Droit des obligations et des contrats

Responsabilité contractuelle et délictuelle, action civile par adhésion au procès pénal, acte interruptif de prescription. En cas de préjudice résultant d’un mandat conclu avec un médecin, deux actions s’offrent au lésé : la responsabilité contractuelle (art. 398 al. 2 et 97 ss CO) et/ou la responsabilité délictuelle (art. 41 ss CO). Cependant, seule l’action fondée sur la responsabilité délictuelle peut faire l’objet d’une action civile par adhésion au procès pénal. L’art. 122 CPP n’englobe pas toutes les prétentions de droit privé, mais seulement celles qui découlent d’infractions. Les prétentions contractuelles n’étant pas basées sur une infraction pénale, sont exclues de l’art. 122 al. 1 CPP et relèvent de la compétence exclusive des tribunaux civils. Pour interrompre la prescription, un acte interruptif doit être adressé au tribunal compétent. Par conséquent, toute prétention civile soumise dans le cadre d’une procédure pénale doit être basée sur les actions délictuelles pour être considérée comme interruptive selon l’art. 135 ch. 2 CO. Le délai de prescription d’une action purement contractuelle, qui ne peut pas être associée à une procédure pénale, n’est pas interrompu par le dépôt d’une plainte pénale.

Responsabilité civile extracontractuelle du constructeur automobile, dommage normatif. En principe, le dommage s’apprécie selon la théorie de la différence. La réparation d’un dommage normatif – non lié à une diminution du patrimoine – n’est accordée que dans deux cas de figure, à savoir le dommage ménager (Haushaltschaden) et le dommage de prise en charge (Pflegeschaden). La conclusion involontaire d’un contrat, dont l’objet est un véhicule touché par le « dieselgate », ne constitue pas un préjudice indemnisable au sens de la responsabilité civile extracontractuelle. La réparation d’un tort moral déguisée pour défaut matériel ne peut ainsi être accordée sur la base des art. 41 et 55 CO.

TF 4A_314/2022 (d)

2022-2023

Risque lié à l’emploi d’un véhicule. L’art. 58 al. 1 LCR implique une responsabilité lorsqu’un dommage est causé « par l’utilisation d’un véhicule à moteur ». La distinction entre l’utilisation et la non-utilisation d’un véhicule est déterminée selon les circonstances. L’incendie causé par la chaleur d’une camionnette garée sur une aire de battage et dont le catalyseur est encore chaud ne relève pas du risque d’exploitation spécifique à l’art. 58 al. 1 LCR. Le critère essentiel n’est pas la nature mécanique ou motorisée du véhicule, mais sa capacité à se déplacer rapidement et à causer de grands dommages. Dans le cas d’espèce, l’incendie n’était pas lié à cette nature de risque. En dépit de la chaleur du catalyseur, il n’y avait pas de lien suffisant avec le déplacement de la camionnette. Il s’agit plutôt d’un risque courant lié au stockage inadéquat d’objets chauds et non d’un risque spécifique à l’utilisation d’un véhicule.

ATF 148 II 73 (f)

2021-2022

Responsabilité de l’EPFL, prescription, faute concomitante. L’omission, par l’employeur, d’annoncer un rapport de travail à l’institution de prévoyance et de verser les cotisations sociales contrevient à différentes normes du droit de la prévoyance professionnelle (art. 10 al. 1 et 66 al. 2 LPP, art. 10 OPP-2). Ces normes ont pour but de protéger les intérêts patrimoniaux des employés et leur violation constitue un acte illicite. L’employé qui ne s’annonce pas spontanément auprès de l’institution de prévoyance après une première procédure confirmant l’existence d’un rapport de travail ne commet pas une faute concomitante qui justifierait de réduire le montant des dommages-intérêts.

Interruption du lien de causalité. L’art. 40c LCdF, qui fixe les conditions auxquelles une entreprise ferroviaire peut être exonérée de sa responsabilité fondée sur le risque (cf. art. 40b LCdF), s’interprète à la lumière de la jurisprudence relative à l’interruption du lien de causalité. La réalisation du risque caractéristique doit être tellement secondaire par rapport à l’état de fait qu’elle n’apparaît plus que comme une cause insignifiante et juridiquement non pertinente du préjudice. En l’espèce, le piéton qui s’est engagé brusquement sur les voies du tramway, sans regarder autour de lui parce qu’il était absorbé par son téléphone portable, a adopté un comportement gravement négligent et contraire aux règles les plus élémentaires de prudence, à tel point qu’il s’agit de la cause principale de l’accident. Bien que la présence de piétons distraits par leur téléphone fasse aujourd’hui partie du paysage urbain quotidien, il n’est pas justifié de faire supporter le poids de telles imprudences aux entreprises ferroviaires.

