Procédure pénale

Art. 226 al. 5 CPP ; 10 al. 2 Cst.

Détention provisoire, annonce de recours tardive de la part du ministère public.

Selon l’art. 226 al. 5 CPP, si le Tribunal des mesures de contrainte n’ordonne pas la détention provisoire, le prévenu est immédiatement mis en liberté. Afin de garantir le droit de recours du ministère public contre une décision de libération prononcée par le Tribunal des mesures de contrainte, le procureur doit annoncer immédiatement son intention de recours auprès de ce dernier, à savoir dès qu’il a connaissance de la décision de libération. Il découle de ces exigences que le ministère public doit en principe comparaître personnellement à l’audience du Tribunal des mesures de contrainte et intervenir immédiatement, soit à l’issue de l’audience ou, s’il n’y comparaît pas, à la suite d’une information téléphonique relative à la décision de remise en liberté. En l’espèce, un courriel envoyé par le procureur 50 minutes après le rendu de sa décision par le Tribunal des mesures de contrainte n’est pas considéré comme une annonce immédiate, malgré le dépôt du recours dans le délai légal.

Art. 227 al. 7 et 237 al. 4 CPP

Examen des mesures de substitution en lieu et place d’une détention provisoire, droit d’être entendu.

Le renvoi général de l’art. 237 al. 4 CPP aux règles matérielles et formelles concernant la détention se justifie par le fait que les mesures de substitution sont ordonnées aux mêmes conditions que la détention provisoire (art. 221 CPP), conditions qui doivent faire l’objet d’une réévaluation périodique. Ainsi, le maintien de mesures de substitution « jusqu’à droit jugé», à savoir pour une période indéterminée, représente une atteinte considérable à la liberté personnelle du prévenu et ne saurait être admise. Les mesures de substitution prévues à l’art. 237 al. 2 CPP doivent donc être prononcées pour une durée déterminée et doivent faire l’objet d’un contrôle périodique.

Art. 431 al. 2 et 3 CPP ; 59 CP

Imputation d’une détention provisoire sur une mesure thérapeutique institutionnelle au sens de l’art. 59 CP.

Le Code pénal ne règle pas la question de l’imputation sur la détention provisoire d’une mesure privative de liberté au sens des art. 56 ss CP. A teneur de l’art. 431 al. 2 CPP, en présence d’une détention provisoire ou pour des motifs de sûreté, le prévenu a droit à une indemnité ou à une réparation du tort moral lorsque la détention a excédé la durée autorisée et que la privation de liberté excessive ne peut être imputée sur les sanctions prononcées à raison d’autres infractions. Interprétant littéralement l’art. 59 CP, le Tribunal fédéral arrive à la conclusion que la mesure thérapeutique institutionnelle est une sanction au sens de l’art. 431 al. 2 CPP. Partant, il retient qu’il se justifie d’imputer la durée de la détention avant jugement sur la mesure thérapeutique institutionnelle. Le droit à une indemnisation pour détention provisoire et pour motifs de sûreté excessive (298 jours) est nié en l’espèce, en raison du fait que la détention provisoire et pour motifs de sûreté doit être imputée sur la mesure thérapeutique institutionnelle finalement ordonnée.

Art. 429 al. 1 CPP ; 95 let. a LTF

Réparation du tort moral subi par le prévenu poursuivi à tort, détention injustifiée, pouvoir d’examen du Tribunal fédéral.

L’indemnité doit être fixée en fonction de la gravité de l’atteinte portée à la personnalité du prévenu. Pour cela, il faut prendre en compte les effets négatifs de l’incarcération concernant l’intégrité physique et psychique et la réputation de l’intéressé. La fixation de l’indemnité pour tort moral est une question d’appréciation que le Tribunal fédéral revoit avec retenue. En l’espèce, une indemnité de CHF 200.- par jour de détention injustifiée pour une courte durée constitue une réparation appropriée, sauf circonstances particulières fondant le versement d’une somme plus ou moins élevée. Si la privation de liberté s’étend sur une plus longue période, le montant de l’indemnité n’augmente pas linéairement, car le dommage occasionné par la durée doit être pris en compte.

Art. 231 et 227 al. 7 CPP

Durée de la détention pour des motifs de sûreté suite au jugement de première instance. La procédure de la détention pour des motifs de sûreté est régie par l’art. 229 CPP. En cas de détention provisoire préalable, le tribunal des mesures de contrainte peut ordonner une détention pour des motifs de sûreté de trois mois au plus, renouvelable. Cette règle vaut également lorsque la détention pour mesures de sûreté est ordonnée par le tribunal de première instance au moment du jugement (art. 231 CPP).

Art. 221 al. 1 let. a CPP

Motif spécifique de détention : le risque de fuite. Dans la détermination du risque de fuite, la gravité de la peine encourue est un indice essentiel. Le danger de fuite doit être examiné en fonction des circonstances concrètes, en tenant compte d’un pronostic provisoire mais sans préjuger sur le jugement qui sera rendu sur le fond (Forum poenale 1/2013, 6).

Art. 3 CEDH

Mauvais traitement durant la détention, volet procédural de la garantie. Le requérant, arrêté dans le cadre d’une enquête judiciaire sur les délits présumés d’appartenance à et de collaboration avec l’organisation terroriste ETA, fut placé en garde à vue au secret. Ce dernier affirme de façon défendable avoir été victime de mauvais traitements durant sa détention. En l’espèce, il est reproché aux autorités nationales de ne pas avoir ouvert une enquête après le dépôt d’une plainte pour torture et mauvais traitements. La Cour rappelle que lors de telles affirmations, l’art. 3 CEDH requiert l’ouverture d’une enquête officielle effective permettant l’identification et la punition des responsables. En l’espèce, les investigations menées n’ont pas été suffisamment approfondies et effectives et ne remplissent donc pas les conditions de l’art. 3 CEDH. L’art. 3 CEDH a donc été violé dans son volet procédural.

Art. 196 ss, 221 al. 1 let. a et 236 CPP

Détention provisoire, risque de fuite, mesures de substitution. Dans la détermination du risque de fuite, les circonstances concrètes du cas particulier doivent être prises en considération. Quant aux éventuelles mesures de substitution susceptibles de pallier au risque de fuite, elles doivent également être étudiées en rapport avec les circonstances concrètes du cas d’espèce (Forum poenale 5/2012, 42).

Art. 62 al. 1, 231 al. 1 et 232 CPP

Détention pour des motifs de sûreté postérieurement au jugement de première instance et omission de statuer. Seul le tribunal de première instance est compétent pour statuer sur le placement ou le maintien en détention après le prononcé de son jugement (231 CPP). Lorsque le tribunal de première instance omet de se prononcer sur le maintien en détention du prévenu condamné, le maintien en détention ne repose sur aucun titre juridique valable. La loi ne règle pas le cas où le tribunal de première instance omet de statuer sur le maintien en détention du prévenu condamné. Dans cette situation, la compétence de la juridiction saisie de l’appel doit être reconnue, par analogie avec ce que prévoit l’art. 232 CPP. L’absence d’un titre de détention valable durant une certaine période ne doit pas à elle seule avoir pour conséquence que le prévenu soit remis en liberté.