Procédure pénale

ATF 148 IV 432(f)

2022-2023

Action civile par adhésion en cas d’acquittement ; conclusions civiles et prétentions contractuelles. L’acquittement fondé sur la non-réalisation d’un élément constitutif de l’infraction ne permet pas une action civile par adhésion à moins que le comportement non-pénalisé constitue un acte illicite au sens de l’art. 41 CO. Les prétentions contractuelles ne peuvent pas faire l’objet de l’action civile par adhésion, puisqu’elles ne naissent pas du fait de l’infraction, mais du contrat (connexité), que la compétence du juge pénal est donnée pour les actions fondées sur des actes illicites (art. 39 CPC) et que le cocontractant n’est pas lésé directement dans ses droits par l’infraction (art. 122 cum 115 al. 1 CPP).

ATF 149 IV 9 (f)

2022-2023

Principe de non-incrimination ; accès au juge ; contenu de l’ordonnance pénale ; prohibition du formalisme excessif. Dans le cas d’espèce, la prévenue ayant refusé de dévoiler son identité au ministère public, celui-ci a inscrit, au lieu du nom et de la date de naissance, la dénomination suivante : « Inconnu[e] xxx, alias B., de sexe féminin, de type caucasien, cheveux bruns, yeux foncés, numéro de profil signalétique : PCN yyy, sans domicile connu ». Plusieurs questions importantes sont soulevées dans cet arrêt. Premièrement, le refus de dévoiler son identité et donc de maintenir son anonymat ne fait pas une partie intégrante du droit de garder le silence et de ne pas s’auto-incriminer. Le refus de révéler son identité est protégé uniquement lorsque celui-ci se mélangerait avec l’établissement de la culpabilité. Ensuite, dans des circonstances particulières – comme celle de la cause en question – si la dénomination utilisée dans l’ordonnance pénale est assez précise pour pouvoir identifier la personne citée et ne pas la confondre avec un tiers elle est « suffisante ». Il est donc autorisé à titre exceptionnel de ne pas identifier formellement un·e prévenu·e dans une ordonnance pénale s’il ou elle ne peut être confondu·e avec une tierce personne. Finalement, s’il a été admis précédemment que la désignation du ou de la prévenu·e était valable sous l’angle l’art. 353 al. 1 let. b CPP, cette désignation doit aussi être reconnue comme « suffisante » dans les procurations, recours, et oppositions aux ordonnances pénales.ATF 149 IV 50 (d) – Art. 355 et 356 CPP ; retrait de l’opposition à l’ordonnance pénale. Le prévenu qui a formé opposition à une ordonnance pénale ne peut pas la retirer avant que le ministère public ait, après avoir procédé à une administration des preuves au sens de l’art. 355 al. 1 CPP, décidé de la suite de la procédure (cf. art. 355 al. 3 CPP). Un éventuel retrait de l’opposition n’est possible que si le ministère public décide finalement de maintenir l’ordonnance pénale (art. 355 al. 3 let. a et 356 al. 1 et 3 CPP). Dans tous les cas, le ministère public n’est pas lié par son ordonnance pénale initiale et le principe de l’interdiction de la reformatio in pejus ne s’applique pas.ATF 148 IV 432(f) – Art. 122 al. 1, 126 CPP ; action civile par adhésion en cas d’acquittement ; conclusions civiles et prétentions contractuelles. L’acquittement fondé sur la non-réalisation d’un élément constitutif de l’infraction ne permet pas une action civile par adhésion à moins que le comportement non-pénalisé constitue un acte illicite au sens de l’art. 41 CO. Les prétentions contractuelles ne peuvent pas faire l’objet de l’action civile par adhésion, puisqu’elles ne naissent pas du fait de l’infraction, mais du contrat (connexité), que la compétence du juge pénal est donnée pour les actions fondées sur des actes illicites (art. 39 CPC) et que le cocontractant n’est pas lésé directement dans ses droits par l’infraction (art. 122 cum 115 al. 1 CPP).TF 6B_900/2022 du 22 mai 2023 (f) (publication prévue) – Art. 431 al. 1 CPP ; autorité compétente pour les indemnités et réparations à la suite de mesures de contraintes illicites. Le principal grief soulevé dans cet arrêt concerne la détermination de l’autorité compétente pour statuer sur l’indemnisation en cas de conditions de détention illicites, tout particulièrement lorsque celles-ci résultent de l’exécution, à titre de mesure de substitution à la détention provisoire (art. 237 CPP), d’une peine privative de liberté prononcée dans le cadre d’une précédente condamnation et pour laquelle un prévenu était au bénéfice d’une libération conditionnelle. L’autorité de jugement de première instance est compétente pour octroyer une réduction de peine à titre d’indemnisation en cas de conditions de détention illicite (art. 431 al. 1 CPP).

