Procédure pénale

ATF 148 IV 456 (d)

2022-2023

Ministère public et participation à l’audience. Le ministère public n’est obligé de participer aux débats que lorsque la peine encourue par le prévenu est de plus d’un an, soit douze mois et un jour. Pour toute peine envisagée inférieure, il n’est pas tenu de soutenir l’accusation en personne.

ATF 148 IV 17 (d)

2021-2022

Récusation du ministère public ; compétence impérative de l’autorité de recours pour l’examen de la demande de récusation. Lorsqu’un motif de récusation (art. 56 let. f CPP) est invoqué à l’encontre du ministère public, la lettre de l’art. 59 al. 1 let. b CPP impose à l’autorité de recours de statuer. Cette dernière dispose donc d’une compétence impérative et exclusive pour connaître d’une demande de récusation concernant un procureur, de sorte que la juridiction de première instance n’est pas compétente à cet égard. Vu la clarté du texte légal, le tribunal ne peut s’en écarter, à moins d’une raison valable de supposer que le libellé méconnaît le « sens véritable » de la norme. Rien ne permet toutefois d’admettre ceci. La marge de manœuvre permettant de déroger aux dispositions sur la compétence judiciaire est en tout état de cause particulièrement réduite (art. 30 al. 1 Cst.). L’examen des demandes de récusation visant le ministère public par l’autorité de recours qui lui est hiérarchiquement supérieure doit en outre garantir que de telles demandes soient jugées par une autorité aussi indépendante que possible et assurer leur traitement uniforme au niveau cantonal. Aussi des motifs matériels peuvent-ils justifier la règle de compétence en vigueur.

Qualité de partie plaignante ; transmission des droits par succession. L’art. 121 CPP règle la transmission des droits d’une partie plaignante par succession, l’alinéa 1 visant le cas particulier où le lésé décède sans avoir renoncé à ses droits de procédure, lesquels passent alors à ses proches au sens de l’art. 110 al. 1 CP. La liste figurant dans cette disposition est exhaustive et doit être interprétée restrictivement. Il convient de distinguer entre la notion de succession matérielle de droit privé et celle de la transmission de la qualité de partie dans la procédure pénale. Il est possible d’être héritier légal du défunt au sens du Code civil, mais de ne pas être habilité à exercer ses droits procéduraux au sens de l’art. 121 CPP. Si les héritiers concernés ne sont pas des proches au sens des art. 121 al. 1 CPP cum 110 al. 1 CP, ils ne sont pas habilités à faire valoir les droits ayant appartenu au lésé. La lettre de l’art. 121 al. 1 CPP est claire et il n’y a guère de raison de s’en écarter pour permettre une interprétation extensive de la norme. Il n’existe pas de lacune (proprement dite) dans la réglementation de la qualité de partie plaignante, laquelle est au contraire exhaustive.

ATF 146 IV 364 (f)

2020-2021

Défense obligatoire. A défaut d’un mandat confié par le prévenu, un avocat ne peut pas prétendre la représenter dans le cadre d’un recours en matière pénale au motif que l’affaire constituait un cas de défense obligatoire dans la procédure cantonale. En effet, les art. 130 s. CPP sur la défense obligatoire ne trouvent pas d’équivalent dans la LTF, qui ne connaît pas une telle institution. Dans ce cadre légal, une partie peut déposer un recours au TF – y compris par l’intermédiaire d’un mandataire – ou y renoncer. La LTF ne souffre d’aucune lacune s’agissant de la situation d’une personne condamnée par défaut, dont l’avocat ne dispose pas de procuration. Tout au plus l’art. 41 al. 1 LTF permet-il au TF de contraindre la personne condamnée qui l’aurait saisi personnellement à se faire représenter dans l’hypothèse où elle est manifestement dans l’incapacité de procéder par elle-même. Cette disposition ne saurait cependant s’appliquer lorsque le TF est saisi par un avocat qui agit hors mandat pour le compte d’un condamné duquel il ne reçoit pas d’instructions ni de procuration.