Relation entre droit civil et droit pénal. En vertu de l’art. 53 CO combiné à l’absence d’autre disposition sur cette question dans le CPC, le tribunal civil n’est pas lié par l’état de fait arrêté au pénal et se prononce librement sur l’illicéité. Il est vrai que dans un cas isolé, le TF avait reconnu une certaine autorité au jugement pénal, en s’inspirant de la jurisprudence relative au retrait administratif du permis de conduire qui tend à éviter les jugements contradictoires, mais on ne saurait en tirer un enseignement général. En l’espèce, la condamnation civile d’un employeur au paiement d’une indemnité pour tort moral à la victime d’un accident de chantier est confirmée, bien que l’employé fautif ait été acquitté dans la procédure pénale.

Action partielle, demande reconventionnelle. La partie défenderesse à une action partielle soumise à la procédure simplifiée peut déposer une demande reconventionnelle tendant à constater l’inexistence de l’entier de la prétention, cela même si la valeur litigieuse atteint alors le seuil de la procédure ordinaire. Autrement dit, la condition de l’art. 224 al. 1 CPC peut être ignorée. La partie défenderesse doit néanmoins faire valoir un intérêt digne de protection. Cette jurisprudence est pleinement applicable dans le domaine des préjudices corporels, lorsque la victime ne fait valoir qu’une partie de son préjudice.

Calcul de la perte de soutien. Le dommage résultant d’une perte de soutien se calcule de manière abstraite à compter du jour du décès du soutien. La capitalisation des rentes (3.5 %) s’opère à compter du même jour. En dépit des critiques d’une partie de la doctrine, qui déplore que les règles de calcul ne soient pas les mêmes en cas de décès et en cas d’invalidité, il n’y a pas de raisons suffisantes de s’écarter de la jurisprudence longuement établie. Pas non plus de changement de jurisprudence sur la question de l’imputation des revenus du patrimoine : les revenus des biens matrimoniaux et successoraux transmis aux personnes soutenues doivent être imputés sur leur dommage, même s’ils n’étaient pas utilisés à des fins d’entretien avant le décès. En outre, le privilège de non-imputation des assurances de somme (art. 96 LCA), applicable aux assurances-vie, doit s’interpréter de manière restrictive. Seul le capital bénéficie du privilège. En revanche, les revenus générés par la somme obtenue de l’assurance doivent aussi être imputés.

Responsabilité du fait des produits. La LRFP n’est pas applicable si le produit à l’origine du dommage (in casu un ascenseur) a été mis en fonction avant l’entrée en vigueur de la loi le 1er janvier 1994 (art. 13 LRFP). Une éventuelle responsabilité du producteur se détermine alors sur la base de l’art. 55 CO, conformément à la jurisprudence développée antérieurement à la LRFP. La victime supporte le fardeau de la preuve du défaut. La défectuosité présuppose dans ce contexte que le produit crée un état de fait dangereux et qu’une conception plus sûre aurait été possible au moment de la mise en circulation. Or, le seul fait que l’ascenseur ait joué un rôle dans la survenance du dommage ne suffit pas encore à prouver que ce dommage a été causé par une défectuosité du produit.

Tort moral, dies a quo du délai de prescription. Lorsqu’un délai de prescription ou de péremption à charge du lésé court à partir de la connaissance du dommage, cela inclut aussi l’étendue du dommage. Le lésé doit être en mesure d’apprécier au moins dans les grandes lignes l’ampleur de son dommage ; en présence d’une situation qui évolue, le délai ne court pas avant le terme de l’évolution. Toutefois, si le préjudice subi est un tort moral, il s’agit d’une souffrance psychique qui n’est de toute façon pas quantifiable, à la différence d’un dommage patrimonial. La victime a donc connaissance de son préjudice dès le moment où elle a conscience que sa souffrance psychique résulte des actes du responsable. Elle ne peut pas attendre la stabilisation ou la disparition de ses troubles pour ouvrir action en responsabilité.