Autorité compétente pour les indemnités et réparations à la suite de mesures de contraintes illicites. Le principal grief soulevé dans cet arrêt concerne la détermination de l’autorité compétente pour statuer sur l’indemnisation en cas de conditions de détention illicites, tout particulièrement lorsque celles-ci résultent de l’exécution, à titre de mesure de substitution à la détention provisoire (art. 237 CPP), d’une peine privative de liberté prononcée dans le cadre d’une précédente condamnation et pour laquelle un prévenu était au bénéfice d’une libération conditionnelle. L’autorité de jugement de première instance est compétente pour octroyer une réduction de peine à titre d’indemnisation en cas de conditions de détention illicite (art. 431 al. 1 CPP).

Conditions d’annulation d’une ordonnance pénale ; compétences du tribunal. Dans une affaire concernant plusieurs prévenus condamnés par ordonnances pénales, le ministère public classe la procédure pénale à l’égard de l’un d’eux à la suite de son opposition. Un autre prévenu – qui n’avait pas fait opposition – demande l’annulation de l’ordonnance pénale prononcée à son encontre, qui lui est refusée par le ministère public. La révision « simplifiée » (art. 356 al. 7 CPP) concerne les cas pour lesquels les conditions de l’art. 392 al. 1 let. a et b CPP sont manifestement réunies au moment où le tribunal de première instance statue après maintien de l’ordonnance pénale par le ministère public. Le condamné non opposant peut toutefois saisir la juridiction d’appel d’une demande de révision fondée sur les art. 410 ss CPP. Le ministère public n’était donc pas compétent pour se saisir de la demande d’annulation de l’ordonnance pénale.

Conditions de validité de l’ordonnance pénale. Le ministère public doit signer l’ordonnance pénale à la main et non au moyen d’un tampon signature, sans quoi elle est affectée d’un vice qui ne peut être réparé ultérieurement. A moins qu’il s’agisse d’un simple oubli du ministère public, le tribunal doit annuler l’ordonnance pénale et renvoyer la cause au ministère public.

ATF 147 IV 127 (d)

2020-2021

Conditions de la procédure écrite d’appel. La procédure d’appel écrite est applicable lorsque la présence du prévenu aux débats d’appel n’est pas indispensable (art. 406 al. 2 let. a CPP). Tel n’est pas le cas lorsque la juridiction d’appel – qui n’a pas obtenu le consentement exprès du prévenu à ce que l’appel soit traité en procédure écrite – s’écarte de l’état de fait retenu en première instance et le condamne alors qu’il avait bénéficié d’un acquittement. Le jugement est annulé et la cause renvoyée à l’instance précédente.

ATF 147 IV 2 (i)

2020-2021

Qualité pour recourir des autorités administratives cantonales compétentes en matière de contraventions. Les autorités administratives instituées en vue de la poursuite et du jugement des contraventions ont les attributions du ministère public (art. 357 al. 1 CPP). Leurs compétences ne vont toutefois pas au-delà du champ d’application du CPP, de sorte qu’elles n’ont pas la qualité pour recourir en matière pénale au TF. Elles ne sont donc pas assimilées à l’accusateur public selon l’art. 81 al. 1 let. b ch. 3 LTF. Elles n’ont pas non plus d’intérêt juridiquement protégé à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée au sens de l’art. 81 al. 1 let. b LTF, car seul le ministère public peut se prévaloir de l’intérêt public à la poursuite pénale.

Validité de la notification d’une ordonnance pénale à l’étranger. Poursuivi pour être entré illégalement en Suisse, le prévenu, domicilié au Brésil, a indiqué l’adresse d’un employé du ministère public dans la « Déclaration de domicile à des fins de notification » pour la notification des décisions pénales. Une ordonnance pénale est notifiée à l’employé, qui en envoie une copie au prévenu au Brésil. Ce dernier forme opposition 20 jours plus tard, de sorte que le ministère public la déclare irrecevable. Appelé à trancher la recevabilité de l’opposition, le TF estime douteux que le prévenu ait compris la portée du formulaire, qui ne lui a pas été remis dans sa langue maternelle. Il considère que l’ordonnance pénale devait être signifiée par voie d’entraide judiciaire à son domicile à l’étranger, connu des autorités pénales, et que le délai d’opposition ne courait qu’à partir de cette signification valable. Il conclut que l’élection de domicile n’était pas valable et que l’ordonnance pénale doit être notifiée une nouvelle fois par voie d’entraide judiciaire.

