Art. 9 Cst. et 179 CC
Modification de la contribution d’entretien due à la conjointe lorsque l’époux salarié perd sa place de travail pendant la vie séparée et débute une activité lucrative indépendante. Lorsque, durant la séparation, un époux perd involontairement sa place de travail et commence une activité lucrative indépendante, un changement de circonstances ne saurait être systématiquement retenu. Il convient d’examiner, d’une part, si l’époux a abandonné son travail volontairement, voire dans l’intention de nuire, nonobstant l’existence d’une lettre formelle de licenciement et, d’autre part, si l’époux a tout entrepris pour trouver un travail lui permettant de réaliser un revenu équivalent à celui de son ancienne activité. Deuxièmement, il faut apprécier les pièces justificatives concernant le revenu issu de la nouvelle activité indépendante, au minimum un bilan intermédiaire couvrant une période de plusieurs mois. Finalement, il faut tenir compte du fait qu’en principe deux à trois ans sont nécessaires après le début de l’activité d’indépendant avant qu’un revenu complet puisse être réalisé. Ce fait d’expérience ne donne pas d’indication sur le caractère durable d’une modification de revenu, mais uniquement son ampleur. Il est possible d’en tenir compte au moyen d’une clause de rétablissement ou de réévaluation à la hausse dans un jugement de modification.
Sabrina Burgat, Chloé Gay-Balmaz, Jérôme Saint-Phor
Art. 80 LP
En cas d’arriérés de contributions d’entretien, le juge du divorce doit statuer sur les éventuels montants devant en être déduits en raison de prestations d’entretien versées par le débirentier depuis la séparation des époux. Le juge examine les allégués des parties et les preuves produites en procédure. Il doit chiffrer précisément le montant de l’imputation dans sa décision afin que le jugement soit susceptible d’exécution forcée (consid. 6.1.1). Une décision de mesures protectrices de l’union conjugale confère un titre de mainlevée définitive à l’époux créancier de contributions d’entretien pour la période antérieure à celle couverte par une décision de mesures provisionnelles de divorce. Devant apporter la preuve de sa libération par titre (art. 81 al. 1 LP), le débirentier ne peut pas se contenter d’invoquer l’extinction de la dette à hauteur des montants déjà payés ; seul un titre postérieur au jugement peut prouver sa libération (consid. 6.1.2) (commentaire dans la newsletter d’octobre 2012).
Olivier Guillod, Rachel Christinat
Art. 125 CC
Une contribution d’entretien est due entre ex-époux si le mariage a exercé un impact décisif sur la vie de l’un des conjoints. Un époux consentant à un déracinement culturel de son pays d’origine remplit en principe cette condition, à moins qu’il se soit volontairement adressé à une agence matrimoniale de son pays d’origine mettant ses clients en contact avec des tiers étrangers. Dans ce cas, la personne souhaitait quitter son pays d’origine et y abandonner sa carrière, indépendamment du mariage (consid. 5).
Olivier Guillod, Rachel Christinat
Art. 129 CC
(même problématique abordée in TF 5A_610/2012 du 20 mars 2013 [d])
Une communauté de vie d’une certaine durée entre hétérosexuels, en principe exclusive, présentant une composante spirituelle, corporelle et économique (communauté de toit, de table et de lit) constitue un concubinage qualifié (ou stable). Les ressources financières des concubins n’influencent pas l’existence de la communauté, qui dépend uniquement de leurs sentiments mutuels et d’une volonté de communauté de destins. Bien qu’il ne suffise pas à éteindre l’obligation d’entretien par une application analogique de l’art. 130 al. 2 CC relatif au remariage, un concubinage qualifié du crédirentier fonde une diminution, une suppression ou une suspension de la rente pendant une durée déterminée, conformément à l’art. 129 al. 1 CC. Le débirentier supporte le fardeau de la preuve du concubinage qualifié du crédirentier. Toutefois, un concubinage qui dure depuis cinq ans lors de l’ouverture de l’action en modification du jugement de divorce, est présumé qualifié. Le fait que cette durée ne soit pas atteinte n’empêche pas l’application de l’art. 129 al. 1 CC. Seule la stabilité de la communauté, qui s’évalue par d’autres facteurs, est déterminante. Le choix entre la suspension ou la suppression de la contribution d’entretien résulte de la pesée d’intérêts opposant la libération définitive du débirentier de son obligation d’entretien et la sécurité du crédirentier de bénéficier de la rente en cas de dissolution de son concubinage. Un concubinage qualifié supérieur à cinq ans conduit généralement à la suppression de la rente (consid. 5.1) (commentaire dans la newsletter d’avril 2013).
