Droit administratif

Réglementation du canton de Berne relative à la détermination des valeurs officielles des immeubles non agricoles. N’a pas la qualité pour recourir la personne qui invoque, dans un recours contre une norme en matière de contributions publiques, une détérioration du budget de l’Etat et de ce fait une probable augmentation d’impôt, faute de démontrer une probabilité minimale d’être indirectement touchée ; les contribuables peuvent néanmoins exiger que les impôts directs sur le revenu et la fortune respectent le principe de l’égalité de traitement ainsi que celui de l’imposition selon la capacité contributive. En revanche, une personne assujettie à une taxe a la qualité pour recourir, même si un avantage accordé à d’autres personnes assujetties à ladite taxe ne lui porte pas directement préjudice. Les exigences en matière de densité normative et de délégation législative valant en matière de taxes, telles que développées dans la jurisprudence du TF, ne s’appliquent qu’à la délégation aux autorités exécutives, non aux décrets adoptés par le parlement lorsqu’il est par ailleurs compétent pour fixer les taxes (consid. 3).

ATF 144 II 412 (d)

2018-2019

Art. 62 ss CO ; 6 al. 1, 27 al. 2 et 42 al. 1 LTVA 2009 ; 68 ss LRTV 2006

Redevance de réception de radio-télévision ; TVA payée indument ; principes généraux du droit ; enrichissement illégitime ; prescription. En tant que principes généraux du droit, les art. 62 ss CO s’appliquent aussi bien en droit public qu’en droit privé. Ainsi, un administré peut demander le remboursement de la TVA relative à la redevance de réception de radio-télévision qui a été illicitement répercuté sur lui par l’autorité publique, car cela représente un enrichissement illégitime de ladite autorité. Toutefois, le droit de demander ledit remboursement pour cause d’enrichissement illégitime se prescrit par un an à compter du jour où l’administré a eu connaissance de son droit de répétition, et, dans tous les cas, cinq ans après la fin de la période imposable au cours de laquelle la créance a pris naissance.

ATF 143 I 220 (f)

2016-2017

Art. 127 al. 1 Cst.

Taxe de consommation d’eau ; taxe causale d’orientation.

La Commune de Blonay prélève une taxe d’eau potable, composée d’une finance annuelle fixe et d’un prix de vente au mètre cube. Cette taxe constitue une contribution causale (ou taxe d’utilisation), car elle vise à couvrir les coûts liés à l’exploitation du système d’approvisionnement en eau potable et représente la contreprestation pour la livraison de l’eau. Elle vise aussi à inciter les consommateurs à limiter leur consommation d’eau par l’instauration de tranches tarifaires. Elle doit être qualifiée de taxe causale d’orientation. Néanmoins, ni l’ancien Règlement de la Commune de Blonay du 29 février 2000 sur la distribution de l’eau (aRDE), base légale formelle prévoyant la taxe en cause quant à son principe (notamment l’existence d’une finance annuelle et d’un prix de vente), ni la loi vaudoise du 30 novembre 1964 sur la distribution de l’eau (LDE/VD) dans sa version applicable en 2013 dans la Commune de Blonay, ne contiennent de chiffres ou de critères permettant de déterminer le mode de calcul de la taxe de base (finance annuelle), respectivement de la taxe de consommation (prix de vente de l’eau). En conséquence, la contribution ne repose pas sur une base légale suffisante et viole ainsi le droit fédéral (art. 127 al. 1 Cst.).

Art. 105 Cst., 2 et 23bis LAlc.

Assujettissement et imposition des produits « Martini Rosso aromatised wine based drink » et « Martini Bianco aromatised wined based drink » selon la LAlc.

La Régie Fédérale des Alcools (RFA) a la qualité pour recourir sur la base de l’art. 89 al. 1 LTF et de la jurisprudence. La notion de « boissons distillées » (« gebrannte Wasser ») de l’art. 2 LAlc est plus large que celle de l’art. 105 Cst. (« alcool obtenu par distillation », mais « gebrannte Wasser » en allemand) ; le but de préservation de la santé publique de la législation sur l’alcool prône une telle extension de la notion. Les produits Martini Rosso et Bianco aromatised wine based drink doivent être considérés comme des boissons distillées au sens de l’art. 2 al. 1 LAlc. En effet, le procédé de concentration par congélation, par lequel la teneur en alcool d’un vin naturel obtenu par fermentation est augmentée, fait qu’un vin autant concentré est un produit alcoolique au sens de cette disposition. Enfin, les produits Martini Rosso et Bianco aromatised wine based drink ne répondent pas à la définition de « vermouths et autres vins de raisins frais préparés avec des plantes ou des substances aromatiques » de l’art. 23bis al. 2 let. c Lalc cum art. 19 et 21 de l’Ordonnance du DFI sur les boissons alcooliques (RO 2013 4977, abrogé le 1er mai 2017, dont les dispositions figurent désormais dans l’Ordonnance du DFI sur les boissons [RS 817.022.1]). Par conséquent, ils doivent être imposés à un taux plein (art. 23bis al. 1 LAlc, CHF 29 par litre d’alcool) et non réduit (art. 23bis al. 2 LAlc, CHF 14.50 par litre d’alcool).

ATF 141 I 105 (d)

2015-2016

Art. 9 et 29a Cst.

Principes d’équivalence et de couverture des frais ; égalité de traitement ; arbitraire ; frais judiciaires.

