’excède pas ses pouvoirs. Le même raisonnement tend du reste à se généraliser en matière de compensation, par la consécration du principe selon lequel l’arbitre est compétent pour connaître d’une exception de compensation même si la relation sur laquelle se fonde la créance invoquée à cette fin n’entre pas dans les prévisions de la clause compromissoire, ou fait l’objet d’une autre convention d’arbitrage, voire d’une clause d’élection de for (voir par ex. l’art. 21(5) Swiss Rules et, pour l’arbitrage interne, l’art. 377 al. 1 CPC). à Voir également l’arrêt 4A_ 428/2010 (d) du 9 novembre 2011 (consid. 2.1-2.3).

TF 4A_579/2010

2010-2011

[(X. [société de production et de distribution de DVD, en particulier dans le domaine sportif] SA c. Comité International Olympique)]. Une partie peut sans doute renoncer à une convention d’arbitrage de manière tacite, par exemple en procédant sur le fond devant le juge étatique sans soulever d’exception d’arbitrage. Toutefois, il serait artificiel d’admettre sans autre qu’il existe une telle renonciation ou qu’il y aurait eu « acceptation » d’une offre de renonciation à la convention d’arbitrage dans un cas où une partie a adressé à l’autre une mise en demeure assortie d’une menace de saisine des tribunaux étatiques visant à obtenir l’exécution d’un contrat contenant une clause arbitrale, et l’autre partie a répondu à la lettre de mise en demeure sans se prévaloir de la convention d’arbitrage, alors que par la suite la partie dont émanait la mise en demeure a agi devant le tribunal arbitral mentionné dans la clause arbitrale sans soulever une quelconque exception.

TF 4A_640/2010

2010-2011

(A.__ c. WADA, FIFA et Cyprus Football Association). Clause arbitrale par référence. Le TF examine avec « bienveillance » le caractère consensuel du recours à l’arbitrage en matière sportive dans le but de favoriser la liquidation rapide des litiges par des tribunaux spécialisés présentant des garanties suffisantes d’indépendance et d’impartialité, à l’instar du TAS. Cette logique sous-tend également la souplesse dont fait preuve la jurisprudence de la Haute Cour dans son traitement de la problématique des clauses arbitrales par référence dans le domaine sportif (consid. 3.2.2). Elle se justifie d’autant plus dans les affaires de dopage, au vu du rôle prééminent progressivement assumé par le TAS, en tant que juridiction garante des standards internationaux, dans le cadre de la lutte mondiale contre ce fléau (consid. 3.3.1). En l’espèce, c’est à bon droit que le TAS s’est déclaré compétent pour connaître de l’appel formé par l’AMA et la FIFA contre la décision du Judicial Committee de la Fédération Chypriote de Football (CFA), en vertu du renvoi global contenu dans les statuts de cette dernière aux règlements de la FIFA prévoyant la compétence du TAS à statuer sur appel dans les affaires de dopage.

Arrêt 4A_220/2007

2008-2009

Art. 190 al. 2 lit. b

ž(Dame Y. [bénéficiaire et protectrice d'un trust] c. Z. [bénéficiaire et protecteur d'un trust] & TA ad hoc à Berne).

Caractère tardif du grief d'incompétence; le champ d'application d'une clause arbitrale visant les litiges "in connection with" l'accord en question est plus large que celui d'une clause visant, par exemple, les litiges pouvant résulter ("arising out") dudit accord; art. 190 al. 2 lit. c : TA ayant statué ultra ou extra petita (non) : les arbitres ne statuent pas au-delà des demandes s'ils n'allouent pas plus que le montant réclamé par la demanderesse, tout en appréciant les faits sur la base de règles ou principes juridiques autres que ceux invoqués par les parties (jura novit curia); art. 190 al. 2 lit. d : latitude accordée aux arbitres dans l'appréciation anticipée des preuves; construction surprenante et imprévisible (non); art. 190 al. 2 lit. e : violation du principe pacta sunt servanda (non).