ATF 145 IV 438 (d)

2019-2020

Art. 353 CPP al. 1 let. c, Art. 353 CPP al. 1 let. d, Art. 353 CPP al. 1 let. e, Art. 355 CPP al. 1, Art. 355 CPP al. 3, Art. 356 CPP al. 1

Prononcé d’une nouvelle ordonnance pénale après opposition contre la première ordonnance. Il s’impose de distinguer le prononcé d’une nouvelle ordonnance pénale impliquant un nouveau verdict de culpabilité et/ou une nouvelle sanction (art. 355 al. 3 let. c CPP) de la possibilité de rectifier, respectivement compléter une ordonnance pénale, notamment eu égard à l’état de fait qu’elle contient. Ce second procédé, que la loi ne prévoit pas expressément, permet d’éviter des arrêts inutiles dans la procédure et répond ainsi au principe de célérité, en ce sens que le tribunal doit renvoyer le cas au ministère public lorsque l’état de fait de l’ordonnance pénale ne remplit pas les conditions requises pour un acte d’accusation. L’ordonnance pénale corrigée ou complétée ne constitue toutefois pas une nouvelle ordonnance pénale au sens de l’art. 355 al. 3 let. c CPP, dès lors que le ministère public maintient matériellement l’ordonnance pénale initiale (art. 356 al. 1 CPP). Par conséquent, si le verdict de culpabilité et la sanction proposée sont identiques, le prévenu n’a pas l’obligation de former opposition à nouveau à l’ordonnance corrigée/complétée, puisque l’opposition initiale s’étend à celle-ci.

ATF 146 IV 145 (d)

2019-2020

Art. 352 CPP al. 3, Art. 42 CP al. 4

Amende additionnelle à une peine pécuniaire assortie du sursis et limite de six mois pour le prononcé d’une ordonnance pénale ; compétence du ministère public. Dans une ordonnance pénale, l’amende qui peut être infligée en sus de la peine en vertu de l’art. 352 al. 3 CPP n’entre pas dans le calcul de la limite de la peine privative de liberté de six mois. Une interprétation littérale de la loi atteste que cet article ne couvre pas uniquement l’amende ordonnée à la suite d’une contravention selon les art. 103 et 106 CP mais également celle prononcée en sus d’une peine assortie du sursis selon l’art. 42 al. 4 CP. Conformément à la formulation de cette disposition, si la peine pécuniaire ou la peine privative de liberté prévue dans l’ordonnance pénale est assortie du sursis, le ministère public a donc la possibilité de prononcer une amende additionnelle indépendamment d’une contravention, sur la base des art. 352 al. 3 CPP cum 42 al. 4 CPP.

ATF 146 IV 30 (f)

2019-2020

Art. 85 CPP al. 4 let. a, Art. 356 CPP al. 4

Fiction de retrait de l’opposition à l’ordonnance pénale (confirmation de jurisprudence) ; défaut aux débats de première instance. Dans le cadre d’une opposition à une ordonnance pénale, la fiction légale selon laquelle ladite opposition est réputée retirée en cas de défaut injustifié du prévenu aux débats ne s’applique pas lorsque celui-ci n’a pas connaissance de la citation à comparaître devant le tribunal de première instance et des conséquences d’une telle absence. La double fiction de notification et de fiction du retrait de l’opposition est interdite, en tant qu’elle méconnaît la garantie conventionnelle et constitutionnelle de l’accès au juge (art. 6 par. 1 CEDH et 29a Cst.). Une telle interdiction vaut également lorsque l’intéressé a pris part à la procédure d’opposition devant le ministère public et lorsque la citation à comparaître a été envoyée de manière réitérée, sous réserve des abus de droit. En effet, il ne peut être déduit de la participation du prévenu à son audition par le ministère public qu’il a effectivement conscience de sa citation ultérieure à comparaître devant le tribunal de première instance et des conséquences d’un défaut. Partant et sous peine de procéder à une double fiction prohibée, on ne peut conclure au retrait de l’opposition du prévenu qui n’a pas cherché le courrier recommandé contenant la convocation à comparaître à l’audience de première instance.

ATF 144 IV 121 (d)

2017-2018

Art. 358 ss, 410 al. 1 let. b CPP

Exclusion de la procédure de révision contre une procédure simplifiée. La révision d’un jugement rendu en procédure simplifiée n’est pas admissible lorsque ledit jugement est en contradiction flagrante avec une décision pénale rendue postérieurement sur les mêmes faits (art. 410 al. 1 let. b CPP). Le motif de révision de l’art. 410 al. 1 let. b CPP est un cas particulier de faits ou moyens de preuves nouveaux selon l’art. 410 al. 1 let. a CPP. Dans le cadre d’une procédure simplifiée, le ministère public et l’accusé s’accordent sur les faits en s’abstenant de clarifier définitivement certaines questions. Ce faisant, ils acceptent consciemment des incertitudes et l’accusé renonce à certains droits procéduraux. Compte tenu de cela, le motif de révision de l’art. 410 al. 1 let. b CPP est incompatible avec les principes de la procédure simplifiée. Ainsi, une personne condamnée dans ce cadre ne peut pas demander la révision du jugement au motif qu’un autre participant a été acquitté dans une procédure ordinaire pour les mêmes faits. Permettre la révision dans un tel cas aurait pour conséquence que le consentement à la procédure simplifiée pourrait être aisément révoqué et créerait un droit d’appel sans limite dans le temps.