Art. 14s LVF

Responsabilité de l’organisateur de voyage à forfait, faute. L’art. 14 LVF institue une responsabilité causale atténuée, dans laquelle la violation d’un devoir de diligence est présumée. Cela ne dispense toutefois pas le voyageur d’établir une violation contractuelle. Compte tenu de la diversité des prestations offertes par les voyagistes, il convient d’examiner quelle prestation est mise en cause. S’agissant d’un transport de personnes, un résultat n’est pas garanti et la survenance d’un accident ne suffit donc pas à retenir une violation contractuelle du transporteur, dont répondrait l’organisateur du voyage (selon un système similaire à celui de l’art. 101 CO). Il appartient au voyageur lésé de le prouver.

Art. 51 CO al. 2 ; 75 al. LPGA al. 2

Action récursoire, privilège de l’employeur. Contrairement à certaines critiques émises par la doctrine à la suite de l’ATF 143 III 79, il n’y a pas de silence qualifié du législateur qui empêcherait de limiter le droit de recours des assureurs sociaux. La prétention récursoire des assurances sociales contre le tiers responsable doit donc être réduite de la part interne qui devrait être assumée par le responsable privilégié si celui-ci n’était pas au bénéfice du privilège (confirmation de la jurisprudence précitée). En outre, l’ordre des recours prévu à l’art. 51 al. 2 CO est la règle de principe en matière de hiérarchie des responsabilités, à laquelle il ne convient de déroger que si son application rigide serait inappropriée aux circonstances particulières du cas. En l’espèce, cela signifie que les prétentions récursoires des assurances sociales contre le tiers responsable – un propriétaire d’ouvrage – doivent être entièrement rejetées, car le responsable privilégié – l’employeur du lésé – répond en deuxième ligne dans l’ordre des recours, alors que le propriétaire est quant à lui en troisième ligne (responsable causal).

Art. 51 CO al. 2 , Art. 75 LPGA al. 2

Action récursoire, privilège de l’employeur. Contrairement à certaines critiques émises par la doctrine à la suite de l’ATF 143 III 79, il n’y a pas de silence qualifié du législateur qui empêcherait de limiter le droit de recours des assureurs sociaux. La prétention récursoire des assurances sociales contre le tiers responsable doit donc être réduite de la part interne qui devrait être assumée par le responsable privilégié si celui-ci n’était pas au bénéfice du privilège (confirmation de la jurisprudence précitée). En outre, l’ordre des recours prévu à l’art. 51 al. 2 CO est la règle de principe en matière de hiérarchie des responsabilités, à laquelle il ne convient de déroger que si son application rigide serait inappropriée aux circonstances particulières du cas. En l’espèce, cela signifie que les prétentions récursoires des assurances sociales contre le tiers responsable – un propriétaire d’ouvrage – doivent être entièrement rejetées, car le responsable privilégié – l’employeur du lésé – répond en deuxième ligne dans l’ordre des recours, alors que le propriétaire est quant à lui en troisième ligne (responsable causal).

Art. 46 CO al. 1

Calcul du dommage ménager. Le fait que la victime, en sa qualité de gérante d’un établissement public, consacre jusqu’à 70 heures par semaine à son activité professionnelle, ne suffit pas pour retenir qu’elle est moins active que la moyenne dans ses activités ménagères. Il n’y a dès lors pas lieu de pondérer à la baisse les données statistiques usuelles (ESPA) servant à établir le montant du dommage ménager. De même, une adaptation à la hausse est également exclue malgré, notamment, un appartement particulièrement grand et des dépenses élevées pour l’entretien des vêtements.

Art. 40c LCdF

Responsabilité du détenteur d’une entreprise ferroviaire, faute grave d’un tiers. Il ressort des travaux préparatoires que la clause d’exonération de responsabilité prévue à l’art. 40c LCdF vise essentiellement le cas des personnes suicidaires en état d’incapacité de discernement. En outre, les principes usuels en matière d’interruption du lien de causalité adéquate demeurent applicables. Le fait d’être poussé par un tiers sur un quai de gare n’est pas un événement véritablement extraordinaire, si bien que l’accident découle du risque caractéristique de l’exploitation d’un chemin de fer que l’entreprise ferroviaire doit en l’espèce assumer.