Art. 190 al. 2 lit. b LDIP

(A. C. SE, A. D. Ltd., A. E. Ltd. Et J. Ltd. C. K. SAS)

Compétence du TA – champ d'application personnel d'une clause compromissoire ; application à une filiale sortie du groupe, suite à un "management buy-out", après la conclusion du contrat contenant la convention d'arbitrage ; art. 190 al. 2 lit. d LDIP : le droit d'être entendu n’est pas violé du fait que le TA a refusé de sanctionner la production, par l'intimée, d'actes de procédure un jour après l'échéance du délai procédural, dès lors que l'acte de mission ne contient pas de règle spécifique à ce sujet. L’égalité des parties serait violée seulement dans le cas où l’autre partie aurait été sanctionnée pour un même retard, mais pas simplement du fait qu’elle a pour sa part déposé à temps.

Arrêt 4A_42/2007

2008-2009

Art. 190 al. 2 lit. b LDIP

(X. [club de football] c. A., B., C. et D. [entraîneurs et physiothérapeute)

Deux contrats ont été signés, seul le premier prévoyant une compétence du TAS. Les parties ont également prévu qu’en cas de contradiction, les termes du premier contrat prévalent. Le TAS est donc compétent ; art. 190 al. 2 lit. e : la violation du principe pacta sunt servanda n’est constitutive d’une violation de l’ordre public que si le TA refuse d’appliquer une clause contractuelle tout en admettant qu’elle lie les parties ou si le TA impose le respect d’une clause dont il considère qu’elle ne lie pas les parties ; art. 190 al. 2 lit. d : violation du droit d’être entendu uniquement si le TA se fonde sur un motif juridique qui ne pouvait pas raisonnablement être prévu par les parties et qui les a donc surprises.

(X. GmbH [société allemande] c. Y. Corporation [société russe])

Art. 190 al. 2 lit. b LDIP

Recours contre une sentence sur compétence par laquelle le TA s'est déclaré incompétent (sentence finale). Groupe de contrats : clauses compromissoires différentes dans des contrats conclus entre les mêmes parties. Non application de la clause en question à d'autres contrats (les termes « Ansprüche aus oder im Zusammenhang mit diesem Vertrag » ne sont pas suffisants pour étendre la clause compromissoire à d’autres contrats) ; art. 190 al. 2 lit. d : violation du droit d'être entendu (non).

Arrêt 4A_468/2007

2008-2009

Art. 190 al. 2 lit. b LDIP

(A. C. SE, A. D. Ltd., A. E. Ltd. Et J. Ltd. C. K. SAS)

Irrecevabilité du grief tiré de l’incompétence du TA dans un recours contre une sentence finale lorsque ce grief avait déjà été rejeté dans un recours contre une sentence partielle dans la même affaire.

Art. 190 al. 2 lit. b LDIP

(B. Fund c. A. Group)

Le TA est compétent pour examiner à titre préjudiciel si une infraction pénale a été commise. Le TA doit suspendre l’instance si un motif impérieux le commande (exemples de motifs impérieux : une partie perd la personnalité juridique ou la capacité d’agir en justice, des circonstances de fait ou de droit déterminantes pour l’issue du litige, mais étrangères à la compétence du TA, doivent être préalablement élucidées) ; le TA peut suspendre l’instance si cette mesure lui semble opportune au regard des intérêts des parties. En l’absence de motif impérieux, la suspension ou le refus de suspendre ne mettent pas en cause l’égalité des parties, ni leur droit d’être entendues en procédure contradictoire. Pas de motif impérieux en l’espèce.

Arrêt 4P.32/2007

2008-2009

Art. 190 al. 2 lit. b LDIP

(X. c. Y.) recours contre une sentence du TA se déclarant incompétent faute de clause compromissoire liant les parties.