Les frais de justice sont des taxes causales qui doivent répondre aux principes d’équivalence et de couverture des frais. Le nombre de jours d’audience n’a en principe aucune influence sur les frais relatifs à la motivation du jugement, car celle-ci ne s’en trouve pas fondamentalement allongée.

ATF 141 II 182 (d)

2015-2016

Art. 16 al. 3 et 93 Cst. ; 10 CEDH ; 3 let. c et e, 10 al. 1, 18 al. 1 LTVA ; 14 ch. 1 OTVA ; 68 ss LRTV

Nouvelle qualification des redevances pour la radio et la télévision ; assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée.

La redevance de réception pour la radio et la télévision ne doit plus être qualifiée de droit régalien en raison de l’évolution du droit de la radio et la télévision, mais d’impôt d’affectation ou de contribution publique sui generis. Elle n’est pas la contreprestation d’une quelconque autre prestation fournie par la Confédération. Partant, elle ne doit pas être assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée.

ATF 141 V 509 (d)

2015-2016

žArt. 61 al. 1 et 62a al. 3, 1re phrase, LPP (dans leur teneur en vigueur depuis le 1er janvier 2012) ; ordonnance du Conseil-exécutif du canton de Berne du 30 mars 2011 sur la surveillance des institutions de prévoyance, des fondations et des caisses de compensation pour allocations familiales (OSIFC) et règlement du 21 octobre 2011 fixant les émoluments de l’Autorité bernoise de surveillance des institutions de prévoyance et des fondations (dans leur teneur en vigueur du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2014)

Coûts des mesures relevant de la surveillance (émolument de surveillance).

La question de savoir si les émoluments servant à financer les coûts d’une surveillance imposée par la loi doivent être considérés comme un impôt et non pas comme une contribution causale est laissée ouverte. La réglementation applicable entre 2012 et 2014 dans le canton de Berne en matière d’émoluments de surveillance des institutions de prévoyance et des institutions qui servent à la prévoyance ne respecte pas les principes de l’équivalence et de la couverture des coûts.

Art. 127 Cst. ; 53e ss LADB/VD

Assujettissement à une autorisation simple de débit de boissons alcooliques à l’emporter ; impôt cantonal spécial ; principe de la légalité en droit fiscal.

Dans la mesure où les commerçants qui sont assujettis à la taxe d’exploitation sur les débits de boissons alcooliques à l’emporter ne bénéficient ni de prestations, ni d’avantages particuliers concrets consentis par l’Etat, la taxe étant due par les titulaires d’autorisations simples de débits de boissons alcooliques à l’emporter indépendamment de toute contre-prestation de l’Etat, il ne s’agit pas, malgré sa dénomination, d’une contribution causale. Seules certaines activités ou catégories de contribuables étant visées, il s’agit d’un impôt cantonal spécial, plus précisément d’un impôt d’attribution des coûts qui n’est admissible que s’il existe des motifs objectifs ou des motifs d’intérêt général en justifiant le prélèvement. En l’espèce, le fait que les boissons vendues au détail se présentent comme une cause non négligeable des dépenses dues à une consommation inappropriée d’alcool par les jeunes justifie un tel impôt.

ATAF 2008/41

2008-2009

Art. 36a et 39 LA, 29a et 32 s OSIA, 13 et 15 LSPr

Nature juridique et calcul des taxes d’aéroport, signification des dispositions de la LSPr. Les taxes d'aéroport, notamment les taxes de passagers, relèvent du droit public même dans les aéroports privatisés. Elles doivent donc respecter les principes de la couverture des frais et de l'équivalence, mais aussi tenir compte des éléments d'appréciation de la LSPr (consid. 5). Le subventionnement croisé est en principe permis lors de l'établissement du tarif des taxes (consid. 9). Appréciation dans le cas d'espèce (consid. 11). Signification du critère de l'abus au sens de la LSPr et appréciation dans le cas d'espèce (consid. 11).

ATF 135 I 130

2008-2009

Art. 8 al. 1, 27 et 127 Cst.

Arrêté neuchâtelois relatif à la facturation des frais de sécurité publique des manifestations sportives exposées à la violence, base légale, égalité de traitement, liberté économique.

La doctrine distingue, parmi les contributions publiques, les contributions causales et les taxes d’orientation. Les contributions causales constituent la contrepartie d’une prestation spéciale ou d’un avantage particulier appréciable économiquement accordé par l’Etat. Elles reposent sur une contre-prestation étatique, qui en est la cause. Ces contributions se divisent généralement en trois sous-catégories : les émoluments, les charges de préférence et les taxes de remplacement. Toutes ont en commun d’obéir au principe de l’équivalence, et une grande partie doit respecter le principe de la couverture de frais. Les impôts constituent quant à eux la participation des citoyens aux charges de la collectivité ; ils sont dus indépendamment de toute contre-prestation de l’Etat (consid. 2). En l’espèce, l’art. 62 de La loi cantonale sur la police neuchâteloise institue un émolument à charge des organisateurs et organisatrices de manifestations nécessitant un important service d’ordre ou de protection. Son montant correspond à tout ou partie des frais engagés (consid. 3.1). La disposition contenue dans l’arrêté cantonal mettant à la charge des organisateurs « une part comprise entre 60 et 80% des coûts de l’engagement de la police cantonale pour le renforcement de la sécurité lors de manifestations sportives exposées à la violence » repose sur une base légale suffisante (consid. 7), ne viole pas le principe d’égalité de traitement (consid. 6) et ne porte pas atteinte à la liberté économique des organisateurs de manifestations sportives (consid. 4).