ATF 147 IV 123 (d)

2020-2021

Qualité pour recourir du ministère public ; mesures de substitution. Le ministère public dispose d’un droit de recours contre les décisions du tribunal des mesures de contrainte relatives à la détention provisoire et aux mesures de substitution. Si la loi habilite une personne détenue provisoirement à recourir contre les décisions du tribunal des mesures de contrainte relatives à sa détention (art. 391 al. 1 let. c CPP et 20 al. 1 let. c CPP cum art. 220 CPP), ce même droit n’appartient pas au ministère public. Le TF lui ouvre toutefois une voie de recours dans un arrêt de principe (ATF 137 IV 22), par la suite confirmé à diverses reprises (not. ATF 139 IV 314). Cette jurisprudence est ici étendue aux mesures de substitution, et ce au regard de l’art. 237 al. 4 CPP (selon lequel les dispositions sur la détention avant jugement s’appliquent mutatis mutandis au prononcé des mesures de substitution et au recours contre celles-ci), de l’égalité de traitement entre la personne prévenue et le ministère public, et du principe de l’unité de la procédure (art. 111 LTF). Il serait par ailleurs injustifié de concéder un droit de recours au ministère public en cas de détention provisoire, mais pas pour des mesures de substitution, alors même que ces dernières peuvent s’avérer aussi radicales que la première. Enfin, le ministère public a les mêmes intérêts dans l’hypothèse d’un refus d’ordonner, prolonger ou révoquer des mesures de substitution qu’en cas de détention.

ATF 147 IV 47 (d)

2020-2021

Qualité pour recourir de la partie plaignante contre la mise des frais à la charge d’un prévenu ; indemnisation du prévenu qui obtient gain de cause sur la question de sa culpabilité à la charge du plaignant. La partie plaignante peut recourir concernant la mise des frais à la charge du prévenu, car la décision sur les frais influence la question de l’indemnisation. En cas de classement de la procédure ou d’acquittement, l’indemnisation du prévenu est à la charge de l’Etat lorsqu’il s’agit d’une infraction poursuivie d’office mais, en cas d’infraction poursuivie sur plainte, elle est (en principe) à la charge de la partie plaignante. Dans le cadre d’une procédure d’appel concernant une infraction poursuivie d’office, la partie plaignante qui succombe est tenue à indemnisation alors que, dans une procédure de recours, c’est l’Etat qui en répond. En cas d’infraction poursuivie sur plainte, la partie plaignante qui, seule, a attaqué la décision, est, en principe, tenue à indemnisation tant dans la procédure d’appel que dans celle de recours (précision de l’ATF 141 IV 476, consid. 1). Il n’est donc pas nécessaire qu’elle ait agi de manière téméraire ou par négligence grave pour être tenue d’indemniser le prévenu qui obtient gain de cause.

Qualité de victime LAVI. La recourante a fait l’objet d’une atteinte à l’intégrité physique (rougeurs au cuir chevelu, ecchymoses aux bras et au cou, dermabrasions au cou et au bras droit). La qualité de victime lui est niée au motif que l’atteinte ne dépasserait pas le niveau des voies de fait. L’atteinte psychique est considérée comme non démontrée. Selon le TF, l’appréciation des instances précédentes est conforme au droit fédéral et aux pièces du dossier : les atteintes physiques susmentionnées « semblent a priori relever des voies de fait » ; saisie au cou quelques secondes, la victime n’a pas été empêchée de respirer et a pu se dégager seule ; elle n’a ressenti qu’une brève douleur après avoir été saisie par le bras ; elle n’a pas documenté son hypervigilance, sa perte d’appétit, son arrêt de travail de 4 jours et l’hébergement chez des amis qu’elle a allégués. Le TF rejette donc le recours.

Qualité de partie plaignante d’une association. L’Asloca-Genève dépose une plainte pénale pour faux dans les titres commis dans l’exercice de fonctions publiques (art. 317 CP) et d’obtention frauduleuse d’une constatation fausse (art. 253 CP) en lien avec un acte notarié pour la vente séparée de huit appartements. Selon la jurisprudence, l’infraction de faux dans les titres vise non seulement à protéger la confiance du public dans l’exactitude d’un titre mais également la confiance spéciale dont jouissent les actes officiels de l’Etat et aussi l’intérêt de ce dernier à une gestion fiable par ses fonctionnaires. Elle peut également porter atteinte à des intérêts individuels : une personne peut être considérée comme lésée par un faux lorsque celui-ci vise précisément à lui nuire. En l’espèce, la création alléguée d’un faux n’avait manifestement pas pour but de nuire directement à l’Asloca-Genève en portant atteinte à son patrimoine ou à son honneur. L’infraction portait atteinte, exclusivement, à l’intérêt collectif poursuivi par la législation cantonale sur l’aliénation de logements. Le fait que les procédures civile et pénale dirigées contre elle soient susceptibles de porter atteinte à son honneur ou à son patrimoine n’est pas la conséquence directe de la création et de l’utilisation du titre, de la manière définie dans la plainte : l’Asloca-Genève évoquait en effet uniquement l’utilisation de l’acte notarié pour obtenir des autorisations de ventes séparées. Le préjudice qui pourrait lui être causé en raison de l’usage du titre en question à l’appui de démarches ultérieures, ne constitue qu’un préjudice indirect. En conséquence, la qualité de partie plaignante de l’Asloca-Genève est niée.