Art. 42 CO

Notion de dépréciation mercantile, preuve et calcul du dommage. La dépréciation mercantile se définit comme une réduction de la valeur de marché d’un bien à la suite d’un événement dommageable, indépendamment de sa diminution technique ou fonctionnelle. Dans le cas de biens immobiliers, une telle dépréciation ne peut être indemnisée que si le demandeur prouve concrètement le dommage qui en résulte, p.ex. en démontrant que le bénéfice résultant de la vente dudit bien est moindre au regard du bénéfice hypothétique qui aurait été obtenu sans l’événement dommageable.

ATF 145 III 72 (d)

2018-2019

Art. 62 al. 1 let. a et b LDA ; 50 al. 1 CO

Responsabilité solidaire. Le fournisseur d’accès internet ne répond solidairement de la violation du droit d’auteur par des tiers qui rendent accessibles des films protégés sur internet que si son activité favorise la violation du droit d’auteur ou est de nature à la favoriser. Or, le simple fait de fournir un accès internet sans aucune référence au contenu transmis ne remplit pas cette condition. Par conséquent, le fournisseur d’accès internet n’a pas la qualité pour défendre à l’action en interdiction ou en cessation au sens de l’art. 62 al. 1 let. a et b LDA.

Art. 58 CO ; 37 al. 2 let. e OTConst

Responsabilité du propriétaire d’ouvrage, défaut d’un échafaudage. Lors d’un contrat d’échafaudage, même si les obligations d’entretien de l’échafaudage n’incombent plus depuis cinq mois à la société propriétaire de l’échafaudage du fait de l’exécution du contrat, celle-ci reste tout de même responsable au sens de l’art. 58 CO. Un échafaudage présente un défaut au sens de l’art. 58 CO lorsqu’un échafaud ne résiste pas à un saut de moins d’un demi-mètre d’un ouvrier, un tel saut correspondant à une utilisation conforme de l’ouvrage selon l’art. 37 al. 2 let. e OTConst.

Art. 42 al. 3 et 43 al. 1bis CO

On considère que même si un cheval vit à une certaine distance du domicile du détenteur (en l’espèce, 6 km), il peut tout de même être qualifié d’animal domestique. Condition : le détenteur ou sa famille en prend soin tous les jours, de la même manière que si l’animal vivait dans ou à côté de la maison de son détenteur. Le lien affectif envers l’animal a ainsi plus d’importance que sa proximité géographique. Il est donc possible de demander la compensation des frais de traitement de l’animal au sens de l’art. 42 al. 3 CO, ainsi que de sa valeur affective (art. 43 al. 1bis CO).

Loi argovienne sur la responsabilité de l’Etat et art. 58 al. 1 LCR

En cas d’accident au cours d’un examen de conduite, il est difficile de démontrer que l’expert a eu un comportement fautif, engageant par celui-ci la responsabilité de l’Etat : il n’est pas arbitraire de donner plus d’importance aux déclarations de l’expert plutôt qu’à celles du candidat et de son instructeur, ce d’autant plus si elles ne coïncident pas complètement. Par ailleurs, le canton d’Argovie n’est pas responsable au sens de l’art. 58 al. 1 LCR, car il n’était pas détenteur du véhicule au moment de l’accident, et ce pour les raisons suivantes : la durée d’utilisation de la voiture était courte, l’Etat n’avait pas d’obligation de mettre de véhicule à disposition pour l’examen et, de plus, cette utilisation a eu lieu dans l’intérêt de l’école de conduite et de celui du candidat.

Art. 58 et 65 LCR ; accident de la circulation ; lien de causalité.

Les critères développés par le TF pour juger de la causalité adéquate entre un accident et un choc nerveux (ATF 138 III 276) ne sont pas applicables sans autre pour se prononcer sur l’existence d’un tel lien entre un accident et des troubles somatoformes douloureux subséquents présentés par un lésé « par ricochet » (consid. 4.5 ss).

Art. 58, 59 et 60 LCR ; enfant heurté par un scooter.

Un enfant de cinq ans manque à peu près totalement de la capacité de discernement nécessaire à un piéton confronté au trafic routier et n’est pas donc susceptible d’un comportement fautif (consid. 4.1 n.p.). Si la responsabilité du détenteur selon l’art. 58 LCR est reconnue, il est alors nécessaire d’examiner la responsabilité des parents à l’égard de l’enfant (art. 60 LCR). Ils sont en effet notamment responsables de veiller à la sécurité de l’enfant dans le trafic routier et répondent de la violation de leur devoir de garant (art. 302 al. 1 CC) selon l’art. 41 CO (consid. 5.1 n.p.).