ATF 144 IV 189 (f)

2017-2018

Art. 141, 358 ss, 362 al. 4 CPP

Sort des déclarations faites par les parties en vue de la procédure simplifiée en cas d’échec de celle-ci après son engagement mais avant son examen par le tribunal de première instance. En vertu de l’art. 362 al. 4 CPP, les déclarations faites par les parties dans la perspective de la procédure simplifiée ne sont pas exploitables dans la procédure ordinaire qui pourrait suivre. Cela concerne tant les aveux du prévenu que les déclarations du ministère public (p. ex. les propositions de peines). Il convient alors d’appliquer à de telles déclarations l’art. 362 al. 4 CPP par analogie lorsque l’échec de la procédure simplifiée intervient durant la procédure préliminaire, soit à un stade antérieur à la décision du tribunal de première instance. Ces déclarations n’étant pas exploitables dans le cadre de la procédure ordinaire, elles ne lient pas le ministère public qui n’agit donc pas de manière contraire à la bonne foi en requérant une peine plus élevée que celle qu’il avait proposée durant la procédure simplifiée. En outre, l’art. 141 al. 5 CPP doit s’appliquer aux pièces visées par l’art. 362 al. 4 CPP. En effet, il ne ressort pas de la lettre de l’art. 141 al. 5 CPP que son application serait limitée à certains types de preuves inexploitables. Ainsi, les pièces doivent être retirées du dossier pénal, conservées à part jusqu’à la clôture définitive de la procédure, puis détruites.

ATF 144 IV I (f)

2017-2018

Art. 70 CP ; 376 CPP

Procédure de confiscation indépendante. Une procédure de confiscation indépendante ultérieure au sens des art. 376 ss CPP ne se justifie que si de nouvelles valeurs confiscables apparaissent après la clôture de la procédure ordinaire. Une mesure de confiscation au sens de l’art. 70 al. 1 CP peut également viser des avantages futurs suffisamment déterminables d’un point de vue temporel et quantitatif (à l’exclusion de simples espérances ou expectatives de gain), y compris par estimation en vertu de l’art. 70 al. 5 CP. Toutefois, si l’autorité pénale, en faisant preuve de la diligence requise, avait pu connaître les valeurs confiscables et ordonner elle-même la confiscation selon l’art. 70 CP à l’issue de la procédure pénale préalable, l’autorité de chose jugée et le principe ne bis in idem font obstacle à une procédure de confiscation ultérieure indépendante.

Art. 358, 360, 361, 362 et 410 CPP

Procédure simplifiée ; révision ; faits et moyens de preuve nouveaux.

Condamné par un tribunal de première instance pour escroquerie en procédure simplifiée, le recourant dépose une demande de révision en se basant sur des faits nouveaux, demande rejetée par le Tribunal de première instance.

Le Tribunal fédéral se penche donc sur la question de savoir si la voie de la révision est ouverte pour un jugement rendu en procédure simplifiée. Il commence par rappeler que la voie de l’appel n’est ouverte que si les parties n’acceptent pas l’acte d’accusation ou que celui-ci ne correspond pas à la réalité. Toutefois, le TF relative cette position et estime, en accord avec la doctrine, que la voie de la révision devrait être ouverte lorsqu’il a été établi dans une autre procédure pénale que le résultat de la procédure à été influencé par une infraction (art. 410 al. 1 let. c CPP) ou en cas de vice de volonté important. Toutefois, la révision ne saurait être possible en cas de faits nouveaux ou de nouveaux moyens de preuve. En effet, cela contredirait la nature même de la procédure simplifiée qui ne prévoit pas d’administration des preuves. Le TF rejette donc le recours.

Art. 376 ss CPP ; 79 LTF

Le Tribunal fédéral se penche ici sur la question de savoir si la voie du recours en matière pénale est ouverte contre les décisions de la cour des plaintes du TPF dans le cadre d’une procédure de confiscation indépendante. Selon l’art. 79 LTF, le recours est irrecevable sauf s’il porte sur une mesure de contrainte, à comprendre : toute mesure à caractère incident adoptée dans le cadre d’une procédure pénale, telle que l’arrestation, la mise en détention, le séquestre, la perquisition. Toutefois, au sens des art. 376 ss CPP, une décision de confiscation, par nature finale et indépendante, sort du champ d’application de ses dispositions et rend le recours en matière pénale exclu.