ATF 145 IV 491 (d)

2019-2020

Art. 86 LCdF al. 1, Art. 115 CPP al. 1, Art. 382 CPP al. 1

Qualité pour recourir des CFF SA à l’encontre d’un jugement d’acquittement. Un recours au sens de l’art. 382 al. 1 CPP peut être formé par les CFF SA à travers leurs représentants, étant admis que la qualité pour recourir au sens de cette disposition se détermine selon le bien juridiquement protégé par l’infraction considérée et que la recevabilité du recours dépend du respect des conditions de l’art. 115 CPP. En l’espèce, l’infraction retenue, à savoir celle de l’art. 86 al. 1 LCdF, protège la sécurité de l’exploitation ferroviaire, soit un intérêt public ; elle ne sert qu’indirectement les intérêts des entreprises ferroviaires. Or, lorsqu’une disposition pénale protège en premier lieu des intérêts publics, seule une personne dont les droits individuels sont simultanément et directement touchés du fait de l’infraction est lésée selon l’art. 115 al. 1 CPP. Inversement, si l’infraction ne lèse que des intérêts publics et ne porte qu’indirectement atteinte à des intérêts privés, la personne indirectement touchée dans ses droits ne saurait prétendre au statut de lésé. Les CFF SA ne remplissent dès lors pas les conditions de l’art. 115 al. 1 CPP et n’ont conséquemment pas qualité pour recourir contre le jugement d’acquittement.

ATF 146 IV 76 (f)

2019-2020

Art. 110 CPP al. 1, Art. 81 LTF al. 1 let. b ch. 5

Qualité pour recourir des proches du lésé décédé contre le classement de la procédure ; qualité pour recourir de la partie plaignante au TF (confirmation de jurisprudence). Les proches du lésé décédé qui se sont constitués parties plaignantes lors de la procédure préliminaire sont susceptibles d’avoir un intérêt juridiquement protégé à l’annulation du classement de la procédure (art. 382 al. 1 CPP) et ainsi d’avoir la qualité pour recourir contre ce dernier. Par ailleurs, conformément à l’art. 81 al. 1 let. b ch. 5 LTF, la partie plaignante qui a participé à la procédure de dernière instance cantonale est habilitée à recourir au TF si la décision attaquée peut avoir des effets sur le jugement de ses prétentions civiles. Seules les prétentions civiles qui sont fondées sur le droit civil constituent des prétentions civiles au sens de cette disposition, celles fondées sur le droit public n’entrant dès lors pas dans la catégorie de l’art. 81 al. 1 let. b ch. 5 LTF. Par conséquent, si une collectivité publique assume une responsabilité de droit public exclusive de toute action directe contre l’auteur d’une infraction pour les actes qui lui sont reprochés, la partie plaignante n’a pas de prétentions civiles.

Art. 81 LTF al. 1 al. b

Qualité pour recourir de la mère détenue. La mère qui se trouve en détention n’a pas qualité pour recourir contre le refus du ministère public d’octroyer un droit de visite au père de l’enfant lorsque, en raison d’un risque de collusion, elle ne pourrait pas participer aux visites. Partant, la mère ne peut se prévaloir d’un intérêt juridique et personnel à l’annulation ou à la modification de la décision refusant le droit de visite au père, de sorte que son recours est irrecevable.