 

Art. 679 al. 1 CC, responsabilité du propriétaire d’immeuble en cas d’excès du droit de la propriété ; eaux publiques.

Une collectivité publique répond du comportement d’un tiers qu’elle a autorisé à utiliser son domaine public, à moins que la causalité adéquate ait été interrompue. En délivrant à un tiers une autorisation d’utilisation, même soumise à des conditions impératives, la collectivité publique cède un attribut de son droit de propriété et doit donc répondre du comportement du tiers (consid. 4.4). Ceci vaut indépendamment du fait que la collectivité publique ait par la suite fautivement omis de surveiller que le tiers autorisé agisse en respectant les conditions, puisqu’il s’agit d’une responsabilité objective. Ainsi, la violation de ces conditions par le tiers autorisé ne suffit pas à interrompre le lien de causalité adéquate et donc à exclure la responsabilité de la collectivité (consid. 4.5).

Commentaire
(publication prévue)

Art. 429 CPP, ordonnance de non-entrée en matière ; indemnité pour frais de défense et tort moral.

Une fouille corporelle motivée par un contrôle positif à la cocaïne, ainsi que la confiscation d’un permis de conduire pour suspicion de falsification, bien qu’ayant mené à une ordonnance de non-entrée en matière, ne constituent pas une atteinte particulièrement grave à la personnalité du prévenu, justifiant la réparation d’un tort moral. Une détention supérieure à trois heures est en revanche indemnisée à ce titre (consid. 3.4). Une indemnisation des frais de défense est due au prévenu acquitté lorsqu’il est établi que le recours aux services d’un avocat relève de l’exercice raisonnable des droits de procédure. La complexité du droit pénal matériel et formel, la nationalité étrangère du prévenu et le fait que la détention s’avère finalement injustifiée sont des éléments qui, pris ensemble, justifient l’indemnisation de frais de procédure (consid. 4.3).

Commentaire
(publication prévue)

ATF 141 III 527

2015-2016

Art. 41 CO et 163 ss CP

Illicéité par le comportement.

Une violation des art. 163 et 167 CP ne fonde pas l’illicéité selon l’art. 41 al. 1 CO. L’étendue de la protection des créanciers résulte déjà du droit de l’exécution forcée. La LP connaît en effet diverses institutions s’attardant spécifiquement et de manière suffisante sur la protection des créanciers. En résumé, les art. 163 ss CP, relatifs aux infractions dans la faillite et la poursuite pour dettes, n’ont pas pour fonction d’étendre et d’élargir la protection des créanciers en matière d’exécution forcée et ne sont donc pas des normes protectrices au sens de l’art. 41 al. 1 CO (consid. 3.5).

TF 4A_261/2015

2015-2016

Art. 41 CO

Responsabilité délictuelle de l’entrepreneur à l’égard du maître en cas de défaut d’ouvrage (art. 363 ss CO).

Le maître de l’ouvrage, auquel l’entrepreneur a livré un ouvrage défectueux, peut exercer, en concours avec l’action contractuelle en garantie des défauts, l’action délictuelle de l’art. 41 CO si les conditions de cette action sont remplies. La défectuosité d’un ouvrage livré, compris comme le résultat concret du travail de l’entrepreneur, ne constitue toutefois pas une violation du droit de propriété du maître, susceptible de créer une prétention délictuelle (art. 41 CO) en faveur de celui-ci (consid. 4.3).

TF 4A_637/2015*

2015-2016

Art. 58 LCR

Accident de la circulation ; lien de causalité.

Les critères développés par le TF pour juger de la causalité adéquate entre un accident et un choc nerveux (ATF 138 III 276) ne sont pas applicables sans autres pour se prononcer sur l’existence d’un tel lien entre un accident et des troubles somatoformes douloureux subséquents présentés par un lésé « par ricochet » (consid. 4.5 ss).

ATF 141 III 112

2014-2015

Art. 41, 97 al. 1 et 112 al. 2 CO

Stipulation pour autrui ; indemnités journalières ; responsabilité des administrateurs.

L’assurance collective d’indemnités journalières conclue par l’employeur est une stipulation pour autrui parfaite en faveur de l’employé. Ce dernier peut réclamer personnellement à l’employeur le paiement des primes à l’assurance, au sens de l’art. 112 al. 2 CO (consid. 4.3). Lorsque l’employeur ne satisfait pas aux obligations auxquelles il s’est engagé, par exemple s’il ne conclut pas le contrat d’assurance prévu, n’acquitte pas des primes dues à l’assurance ou n’annonce pas à temps la maladie d’un employé, ce dernier peut demander réparation du dommage subi tant à la société employeuse (art. 97 CO) qu’à ses administrateurs à titre personnel (art. 41 CO ; consid. 4.5 et 5).