Olivier Guillod, Rachel Christinat
Art. 125, 129 CC
La modification d’un jugement de divorce permet d’adapter la réglementation aux circonstances nouvelles liées à des faits nouveaux importants et durables. Un fait revêt un caractère nouveau lorsqu’il n’a pas été pris en considération pour fixer la contribution d’entretien lors du divorce. Il est présumé que la contribution d’entretien a été fixée en tenant compte des modifications prévisibles, soit celles qui, bien que futures, sont déjà certaines ou fort probables. Si la condition du fait nouveau est remplie, le juge doit fixer la nouvelle contribution sur la base de l’art. 125 CC, en usant de son pouvoir d’appréciation, après avoir actualisé tous les éléments pris en compte dans le calcul précédent (consid. 11.1.1). Lorsque les revenus ne suffisent pas à l’entretien des époux, rien ne s’oppose à ce que l’entretien soit assuré par la fortune, y compris les éventuels biens propres, dans la mesure où l’art. 125 al. 2 ch. 5 CC place les revenus et la fortune sur un pied d’égalité. La jurisprudence a déjà admis qu’un débirentier soit contraint
d’entamer la substance de son importante fortune afin de couvrir le minimum vital élargi de son épouse (consid. 11.1.2).
Art. 125 CC
La méthode de calcul de la contribution d’entretien (art. 125 CC) suit trois étapes. Il convient d’abord de déterminer l’entretien convenable d’après le niveau de vie des époux, puis d’apprécier l’autonomie financière de l’éventuel crédirentier, avant de fixer le montant de la contribution d’entretien appropriée, en tenant compte des besoins du crédirentier et de la capacité économique du débirentier.
Art. 125 CC
Principe et méthode pour fixer la contribution d’entretien en faveur de l’ex-époux. Prise en compte de nouvelles ressources et charges du conjoint débiteur quand les conditions d’une modification notable et durable de sa situation financière se réalisent avant même le prononcé du divorce. Hypothèses dans lesquelles il est admissible de s’écarter d’un calcul selon les dépenses effectives des époux durant le mariage et d’appliquer la méthode du minimum vital élargi avec répartition de l’excédent entre les époux. Conditions pour imputer un revenu hypothétique à l’époux crédirentier. En cas de remariage, le second mari n’a pas à compenser la perte de l’entretien dû par le premier mari, à moins de s’y être engagé.
Examen d’un revenu hypothétique et des charges du débirentier. Seules les charges réellement acquittées peuvent être prises en compte. Si l’intimée conteste formel-lement que le recourant s’acquittait du loyer, il appartient à celui-ci d’en prouver le paiement effectif et mensuel.
Lorsque les parties ont vécu séparément les huit dernières années, l’épouse ne peut pas prétendre, dans le calcul du montant et de la durée de la contribution d’entretien, au maintien du niveau de vie durant le mariage, bien que ce dernier ait duré 22 ans.
Pour la reprise d’une activité, l’âge de 45 ans est un seuil général permettant de guider la réflexion, mais nécessitant une adaptation à chaque situation concrète. Un revenu hypothétique arrêté à CHF 3’000.- se justifie malgré un contexte d’immigration et l’absence de formation du crédirentier. Le fardeau de la preuve pèse sur l’époux alléguant des contributions extraordinaires. La preuve doit être complète, la vraisemblance ne suffit pas.
Considérant le devoir d’assistance consécutif au mariage, il est possible d’imputer un revenu hypothétique à la nouvelle épouse du débiteur de contributions d’entretien. Le jugement modifiant les contributions d’entretien rétroagit généralement à la date du dépôt de la demande. Le juge peut néanmoins fixer librement une autre date, comme celle de l’entrée en force du jugement.
Le remboursement de frais par l’employeur qui ne correspondent pas à des dépenses effectivement supportées dans l’exercice de la profession constitue un revenu. Une attestation de l’employeur d’un remboursement forfaitaire des frais ne suffit pas à prouver les frais professionnels effectifs. En principe, le minimum vital du droit des poursuites est applicable pour le calcul des contributions d’entretien. Il inclut les primes d’assurances obligatoires. Si les moyens des parties sont insuffisants pour couvrir leurs minima vitaux du droit des poursuites, la charge fiscale ne doit pas être prise en compte. En outre, les primes d’une assurance-maladie complémentaire doivent être payées avec le montant de base et la réserve pour dépenses imprévues (+ 20%), bien que des exceptions à cette règle soient toutefois possibles.
En cas de situation financière très favorable, il n’est pas équitable d'utiliser la méthode du minimum vital pour fixer la contribution d'entretien. Il convient bien plus d'évaluer les besoins du créancier de la contribution d'entretien pour maintenir son train de vie antérieur. Il n'y a pas lieu d'imputer un revenu hypothétique à une femme de 47 ans qui n'a jamais travaillé au cours d'un mariage de 17 ans, n'a pas de formation professionnelle et connaît des problèmes de santé.
En cas de situation financière très favorable, il n’est pas équitable d'utiliser la méthode du minimum vital pour fixer la contribution d'entretien. Il convient bien plus d'évaluer les besoins du créancier de la contribution d'entretien pour maintenir son train de vie antérieur. Il n'y a pas lieu d'imputer un revenu hypothétique à une femme de 47 ans qui n'a jamais travaillé au cours d'un mariage de 17 ans, n'a pas de formation professionnelle et connaît des problèmes de santé.