ATF 145 IV 161 (f)

2018-2019

Art. 382, 105 CPP ; 66a CP

Qualité de partie ; qualité pour recourir. Les membres de la famille (ici la compagne et le fils) d’un prévenu à l’encontre duquel a été prononcée une expulsion pénale n’ont ni la qualité de partie à la procédure pénale (art. 105 al. 2 CPP), ni la qualité pour recourir contre ce jugement (art. 382 CPP). Les membres de la famille ne peuvent se prévaloir de l’art. 8 § 1 CEDH en arguant que la décision d’expulsion porte atteinte à leur droit au respect de la vie familiale. En effet, une telle atteinte n’est ni directe ni immédiate (art. 105 al. 2 CPP), dès lors qu’elle ne se concrétise que dans l’hypothèse où ils ne suivraient pas le prévenu expulsé dans son pays d’origine. En outre, l’intérêt des membres de la famille à l’annulation ou la modification du jugement est uniquement un intérêt de fait (art. 382 al. 1 CPP). Si un tel intérêt peut suffire à fonder la qualité de partie en droit des étrangers, tel n’est pas le cas en droit pénal, qui poursuit des objectifs différents (sanctionner la commission d’infractions et non régler le lieu de vie de la personne concernée). Enfin, le droit au respect de la vie familiale (art. 13 al. 1 Cst. ; 8 CEDH) des membres de la famille du prévenu est indirectement pris en compte lors du prononcé de l’expulsion par les autorités pénales, dans le cadre de la pesée d’intérêts entre l’intérêt public à l’expulsion et l’intérêt privé du prévenu à rester en Suisse.

ATF 143 IV 495 (f)

2017-2018

Art. 433 CPP

Indemnité pour les dépenses obligatoires de la partie plaignante. L’indemnité de l’art. 433 al. 1 CPP pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure n’est pas productive d’intérêts compensatoires. Pour qu’une indemnité soit productive d’intérêts, il faut qu’elle soit considérée comme la réparation d’un dommage de la partie plaignante, entraînant alors l’application des art. 41 ss CO. L’indemnité de l’art. 433 al. 1 CPP ne vise pas à réparer le dommage subi par la partie plaignante ensuite de l’infraction, mais à rembourser ses dépens. Ainsi, les dispositions de la responsabilité extracontractuelle ne trouvent pas application. Cette solution vaut également pour les indemnités fondées sur l’art. 429 al. 1 let. a CPP (remboursement des dépens du prévenu), mais non pour celles fondées sur l’art. 429 al. 1 let. c CPP qui couvrent le tort moral du prévenu.

ATF 144 IV 17 (d)

2017-2018

Art. 105 al. 1 let. f, 383 al. 1 CPP

Tiers touchés par des actes de procédure ; sûretés. Les personnes concernées par une confiscation, sans être elles-mêmes des prévenus, doivent être considérées comme des tiers touchés par des actes de procédure et, conséquemment, comme des autres participants à la procédure (art. 105 al. 1 let. f CPP). Ces derniers ne peuvent se voir imposer la fourniture de sûretés, à la suite d’un appel interjeté par une personne autre que le prévenu. En effet, l’art. 383 al. 1 CPP ne vise ni les autres participants à la procédure, ni le prévenu. Il n’est donc pas possible d’appliquer par analogie cet article aux autres participants à la procédure, de telle sorte que la juridiction de recours ne peut pas exiger d’eux qu’ils fournissent des sûretés pour couvrir les frais et indemnités éventuels.

ATF 144 IV 176 (d)

2017-2018

Art. 56 al. 3 CP ; 185 al. 1, 187 al. 1 CPP

Délégation d’expertises psychiatriques. Lorsqu’un expert est désigné et chargé d’une expertise, il lui incombe d’accomplir son mandat personnellement (interdiction de délégation de l’art. 185 al. 1 CPP). Il peut toutefois recourir à des auxiliaires pour des travaux d’importance secondaire. Il demeure néanmoins tenu de fournir personnellement l’expertise et d’en préparer les éléments essentiels. Ainsi, il peut notamment faire appel à un psychiatre pour l’évaluation d’aspects individuels du prévenu, mais il ne saurait le charger de préparer l’expertise et d’en tirer des conclusions. Afin de vérifier ces exigences, le rapport d’expertise doit indiquer, de façon transparente, le recours à des auxiliaires, leur nom (art. 187 al. 1 CPP), la répartition concrète des tâches, et la façon dont l’expert les a supervisés de manière à garantir sa responsabilité. L’expert ne doit pas requérir une autorisation préalable de l’autorité de poursuite pénale pour le simple recours à des auxiliaires mais il est souhaitable qu’il lui indique préalablement leur nom, ainsi que la nature et l’ampleur de leur contribution.