La recourante, en sa qualité de cessionnaire d’une créance, entend fonder son action sur la clause compromissoire insérée dans le contrat. Le TF retient que l’existence d’une cession n’a pas été démontrée ; art. 190 al. 2 lit. c ; la recourante reproche au TA d’avoir statué ultra petita pour s’être déterminé sur l’existence ou non d’une cession. Application de la théorie des faits de double pertinence car l’existence d’une cession détermine à la fois la légitimation active du cessionnaire et sa capacité à être partie à la procédure arbitrale mise en œuvre sur la base de la clause compromissoire liée à la créance cédée. Le TA devait, pour déterminer sa propre compétence, examiner à titre préjudiciel la question de l’existence de la cession de créance litigieuse.

TF 4A_424/2008

2008-2009

Art. 190 al. 2 lit. b LDIP

(X. c. Fédération Internationale de Hockey (FIH))

La recourante se plaint du fait que le TAS s’est déclaré – à tort selon la recourante – compétent, alors qu’en réalité ses critiques portent sur la question de savoir si elle disposait de la légitimation active pour recourir au TAS. A noter que – curieusement – la recourante se plaint du fait que le TAS se serait à tort déclaré compétent, alors même que c’est la recourante qui a initié la procédure devant le TAS.

TF 4A_438/2008

2008-2009

Art. 190 al. 2 lit. b

(X. AG [société allemande] et Y. SA c. A)

Distinction entre un arbitre et un expert-arbitre sur la base des critères suivants : termes utilisés dans l’accord des parties, étendue des attributions conférées au tiers à désigner selon cet accord, aptitude de la décision prise par ce tiers à constituer un titre d’exécution forcée.

TF 4A_460/2008

2008-2009

Art. 190 al. 2 lit. b LDIP

(A. c. Fédération Internationale de Football Association (FIFA) & World Anti-Doping Agency (WADA))

Les statuts de l’association brésilienne de football (CFB) renvoient aux règles de la FIFA qui, elles-mêmes, contiennent une clause compromissoire en faveur du TAS. En sa qualité de membre de la CFB, le recourant est lié par cette clause compromissoire.

Art. 190 al. 2 lit. b LDIP

(X. AG c. Federation Y.)

Relation contractuelle contenant une clause compromissoire est « prolongée » par un nouveau contrat contenant une clause d’élection de for

Les parties ont clairement convenu de la conclusion d’un nouveau contrat qui n’est donc pas soumis à la clause compromissoire prévue dans le premier contrat. Il s’en suit également que le TA n’était pas habilité à accorder des dommages-intérêts pour violation du second contrat.

TF 4A_452/2007

2007-2008

(X. GmbH [société allemande] c. Y. Corporation [société russe])

Art. 190 al. 2 let. b LDIP : recours contre une sentence sur compétence par laquelle le TA s'est déclaré incompétent (sentence finale). Groupe de contrats : clauses compromissoires différentes dans des contrats conclus entre les mêmes parties. Non-application de la clause en question à d'autres contrats.

Art. 190 al. 2 let. d LDIP : violation du droit d'être entendu (non).

TF 4A_244/2007

2007-2008

Art. 190 al. 2 let. b LDIP

(A. C. SE, A. D. Ltd., A. E. Ltd. Et J. Ltd. C. K. SAS)

Compétence du TA : champ d'application personnel d'une clause compromissoire; application à une succursale sortie du groupe, suite à un "management buy-out", après la conclusion du contrat contenant la convention d'arbitrage ; art. 190 al. 2 let. d LDIP : le droit d'être entendu n’est pas violé du fait que le TA a refusé de sanctionner la production par l'intimée d'actes de procédure un jour après l'échéance du délai procédural, dès lors que l'acte de mission ne contient pas de règle spécifique à ce sujet. L’égalité des parties serait violée seulement dans le cas où l’autre partie aurait été sanctionnée pour un même retard, mais pas simplement du fait qu’elle a pour sa part déposé à temps.

Art. 190 al. 2 let. b LDIP

(A. C. SE, A. D. Ltd., A. E. Ltd. Et J. Ltd. C. K. SAS)

Irrecevabilité du grief tiré de l’incompétence du tribunal arbitral dans un recours contre une sentence finale lorsque ce grief avait déjà été rejeté dans un recours contre une sentence partielle dans la même affaire.