ATF 141 III 97

2014-2015

Art. 47 et 49 CO

Réparation morale ; comportement de l’auteur de l’acte illicite au procès.

Le juge tient compte des circonstances particulières lors de la fixation de l’indemnité équitable à titre de réparation du tort moral. Le genre et la gravité de la lésion, l’intensité et la durée des répercussions sur la personnalité de la victime, le degré de la faute de l’auteur et l’éventuelle faute concomitante de la victime figurent parmi les circonstances principales qui peuvent justifier l’application de l’art. 47 CO (consid. 11.2). En revanche, le juge ne peut pas tenir compte du comportement de l’auteur durant le procès, respectivement de son assurance, pour fixer l’indemnité. Si le comportement du responsable en procédure dépasse les limites de l’acceptable et conduit à une offense de la victime, c’est alors l’art. 49 CO qui est applicable afin de sanctionner l’atteinte grave portée aux droits de la personnalité de celle-ci (consid. 11.4).

Art. 41, 44, 47 et 58 CO

Responsabilité de l’exploitant des pistes de ski.

La responsabilité est de nature tant contractuelle (contrat de transport) que délictuelle (art. 41 et 58 CO ; consid. 3.2). Pour déterminer le devoir de sécurité de l’exploitant de pistes de ski, le TF se base sur des directives émanant d’associations reconnues (SKUS et RMS ; consid. 3.4.1). Toutefois, des mesures de sécurité supplémentaires peuvent également être exigées en présence de dangers reconnaissables. Une pesée d’intérêts doit alors intervenir afin d’établir ce qui peut raisonnablement être exigé de l’exploitant (consid. 3.4.5). La faute concomitante de la victime (art. 44 CO) est analysée en fonction de son comportement, de sa capacité de discernement et des règles FIS (consid. 4.1 ss). Une faute des parents, skiant derrière un enfant victime d’un accident, ne doit pas être imputée à l’enfant (consid. 4.6). Le capital reçu d’une assurance de somme privée ne doit pas être un critère de fixation du tort moral (art. 47 CO ; consid. 5.3.2).

TF 4A_310/2014

2014-2015

Art. 46 al. 1 CO

Calcul du dommage ; perte de gain actuelle et future.

La victime de lésions corporelles a droit aux dommages-intérêts qui résultent de son incapacité de travail. La loi distingue la perte de gain actuelle et future. Est actuelle la perte de gain éprouvée au jour de la décision de la juridiction cantonale devant laquelle il est possible pour la dernière fois d’invoquer des faits nouveaux. Est future la perte de gain subie par la victime devenue totalement ou partiellement invalide. Les deux postes font toutefois partie du même dommage et les principes de calcul demeurent les mêmes (consid. 2.2). Il s’agit pour le juge d’estimer le gain que la victime aurait réalisé si elle n’avait pas subi l’accident (consid. 4.1.2).

TF 4A_557/2014

2014-2015

Art. 41 CO

Frais d’avocats ; concours d’actions.

Le CPC détermine les dépens auxquels le plaideur victorieux peut prétendre. Il n’y a pas de place pour une action fondée sur le droit de la responsabilité civile tendant au remboursement des frais d’avocat. Il existe toutefois un concours entre l’action fondée sur l’art. 41 CO et le remboursement des dépens du droit de procédure civile lorsque le plaideur victorieux s’est heurté à un comportement illicite de la partie qui succombe en cours de procédure. C’est le cas notamment du plaideur téméraire qui savait ou devait savoir sa position indéfendable (consid. 2.1).

TF 6B_768/2014

2014-2015

Art. 47 CO et art. 122 CPP

Tort moral suite à une transmission du HIV.