ATF 144 IV 28 (d)

2017-2018

Art. 168, 177-179 CPP

Devoir d’information lors des auditions menées par la police. Lorsqu’une personne est auditionnée par la police en qualité de personne appelée à donner des renseignements et qu’elle est susceptible d’être entendue en qualité de témoin par la suite, la police doit rendre cette personne attentive non seulement à ses droits et obligations de personne appelée à donner des renseignements, mais aussi d’éventuel témoin. Les déclarations d’une personne interrogée par la police à titre de personne appelée à donner des renseignements qui est, plus tard dans la procédure, interrogée comme témoin, ne sont utilisables que si la personne a été informée de ses droits de refuser de témoigner par la police.

ATF 144 IV 97 (d)

2017-2018

Art. 162, 178 let. f CPP

Statuts de témoin et de personne appelée à donner des renseignements. Une personne condamnée par un jugement entré en force, dans une procédure distincte visant à élucider les faits ou portant sur une infraction connexe, doit être entendue en qualité de témoin, par application analogique des art. 162 ss CPP. En effet, une fois le règlement de la procédure entré en force, les droits de protection de la personne appelée à donner des renseignements ne sont plus nécessaires, puisque le principe ne bis in idem s’applique en vertu de l’art. 11 CPP. Toutefois, s’il existe, dans un cas d’espèce, des indices laissant présager que la personne à auditionner pourrait s’avérer être soit l’auteur des faits à élucider ou d’une infraction connexe, soit une participante à ceux-ci, elle doit être entendue en tant que personne appelée à donner des renseignements (art. 178 let. d CPP).

Art. 105, 132, 136 CPP

Droit à l’assistance judiciaire des tiers touchés par des actes de procédure. Le CPP règle expressément le droit à l’assistance judiciaire du prévenu (art. 132 ss CPP) et de la partie plaignante (art. 136 CPP). Il demeure toutefois muet s’agissant des autres participants à la procédure au sens de l’art. 105 CPP. Lorsque d’autres participants à la procédure, dont les tiers touchés par des actes de procédure, sont directement touchés dans leurs droits, ils doivent se voir reconnaître la qualité de partie et les droits qui en découlent. Ils peuvent dès lors solliciter l’assistance judiciaire dans la mesure nécessaire à la sauvegarde de leurs intérêts (art. 105 al. 2 CPP). Pour autant, l’octroi de l’assistance d’un défenseur d’office demeure soumis aux conditions usuelles (art. 132 al. 1 let. b, 136 al. 1 et al. 2 let. c CPP, 29 al. 3 Cst.).

Art. 147, 185 CPP

Participation de l’avocat du prévenu à l’entretien d’exploration psychiatrique. Un avocat ne dispose d’aucun droit, ni sur la base du CPP, ni sur celle de la Cst. ou de la CEDH, à participer à l’entretien d’exploration de son client par un expert forensique. Contrairement à ce que prétend le recourant, un tel droit ne peut être déduit de l’art. 185 al. 5 CPP, lequel concerne uniquement le droit de l’accusé de refuser de témoigner devant l’expert et ne suppose aucunement un droit d’être assisté par un défenseur. L’entretien d’exploration mené par le psychiatre forensique poursuit un autre but que l’audition du prévenu. Il vise à permettre à l’expert d’établir les questions à examiner conformément au mandat d’expertise, sans être influencé, ce que la présence de l’avocat risquerait de compromettre. Il serait de plus difficile, du point de vue du principe de l’égalité de traitement, de justifier qu’un droit de participation correspondant ne soit pas accordé à toutes les autres parties ou qu’il ne soit pas étendu aux autres enquêtes indépendantes réalisées par l’expert.

Art. 130 lit. c CPP

Défense obligatoire et défense d’office.

Sur l’autoroute, un automobiliste roule entre 4 m à 6 m derrière un autre véhicule, à une vitesse de 90km/h à 105 km/h. A la sortie de l’autoroute, l’automobiliste poursuivi s’arrête et sort de son véhicule afin de confronter le poursuivant. Ce dernier sort alors un couteau. Le premier automobiliste remonte dans sa voiture en craignant pour sa vie et celle de sa famille. Le Ministère public met le prévenu en accusation pour violation de grave des règles de la circulation routière et pour menaces, en proposant une peine de 50 jours-amende à CHF 100.00 ainsi qu’une amende de CHF 1’000.00. Le prévenu estime qu’il s’agit d’une défense obligatoire et demande en outre que les preuves soient réadministrées conformément à l’art. 131 al. 3 CPP. Le Tribunal fédéral doit examiner les conditions de la défense obligatoire selon l’art. 130 CPP.

