Droit administratif

ATF 144 II 376 (f)

2018-2019

Art. 87, 164 et 178 al. 3 Cst. ; 5 PA

Délégation de tâches publiques ; délégation d’un pouvoir décisionnel à un organisme extérieur à l’administration ; exigences en matière de délégation d’un pouvoir décisionnel ; compétence décisionnelle de l’Aéroport de Genève ; retrait de la carte d’identité aéroportuaire. La compétence de rendre des décisions est un privilège – et un monopole – de souveraineté de la puissance publique. Pour que des personnes juridiques extérieures à l’administration puissent être habilitées à le faire, une base légale formelle est nécessaire. Toutefois, la délégation de tâches publiques à un organisme extérieur à l’administration peut implicitement comprendre le pouvoir décisionnel nécessaire à leur accomplissement, pour autant qu’une loi spéciale ne l’exclue pas et que l’exercice d’un tel pouvoir de décision soit indispensable à l’organisme concerné pour réaliser lesdites tâches. Le plus souvent, la question de savoir si la délégation d’une tâche publique englobe celle d’un pouvoir décisionnel ne trouve pas de réponse évidente dans le texte légal et il faut déterminer par voie d’interprétation l’existence et, le cas échéant, l’étendue et le champ d’application précis d’un tel pouvoir. Même si en matière de délivrance de cartes d’identité aéroportuaires, la réglementation est complexe, en ce qu’elle comporte des délégations de compétences en cascade, des renvois qui se recoupent et qu’elle fait appel à des textes nationaux et internationaux, il n’en demeure pas moins qu’elle permet, par la combinaison du droit interne et du droit international, de reconnaître à l’Aéroport de Genève une compétence décisionnelle dans ce domaine.

ATF 145 I 108 (f)

2018-2019

Art. 9 al. 1 Cst. ; 12 du règlement du Conseil d’Etat de l’Etat de Vaud du 9 novembre 2010 sur l’harmonisation et la coordination de l’octroi des prestations sociales et d’aide à la formation et au logement cantonales vaudoises

Notion de personnes menant de fait une vie de couple ; notion de concubinage stable ou qualifié ; interdiction de l’arbitraire ; devoir d’assistance. La notion de « personnes menant de fait une vie de couple » est assimilée à celle de « personne vivant en concubinage stable ou qualifié » qui doit elle-même être comprise comme étant une communauté de vie d’une certaine durée, voire durable, entre deux personnes, à caractère en principe exclusif, qui présente une composante tant spirituelle que corporelle et économique, et qui est parfois désignée comme une communauté de toit, de table et de lit. Cette notion vise les relations dans lesquelles les partenaires entretiennent des liens étroits et stables semblables à ceux qui unissent des époux, et sa portée doit être appréhendée au cas par cas et en fonction de l’ensemble des circonstances de la vie commune des partenaires (durée de la relation, durée de vie en commun, enfants communs, etc.) sous peine de violer l’interdiction de l’arbitraire. Cela étant, il est arbitraire de considérer que deux partenaires « mènent de fait une vie de couple » du simple fait qu’ils ont emménagé dans le même appartement et, sur cette seule base, de réévaluer le montant de la bourse d’études octroyée à l’un d’entre eux en tenant compte du salaire de l’autre. En effet, cet élément à lui seul ne constitue qu’un simple indice, mais non la preuve de l’existence de liens aussi étroits que ceux qui unissent des époux.

ATF 143 II 37 (d)

2016-2017

žArt 14 s. LApEl ; ancien art. 31b OApEl ; 102 ss CO.

Intérêts sur le remboursement d’acomptes versés sur une base illégale pour les services-systèmes (intérêts en droit public) ; intérêts moratoires, rémunératoires et dus pour cause d’enrichissement illégitime.

A la suite de l’ATAF 2010/49 ayant déclaré l’ancien art. 31b OApEl illégal, Swissgrid doit rembourser les acomptes payés à tort par les exploitants de centrales électriques, tenu par les règles sur l’enrichissement illégitime. S’agissant des intérêts moratoires, le Tribunal fédéral laisse ouverte la question de leur exigibilité et notamment le fait de concilier le principe selon lequel l’obligation de payer ne disparaît pas tant que la décision dans laquelle elle se trouve n’est pas annulée avec l’illégalité de la disposition fondant le paiement. L’exigence de la mise en demeure pour les intérêts moratoires vaut en droit public dans les mêmes termes qu’en droit privé. Au vu notamment de la situation des marchés financiers, l’exception selon laquelle un intérêt rémunératoire peut être dû sans base légale doit être interprétée strictement. Quant aux intérêts dus pour cause d’enrichissement illégitime, le Tribunal fédéral laisse entendre qu’ils ne valent pas pour les collectivités publiques.