La fixation de l’indemnité pour tort moral s’effectue en deux phases. La première suit des critères objectifs déterminant un montant de base comme point d’orientation. La deuxième consiste à l’adaptation de ce montant au regard des circonstances concrètes du cas particulier. Concernant une contamination HIV, le montant de base ne saurait être calqué sur un jugement rendu à une époque où les moyens thérapeutiques étaient considérablement moins efficaces qu’actuellement. De plus, dans l’hypothèse où plusieurs personnes auraient subi des actes délictueux similaires du même auteur, le juge se doit de procéder à une appréciation individuelle des circonstances propres à chaque victime. Par rapport à l’exercice d’une action civile par adhésion à la procédure pénale (art. 122 CPP), les prétentions civiles doivent se fonder exclusivement sur l’acte pénalement répréhensible (consid. 3.3 s.).

Art. 6 § 1 CEDH, art. 20 al. 1 LRCF et art. 60 CO 

Action en responsabilité en matière d’amiante ; délais de prescription. Exposé dans le cadre de son travail à l’amiante jusqu’en 1978, un employé décède en 2005 des suites d’un cancer. Les prétentions en réparation de la famille survivante sont déclarées périmées par le TF, le délai absolu de dix ans courant depuis le jour de l’acte dommageable étant échu, quand bien même le délai d’un an à compter de la date de la connaissance du dommage aurait été respecté (ATF 136 II 187). S’agissant de la naissance du droit pour le créancier d’exiger la réparation, est décisif le moment où l’auteur du préjudice a, en violation de ses obligations, porté atteinte à l’intégrité physique de la victime ; toutefois, vu qu’il n’est pas certain que l’exposition à l’amiante provoque effectivement une maladie et qu’il existe une longue période (15 à 45 ans) qui sépare l’exposition à l’amiante et l’apparition d’une éventuelle maladie, il n’est objectivement pas possible de déterminer avant la fin du délai de prescription si une réparation est due ou non, et ceci même dans les cas où la violation d’un devoir est établie (ATF 137 III 16). La Cour EDH considère cependant que lorsqu’il est scientifiquement établi que la victime n’a aucune possibilité de savoir si elle est atteinte d’une certaine maladie, cette circonstance extraordinaire doit être prise en compte dans le calcul du délai de prescription, sous peine de violer l’art. 6 § 1 CEDH.

Art. 60 CO

Dommage corporel et psychique suite à une intervention chirurgicale ; indemnité pour tort moral ; prescription. Une opération d’adaptation du sexe représente une intervention chirurgicale grave et irréversible qui n’est indiquée, d’après les directives médicales applicables, que si le désir d’une adaptation du sexe est avéré pendant une période prolongée par des examens notamment psychiatriques et psychothérapeutiques approfondis. Quant à la prescription, ce n’est pas l’opération valablement consentie qui constitue l’évènement dommageable dans la mesure où les prétentions en réparation découlent d’actes antérieurs à l’intervention chirurgicale (renseignements des autorités, rejet de la requête). Selon une pratique constante, il n’y a pas lieu de faire abstraction des règles de prescription même dans les cas de rigueur particuliers (ATF 136 II 187, consid. 7.5), ces règles ne violant pas le droit au réexamen prévu par l’art. 6 CEDH. Invoquer une erreur de droit est en principe sans importance dans le cadre de la prescription (ATF 131 III 61, consid. 3.1.2).

Art. 41 et 398 al. 2 CO

Responsabilité contractuelle de la banque. Dans le cadre de l’examen du devoir de diligence et de fidélité du mandataire, il y a lieu de prendre en considération le droit public qui impose à la banque des règles de comportement et de diligence destinées à lutter contre le blanchiment d’argent et à permettre aux autorités pénales de trouver les personnes coupables et de confisquer le produit des infractions. Toutefois, la diligence requise dans l’identification du client et l’ayant droit économique ne doit pas être confondue avec celle due au cocontractant en vertu des règles sur le mandat. Les règles de droit public, notamment celles qui figurent dans la LBA, n’ont pas pour but de protéger des intérêts patrimoniaux individuels. Dès lors, l’illicéité requise pour fonder une responsabilité civile délictuelle au sens de l’art. 41 CO ne peut pas être déduite directement de la violation d’une obligation prescrite par la LBA (ATF 134 III 529). Pour apprécier si la banque a fait preuve de l’attention commandée par les circonstances et définir si elle a enfreint son obligation de diligence, le tribunal peut être amené à prendre en compte la Convention de l’Association suisse des banquiers relative à l’obligation de diligence des banques (CDB ; ATF 131 III 511, 3.2.3) ou les règles d’application de la LBA (cf. ATF 131 III 418, consid. 2.3.3).