La Haute cour commence par rejeter l’application des motifs de durée de la peine (art. 130 lit. b CPP) et de l’état physique ou psychique (art. 130 lit. c CPP). Elle se penche dès lors sur les « autres motifs » de l’art. 130 lit. c CPP, retenant qu’en l’espèce, la difficulté du cas et l’éventualité d’un casier judiciaire ne permettent pas de considérer qu’il existe un motif qui peut entraver de la même manière qu’un problème physique ou psychique la défense du prévenu. Pour octroyer la défense d’office, le Tribunal fédéral rappelle que l’éventualité de devoir purger une peine privative de liberté ne suffit pas, que l’octroi d’un sursis doit être exclu et que dans un cas relativement grave, il doit y avoir des difficultés en fait ou en droit que le prévenu ne peut pas surmonter seul. La défense d’office est rejetée lors d’un cas de peu de gravité, ce qui doit être retenu lorsque l’infraction est réprimée par une amende ou une peine privative de liberté minime. En l’espèce, le Tribunal fédéral rejette la demande d’octroi d’un défenseur d’office au motif qu’il n’y a pas de difficultés en fait ou en droit au sens de l’art. 132 CPP.

Art. 115 al. 1 et 118 al. 1 CPP ; 261bis 4 CP

Qualité de lésé.

Un téléspectateur porte plainte contre un humoriste pour discrimination raciale, au motif qu’il s’est servi du cliché selon lequel les juifs sont cupides, et laissé entendre que lorsque les juifs font de l’humour, ce n’est pas seulement pour faire rire mais aussi par appât du gain. Le Tribunal fédéral doit déterminer si le téléspectateur a la qualité de lésé et donc de partie plaignante, ce que le Ministère public et le Tribunal cantonal lui ont dénié.

La Haute cour rappelle que c’est l’atteinte au bien juridique protégé qui définit si le lésé est directement touché dans ses droits au sens de l’art. 115 CPP. L’art. 260bis par. 4 in initio CP tend à protéger la dignité que tout homme acquiert dès la naissance, ainsi que l’égalité entre les êtres humains. À l’appui des trois arguments suivants, le Tribunal fédéral arrive à la conclusion que les membres du groupe visé par l’humoriste ne sont qu’indirectement touchés, partant n’ont pas la qualité de lésés :

  • comme en matière de délits contre l’honneur, l’attaque doit viser une personne déterminée ou déterminable ;
  • à mesure qu’il s’agit d’une infraction contre la paix publique, les droits individuels ne sont qu’indirectement protégés ;
  • puisque le nombre de personnes visées est indéterminé, reconnaître la qualité de lésé à chaque particulier poserait des difficultés pratiques considérables.

Art. 135 CPP

Indemnisation du défenseur d’office.

Après renvoi du Tribunal fédéral, le Tribunal cantonal condamne le recourant à 28 mois de peine privative de liberté pour mise en danger de la vie d’autrui et l’acquitte en revanche du chef de prévention de tentative de meurtre. Le TC octroie une indemnité de CHF 110’000.00 à son défenseur d’office concernant la procédure qui a eu lieu suite au renvoi par le Tribunal fédéral. Le Ministère public recourt contre ce jugement en concluant à la condamnation du prévenu pour meurtre et à la réduction de l’indemnité de l’avocat d’office à CHF 53’000.00. Le Tribunal fédéral doit examiner les principes de rétribution de l’avocat d’office.

L’avocat d’office bénéficie d’une créance de droit public pour les opérations nécessaires à la défense des intérêts du prévenu, dont la qualité et la quantité doivent se mesurer au travail d’un avocat expérimenté et efficient. L’autorité doit fixer l’indemnité selon ces principes dans un rapport de proportionnalité et bénéficie pour ce faire d’un large pouvoir d’appréciation. Dans le cas d’espèce, le Tribunal cantonal n’a pas examiné la pertinence des postes sur la note de frais et octroyé des frais et dépens disproportionnés (lecture du dossier) et pour des postes qui ne doivent pas être indemnisés par l’Etat (contacts sociaux avec le client, engagement d’un détective privé). En conséquence, le Tribunal fédéral admet le recours du Ministère public et renvoie l’affaire à l’instance précédente pour nouvelle décision sur l’indemnisation de l’avocat d’office.