Une éventuelle obligation d'entretien en faveur du mari ne peut se justifier par des désavantages découlant du mariage, même si l’union a duré douze ans jusqu’à la séparation, dans la mesure où les conjoints n'ont pas eu d'enfant et que le mari n'a pas renoncé à exercer son activité professionnelle durant le mariage.
Une éventuelle obligation d'entretien en faveur du mari ne peut se justifier par des désavantages découlant du mariage, même si l’union a duré douze ans jusqu’à la séparation, dans la mesure où les conjoints n'ont pas eu d'enfant et que le mari n'a pas renoncé à exercer son activité professionnelle durant le mariage.
Calcul d’un revenu hypothétique et montant d’une contribution d’entretien. Le versement régulier d'indemnités de chômage sans suspension constitue un indice permettant de retenir que l'assuré a entrepris tout ce qu'on pouvait raisonnablement exiger de lui pour éviter le chômage et, partant, qu'il a fait des recherches pour retrouver un emploi.
Calcul d’un revenu hypothétique et montant d’une contribution d’entretien. Le versement régulier d'indemnités de chômage sans suspension constitue un indice permettant de retenir que l'assuré a entrepris tout ce qu'on pouvait raisonnablement exiger de lui pour éviter le chômage et, partant, qu'il a fait des recherches pour retrouver un emploi.
Application de l’art. 125 CC en cas de mariage ayant eu un impact décisif sur la vie des époux. Appréciation des critères de l’art. 125 al. 2 CC.
La prise en compte, durant la courte procédure de divorce, du revenu découlant d’une indemnité pour atteinte à l’intégrité selon 49 LAM n’est pas arbitraire dans certaines circonstances, dans la mesure où elle permet de couvrir temporairement un excédent de charges de la famille.
Calcul des contributions d’entretien après le divorce. Précision des conditions dans lesquelles la durée du concubinage avant le mariage peut être prise en compte. Le concubinage devait déjà avoir concrètement et durablement influencé la capacité contributive de chacun des conjoints. Arrêt commenté par Regina Aebi-Müller, Jusletter 9 mars 2009.
Rétroactivité du partage des rentes AVS et LPP perçues par l'époux pour les enfants ; obligation pour l'épouse de verser à son mari, par mois et d'avance, la moitié des allocations familiales ou d'études ; répartition entre les parents des dépenses d'entretien pour les enfants qui dépasseraient les allocations et rentes perçues en leur faveur ; liquidation du régime matrimonial et fixation de l'indemnité équitable de l'art. 124 CC.
Rappel des critères permettant le calcul des contributions d’entretien après le divorce selon l’art. 125 CC.
Rappel des critères permettant de retenir un revenu hypothétique pour l’épouse. Compte tenu de son âge, elle peut envisager de nouveaux débouchés, mais elle ne bénéficie pas d’une longue expérience professionnelle, en raison de la répartition des tâches choisie durant le mariage. C’est pourquoi, la prise en compte d’un revenu hypothétique à 80% (et non à 100%) n’est pas critiquable.
Calcul d’une contribution d’entretien due à l’épouse devenue invalide à 50% durant le mariage qui a duré 8 ans et pendant lequel aucun enfant n’est né de l’union. Contrairement à l’instance inférieure, le Tribunal fédéral tient compte de la diminution des prestations de prévoyance de l’épouse et de son excédent de charges pour fixer la contribution d’entretien.
Fixation des contributions d’entretien dans le cadre d’un mariage de longue durée quand l’épouse, restée au foyer, est devenue invalide à 100%. Prise en compte de l’évolution future de la rente AI et rappel des critères de l’art. 125 CC.
Calcul du revenu du débirentier exerçant l’activité d’agriculteur. Prise en compte dans les charges de la part relative au logement. Calcul des contributions d’entretien dues aux enfants.
Prise en compte des éléments déterminants permettant de fixer la contribution d’entretien. Renvoi du dossier à l’instance cantonale, pour compléter l’instruction.
Contestation du principe de l’allocation d’une contribution d’entretien en faveur de l’épouse et demande de réduction de celle en faveur de l’enfant.
Mariage ayant eu un impact décisif sur la vie des époux. La situation du débirentier, seul propriétaire de la société anonyme qui l'emploie, est proche de celle d'un indépendant. Examen des contributions d’entretien et liquidation du régime matrimonial.
Lorsque l’autorité cantonale prend en compte la charge fiscale du débirentier en présence d’un revenu modeste, elle viole le droit fédéral. Admission du recours de l’épouse par le Tribunal fédéral.
Suspension de la contribution d’entretien en raison d’un concubinage. Prise en compte des frais professionnels ainsi que des rentes AI complémentaires en faveur des enfants pour fixer la contribution d’entretien.
Application des principes découlant de l’article 125 CC en cas de remariage ayant un impact décisif sur la vie de l’époux. L’arrêt a été commenté par Annette Spycher, ZBJ 2008 (144), p. 514 – 521.
Entretien du conjoint après le divorce. Liens entre les articles 124 CC (indemnité équitable dans le partage de la prévoyance professionnelle) et 125 CC (contribution d’entretien).