Droit des migrations

Art. 31a al. 1 let. b LAsi ; 29a OA 1

Cet arrêt concerne une mère et ses deux enfants afghans, ayant déposé une demande d’asile en Bulgarie avant de venir en Suisse. Par application du RD III, la Suisse demande à la Bulgarie de les prendre en charge et rend une décision de non-entrée en matière. Les recourants font valoir que le SEM aurait dû appliquer la clause de souveraineté car ils sont des personnes vulnérables et la mère a, en outre, des problèmes de santé. Le SEM dispose d’un large pouvoir d’appréciation afin de déterminer s’il entend faire usage ou non de la clause de souveraineté, pouvoir que le TAF doit respecter depuis la suppression de l’art. 106 al. 1 let. c LAsi. Or, en l’espèce, malgré les arguments soulevés par la recourante concernant sa santé, le SEM s’est contenté de dire qu’au vu du dossier rien ne justifiait l’application de ladite cause. En n’examinant pas les griefs soulevés, il n’a pas fait usage de son pouvoir d’appréciation de manière conforme à la loi (excès négatif) et a donc commis une violation du droit. Dès lors, le recours est admis et la cause renvoyée au SEM pour nouvel examen.

Rendu le même jour, par le même collège de juges et sur la même thématique (transfert Dublin en Bulgarie), cf. TAF D-5407/2016 du 31 octobre 2018 (d).

Art. 31a LAsi, Règlement Dublin-III

Dans cet arrêt, il est question de la pertinence des exigences posées dans la jurisprudence Tarakhel de la CourEDH s’agissant de personnes particulièrement vulnérables autres que des familles avec enfant. En l’occurrence, le recourant est un ressortissant sri lankais sur la demande d’asile duquel le SEM n’est pas entré en matière en raison de la compétence de l’Italie (l’intéressé est entré dans ce pays au bénéfice d’un visa). Dans son analyse, le Tribunal relève notamment que, dans l’arrêt Tarakhel, la Cour a clairement montré que sa réflexion était intimement liée au respect de l’intérêt supérieur de l’enfant et à la situation dans laquelle se trouvent les familles. Il en déduit que les exigences posées par la Cour n’ont pas vocation à protéger d’autres personnes particulièrement vulnérables, telles que les personnes gravement malades.

ATAF 2017 VI/9 (d)

2017-2018

Règlement Dublin-III

Cet arrêt de principe élargit la portée de la jurisprudence du TAF relative au Règlement Dublin-III. Les recourants sont une famille originaire d’Irak contre laquelle une décision de non-entrée en matière a été prononcée en raison de la compétence d’un autre Etat membre Dublin pour traiter leur demande d’asile (art. 31a al. 1 let. b LAsi). Devant le TAF, la famille invoque une application erronée des critères prévus par le Règlement. La question qui se pose pour le Tribunal est donc de savoir si un tel argument est admissible ou si les critères ont uniquement vocation à régler une situation interétatique. Jusque-là, et contrairement à la pratique de la CJUE, le TAF distinguait entre les règles directement applicables qui consacraient des droits fondamentaux pour les requérants d’asile et celles ne pouvant être invoquées car jugées purement techniques. Suivant le principe d’uniformité d’application et d’interprétation du règlement Dublin-III, le TAF estime qu’il n’existe pas de motifs valables l’autorisant à ne pas suivre la jurisprudence européenne. Cet arrêt ouvre donc la porte à des recours pour application erronée de tous les critères du Règlement Dublin-III.

Art. 31a LAsi ; 9 Règlement Dublin-III

Cet arrêt concerne le recours d’une ressortissante irakienne contre une décision de non-entrée en matière sur sa demande d’asile. Le SEM estime que la France est responsable du traitement de sa demande d’asile car la recourante dispose d’un visa émis par ce pays. Elle, au contraire, estime que la Suisse est responsable en vertu de l’art. 9 Règlement Dublin-III car son mari, dont le renvoi est inexigible, dispose d’une autorisation de séjour en Suisse. La question que se pose le TAF est de savoir si cet article exige une relation conjugale réelle, stable et effectivement vécue. A ce sujet, le Tribunal retient, d’une part, que l’art. 2 let. g Dublin-III ne prévoit pour les conjoints pas d’autre condition que celle d’être mariés (contrairement aux partenaires non mariés) et, d’autre part, que l’art. 9 Dublin-III renonce expressément à exiger que le mariage ait été conclu dans le pays d’origine. Ainsi, le fait qu’en l’occurrence le mariage, conclu dans le pays d’origine, n’ait pas été directement suivi d’une vie conjugale durable ne peut pas être invoqué par le SEM. Pour le surplus, le Tribunal estime que l’art. 9 reste applicable lorsque les conditions ayant justifié l’octroi d’une admission provisoire existent toujours après que la personne concernée ait reçu une autorisation de séjour.

Art. 31a LAsi, Règlement Dublin-III

Cet arrêt s’intéresse à la situation de la Pologne vis-à-vis du système Dublin. En effet, la recourante invoque, d’une part, des défaillances systémiques dans le système d’asile polonais (art. 3 par. 2 Dublin-III) et, d’autre part, le devoir de la Suisse de faire usage de la clause humanitaire dans son cas. S’agissant du premier argument, le Tribunal estime qu’il n’existe aucune raison sérieuse d’admettre l’existence de défaillances systémiques en Pologne. Concernant ensuite la clause de souveraineté, le TAF estime que le SEM a correctement utilisé son pouvoir d’appréciation mais que l’un des éléments nouveaux invoqués dans le recours est à même de justifier l’application de la clause de souveraineté. Il s’agit du fait que, durant les nombreux séjours en hôpital rendus nécessaires par l’état de santé de la recourante, les filles de celle-ci seraient placées dans une structure d’accueil pour requérants d’asile mineurs non accompagnés.