Art. 49 CO

Indemnité pour tort moral octroyée à une société. La fixation de l’indemnité pour tort moral est une question d’application du droit fédéral que le TF examine librement. Toutefois, dans la mesure où celle-ci relève de l’appréciation des circonstances, le TF intervient avec retenue. Il le fait notamment si l’autorité cantonale a mésusé de son pouvoir d’appréciation. Comme il s’agit d’une question d’équité, le TF examine librement si la somme allouée est disproportionnée ou au contraire insuffisante. A propos du montant alloué en réparation du tort moral, une comparaison avec d’autres affaires ne doit intervenir qu’avec circonspection puisque le tort moral ressenti dépend des circonstances du cas d’espèce. Néanmoins, une comparaison peut se révéler un élément utile d’orientation. En tenant compte de l’ensemble des
circonstances (atteinte brève mais diffusée sur Internet) et de la jurisprudence, la somme de CHF 25’000.- apparaît comme inéquitable et disproportionnée et doit ainsi être réduite à CHF 10’000.-.

Art. 61 al. 2 CO, art. 72 al. 2 et 75 al. 2 LTF

Responsabilité de l’État pour les activités médicales. Les soins dispensés dans les hôpitaux publics relèvent de l’exécution d’une tâche publique (art. 61 al. 2 CO). Les cantons peuvent ainsi soumettre au droit public cantonal la responsabilité des
médecins engagés dans un hôpital public (consid. 1.3). Toutefois, afin de garantir une application uniforme du droit, les causes de responsabilité médicale, qu’elles relèvent du droit public ou privé, doivent être soumises à la même voie de recours ainsi qu’à la même Cour au niveau du TF. Par conséquent, au regard de l’art. 72 al. 2 let. b LTF, un recours en matière civile ou un recours constitutionnel subsidiaire sont les uniques voies de recours ouvertes dans ces causes. Les cantons doivent ainsi faire en sorte que la décision rendue en première instance puisse faire l’objet d’un recours auprès
d’un tribunal cantonal supérieur (art. 75 al. 2 LTF).

Art. 58 al. 1 CO

Responsabilité du propriétaire d’ouvrage. Lorsque les standards de sécurité d’un ouvrage deviennent plus élevés, cela ne signifie pas que les vieux bâtiments, qui ne correspondent pas aux nouveaux standards, doivent être impérativement et immédiatement modernisés. Il s’agit alors, au regard des circonstances concrètes, d’examiner si l’ouvrage offre toujours une sécurité suffisante ou si le fait de procéder aux améliorations permettrait d’écarter le danger lorsque le coût des travaux est en proportion avec le danger (consid. 3.2).

La responsabilité fondée sur la confiance se situe entre la responsabilité contractuelle et la responsabilité délictuelle. Il s’agit de la responsabilité du tiers qui suscite une confiance digne de protection puis la trahit d’une manière déloyale. Toutefois, la victime n’est pas protégée de sa propre imprudence, de sa crédulité ou encore du risque inhérent à toute affaire commerciale (ATF 133 III 449 consid. 4.1). De plus, la responsabilité fondée sur la confiance n’offre pas une protection contre des dangers inhabituels. Ainsi, le devoir de protection d’une banque envers son client s’arrête là où le
danger devient atypique (consid. 2.1).

Art. 58 ss LCR et art. 46 CO

Responsabilité du détenteur de véhicule automobile ; atteinte à l’avenir économique. Lorsque plusieurs détenteurs sont impliqués dans un accident, la répartition du dommage s’effectue en proportion de la faute de chaque détenteur, à moins que des circonstances spéciales justifient une autre répartition. Le risque inhérent à l’emploi d’un véhicule fait notamment partie de ces circonstances spéciales. Il s’agit alors de déterminer si le risque à l’emploi d’un véhicule dépasse de manière
marquante celui d’un autre. Un tel risque doit être établi en tenant compte du risque concret (vitesse, poids, stabilité du véhicule) et non abstrait (catégories de véhicule différentes). Ainsi, sauf circonstances particulières, le risque inhérent d’un motocycle n’est pas plus grand que celui d’une voiture. Concernant l’atteinte à l’avenir économique d’une victime, une très faible invalidité médico-théorique (taux inférieur à 10%) ne provoque, en principe, pas une telle atteinte.

TF 4A_98/2008

2007-2008

Préjudice en cas de lésions corporelles (art. 46 al. 1 CO) ; préjudice ménager ; calcul de la valeur du travail ménager.